Séance en hémicycle du 31 juillet 2007 à 16h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Madame le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous voici donc arrivés dans la « dernière ligne droite » de cette soixante-huitième session extraordinaire, la première de la treizième législature qui s'est ouverte le 20 juin dernier.

Au terme de cette dernière période fort riche et « enlevée » - c'est le moins que l'on puisse dire -, je pense que nous pouvons être légitimement fiers de la manière dont notre assemblée a su réagir aux évènements politiques tout en affichant les vertus qu'elle puise dans sa continuité et, surtout, dans son travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Qu'on en juge !

Pour la troisième fois depuis 1958, le Premier ministre a été choisi dans nos rangs. Trois de nos collègues - M. Karoutchi

Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP.

Nouveaux applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Nos collègues socialistes devraient applaudir !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

... ont été appelés à changer de place dans cet hémicycle et siègent désormais sur les bancs du Gouvernement, sans oublier deux anciens sénateurs qui ont, eux aussi, rejoint le Gouvernement, MM. Darcos et Barnier.

Je ne résisterai pas non plus au plaisir de rappeler que le Gouvernement compte également, parmi ses secrétaires d'État, l'une de nos jeunes administratrices, Mme Rama Yade, que nous avons eu raison de choisir en son temps !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Avant même les consultations électorales du printemps et, vous le savez, pendant cette période, le Sénat a pleinement joué son rôle particulier au sein du Parlement ; je tenais à la souligner. Entre le mois de février - fin de nos travaux en séance publique - et le dernier jour de la précédente législature, le 19 juin, tous les projets de loi - je dis bien tous : trente-sept textes au total - ont été déposés sur le bureau du Sénat.

Dès l'élection de la nouvelle assemblée, j'ai rappelé au nouveau président de l'Assemblée nationale, M. Bernard Accoyer, que je salue très cordialement, que trente-trois propositions de loi adoptées par le Sénat restaient à examiner par les députés.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le premier jour de la nouvelle législature - le 20 juin -, la conférence des présidents s'est réunie, nous permettant de siéger pendant que l'Assemblée nationale élisait son bureau et constituait ses commissions. Par ailleurs, je vous le rappelle, le tout premier projet de loi de cette treizième législature, déposé au Sénat et examiné le 27 juin, visait précisément à accroître les pouvoirs du Parlement en créant une délégation parlementaire au renseignement.

Nous nous sommes prononcés, en vertu de l'article 49, alinéa 4, de la Constitution, pour la quinzième fois depuis le début de la Ve République, sur une déclaration de politique générale du Gouvernement spécifique au Sénat, qui a été suivie d'un vote. Puis nous avons eu deux débats déterminants pour le suivi de l'action du Gouvernement : le 4 juillet dernier le débat sur les résultats du Conseil européen des 21 et 22 juin, et le 24 juillet le débat d'orientation budgétaire.

Sur les sept projets de loi - hors conventions internationales - inscrits à l'ordre du jour de nos travaux pour cette session extraordinaire, cinq ont été déposés au Sénat en premier.

Très bien sur les travées de l'UMP !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Mais cette session extraordinaire n'aura pas été seulement consacrée à la traduction législative des réformes annoncées par le chef de l'État et approuvées par le pays.

Notre programme de travail porte la marque de notre action tenace, patiente et continue en matière de contrôle.

L'interruption de la session, de février à juin, nous avait rappelé que les commissions, délégations et offices sont le lieu naturel de cet aspect essentiel du travail parlementaire, où s'exprime dans toute sa plénitude le nécessaire dialogue entre majorité et opposition, qui constitue, en quelque sorte, la spécificité de notre assemblée. Le contrôle de l'action du Gouvernement est bien la seconde nature du Sénat.

Durant cette période, nos commissions, délégations et offices ont tenu quelque 77 réunions, pour une durée globale d'environ 180 heures, et ont auditionné près de 100 personnalités. Qui dit mieux ? Qui peut dire que le Sénat était en vacances ?

Debut de section - Permalien
Plusieurs sénateurs de l'Ump

Personne !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

M. le président. C'est bien de le penser, c'est encore mieux de le dire !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Ces travaux n'ont pas pour seule vocation le contrôle de l'action du Gouvernement ; ils alimentent aussi nos discussions législatives.

Les récents débats européens confirment la nécessaire complémentarité entre la séance plénière et les travaux des commissions.

Le 6 mars et le 20 juin, la Délégation pour l'Union européenne a organisé deux réunions qui, dans l'esprit de la séance publique, ont permis que se tiennent deux débats préalables aux conseils européens de mars et de juin. Sans cette initiative, aucun débat de ce type n'aurait eu lieu pendant la présidence allemande. Le Sénat a pu ainsi marquer sa présence dans le débat européen, avant le débat qui s'est tenu, en séance publique, le 4 juillet, pour tirer les conséquences du Conseil européen.

Autre illustration, elle aussi très éclairante, de cette complémentarité entre le « petit hémicycle » des salles Clemenceau ou Médicis et cette salle des séances publiques où nous siégeons : l'examen du projet de loi de règlement, qui a donné lieu à neuf auditions ministérielles organisées par la commission des finances élargie, et à deux débats en séance publique ; je parle sous le contrôle du président de la commission des finances et du rapporteur général, qui ont animé ces débats.

Fort de ces précédents réussis, il nous appartient de trouver, de manière pragmatique, le meilleur équilibre possible entre la spontanéité des travaux en commission et la solennité de la séance publique.

Mes chers collègues, en cette fin de session extraordinaire, je crois que nous avons tous, majorité et opposition, exercé la plénitude de notre mandat dans un esprit de compréhension mutuelle face à un Gouvernement qui, je le reconnais, nous a imposé des délais sans doute trop brefs. Mais, dans les circonstances politiques d'un début de législature, pouvait-il en être autrement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le fait que nous nous retrouvions en première ligne de l'élaboration de réformes qui engagent l'avenir de la France impose aussi au Sénat des devoirs supplémentaires.

