La commission a délibéré assez longuement sur ce sujet. Elle n'a pas été convaincue de l'opportunité de l'article 3 bis et en propose donc, à ce stade, la suppression.
Il s'agit de l'application d'un des principes importants issus de la loi de sécurité financière, celui de la séparation des fonctions d'audit et de conseil. Ce principe se trouve mis en cause lorsqu'il est recouru à des réseaux juridiques ou comptables internationaux comportant en leur sein à la fois des entités chargées de missions de conseil et des organes fournissant des missions d'audit ou de contrôle.
Nous avons précisé, dans la loi de sécurité financière, les situations dans lesquelles l'indépendance du commissaire aux comptes est affectée : « lorsqu'il appartient à un réseau pluridisciplinaire, national ou international, dont les membres ont un intérêt économique commun, par la fourniture de prestations de services à une personne contrôlée ou qui contrôle [...] la personne dont les comptes sont certifiés par ledit commissaire aux comptes ».
Monsieur le ministre, vous souhaitez, dans cet article, que l'Etat puisse être exonéré de l'application d'un tel principe.
On peut comprendre que l'Etat soit parfois, par nature, un peu schizophrène.
D'un côté, il contrôle des entreprises qui forment le secteur public, lesquelles emploient des commissaires aux comptes qui effectuent des audits et vérifient leurs comptes. Lorsque les entreprises sont importantes, elles ne peuvent, sur le marché actuel, qu'avoir recours, dans bien des cas, à des commissaires aux comptes affiliés à des réseaux internationaux.
D'un autre côté, l'Etat, en tant qu'actionnaire et peut-être aussi au titre de ses prérogatives régaliennes, peut avoir besoin de diverses prestations de conseil : en matière de stratégique, de montage d'opérations, de gestion, etc. Notamment par le biais de l'Agence pour les participations de l'Etat, qui est un organisme interne à la direction du Trésor, l'Etat peut solliciter les conseils d'entités liées à tel ou tel commissaire aux comptes qui se trouve exercer son mandat dans une entreprise dont une partie du capital est détenue par ce même Etat.
D'où cette schizophrénie de l'Etat que j'évoquais à l'instant.
L'Etat peut-il s'exonérer de la discipline commune ? Vous allez peut-être nous dire, monsieur le ministre, que le marché de ce type de prestations est maintenant assez restreint, qu'il faut recourir aux meilleures compétences possibles au niveau mondial et qu'elles se trouvent souvent dans de tels réseaux pluridisciplinaires. Dans ce cas, nous serons tentés de vous répondre que, en adoptant une telle attitude, on n'encourage pas la création de nouveaux noyaux de compétences extérieurs à ces réseaux.
Nous avons vu, en peu d'années, les big eight devenir les big four. Bientôt, il y aura peut-être le big one ! Or, chacun le sait, dans ce domaine comme dans d'autres, le big one, c'est la négation de la liberté ! Nous, nous sommes attachés au pluralisme, aussi bien en matière comptable que pour l'audit et le conseil.
Tel est, monsieur le ministre, l'état de la réflexion de la commission des finances.