Intervention de Hubert Haenel

Réunion du 19 février 2009 à 9h30
Organisation et régulation des transports ferroviaires et guidés — Discussion générale

Photo de Hubert HaenelHubert Haenel :

Le deuxième grief concerne la tarification ferroviaire française. La Commission européenne critique l’organisation française relative aux péages ferroviaires acquittés par les entreprises utilisant le réseau. En effet, la détermination de ces redevances n’est pas effectuée de façon indépendante par le gestionnaire du réseau, RFF, cette décision relevant du secrétariat d’État chargé des transports.

Le troisième grief renvoie à l’absence d’une autorité indépendante de contrôle et de régulation. Comme en matière d’énergie ou de télécommunications, l’ouverture européenne à la concurrence s’accompagne de l’exigence de mise en place d’une autorité de régulation, qui doit remplir deux conditions : être indépendante de tous les opérateurs et veiller à l’absence de discrimination en tranchant les litiges et, le cas échéant, en imposant des sanctions.

L’actuelle Mission de contrôle des activités ferroviaires, la MCAF, ne remplit aucune de ces deux conditions, puisqu’elle est placée auprès du secrétariat d’État chargé des transports, qui est également l’autorité de tutelle de la SNCF, entreprise publique détenue à 100 % par l’État. Par ailleurs, elle ne dispose pas de réels pouvoirs coercitifs.

Le projet de loi relatif à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires et guidés et portant diverses dispositions relatives aux transports dont nous débutons aujourd’hui l’examen devrait permettre à la France de se mettre en plus grande conformité avec le droit européen.

La situation de la France devrait être fortement améliorée par le fait que, même si le Gouvernement continue de fixer formellement le montant des péages, il ne pourra désormais le faire qu’à la condition d’avoir l’accord de la Commission de régulation des activités ferroviaires, la CRAF, créée par le projet de loi, qui devra émettre un avis conforme.

Le principal apport du projet de loi est la création de la CRAF, ou plutôt de l’ARAF, si cette dénomination, comme je l’espère, est adoptée. Il s’agit d’instituer en France une autorité administrative indépendante chargée de veiller au respect des règles de concurrence.

Le texte qui nous est soumis devrait répondre aux conditions posées par le droit communautaire, pourvu que le Sénat suive le rapporteur, notre éminent collègue Francis Grignon.

Si la France se dote enfin d’une autorité de régulation ferroviaire, encore faut-il que celle-ci soit puissante et « robuste ».

Cette autorité de régulation était déjà jugée nécessaire par la Cour des comptes, « dans la mesure où », écrivait-elle dans son rapport publié en avril 2008, « l’État peut difficilement arbitrer des conflits opposant l’entreprise ferroviaire SNCF et ses concurrents. Elle doit disposer d’autant plus de pouvoirs et de moyens que le gestionnaire de l’infrastructure est proche de l’entreprise ferroviaire SNCF. Si la gestion de l’infrastructure était confiée à une filiale de la SNCF », poursuivait la Cour des comptes, « une partie des personnels de RFF pourrait intégrer les équipes de cette autorité, ce qui permettrait de conserver une capacité de contre-expertise extérieure à la SNCF ».

D’une manière générale, le rôle de cette autorité administrative indépendante sera de veiller au traitement transparent et non discriminatoire entre les entreprises ferroviaires susceptibles d’accéder au réseau, en s’assurant que les conditions techniques et administratives d’accès n’entravent pas la concurrence.

Tout spécialement, cette autorité devra avoir à connaître des questions relatives à l’attribution des capacités ferroviaires, ce qui est apparemment essentiel, et à l’accès aux différentes prestations liées à l’infrastructure. Elle devra également veiller à ce que les différents opérateurs aient un accès non discriminatoire aux « facilités essentielles », notamment en ce qui concerne les services en gare. J’insiste sur ce point : s’il relève de l’évidence que l’attribution des sillons est la condition indispensable aux circulations ferroviaires, cela ne constitue pas une condition suffisante.

La concurrence peut également être faussée par des formes de discrimination plus subtiles, notamment celles qui peuvent toucher les services en gare, l’information donnée aux voyageurs, la distribution ou l’attribution des quais.

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