Dans la mesure où nous sommes saisis en premier de réformes essentielles, nous nous trouvons naturellement sous les feux de l'actualité et des médias.

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Plusieurs sénateurs de l'Ump

C'est le cas !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

M. le président. Car si les heures passées dans cette salle ne représentent qu'une petite partie de notre travail collectif, elles en sont la partie la plus visible, en quelque sorte la vitrine. N'oublions pas que chacun d'entre nous est comptable de l'image que nous donnons de notre institution, à laquelle, tous, sans exception, nous sommes très attachés.

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

À l'heure où s'engage une nouvelle réflexion sur la modernisation des institutions, nous avons apporté la preuve du rôle essentiel que joue le Sénat dans l'équilibre de nos institutions, pour peu que nous restions fidèles à notre identité sénatoriale. Car cette identité est le meilleur gage de la qualité de nos travaux. Le Sénat est là pour veiller à ce que la loi soit bien faite, comme le recommandait Jules Ferry, mon illustre prédécesseur.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le bicamérisme à la française a fait ses preuves. C'est assurément dans la rénovation du travail parlementaire et dans l'amélioration du fonctionnement interne des assemblées que nous trouverons les meilleures bases du rééquilibrage souhaité de nos institutions.

Le Sénat, assemblée parlementaire à part entière, ...

Debut de section - Permalien
Un sénateur de l'Ump

Jusqu'à quand ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

...a déjà démontré sa capacité à s'auto-réformer, qualité qui - dois-je le rappeler ? - n'est pas si fréquente dans les assemblées de cette nature.

La réduction de la durée du mandat des sénatrices et des sénateurs ou la large place faite au mode de scrutin proportionnel ont déjà illustré notre souci permanent d'adaptation aux préoccupations de nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Nous avons aussi, je crois, été les premiers à réfléchir sur la modernisation du travail parlementaire. Notre conférence des présidents s'est ainsi régulièrement réunie, sur mon initiative, depuis le début de l'année 2006, pour réfléchir et faire évoluer les conditions du travail sénatorial, dans le dialogue et le respect des sensibilités de chacun. Ainsi, une nouvelle fois, nous serons prêts pour poursuivre cette mission. Nul ne peut contester le travail de la conférence des présidents !

En attendant, une session extraordinaire peut en cacher une autre !

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Mes chers collègues, il semble que nous soyons appelés à nous retrouver dès la mi-septembre

Déjà ! sur les travées de l'UMP

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Pour l'heure, je vous invite, ainsi que nos personnels, auxquels je tiens à rendre hommage pour leurs compétences et leur disponibilité

Applaudissements

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Mes chers collègues, je vous souhaite un bon mois d'août !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement

Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais, au nom du Gouvernement, remercier le Sénat de la qualité du travail accompli depuis un peu plus d'un mois.

Comme M. le président le soulignait, nombre de textes législatifs ont été examinés dans le cadre d'une discussion ouverte et démocratique, même si - je le concède bien volontiers - les délais ont été parfois abrégés, session extraordinaire oblige. À cet égard, je remercie d'autant plus les présidents de commission et les rapporteurs d'avoir accepté ce travail supplémentaire.

Et quel travail considérable accompli depuis cinq semaines ! Après avoir examiné en première lecture le projet de loi portant création d'une délégation parlementaire pour le renseignement, le Sénat a discuté de l'ensemble des accords européens, adopté le projet de loi de règlement du budget de l'année 2006 et mené un débat d'orientation budgétaire.

En outre, quatre projets de loi ont été examinés conjointement avec l'Assemblée nationale : le projet de loi renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs, le projet de loi relatif aux libertés et responsabilités des universités, le projet de loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs, que Xavier Bertrand présente en ce moment même devant l'Assemblée nationale, et le projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat.

Debut de section - Permalien
Roger Karoutchi, secrétaire d'État

Enfin, le Sénat examine aujourd'hui le projet de loi instituant un contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Certes, monsieur Sueur, tout le monde n'a pas le même point de vue sur les différents textes législatifs que la Haute Assemblée a examinés.

Debut de section - Permalien
Roger Karoutchi, secrétaire d'État

Mais, au Sénat comme à l'Assemblée nationale, l'existence de véritables débats de fond est la règle, et heureusement ! C'est la raison pour laquelle il faut une majorité et une opposition. En effet, un dialogue républicain et démocratique suppose le respect des uns et des autres, ...

Debut de section - Permalien
Roger Karoutchi, secrétaire d'État

... et la capacité de s'exprimer et de défendre ses options, pour que le Sénat et l'Assemblée nationale puissent ensuite trancher souverainement par leur vote. C'est ainsi que fonctionne la démocratie, et c'est très bien !

Pour autant, comme l'a précisé M. le président - je suis désolé que la pause estivale soit si courte, mesdames, messieurs les sénateurs -, le Parlement siègera de nouveau en session extraordinaire à compter du mardi 18 septembre.

À cette occasion, plusieurs textes législatifs seront discutés, notamment le dispositif relatif à l'immigration, qui a déjà été examiné par le conseil des ministres, le texte sur la défense des marques et la lutte contre les contrefaçons et le projet de loi, en gestation depuis plusieurs années, tendant à la ratification de l'accord de Londres sur les brevets. En outre, le projet de loi portant création d'une délégation parlementaire pour le renseignement sera examiné en deuxième lecture, tout comme le projet de loi instituant un contrôleur général des lieux de privation de liberté, à condition, bien entendu, que l'Assemblée nationale ait eu le temps de l'adopter en première lecture.

Monsieur le président, au nom du Gouvernement, je veux remercier la Haute Assemblée, dans toutes ses composantes, de la qualité du travail fourni et de l'excellente image du Parlement qui a été offerte à tout le pays s'agissant tant de l'ampleur des travaux que de la qualité des débats de fond.

