Le débat a été largement lancé avant même que nous abordions l'examen des amendements. Cela démontre que nous traitons l'un des points les plus sensibles du texte que nous examinons.
Selon moi, on ne doit modifier les conditions constitutionnelles de recours au référendum que d'une main tremblante. Ces conditions, ainsi que leur raison d'être, ont été rappelées lors de la discussion générale, notamment par le président de mon groupe, M. Michel Mercier, que tout le monde a écouté avec une très grande attention. Je ne reviens donc pas sur l'ensemble des arguments qui ont été développés tant par lui que par d'autres orateurs.
Je ne suis ni membre de la commission des lois, ni juriste, ni a fortiori spécialiste de droit constitutionnel. J'essaie simplement d'être un Européen de bonne volonté, et c'est à ce titre que j'interviens en cet instant.
Pour ce qui concerne la construction européenne, j'estime que le principe du recours au référendum est bon. L'Europe mérite que de temps en temps l'ensemble des Français soient consultés. En effet, il faut que les Français s'approprient la démarche et qu'ils valident les progrès qui sont réalisés, à titre exceptionnel ou plus fréquemment.
Leur demander trop souvent leur avis dramatiserait la situation et les amènerait à bouder le référendum. Mais, selon moi, la pire des choses serait que les Français ne s'expriment pas sur une question concernant l'Europe. Ce serait faire preuve de mépris tant pour l'Europe que pour la démocratie.
Consulter trop peu nos concitoyens n'est pas non plus une bonne manière de procéder parce que cette pratique conduit à dramatiser. Elle donne le sentiment aux Français qu'on leur cache des choses, que l'Europe est une affaire de spécialistes, si bien qu'ils se détournent alors du sujet.
Dans la période récente, les Français ont été consultés par référendum environ une fois tous les dix ans ; la dernière consultation a concerné le traité de Maastricht. Il était opportun de les consulter sur ce traité. Dieu sait pourtant si l'on en garde un souvenir un peu désagréable. Mais, s'agissant de la mise en place d'une monnaie unique, de la première pierre posée pour l'instauration d'une politique étrangère et de sécurité commune, sujets qui représentent des transferts évidents de souveraineté, il n'était pas mauvais que les Français fassent part de leur accord, car il s'agit de ce qui fait la chair de la chair de notre nation.
Qu'ils soient appelés à se prononcer sur de tels sujets, je suis d'accord. Qu'un peu plus de dix ans après, on leur donne de nouveau la parole me paraît bon. On aurait pu le faire à propos de l'élargissement ; cela aurait peut-être été un peu plus concret. Tel ne fut pas le cas. On a choisi de les consulter à propos de la Constitution. Soit !
A partir du moment où les Français sont consultés sur la Constitution, ne compliquons pas l'exercice en mêlant un certain nombre de sujets.
Le débat sur la Constitution est essentiel. Il n'est pas simple. Les Français doivent se prononcer sur la Constitution et sur rien d'autre, et à travers leur vote ils doivent exprimer leur adhésion au processus de la construction européenne et à la nouvelle étape qui leur est proposée.
Dans quinze ans, ils seront appelés à statuer sur la question de l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne. Nous verrons alors s'ils seront consultés par le biais du Parlement ou si, cette question étant considérée comme essentielle, elle sera soumise à référendum.