Cet article, qui traite de l’élection des conseillers communautaires, n’est pas sans poser un certain nombre de problèmes.
Je ne m’étendrai pas sur le fait qu’il entérine la création des métropoles avant même que notre assemblée ne se soit prononcée sur le sujet. Nous y reviendrons certainement dans la discussion…
Nous avons déjà eu à plusieurs reprises l’occasion d’indiquer que nous n’étions pas opposés à ce que les électeurs aient leur mot à dire dans la désignation des délégués des communes au sein des conseils communautaires, et donc à la mise en œuvre de la méthode du fléchage des candidats.
C’est, semble-t-il, ce que l’on nous propose, mais la discussion parlementaire sur cette disposition est renvoyée à un projet de loi ultérieur. Cela ne saurait nous rassurer ! Il ne nous paraît d’ailleurs pas acceptable d’adopter un principe – encore un ! – sans avoir de prise sur la définition de ses modalités d’application.
Nous aurons l’occasion d’insister sur ce point au long du débat : notre conception de l’intercommunalité est fondée sur le volontariat et sur le libre choix des communes. Nous rejetons donc, en la matière, toute décision autoritaire.
Les établissements publics de coopération intercommunale, ou EPCI, ne sont pas et ne doivent pas devenir des collectivités territoriales, ni en droit ni en fait. Il s’agit avant tout de structures de coopération et de mutualisation, représentant les communes qui en sont membres. En conséquence, il nous apparaît absolument nécessaire de maintenir un lien institutionnel fort entre la commune, représentée par son conseil municipal, et la structure intercommunale.
Dans ces conditions, retenir un mode de scrutin fondé sur le suffrage universel direct, avec une élection autonome des conseillers communautaires, serait inopportun. Cela accroîtrait de fait les pouvoirs des intercommunalités au détriment de ceux des communes et légitimerait une forme de tutelle, ce que nous refusons.
Or la réforme proposée par le Gouvernement, sans jamais que cela soit explicitement dit, va précisément dans le sens de l’intégration des communes au sein des intercommunalités. La commission des lois évoque d’ailleurs, s’agissant de l’élection des conseillers communautaires au suffrage universel direct, un « corollaire indispensable au fort degré d’intégration et aux larges compétences des EPCI à fiscalité propre ».
Nous savons donc bien quel est l’objectif de la majorité : donner la primauté aux intercommunalités pour, à terme, vider les communes de leur substance. Cela exige de créer des structures plus importantes, dont le modèle serait la métropole, cumulant pouvoirs et compétences.
Je pense que nous devons être très attentifs et refuser que l’intercommunalité se transforme en une machine à faire disparaître la démocratie communale et la libre administration des communes. L’alinéa 3 de l’article 2, en indiquant simplement que les délégués des communes seront élus au suffrage universel direct, laisse le champ libre à toute modification ultérieure. Or le projet de loi recouvre déjà trop de non-dits.
D’ailleurs, le rapport de la commission des lois souligne, à juste titre, que les dispositions incluses dans le projet de loi n° 61 pourront être modifiées par le débat parlementaire. Du flou s’ajoute donc au flou !
Effectivement, nous devrons pouvoir exercer notre droit d’amendement à cette occasion – du moins c’est ce que nous espérons, car, en définitive, peu de nos propositions sont acceptées par le Gouvernement… Néanmoins, nous restons méfiants et préférons donc le faire jouer dès aujourd’hui, afin de nous assurer que la méthode du fléchage ne pourra pas être remise en cause au bénéfice d’un autre mode de scrutin destiné à mettre en place, à la tête des intercommunalités, des équipes indépendantes dépourvues d’élus municipaux.
Les délégués communautaires sont et doivent rester liés au conseil municipal dont ils sont issus : telle est la philosophie qui sous-tend les amendements que nous avons déposés à cet article 2.