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie des compliments mérités que vous nous avez adressés ; nous y sommes tous très sensibles.

Nous ne doutons pas un seul instant que vous serez notre avocat auprès des instances de l'exécutif, si le Sénat y est évoqué.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

L'ordre du jour appelle le scrutin pour l'élection de deux membres suppléants représentant la France à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à l'Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale.

Je déclare le scrutin ouvert pendant une heure dans la salle des conférences.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

J'informe le Sénat que les commissions mixtes paritaires chargées de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion respectivement du projet de loi sur les libertés et responsabilités des universités et du projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat sont parvenues à l'adoption d'un texte commun.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Pour le cas où M. le Premier Ministre demanderait la constitution d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs, j'informe le Sénat que la commission spéciale chargée d'examiner ce projet de loi m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera.

Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l'article 12 du règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Nous reprenons la discussion du projet de loi instituant un contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Nous passons à l'examen des articles.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

L'amendement n° 25, présenté par Mme Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

Est autorisée la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants signée à New York le 16 septembre 2005, et dont le texte est annexé à la présente loi.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Cet amendement a pour objet la ratification du protocole facultatif se rapportant à la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

En effet, par le présent projet de loi, la France, qui est signataire de la convention contre la torture de l'ONU et de son protocole facultatif, s'engage à se conformer aux prescriptions internationales en matière de contrôle extérieur des prisons.

La session extraordinaire qui s'est ouverte a permis la ratification de nombreuses conventions internationales, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir. Il semble donc que le Gouvernement soit enfin enclin à soumettre au Parlement tous les accords internationaux signés, mais non encore ratifiés par la France.

Puisque le texte dont nous débattons aujourd'hui vise à rendre la législation française compatible avec le protocole facultatif, pourquoi le Gouvernement n'a-t-il pas décidé d'inscrire à l'ordre du jour la ratification de ce protocole ? En effet, dès lors que le projet de loi répond à des obligations internationales de la France, il semble indispensable de donner à ce protocole une valeur supralégislative.

Le rejet de cet amendement placerait la France dans une situation tout à fait paradoxale, puisque notre pays s'affranchirait ainsi formellement de ses obligations internationales, tout en adoptant des dispositions de droit interne reprenant le contenu de conventions internationales dont il est signataire.

Aujourd'hui, qu'est-ce qui nous empêche de ratifier ce protocole facultatif ? À mon sens, la seule barrière qui existait, c'est-à-dire la mise en place d'un contrôleur extérieur des lieux de privation de liberté, tombe avec l'adoption de ce projet de loi.

Je vous suggère donc de faire d'une pierre, deux coups, en associant la ratification du protocole facultatif à l'adoption du présent projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Je le rappelle, la France s'est engagée à ratifier le protocole facultatif au cours du premier semestre 2008. Le Gouvernement confirmera sans doute cet engagement en séance publique.

Quoi qu'il en soit, d'un point de vue formel, il paraît difficile de ratifier une convention internationale qui ne nous serait pas présentée sous la forme d'un projet de loi. Ce serait paradoxal !

C'est la raison pour laquelle la commission souhaite le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice

Je partage l'opinion de M. le rapporteur : la ratification du protocole facultatif doit faire l'objet d'un projet de loi ; il n'est pas possible de l'intégrer dans le présent texte.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Madame Boumediene-Thiery, l'amendement est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Oui, je le maintiens, monsieur le président.

À mon sens, il est tout à fait possible de ratifier le protocole additionnel...

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

... et il serait souhaitable de le faire aujourd'hui, dans le cadre du présent projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Pasqua

Mais non ! Il n'y a pas de projet de loi de ratification !

L'amendement n'est pas adopté.

Le contrôleur général des lieux de privation de liberté, autorité indépendante, est chargé, sans préjudice des prérogatives que la loi attribue aux autorités juridictionnelles, de contrôler les conditions de prise en charge des personnes privées de liberté, afin de s'assurer du respect des droits fondamentaux dont elles demeurent titulaires.

Il exerce principalement ce contrôle par des visites sur place.

Dans la limite de ses attributions, il ne reçoit d'instruction d'aucune autorité.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous avons pris acte, ce matin, du dépôt de ce projet de loi instituant un contrôleur général des lieux de privation de liberté, conformément à l'engagement pris par la France auprès des Nations unies de créer un mécanisme national de prévention des traitements inhumains et dégradants.

Cet article 1er n'appelle pas d'observation particulière, sinon qu'il faudra très vite le nourrir. La suite de notre discussion permettra de lever un certain nombre d'ambiguïtés qui tiennent à la généralité du projet de loi. En effet, afin de rendre effective cette nouvelle autorité, il est essentiel d'en déterminer les contours avec une extrême précision.

Le projet de loi ne définit la mission confiée au contrôleur général que de manière très générale, puisque celle-ci vise seulement le contrôle des « conditions de prise en charge des personnes privées de liberté, afin de s'assurer du respect des droits fondamentaux dont elles demeurent titulaires ».

Selon M. le rapporteur, le contrôle devrait donc essentiellement porter sur les conditions matérielles de privation de liberté susceptibles de mettre en cause la dignité de la personne - il s'agit notamment de l'état des locaux, de l'hygiène et de l'alimentation - et sur l'application aux personnes concernées des droits qui sont inaliénables, c'est-à-dire les droits à la santé, à des liens familiaux, au travail ou à la formation, ainsi que l'exercice effectif des droits de recours administratifs ou judiciaires.

Sont également abordés les rapports entre les personnes privées de liberté et le personnel des établissements qui les retiennent, en particulier au regard de la déontologie professionnelle et des droits de l'homme.

