Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous le savons tous, les sommes consacrées aux pensions et retraites des agents de l'État et de certains secteurs d'activité font partie des revenus des ménages, qui contribuent de façon importante à l'ensemble de l'activité économique. Les pensions et retraites ne sont donc pas uniquement une charge pour le budget de l'État.
Cela étant dit, c'est le devenir même des régimes spéciaux qui doit retenir notre attention dans le cadre de l'examen des crédits de cette mission. En effet, on nous explique souvent, en se fondant sur des extrapolations démographiques, que les régimes spéciaux, comme ceux de la fonction publique, représenteraient des charges trop lourdes. À ce titre, les futurs retraités de ces différents régimes devraient accepter quelques menus sacrifices.
Permettez-moi de faire quelques observations.
Si certains régimes sont aujourd'hui déficitaires de manière sensible - je pense au déficit structurel du régime des mines lié à l'interruption pure et simple de l'activité -, les décennies à venir seront marquées, pour l'ensemble des régimes, par la raréfaction du nombre des allocataires de prestations.
Dans le domaine des chemins de fer, par exemple, le fait que nous ayons connu un mouvement de réduction du nombre des cheminots en activité pèse dans l'immédiat sur le régime de retraite. A contrario, cet effet jouera à la baisse dans les années à venir, puisque le nombre d'actifs cessant leur activité sera moindre qu'aujourd'hui. Cette remarque vaut pour l'ensemble de la fonction publique et des régimes relevant des crédits de la mission et du compte spécial.
Un autre mouvement spectaculaire vient d'animer la fonction publique d'État, c'est le mouvement de transfert, découlant de la décentralisation, de personnels, notamment des personnels techniciens, ouvriers et de service, ou TOS, de l'éducation nationale et du personnel des directions départementales de l'équipement.
Ce transfert budgétaire a une traduction précise dans le cadre de la discussion qui nous occupe : 1, 1 milliard d'euros de crédits de personnel imputables aux transferts a disparu de l'article 34 et sont compensés, à due concurrence, par autant de recettes fiscales transférées, c'est-à-dire notamment par une part de la taxe intérieure sur les produits pétroliers.
Mais, nous devons le souligner, cette somme considérable, qui consomme la majorité des ouvertures nouvelles de crédits prévues par la loi de finances initiale, n'est sans doute rien au regard des sommes que l'État économisera progressivement au détriment des finances locales dans les années à venir. Le passage des fonctionnaires d'État employés par le ministère de I'éducation nationale ou par le ministre de l'équipement en fonctionnaires dépendant du régime de la CNRACL, la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, permet en fait à l'État de se dégager du financement ultérieur des pensions versées à ces agents, puisque le volume des cotisations prélevées n'a pas été transféré avec les personnels.
Dans ces conditions, le compte d'affectation spéciale peut fort bien connaître ces prochaines années une amélioration tendancielle provenant du fait qu'il n'aura pas à prendre en charge le versement des pensions des personnels transférés. Une telle amélioration participera du même coup à la dégradation des comptes de la CNRACL et peut-être même à la mise en cause de la « bonne santé » de l'IRCANTEC, puisque ces organismes de retraite seront confrontés au problème du versement des prestations.
Nul doute qu'il conviendrait, dans la plus parfaite transparence, de faire le point de l'application concrète du transfert des personnels sur la situation financière des collectivités territoriales à échéance des dix à quinze prochaines années.
Nous ne voterons bien évidemment pas les crédits de cette mission ni ceux du compte d'affectation spéciale, car ils consacrent de manière générale la remise en question de la qualité et du niveau des prestations servies aux retraités.