Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen du texte de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2007 conclut, comme chaque année, nos travaux parlementaires.
Pour autant, cet examen ne modifie pas grand-chose, sur le fond, au contenu de ce collectif budgétaire.
Comme nous l'avons indiqué lors de la discussion générale, ce collectif budgétaire pour 2007 est fortement contraint à la fois par les termes de la loi TEPA votée au mois d'août dernier et par la réalité de la situation économique.
L'INSEE, comme d'ailleurs la Banque de France, confirme que le taux de croissance de 2007 sera inférieur à 2 %, contrairement au cadrage de la loi de finances initiale. Cela aura une incidence sur le montant de certaines recettes fiscales.
C'est ainsi que le produit de l'impôt sur le revenu, celui de la taxe sur la valeur ajoutée et celui de la taxe intérieure sur les produits pétroliers se sont réduits, de même, sans doute, que le produit des droits perçus sur le tabac.
En revanche, en ce qui concerne les droits d'enregistrement, les effets de la loi TEPA sont immédiats et manifestes, avec une perte très sensible de recettes sur les successions et donations : ils jouent à plein pour les très gros patrimoines.
Enfin, et c'est le signe que notre pays est loin de s'appauvrir mais que cet enrichissement ne profite qu'à quelques-uns, deux impôts rencontrent un fort dynamisme de leurs recettes : l'impôt sur les sociétés, majoré de plus de 10 % sur les prévisions de la loi de finances initiale, et l'impôt de solidarité sur la fortune, dont la progression est encore plus forte.
De manière assez paradoxale d'ailleurs, le peu de succès de la mesure phare du paquet fiscal de l'été - la défiscalisation des heures supplémentaires - améliore le solde budgétaire global, puisque la dépense n'est pas à la hauteur des estimations initiales.
Nul doute que c'est pour cette raison que le Gouvernement et sa majorité se permettent d'annoncer à grand renfort de clairon des mesures qui seront prises dans les semaines à venir - je pense à la monétisation des RTT ou à la prime exceptionnelle négociable de 1 000 euros -, puisqu'elles ne sont destinées qu'à mobiliser les sommes non utilisées dans l'application de la loi TEPA !
Faut-il préciser encore que, ce faisant, on ouvre la voie à une démolition en règle du code du travail : travail du dimanche, individualisation des rémunérations et des garanties des salariés, remise en cause des relations conventionnelles institutionnalisées ?
En outre, il y a quelque hypocrisie à prétendre aujourd'hui s'occuper du pouvoir d'achat des ménages, alors que l'on s'apprête à liquider les 35 heures et le contrat de travail à durée indéterminée et que l'on propose aux salariés de payer par l'allongement de la durée du travail et la précarité renforcée ce que leur travail a déjà payé !
Pour ne prendre que cet exemple, on peut tout de suite faire 600 chômeurs de moins en transformant les heures de RTT monétisables existant chez France Télécom !
En ce qui concerne le projet de loi de finances rectificative, nous ne pouvons que remarquer, une fois encore, que la totalité des ressources fiscales nouvelles enregistrées a été consacrée à la réduction du déficit budgétaire.
Il est des besoins sociaux d'une force particulière - je pense notamment à la persistance de la crise du logement, qui rend fort hypothétique la mise en oeuvre de la loi instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, dite « loi DALO » -, qui auraient mérité des efforts budgétaires renouvelés !
En lieu et place de cela, des milliards d'euros sont engloutis afin d'afficher la réduction du déficit, pour complaire aux marchés financiers qui se nourrissent généreusement d'une dette publique dont le taux d'intérêt ne cesse d'augmenter et qui constitue aujourd'hui le deuxième budget civil de la nation !
Comme il faut bien donner du grain à moudre aux parlementaires, quelques mesures ont été prises dans ce collectif budgétaire. S'agit-il de la baisse de la TVA ou de la modération des taxes pétrolières ? Non ! Ce sont de nouveaux allégements en faveur de l'impôt de solidarité sur la fortune, de nouvelles conditions de transmission des biens professionnels des professions libérales, un allégement des droits de mutation à titre gratuit sous recommandation du lobby notarial, des facilités pour les déclarations de revenus non salariaux au titre de l'impôt sur le revenu.
Pour les particuliers, les consommateurs salariés par exemple, peu de changements sont prévus, si ce n'est la mise en place d'une éco-pastille, qui aura pour première conséquence de faire payer une forme de nouvelle vignette aux familles modestes contraintes d'acheter certains modèles de véhicules roulant au gasoil.
Si le Grenelle de l'environnement a pour effet de multiplier les taxes pour les consommateurs salariés, qu'il nous soit permis de douter du caractère éthique de ses préconisations et mesures !
En tout état de cause, il est sûr que la grande masse des contribuables subira les conséquences des annulations de crédits votées dans le collectif budgétaire, annulations qui frappent le développement des transports collectifs urbains, la construction et la réhabilitation de logements, la politique de la ville, entre autres dispositions.
Ce collectif budgétaire peut être ainsi résumé : il solde les comptes d'une situation économique loin d'être florissante - avec des risques réels de ralentissement pour la conjoncture -, il traduit la progression des recettes fiscales liées à l'accumulation de valeur ajoutée au profit des ménages aisés comme des plus grandes entreprises, il distribue des cadeaux de Noël à une infime minorité de contribuables, il valide le déclin engagé de la dépense publique utile au plus grand nombre.
Ce sont autant de raisons qui conduisent les sénatrices et les sénateurs du groupe CRC à ne pas voter ce texte.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme il est de circonstance en cette période, je veux, au nom de l'ensemble des membres de mon groupe, remercier les agents du Sénat de leur concours tout au long de l'année, plus particulièrement au cours de cette session budgétaire particulièrement chargée. Je leur souhaite de bonnes fêtes de fin d'année et leur adresse, en mon nom personnel comme au nom de mes collègues, tous mes voeux de bonne et heureuse année pour 2008.