Mais, comme le note le rapporteur, « le champ de compétences ouvert au contrôleur n'inclut pas l'organisation et les conditions de travail des personnels et apparaît, à ce titre, moins extensif que celui qui est envisagé par la mission présidée par M. Guy Canivet pour le contrôleur général des prisons ». ²

Afin de définir au mieux la mission du contrôleur général des lieux de privation de liberté, nous présenterons un amendement qui reprend précisément la formule retenue dans la proposition de loi que le rapporteur avait rédigée avec M. Cabanel et selon laquelle le contrôle devait porter sur « l'état, l'organisation et le fonctionnement des établissements pénitentiaires, ainsi que les conditions de la vie carcérale et les conditions de travail des personnels pénitentiaires ».

Telles sont donc les réserves que nous émettons sur cet article 1er et qui feront l'objet de toute une série d'amendements.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 18, présenté par MM. Lecerf et Portelli, Mmes Bout et Henneron et M. de Richemont est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le début du premier alinéa de cet article :

Le contrôle extérieur et indépendant des lieux de privation de liberté est confié au Médiateur de la République qui est chargé, à ce titre, sans préjudice des prérogatives...

La parole est à M. Jean-René Lecerf.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Cet amendement a déjà fait l'objet d'une discussion sur le fond ce matin, à l'occasion de la discussion générale et de la réponse de Mme la ministre. Je suis personnellement prêt à le retirer.

Néanmoins, je souhaite souligner l'attachement d'un certain nombre de collègues, dont moi-même, à voir les fonctions de contrôleur général exercées par le Médiateur. Je tiens également à affirmer l'utilité d'une évolution du statut du Médiateur de la République vers un véritable statut d'ombudsman et à manifester les réserves d'un grand nombre de nos collègues face à la multiplication sans frein des autorités indépendantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

L'amendement n° 60, présenté par MM. C. Gautier, Badinter, Mermaz, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :

Après les mots :

est chargé

Rédiger comme suit la fin du premier alinéa de cet article :

de contrôler l'état, l'organisation et le fonctionnement des lieux privatifs de liberté, ainsi que les conditions de vie des personnes privées de liberté et les conditions de travail des personnels de ces établissements.

La parole est à M. Charles Gautier.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Gautier

Comme je le disais ce matin, si nous prenons acte avec satisfaction du dépôt de ce projet de loi tendant à instaurer un contrôleur général des lieux de privation de liberté, conformément à l'engagement pris par la France auprès des Nations unies de créer un mécanisme national de prévention des traitements inhumains et dégradants, nous souhaitons toutefois que le contrôle créé satisfasse pleinement aux obligations établies par le protocole facultatif.

Pour ce faire, nous préférons préciser le champ de compétence du contrôleur général en reprenant la rédaction prévue par la proposition de loi de Jean-Jacques Hyest et Guy Cabanel. Tel est l'objet de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

L'amendement n° 26, présenté par Mme Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller est ainsi libellé :

Après les mots :

aux autorités juridictionnelles

rédiger comme suit la fin du premier alinéa de cet article :

de contrôler les conditions générales de prise en charge des personnes privées de liberté, telles que l'état des lieux de privation de liberté, notamment en ce qui concerne les conditions d'hygiène de santé, l'application des statuts, lois et règlements attachés la nature de la privation de liberté, les relations entre la personne privée de liberté et le personnel en charge de celle-ci, les pratiques professionnelles et le respect de la déontologie par les personnes en charge de la privation de liberté, leur formation, ainsi que leur organisation et leurs conditions de travail. Il s'assure également du respect des droits fondamentaux dont les personnes privées de liberté sont titulaires.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Cet amendement vise à préciser la notion « conditions générales de privation de liberté ».

Il s'agit de contrôler l'état des lieux de privation de liberté quant à la vétusté, à la propreté, au respect des conditions minimales d'hygiène et de santé, ainsi que le respect des statuts, lois et règlements selon la nature de la privation de liberté. Il convient également de contrôler les relations entre la personne privée de liberté et le personnel, afin de prévenir les conflits interindividuels et d'évaluer la capacité d'écoute du personnel, les pratiques professionnelles et le respect des règles de déontologie auxquelles est soumis le personnel. Il importe enfin de contrôler la formation, l'organisation et les conditions de travail du personnel en charge de la privation de liberté.

Cet amendement précise la mission du contrôleur : au-delà du respect des conditions de privation de liberté, le contrôleur doit pouvoir s'assurer que l'individu privé de liberté bénéficie de conditions de détention préservant sa dignité humaine.

Les conditions matérielles d'hygiène et de santé sont importantes, mais la personne privée de liberté doit pouvoir également jouir du respect de sa dignité dans ses relations avec le personnel et ne pas faire l'objet de pressions morales, ni de traitements contraires au respect de la dignité humaine, tels qu'insultes, brimades, chantages ou pressions psychologiques.

Le contrôleur doit donc également s'assurer que le personnel travaille dans des conditions optimales : il doit être qualifié, formé, jouir de conditions de travail correctes au regard de l'importance des missions qu'il est amené à remplir. C'est l'aptitude générale des personnels et de l'institution à sauvegarder la dignité des personnes privées de liberté qui doit alors être contrôlée.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

L'amendement n° 79, présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :

Après les mots :

aux autorités juridictionnelles

rédiger ainsi la fin du premier alinéa de cet article :

de contrôler l'état, l'organisation, le fonctionnement de ces lieux ainsi que les conditions de vie des personnes privées de liberté et les conditions de travail des personnels afin de s'assurer du respect de la dignité et des droits fondamentaux dont les personnes privées de liberté sont titulaires.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Le champ de compétences du futur contrôleur général évoqué dans l'article 1er semble, à tout point de vue, trop restreint puisqu'il se limite aux conditions de prise en charge des personnes privées de liberté.

