Intervention de Jean-Jacques Hyest

Réunion du 31 juillet 2007 à 10h00
Contrôleur général des lieux de privation de liberté — Discussion d'un projet de loi

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest, rapporteur :

Par rapport au rôle confié aux juges, l'apport du contrôleur général est de permettre une action préventive qui n'existe pas réellement aujourd'hui.

Par ailleurs, l'articulation avec les autres autorités administratives indépendantes ne devrait pas soulever de difficultés de fond dans la mesure où chacune assume une fonction spécifique.

La commission vous présentera un amendement permettant la saisine du contrôleur général par les autres autorités administratives indépendantes qui peuvent avoir connaissance de situations de personnes placées dans des lieux de privation de liberté, afin d'harmoniser l'action de chacune de ces autorités dans le respect de leurs compétences respectives.

La question se pose cependant du maintien de certains organismes ou commissions administratives dont le rôle « doublonne » celui qui est confié au contrôleur général. Quel sera en particulier le sort de la Commission nationale de contrôle des centres et locaux de rétention administrative et des zones d'attente, la CRAZA ? Je tiens à saluer le travail qui a été accompli grâce à cette commission, sur l'initiative de son président, et ce en dépit de la modestie des moyens qui lui sont alloués. Cependant, ses attributions apparaissent pour une très large part redondantes avec celles qui sont dévolues au contrôleur général. Dans la mesure où les dispositions constitutives de cette commission présentent un caractère réglementaire, il appartiendra au Gouvernement de décider de son avenir. Madame le garde des sceaux, peut-être pourrez-vous nous donner quelques indications sur ce point.

En tout état de cause, il sera utile d'évaluer et, le cas échéant, de revoir les dispositifs de contrôle à la suite de l'institution du contrôleur général.

Ensuite, madame le garde des sceaux, la commission des lois souhaite attirer votre attention sur les moyens dévolus au contrôleur général, qui exercera sa mission sur quelque 5 500 locaux. Même s'il est vrai que l'on ne passe pas le même temps à contrôler une brigade de gendarmerie et un grand établissement pénitentiaire, car les problèmes sont de nature différente, il lui faudra impérativement disposer des ressources humaines et matérielles nécessaires à l'accomplissement de cette tâche.

À titre indicatif, l'inspecteur en chef des prisons d'Angleterre, dont le rôle apparaît comparable à celui du contrôleur général, compte une équipe d'une quarantaine de personnes pour visiter cent trente-neuf établissements.

Enfin, ma dernière observation portera sur le pouvoir d'action du contrôleur général. Certains souhaitent lui conférer un pouvoir d'injonction. Or, le pouvoir d'injonction n'est cependant pas toujours synonyme d'efficacité. Il peut susciter un réflexe de défense des administrations et le repli sur certains corporatismes. L'expérience témoigne à l'inverse que le dialogue et la persuasion peuvent, dans le cadre d'une démarche d'investigation, obtenir de réels résultats. Vous l'avez rappelé, madame le garde de sceaux et, de ce point de vue, l'exemple de la Grande Bretagne est particulièrement pertinent.

L'autorité du contrôleur général se bâtira non pas contre les administrations, mais avec elles, dans une relation de confiance.

À la lumière de ces observations, on mesure mieux l'importance que revêtira le choix de la personnalité appelée à assurer ces fonctions. Le magistère moral que devra exercer le contrôleur général implique à l'évidence une expérience et une compétence incontestées.

La représentation nationale est appelée à se prononcer sur un projet qui répond à un voeu très largement partagé sur l'ensemble de nos travées. Je ne doute pas que cet esprit de consensus nous animera dans notre débat et nous permettra de parfaire un projet de loi destiné à nous réunir et non à nous diviser.

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