…alors même que, grâce à la bienveillance de notre président de séance, nous venons de disposer du texte de la commission mixte paritaire en séance publique.
Ainsi, dans le débat mené au Palais Bourbon, vous avez déposé dix-sept amendements et sous-amendements conduisant à introduire des dispositions ne figurant pas dans le texte initial du projet de loi.
Bien entendu, comme il est d’usage en pareil cas, vous avez également demandé aux commissions saisies au fond comme aux commissions saisies pour avis de proposer à l’adoption d’autres dispositions ne figurant pas en tant que telles dans le texte initial.
Ainsi, 80 % des 180 amendements du rapporteur de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale ont été retenus, et ils présentaient souvent la caractéristique d’abriter une proposition ministérielle.
Au moment où le débat se porte aussi sur l’exercice du droit d’amendement parlementaire, cette donnée doit être soulignée. Dans le même temps, seuls 8 des 127 amendements déposés par mes collègues de l’Assemblée nationale ont été retenus. Nos collègues du groupe socialiste de l’Assemblée nationale, avec 36 amendements adoptés sur 235 déposés, ne sont guère mieux lotis.
Il faut dire qu’ici même, en octobre, seule une trentaine d’amendements déposés par les groupes de l’opposition sénatoriale avaient été pris en compte.
Voici les faits : le débat au Sénat a été marqué par le dépôt de 681 amendements, celui de l’Assemblée nationale par le dépôt de plus d’un millier, et la commission mixte paritaire, pour faire bonne mesure, devait encore en examiner 174 avant-hier.
Cela n’a nullement empêché, comme je l’ai dit, que soient intégrés en priorité les amendements du Gouvernement, au point d’ajouter de nombreuses dispositions nouvelles au texte initial, et ceux des commissions permanentes, souvent porteuses de dispositions que les rédacteurs du projet de loi avaient oubliées, plus ou moins consciemment, d’introduire.
Cette manière de faire n’est pas respectueuse des droits du Parlement. Elle conduit à dissimuler jusqu’au dernier moment des mesures dont la portée est parfois significative. Elle permet aussi de s’abstraire – faut-il le souligner ? – de l’appréciation critique du Conseil d’État sur bien des points.
Elle instrumentalise les commissions permanentes qui deviennent les troupes auxiliaires du Gouvernement pour porter les propositions sujettes à caution et elle réduit l’initiative parlementaire à sa plus simple expression.
La preuve en est que seule une vingtaine d’amendements déposés par les parlementaires et les groupes de la majorité sénatoriale ont été adoptés.