Seul l'aspect matériel est ici pris en compte, et non l'aspect psychologique. C'est pourquoi nous proposons que les conditions de vie de ces personnes soient contrôlées dans leur ensemble. Contrôler comment elles vivent leur privation de liberté est tout aussi important que de contrôler leur prise en charge. C'est d'ailleurs dans cet esprit que nous souhaitons voir garanti le respect non seulement des droits fondamentaux de ces personnes, mais également de leur dignité.

Par ailleurs, l'article 1er omet totalement le contrôle de l'état, de l'organisation et du fonctionnement des lieux de privation de liberté, ainsi que des conditions de travail des personnels. En 2001, la proposition de loi de MM. Hyest et Cabanel prévoyait un tel contrôle. Nous ne comprenons pas que celui-ci ait aujourd'hui disparu alors qu'il semble toujours opportun.

L'état des lieux, leur organisation et leur fonctionnement sont inséparables des conditions de vie des personnes retenues, comme des conditions de travail des personnels. Nous concevons ce contrôle non pas comme une mesure de défiance vis-à-vis des personnels mais, bien au contraire, comme une disposition permettant d'améliorer leurs conditions de travail, si cela s'avère nécessaire.

À nos yeux, ces éléments forment un tout indivisible qu'il convient de soumettre au contrôle du contrôleur général afin de garantir son efficacité. C'est pourquoi nous vous proposons d'étendre en ce sens le champ de compétence du contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

L'amendement n° 1, présenté par M. Hyest au nom de la commission est ainsi libellé :

Après les mots :

du respect

rédiger ainsi la fin du premier alinéa de cet article :

de leurs droits fondamentaux.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Selon la rédaction du projet de loi, le contrôleur général veille au respect des droits fondamentaux dont les personnes privées de liberté « demeurent titulaires ».

Le Gouvernement entend souligner que, même privés de liberté, les intéressés conservent certains droits fondamentaux. La rédaction proposée par cet amendement vise un objectif tout à fait identique, sous une forme plus concise. Nous souhaitons en effet que les lois soient claires et lisibles par tous !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

L'amendement n° 27, présenté par Mme Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller est ainsi libellé :

À la fin du premier alinéa, remplacer le mot :

demeurent

par le mot :

sont

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Cet amendement concerne le contrôle du respect des droits fondamentaux, donnée essentielle du contrôle que sera amené à effectuer le contrôleur.

Les droits visés par le projet de loi recouvrent le respect de la dignité humaine.

Ces principes, tels qu'ils découlent de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, font partie du « noyau dur » des droits humains. Toute personne jouit, en toutes circonstances, de ces droits. La personne privée de liberté est titulaire de ces droits parce que nul ne peut y déroger : ils sont intangibles et imprescriptibles.

L'emploi du verbe « demeurent » laisse supposer que la personne privée de liberté aurait pu, du fait de la privation de liberté, perdre la jouissance de ces droits. Ce terme laisse penser qu'une déchéance de ces droits est possible, alors que tel n'est pas le cas.

Cet amendement vise à rappeler que la personne, même privée de liberté, est toujours titulaire de ces droits.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Concernant l'amendement n° 18 de Jean-René Lecerf, la commission a déjà longuement débattu de la question du rattachement du contrôleur général au Médiateur de la République. Nous convenons tous de la nécessité d'établir une distinction entre les fonctions de contrôle et de méditation.

Le Médiateur de la République lui-même insiste sur l'obligation de séparation stricte de ces deux missions. Il rappelle la nécessité d'un cloisonnement entre deux structures administratives distinctes, ainsi que le recours à des compétences différentes dans des équipes différentes.

Compte tenu de cette séparation stricte, les économies d'échelle invoquées par les auteurs de l'amendement ne paraissent pas convaincantes.

Les personnes que nous avons entendues lors des auditions, dans leur grande majorité, souhaitent que la fonction de contrôle soit confiée à une autorité spécifique ; c'est notamment la recommandation du Conseil de l'Europe.

Sans doute notre position aurait-elle été différente s'il existait en France un véritable ombudsman auquel les fonctions de contrôle et de médiation pourraient être éventuellement rattachées. Mais tel n'est pas le cas aujourd'hui. En l'état du droit, le rattachement de la fonction de contrôle au Médiateur serait source de confusion. La commission a donc émis un avis défavorable.

L'amendement n° 60 tend à introduire, parmi les missions du contrôleur général, le contrôle des conditions de travail des personnels. Cet aspect n'est pas prévu par le protocole facultatif, qui fixe pour mission au contrôleur général le seul contrôle de la situation des personnes privées de liberté. Il est préférable d'en rester à la rédaction du projet de loi, que j'ai d'ailleurs explicitée dans le rapport en m'appuyant sur les recommandations de la mission présidée par M. Guy Canivet.

Je pense qu'une formulation générale est préférable pour ne pas encadrer trop strictement les missions du contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.

L'amendement n° 26 vise à préciser de manière très détaillée les compétences du contrôleur général. Il me semble qu'une formulation générale est préférable, car elle est plus adaptée au caractère d'une disposition législative. Toute énumération comporte un risque d'oubli et peut ainsi contredire le but affiché par les auteurs de l'amendement. En revanche, il est souhaitable que le débat puisse éclairer le contenu et la portée de ce contrôle.

Selon la commission, ce contrôle doit porter sur les conditions matérielles de privation de liberté susceptibles de mettre en cause la dignité de la personne, telles que l'état des locaux, l'hygiène et l'alimentation.

Ce contrôle doit également porter sur l'application aux personnes concernées des droits qu'elles conservent et qui varient, naturellement, selon leur statut : droit à la santé, maintien des liens familiaux, le cas échéant droit au travail ou à la formation, en particulier pour les personnes détenues, exercice effectif des droits de recours administratifs ou judiciaires.

Enfin, ce contrôle doit porter sur les rapports entre les personnes privées de liberté et les personnels des structures dont elles relèvent, en particulier au regard de la déontologie professionnelle.

Je pense que Mme le garde des sceaux confirmera que telle est bien l'étendue des compétences du contrôleur général.

Je demande donc le retrait de cet amendement. Dans la négative, j'émettrai un avis défavorable.

L'amendement n° 79 appelle les mêmes observations que l'amendement n° 60 puisqu'il est pratiquement identique.

Quant à l'amendement n° 27, il est satisfait par l'amendement n° 1 de la commission qui répond à la préoccupation exprimée par Mme Boumediene-Thiery.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

S'agissant de l'amendement n° 18 de M. Lecerf, il est vrai que les excellents travaux du Médiateur sur les conditions de détention, réalisés depuis 2005, ont fortement contribué à l'élaboration de ce projet de loi, ainsi qu'à la prise de conscience de la nécessité de créer un poste de contrôleur.

Les missions du contrôleur et du Médiateur sont très différentes : les prérogatives du Médiateur lui permettent de résoudre des difficultés opposant des particuliers aux pouvoirs publics. Telle n'est pas la mission de l'autorité de contrôle indépendante que nous avons souhaité créer.

Je souhaite vous remercier, monsieur Lecerf, de votre ouverture d'esprit et de la qualité des échanges que nous avons eus sur ce sujet. Je ne suis absolument pas opposée à une évolution des missions du Médiateur : si vous souhaitez que nous puissions y travailler, j'y suis tout à fait favorable.

Je vous remercie également d'avoir proposé de retirer cet amendement, en fonction des explications que je vous ai données ce matin.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

L'amendement n° 18 est retiré.

Veuillez poursuivre, madame le garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Concernant l'amendement n° 60, le Gouvernement souhaite définir de la manière la plus large possible la mission du contrôleur, afin que celle-ci puisse être exercée sans contraintes.

En effet, si l'on établit une liste énumérative des cas de contrôle, on risque de ne pas pouvoir prendre en compte certaines situations. En Angleterre, par exemple, l'inspecteur en chef des prisons a pu travailler sur la prévention des suicides parce que le champ de sa mission est resté très large et n'a pas été limité par une telle liste. Nous n'avons pas souhaité inscrire une liste énumérative dans le texte, afin d'assurer les meilleures conditions de travail au contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 60.

Je reprendrai exactement les mêmes arguments s'agissant de l'amendement n° 26. Nous n'avons pas souhaité établir une énumération précise des cas de contrôle, afin de permettre au contrôleur général d'examiner les conditions de prise en charge des personnes détenues ou retenues dans les meilleures conditions possibles.

Le Gouvernement émet, par conséquent, un avis défavorable sur l'amendement n° 26, ainsi que sur l'amendement n° 79, pour les mêmes raisons.

Par ailleurs, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 1, car il permet d'améliorer la rédaction du texte.

En ce qui concerne enfin l'amendement n° 27, il est satisfait par l'amendement n° 1.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'amendement n° 60.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je voudrais revenir sur cet amendement et expliquer pourquoi nous y sommes toujours favorables, en dépit des explications qui nous ont été données par M. le rapporteur.

Monsieur le rapporteur, je ne comprends pas bien votre position, puisque nous avons repris exactement les termes d'une proposition de loi qui avait été signée par un certain M. Hyest...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Il est possible que votre pensée ait évolué entre-temps, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

... car vous nous dites que la formule présentée par le Gouvernement est meilleure que celle dont vous étiez l'auteur en 2001.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Vous nous proposez d'adopter une rédaction qui évoque « les conditions de prise en charge des personnes privées de liberté ». Or cette formulation recouvre, si l'on y réfléchit, tout ce qui a trait à la condition concrète des personnes visées.

La rédaction présentée dans votre proposition de loi était bien meilleure, car elle prévoyait le contrôle de l'état, de l'organisation, du fonctionnement des lieux privatifs de liberté, d'une part, celui des conditions de travail des personnels de ces établissements, d'autre part. Cela était très clair.

Je ne vois donc pas pourquoi, monsieur le rapporteur, vous seriez aujourd'hui hostile à la rédaction que nous proposons, et qui est aussi la vôtre. M. Frimat me rappelle d'ailleurs très opportunément que cette formulation avait été adoptée à l'unanimité par le Sénat : ce que nous avions décidé hier, nous pourrions le confirmer aujourd'hui. Le Sénat a beaucoup de sagesse, et je n'imagine pas qu'un texte ayant fait l'objet de son approbation unanime puisse se trouver tout d'un coup dénué d'intérêt.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

M. Jean-Claude Gaudin remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 80, présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :

I. Après le premier alinéa de cet article, insérer deux alinéas ainsi rédigés :

Est considérée comme une privation de liberté toute forme de détention ou d'emprisonnement ou le placement dans un établissement public ou privé de surveillance dont la personne n'est pas autorisée à sortir de son gré, ordonné par une autorité judiciaire ou administrative ou toute autre autorité publique.

Toute privation de liberté est considérée comme illégale si le lieu dans lequel elle se déroule n'a pas fait l'objet d'une déclaration préalable auprès du contrôleur général.

II. En conséquence, rédiger ainsi le début du deuxième alinéa de cet article :

Le contrôleur général des lieux de privation de liberté exerce...

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Si, comme je l'ai dit ce matin, nous sommes satisfaits que le contrôle ne porte plus uniquement sur les prisons - comme nous y oblige de toute façon le protocole facultatif à la convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants -, nous souhaiterions néanmoins être sûrs que le contrôleur général pourra contrôler tous les lieux de privation de liberté, sans exception.

Nous aurions pu dresser la liste de ces lieux, mais je vous en fais grâce, mes chers collègues, supposant que vous la connaissez aussi bien que moi.

Quoi qu'il en soit, une telle liste serait tout à fait susceptible d'évoluer et aurait l'inconvénient, comme toutes les listes, de ne pas être forcément exhaustive.

