Intervention de Josiane Mathon-Poinat

Réunion du 31 juillet 2007 à 16h00
Contrôleur général des lieux de privation de liberté — Article 6

Photo de Josiane Mathon-PoinatJosiane Mathon-Poinat :

Force est de constater que ce texte se distingue particulièrement par son imprécision. L'article 6 nous indique que le contrôleur peut visiter tout lieu de privation de liberté. Pourtant, l'aspect vindicatif de cette formulation ne masque pas le flou qui règne sur la définition de ces fameux « lieux de privation de liberté ». Ainsi, une interprétation a minima pourrait conduire à considérer comme lieu de privation de liberté la simple cellule où est détenu le prisonnier ou la chambre du malade.

Prenons le cas de l'hospitalisation des détenus. En décembre 2003, l'accouchement d'une détenue menottée à l'hôpital Sud Francilien d'Évry avait suscité de la part du ministère de la justice des commentaires scandalisés, mais il y eut beaucoup moins d'émoi, un an plus tard, lorsque le ministère ordonna que tous les malades soient non seulement entravés mais menottés dans le dos.

Comme le constate l'Observatoire international des prisons, pour le moindre examen, des prisonniers peuvent passer plusieurs heures menottés. Dans ces conditions, de plus en plus de détenus refusent les extractions médicales. Or rien ne précise dans la loi si les équipements hospitaliers recevant des personnes privées de liberté rentrent dans le périmètre d'action du contrôleur.

De la même manière, qu'en est-il des conditions de travail en prison ? Les détenus peuvent se voir proposer du travail de service général, c'est-à-dire lié au fonctionnement des établissements pénitentiaires. Certains détenus travaillent même à l'extérieur de ces établissements, en semi-liberté, pour le compte de collectivités publiques, d'associations ou d'entreprises. Le « SMIC détenu » s'élève à 45 % du SMIC à l'extérieur et le droit du travail est inexistant.

Hormis ceux qui travaillent en dehors des murs des prisons, les détenus ne signent aucun contrat de travail. Ils n'ont pas le statut juridique de salarié. Il n'existe donc aucune disposition relative à la durée de l'emploi et de la période d'essai, au contenu du poste, aux objectifs professionnels ou au licenciement. Ils n'ont pas droit à des compensations financières en cas de maladie ou d'accident du travail.

Ce sont donc des « faux salariés », qui n'ont aucune possibilité d'expression collective.

Le travail est encore considéré par les directions pénitentiaires comme un outil essentiel de gestion de la détention, plutôt que comme une mesure favorisant la réinsertion des personnes incarcérées.

Certaines entreprises peuvent considérer le travail pénitentiaire comme une variable d'ajustement à la conjoncture économique. En effet, les ateliers de détenus offrent, dans certains cas, les caractéristiques d'un sous-traitant.

Dans ces conditions, le contrôleur des lieux de privation de liberté aura-t-il accès aux locaux où travaillent les personnes incarcérées ? Pourra-t-il observer leurs conditions de travail ? Si l'ampleur de sa mission l'exige, pourra-t-il être accompagné de ses collaborateurs ?

Avec une formulation aussi vague du périmètre d'action du contrôleur, tous ces points semblent quelque peu difficiles à cerner. C'est pourquoi nous demandons que ce périmètre soit précisé.

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