Nous avons eu en commission un débat assez long sur ce thème, aussi me permettrez-vous, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, de développer mon argumentation.
En guise de remarque préliminaire, je me demande si les auteurs de cet amendement ont bien perçu que les dispositions du projet de loi concernent la possibilité pour un matériel roulant de passer les frontières sans avoir besoin de faire l’objet d’une obligation de mise en exploitation à chaque fois qu’il traverse une frontière nationale. Ce système de reconnaissance mutuelle est la base de la construction d’un espace de libre circulation ferroviaire. Il n’est pas question spécifiquement d’exportation de matériel d’un pays vers un autre. La problématique est donc celle de la sécurité des équipements et non celle d’un protectionnisme industriel.
Cela étant dit, je comprends la préoccupation de nos collègues, mais leur proposition est en contradiction directe avec nos obligations communautaires, et ce quel que soit le cas de figure.
Premier cas : lorsqu’il s’agit de matériel d’un autre pays de l’Union, nous n’avons pas le choix puisque la directive nous impose à tous d’accepter le matériel mis en exploitation chez les autres. Il ne s’agit donc ici que d’une transposition du droit européen ; il y a déjà réciprocité par définition.
Deuxième cas : quand il s’agit du matériel d’un pays ayant signé un accord avec l’Union européenne, nous ne pouvons pas non plus imposer des conditions nationales restreignant l’application d’un acte juridique qui engage les vingt-sept États membres. Rappelons d’ailleurs qu’aucun accord de ce type n’a encore été signé par la Commission européenne. Mais lorsque le cas se présentera, il conviendra bien sûr de veiller à Bruxelles à ce que la Commission exige la réciprocité.
Quant au troisième cas, celui d’un accord bilatéral signé directement avec la France, il n’est plus envisageable dans la mesure où, précisément, les autorisations de circulation de matériel roulant relèvent désormais du niveau communautaire.
Les auteurs de cet amendement soulèvent une question réelle, mais l’on n’y répondra pas en insérant dans le texte des dispositions violant directement le droit communautaire. Il revient en revanche au Conseil et au Parlement européen de s’assurer que la Commission veille au respect du principe de réciprocité dans les accords de reconnaissance qu’elle pourrait signer avec des pays tiers.
Cela pourrait tout à fait faire l’objet d’une résolution européenne, comme nous l’avons évoqué en commission, qui pourrait être examinée par la commission des affaires économiques, et ce d’autant plus qu’aucun accord de reconnaissance tel que prévu par le texte n’a encore été signé entre l’Union européenne et un pays tiers.
Vous comprendrez donc que la commission émette, si cet amendement est maintenu, un avis défavorable.