En outre, 2 millions d'euros ont été économisés dans le domaine de la location de matériel d'écoutes, grâce à la mise en concurrence des prestataires.
Enfin, jusqu'à présent, lorsque la justice demande un renseignement à un opérateur téléphonique, une somme forfaitaire de 9 euros lui est facturée. Nous avons fixé des tarifs avec les opérateurs, afin de les rapprocher du coût réel. Ainsi, les renseignements déjà en leur possession seront facturés au prix de 3, 8 euros, et les demandes plus complexes à celui de 20 euros. L'économie qui sera obtenue peut être évaluée à 14 millions d'euros.
Vous remarquerez que les économies réalisées seront compatibles avec la liberté de prescription des magistrats, qu'elles n'entraveront en rien. Il n'a jamais été question que cette dernière soit mise en péril. J'ai simplement dit qu'en faisant appel à la responsabilisation de tous nous choisirons, à qualité comparable, la prestation la moins chère. C'est là une démarche qui n'était même pas envisagée voilà ne serait-ce qu'un an.
Je compte également sur les efforts des chefs de programme dans chaque juridiction ; je les ai mobilisés sur ce sujet. Ils disposeront l'an prochain d'une enveloppe globale incluant les frais de justice, et auront toute latitude pour décider de l'emploi des crédits et des équivalents temps plein travaillé mis à leur disposition.
Je voudrais insister en outre sur un point que peut-être le Sénat n'a pas perçu dans cette logique impitoyable de la LOLF : si nous devions dépenser plus, au titre des frais de justice, que ce qui a été budgété - vous avez bien noté, monsieur du Luart, que 50 millions d'euros pourraient être mobilisés en cas de dépenses exceptionnelles et viendraient alors éventuellement s'ajouter aux 370 millions d'euros dont j'ai parlé tout à l'heure -, ce surcroît serait prélevé sur les crédits des services judiciaires.
Les chefs de cour et de juridiction sont prévenus : ils devront payer les frais de justice, mais si ces derniers dépassent le montant initialement prévu, ce sera évidemment au détriment des crédits de fonctionnement. Leur indépendance n'est donc nullement remise en cause dans cette affaire ; il s'agit de savoir quelle est, pour les chefs de cour et de juridiction, la meilleure manière d'affecter les moyens dont ils disposent, dans une dyarchie qu'il est évidemment tout à fait souhaitable de conserver, sous peine de rompre, beaucoup plus gravement que budgétairement, l'équilibre de notre magistrature ; j'y reviendrai tout à l'heure.
M. le rapporteur pour avis s'inquiète de la charge de travail des services administratifs régionaux. Depuis trois ans, nous les avons renforcés de 314 agents, de sorte qu'aujourd'hui leur effectif total est de 1125 agents.
J'ai demandé aux chefs de cour de résorber en priorité les vacances de postes dans ces services pour faire des SAR des services autonomes, dotés d'effectifs et d'un budget propres. Les postes de responsable de service seront augmentés d'une catégorie et reclassés dans le grade ou l'échelon immédiatement supérieur. Il appartiendra d'ailleurs aux seuls chefs de cour et de juridiction, et non pas à la Chancellerie, de flécher, parmi les postes créés mis à leur disposition, les postes de fonctionnaires de catégorie C, notamment, vers les SAR. Nous entendons ainsi accroître la responsabilisation de ces gestionnaires.
Conformément au souhait de MM. Karoutchi et Détraigne, la LOLF permet de responsabiliser chacun des acteurs de la justice sur les coûts budgétaires. En tant que chefs de budget opérationnel de programme, les chefs de cour et de juridiction assumeront la responsabilité de leur gestion devant moi, responsable de la mission « Justice », et je vous rendrai, à mon tour, des comptes sur cette gestion.
Au-delà des crédits inscrits pour la mission « Justice », le Premier ministre a validé la possibilité de mobiliser 50 millions d'euros de dépenses exceptionnelles de frais de justice sur le programme « dépenses accidentelles et imprévisibles » de la mission « Provisions ». Ce dispositif se justifie au moins pour la première année de mise en oeuvre de la LOLF. Nous pouvons réaliser des économies, mais nous ne pouvons prédire, malheureusement, toutes les catastrophes susceptibles d'entraîner des frais de justice. C'est, me semble-t-il, l'objet de ce programme que de financer ce surcoût éventuel.
Comme vous le voyez, le plan d'économies ajouté au fonds exceptionnel permettra de payer l'intégralité des frais de justice.
Je voudrais maintenant répondre à une interrogation sur les juridictions judiciaires.
L'architecture budgétaire doit garantir l'indépendance constitutionnelle de l'autorité judiciaire, qui comprend les magistrats du siège et ceux du parquet. Mais la justice n'est efficace que si ces deux catégories de magistrats travaillent de manière complémentaire. A cet égard, les réunions que j'organise régulièrement, dont la dernière en date réunissait les procureurs généraux et les premiers présidents, prouvent à l'évidence que, le plus souvent, les responsables des cours s'entendent, et s'entendent bien !
La séparation en deux programmes serait plutôt source de blocage. En outre, elle ne permettrait pas à la représentation nationale de disposer d'une vision cohérente de l'action de l'autorité judiciaire, tant dans le domaine civil que dans le domaine pénal. Par ailleurs, elle aurait des effets négatifs dans la gestion du poste des frais de justice. Des risques de doublons apparaissent dès que les ordonnateurs secondaires sont séparés.
La création de ces deux programmes entraînerait de très sérieuses complications en matière non seulement de gestion des services communs, mais également de gestion des ressources humaines, des sites immobiliers ou des applications informatiques. De même, la réduction de la taille du budget opérationnel de programme que constitue une cour d'appel dans le cadre de chaque programme limiterait les possibilités de fongibilité des crédits. Ce serait ainsi un principe fort de la modernisation de la gestion des finances publiques, initiée par la LOLF, qui serait mis à mal.
Je tiens à signaler que l'ordonnancement conjoint entre le siège et le parquet, applicable à compter de 2006, fonctionne déjà dans les cours d'appel expérimentales sans porter atteinte à la liberté de prescription des magistrats.
Enfin, le Premier ministre a décidé de ne pas soumettre les services judiciaires aux gels budgétaires, et d'alléger les contrôles a priori des contrôleurs financiers. Cette décision est entrée en vigueur dès le mois de juillet dernier.
Je voudrais, avant de conclure, répondre en quelques mots à M. Collombat, qui a embrassé dans une ample intervention tous les problèmes de la justice. Ne voyez dans mon propos aucune intention polémique, monsieur le sénateur ; je suis totalement sincère quand je me félicite de l'initiative récente d'un grand hebdomadaire. Oui, lancer une pétition sur les prisons me semble une bonne idée, et elle peut même m'aider. En effet, je souhaite avoir le maximum de crédits, tenir le cap fixé par la loi d'orientation et de programmation pour la justice et faire en sorte que nous puissions maintenir le rythme soutenu de notre action en faveur de l'humanisation des prisons.
Pour autant, quand j'ai redit, ici même, que nous n'avions eu, depuis les années quatre-vingt, que trois programmes de création de prisons - le programme Chalandon, le programme Méhaignerie et le programme Perben -, je ne cherchais pas plus la polémique : c'est la stricte vérité ! Il n'y a jamais eu d'autres programmes.