C'est pourquoi nous avons fait le choix de définir ce qu'est une privation de liberté, en reprenant les termes du protocole précité, afin de permettre au contrôleur général de visiter tous les lieux correspondant à cette définition.

Ainsi, sa liberté serait totale, quelle que soit l'évolution des lieux privatifs de liberté : si d'autres structures de cette nature sont créées, elles entreront automatiquement dans le champ du contrôle.

Par ailleurs, tous les lieux de privation de liberté devront être systématiquement déclarés au contrôleur général, afin qu'aucun ne puisse échapper à son action. Je pense notamment au cas des locaux de rétention administrative, dont le nombre et la localisation fluctuent en fonction des besoins du moment.

Nous proposons donc de soumettre la légalité d'une mesure de privation de liberté à la condition de déclaration préalable auprès du contrôleur général du lieu où elle est exécutée.

Notre amendement vise, ni plus ni moins, à renforcer les pouvoirs du contrôleur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

L'amendement n° 80 tend à définir la privation de liberté sur le modèle de la rédaction retenue par le protocole facultatif à la convention des Nations unies.

Il a en outre pour objet d'instaurer une déclaration préalable auprès du contrôleur général de l'ouverture de tout nouveau lieu de privation de liberté, faute de quoi la détention serait illégale.

Si la sanction de l'absence de déclaration préalable apparaît inadaptée, il est souhaitable, en revanche, que le contrôleur général puisse être informé du nombre exact de lieux de privation de liberté. Le Gouvernement pourra peut-être nous donner des précisions sur ce point. Dans la mesure où je pense que nous obtiendrons des éclaircissements suffisants, je demande le retrait de cet amendement.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Cet amendement comporte deux aspects.

Tout d'abord, il présente une définition de la privation de liberté, reprise du protocole facultatif à la convention des Nations unies.

Ensuite, il prévoit une déclaration préalable auprès du contrôleur général de tout lieu de privation de liberté, qu'il s'agisse de locaux de garde à vue, d'un centre de rétention ou d'un lieu d'emprisonnement.

Or si communiquer la liste des lieux de privation de liberté ne pose aucun problème, rendre illégale la mesure de détention, de rétention ou d'hospitalisation d'office en l'absence de déclaration préalable auprès du contrôleur général du lieu où elle est exécutée pourrait soulever des difficultés, sur le plan juridique et sur celui de la sécurité.

En particulier, une personne peut se voir notifier ses droits dans la rue, en vue de son placement en garde à vue, au moment même de l'interpellation. Elle se trouve dès cet instant privée de sa liberté, et l'on peut s'interroger sur le traitement d'un tel cas au regard de la disposition présentée par les auteurs de l'amendement. Comment jugera-t-on cette situation ?

Je le répète, transmettre au contrôleur général la liste des lieux de privation de liberté ne suscite aucun problème, mais il ne faudrait pas que l'absence de déclaration préalable du lieu d'exécution rende illégale la mesure de placement en détention ou en garde à vue, car ce lieu est forcément inconnu au moment où la mesure est prise. Par exemple, le placement d'un mineur en centre éducatif fermé par un juge des enfants pourrait être considéré illégal si le centre vient d'ouvrir et n'a pas fait l'objet d'une déclaration préalable auprès du contrôleur général.

Par conséquent, dans la mesure où cet amendement lie la légalité de la privation de liberté à la déclaration préalable du lieu où elle s'exerce, nous y sommes défavorables.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 1 er est adopté.

Le contrôleur général des lieux de privation de liberté est nommé par décret pour une durée de six ans. Son mandat n'est pas renouvelable.

Il ne peut être mis fin à ses fonctions avant l'expiration de son mandat qu'en cas de démission ou d'empêchement.

Les fonctions de contrôleur général des lieux de privation de liberté sont incompatibles avec toute autre activité professionnelle ou tout mandat électif.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Avec l'article 2, nous commençons à aborder le vif du sujet.

Sur toutes les travées de notre assemblée, on s'accorde à estimer que le contrôleur général des lieux de privation de liberté doit constituer une autorité vraiment indépendante, comme il est affirmé à l'article 1er. D'ailleurs, cette autorité viendra s'ajouter à d'autres institutions du même type, déjà qualifiées d'autorités indépendantes : le Médiateur de la République, le Défenseur des enfants, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, qui est une instance collégiale.

Cependant, nous nous apercevons finalement que les moyens d'instaurer une autorité indépendante ne sont pas au rendez-vous. En effet, il n'est pas très satisfaisant que le contrôleur général des lieux de privation de liberté soit nommé par décret simple : cela banalise considérablement la fonction. Les autorités que j'ai citées à l'instant sont nommées par décret pris en conseil des ministres ou par décret du Président de la République.

Nous aurons l'occasion, tout au long de ce débat, de nous reporter à ce que la commission des lois et le Sénat, dans son ensemble, voulurent en 2001.

En effet, la commission des lois du Sénat était allée beaucoup plus loin, à l'époque, que ne le prévoit le texte qui nous est soumis. Aujourd'hui, elle propose que le contrôleur général soit nommé par décret du Président de la République - tout de même ! - pris après avis consultatif - quelle modestie, quelle frilosité ! - des commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat.

Nous voici donc transformés en assemblée consultative ! Ce n'est pas très glorieux pour les défenseurs des prérogatives parlementaires.

Cela étant, le Gouvernement propose donc, pour l'heure, que le contrôleur général soit nommé par décret simple, ce qui appelle deux observations.

En premier lieu, cela est en contradiction avec les préconisations de la mission Canivet, qui prévoyait au moins une nomination par décret du Président de la République, sur proposition de la Commission nationale consultative des droits de l'homme : toujours cette tendance, soit dit en passant, à s'adresser à des organismes, aussi vénérables et utiles soient-ils, plutôt qu'au Parlement ! Je le disais ce matin, on ne cesse de se méfier du Parlement. Cela est d'ailleurs également vrai, hélas ! lorsque la gauche est aux responsabilités.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Eh oui, c'est la vérité ! Je suis historien, j'ai donc de la mémoire...

