Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis l'an dernier, grâce à la LOLF, le Parlement examine de façon plus précise les crédits afférents aux régimes spéciaux de retraite les plus importants, ceux de la SNCF, de la RATP, des marins, des mines et des routiers.
J'en suis heureux, car cette démarche répond non seulement à un besoin, mais aussi à une attente de plus en plus forte de nos concitoyens.
Dans son rapport du mois de septembre 2006, la Cour des comptes a fort justement souligné que les ressortissants de ces régimes sont demeurés à l'écart des réformes des retraites de 1993 et de 2003. Les débats des dernières semaines ont bien montré que cette situation est de moins en moins bien acceptée par les Français, qui réclament avant tout plus d'équité et de transparence sur cette question.
Pour cette raison, la commission des affaires sociales renouvelle les demandes qu'elle avait formulées l'an dernier, mais en vain, afin d'obtenir l'amélioration des indicateurs et de la présentation de l'ensemble de cette mission. L'enjeu est de première importance : il sera impossible de préparer une réforme de ces fameux régimes de retraite spéciaux si le Parlement continue à n'en connaître que ce qui correspond à leurs charges de gestion, c'est-à-dire à 3 % des dépenses totales !
Monsieur le ministre, je souhaite savoir pourquoi il n'a pas été répondu à nos demandes formulées oralement puis confirmées par écrit et adressées au ministère du budget.
Si je mentionne ce fait, c'est parce que les indicateurs actuels ne donnent qu'une vision partielle des problèmes des régimes spéciaux.
Bien plus que les seules dépenses de gestion courante, qui sont dérisoires, nous aurions besoin de connaître le niveau des engagements à long terme de ces systèmes spéciaux de retraite, mais aussi la décomposition entre les « droits de base » servis par le régime général et les « avantages spécifiques » correspondants aux prestations supplémentaires de ces régimes, ainsi que l'hypothèse de projection et le mode de calcul de ces estimations.
Il importe en outre de disposer, pour chacun de ces régimes, de nouveaux indicateurs portant sur l'âge moyen de liquidation des pensions, la proportion des départs à la retraite des personnes en service actif, la répartition de ces départs par tranches d'âge - avant cinquante-cinq ans, entre cinquante-cinq ans et soixante ans. Le Parlement ne peut se contenter, année après année, d'une bonne lecture de la presse quotidienne et hebdomadaire...
Enfin, nous manquons de données sur la durée moyenne de perception et le montant moyen des pensions, ainsi que sur l'espérance de vie à soixante ans de ces assurés sociaux. L'ensemble de ces informations nous autorisera à procéder à des comparaisons avec les assurés sociaux des autres régimes, tant du secteur privé que du secteur public.
La commission des affaires sociales demande au moins que ces réflexions puissent être reprises dans le prochain projet de loi de finances. Nous comptons à cet égard sur l'aide de la commission des finances. Nous contribuerions ainsi à préparer dans de bonnes conditions la première clause de rendez-vous de la réforme des retraites, qui interviendra en 2008, voire dès 2007 sur certains points.
Nous y sommes d'autant plus attachés que les informations sur les retraites des grandes entreprises publiques sont rarement publiées ou très difficilement accessibles, y compris pour les parlementaires. Les adossements de régimes spéciaux aux caisses de retraite du secteur privé en fournissent malheureusement une illustration parfaite : en dépit de l'obligation d'information inscrite à l'article L. 222-7 du code de la sécurité sociale, le Parlement continue le plus souvent à ne connaître de ces dossiers que ce qu'en dit la presse. On peut donc mesurer l'aspect dérisoire de cette obligation d'équité et de transparence.
Réformer les régimes spéciaux supposerait de mener un travail préparatoire approfondi afin de pouvoir mettre en évidence leur spécificité et leurs modes de financement, procéder à des comparaisons avec les systèmes de retraite de droit commun et appréhender le caractère atypique de leur effort contributif. À la RATP et à la SNCF, par exemple, les cotisations des salariés ne représentent respectivement que 13 % et 7 % des prestations de retraite versées. Dans ces conditions, peut-on vraiment parler de régime de retraite par répartition ? Pour ma part, je suis convaincu que ces mots n'ont pas la même signification d'un organisme à l'autre.
En définitive, mes chers collègues, cette nouvelle mission constitue non seulement un élément potentiel pour le contrôle parlementaire - s'il est possible -, mais aussi une chance dans la perspective de la prochaine réforme des retraites, à condition que soit repensé rapidement le cadre général de ces documents, comme nos propositions invitent à le faire.
Soucieuse de contribuer au débat public et au succès de la LOLF, la commission des affaires sociales a souhaité publier dans son rapport de nombreuses données statistiques inédites, qui permettent d'illustrer le bien-fondé de ses suggestions.
Renforcer l'information et le contrôle parlementaire est également l'une des conclusions du rapport publié l'an dernier à la suite des travaux de la commission de réflexion sur la dette publique, présidée par Michel Pébereau. Notre commission en partage l'orientation.
Sous ces réserves, la commission des affaires sociales s'est déclarée favorable à l'adoption des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite ».