Intervention de Robert Badinter

Réunion du 16 février 2005 à 15h00
Modification du titre xv de la constitution — Article 2

Photo de Robert BadinterRobert Badinter :

Nous abordons là, indiscutablement, le point le plus important de notre discussion. En effet, sur l'article 3, nous aurons une discussion technique qui ne soulèvera pas de problème politique majeur.

Il est à la fois inutile et inopportun d'examiner dans la précipitation les articles « turcs », au cours d'un débat qui devrait être réservé à la question de la révision constitutionnelle nécessaire pour l'adoption du traité établissant une Constitution pour l'Europe.

Je ne parlerai pas de la Turquie, mais de l'article 2 lui-même et de ses conséquences sur notre Constitution. En effet, comme l'a mentionné M. Cointat, il ne s'agit pas d'une disposition temporaire. Si vous votez cette modification, qui n'est pas conditionnée par l'issue du prochain référendum, celle-ci s'inscrira dans la Constitution pour les années à venir.

L'idée évoquée par M. Gélard selon laquelle le Parlement pourrait revenir sur cette disposition n'est pas sérieuse : on ne procède pas à une révision constitutionnelle pour faire ensuite marche arrière, une fois que la finalité politique de l'opération a été consommée ! Ce n'est pas ainsi que le Parlement doit fonctionner.

Cette révision sera donc acquise et je souhaite, mes chers collègues, que vous en mesuriez la portée constitutionnelle.

Monsieur Cointat, j'ai été heureux de retrouver dans vos propos les arguments que j'avais développés hier au cours d'une séance presque vespérale et devant une audience par conséquent limitée.

Je le rappelle, nous nous trouvons devant un paradoxe inouï.

Cet article a pour effet, premièrement, de réduire au sein de notre Constitution les prérogatives du Président de la République, deuxièmement, de restreindre le pouvoir du Parlement et, troisièmement, de dévaluer inévitablement le référendum, qui est tout de même l'une des expressions de la démocratie directe.

Ce sont des évidences, mais je les rappelle.

Tout d'abord, s'agissant des pouvoirs du Président de la République, la Constitution lui a permis dès l'origine de choisir entre la voie parlementaire et la voie référendaire pour la ratification des traités.

En ce qui concerne l'adhésion de nouveaux membres à l'Union européenne - puisque tel est l'objet de cet article -, depuis trente ans, c'est-à-dire la présidence de M. Pompidou, aucun président de la République n'a utilisé la voie du référendum s'agissant de l'adhésion d'un nouvel Etat membre à l'Union européenne.

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