Par conséquent, on a toujours tendance à s'en remettre à d'autres institutions que le Parlement. C'est d'ailleurs une orientation constante sous la Ve République, qui ne fait que se préciser.

Quant à la proposition de loi Hyest-Cabanel, à laquelle nous ne cesserons de nous référer, elle prévoyait au moins une nomination par décret en conseil des ministres.

En second lieu, il faut tout de même se souvenir des promesses du candidat Nicolas Sarkozy, qui souhaitait faire avaliser par le Parlement les nominations des autorités indépendantes. Nous sommes vraiment là au centre du sujet !

Or Mme la garde des sceaux nous a dit qu'il fallait laisser travailler la commission Balladur et ne pas anticiper. Je ne vois pas du tout pourquoi nous serions soumis à une commission nommée. Nous sommes un Parlement élu, au suffrage universel direct pour l'Assemblée nationale, au suffrage universel indirect pour le Sénat.

Nous présenterons donc tout à l'heure une batterie d'amendements portant sur cet article. Nous souhaitons en particulier que le contrôleur général des lieux de privation de liberté soit nommé par décret du Président de la République, après un avis des commissions compétentes des deux assemblées liant ce dernier et pris - tenez-vous bien, mes chers collègues ! - à la majorité des trois cinquièmes de leurs membres. Nous instaurerions alors vraiment une autorité indépendante et digne des fonctions que nous voulons lui confier.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

Après M. Mermaz, je tiens à attirer l'attention de nos collègues sur l'importance de la procédure de nomination du contrôleur général et sur le choix de ce dernier. En effet, tant vaudra cette institution que vaudra le choix du contrôleur général, et particulièrement du premier titulaire de la fonction.

Dans mon intervention à la tribune, j'ai rappelé que, dans le protocole facultatif à la convention des Nations unies que nous devons ratifier, mention était faite des qualités que cette personne devait présenter : il devra s'agir d'une personnalité de haute moralité, ayant une expérience professionnelle reconnue dans le domaine de l'administration de la justice, en particulier en matière de droit pénal et d'administration pénitentiaire ou policière ou dans les divers domaines ayant un rapport avec le traitement des personnes privées de liberté - on pense bien entendu au domaine psychiatrique.

Par conséquent, ce choix est essentiel. Une fois définies les qualités que le contrôleur général doit évidemment présenter, se pose la question des conditions de sa nomination.

Je laisse de côté le débat sur sa nomination par décret en conseil des ministres, qui pose un problème de constitutionnalité au regard de la loi organique.

Je m'en tiendrai à la réflexion suivante : il ne suffit pas de dire que la personnalité nommée présentera toutes les qualités parce qu'elle aura été choisie par l'exécutif ; son autorité sera d'autant plus grande si le Parlement - et plus particulièrement les commissions parlementaires en charge de ces questions - donne un avis favorable. La désignation d'un contrôleur dont la fonction est la défense des droits fondamentaux des personnes privées de liberté requiert le concours du Parlement ou, tout du moins, sa participation aux côtés du Gouvernement.

Nous allons plus loin : s'il s'agit d'un avis de la majorité donné à la majorité, l'autorité du contrôleur sera limitée. Il faut donc associer l'opposition à sa désignation afin que cette dernière fasse l'objet d'un consensus.

C'est la raison pour laquelle nous insistons sur ce point : non seulement les commissions compétentes du Parlement doivent être consultées, mais leur avis doit également être pris à la majorité des trois cinquièmes.

Ce point revêt une importance considérable, car, je le répète, tant vaudra le contrôleur que vaudront sa personnalité et les conditions de sa nomination.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 61, présenté par MM. C. Gautier, Badinter, Mermaz, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du premier alinéa de cet article, après les mots :

par décret

insérer les mots :

du Président de la République, après avis des commissions compétentes de l'Assemblée Nationale et du Sénat pris à la majorité des 3/5 de leurs membres,

La parole est à M. Charles Gautier.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Gautier

L'autorité que nous avons créée par l'article 1er ne sera reconnue que si elle est indépendante et incontestable. En conséquence, la mention d'une nomination par décret apparaît tout à fait insuffisante.

C'est pourquoi nous proposons que le contrôleur général des lieux de privation de liberté soit nommé par décret du président de la République, après avis des commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat pris à la majorité des trois cinquièmes de leurs membres, comme l'avait annoncé le candidat à la présidence de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 82, présenté par Mme Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du premier alinéa de cet article, après les mots :

par décret

insérer les mots :

du Président de la République, après avis des commissions compétentes du Parlement,

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

L'article 2 instaure un mode de nomination manifestement insatisfaisant : il ne semble pas de nature à garantir l'indépendance dont doit bénéficier l'institution que nous sommes en train de créer.

Le contrôleur général serait nommé par décret simple. Or il doit constituer une autorité, certes indépendante, mais aussi incontestable. La proposition de loi de 2001, telle qu'elle avait été déposée sur le bureau du Sénat, prévoyait déjà une nomination par décret du Président de la République.

Les associations, dans leur ensemble, souhaitent que le contrôleur soit nommé, directement ou indirectement, par le Parlement. Un tel dispositif existe d'ailleurs dans d'autres pays qui ont déjà mis en place un mécanisme national de prévention.

Nous aurions aussi pu imaginer que le contrôleur général soit choisi sur une liste préétablie par la Commission nationale consultative des droits de l'homme.

Néanmoins, comme la nomination directe par le Parlement est, semble-t-il, impossible, nous avons fait le choix de prévoir que le contrôleur général soit nommé par décret du Président de la République - c'est un minimum ! -, mais pris après avis des commissions compétentes des deux assemblées parlementaires.

Ce choix me paraît être un compromis satisfaisant du point de vue à la fois de l'indépendance nécessaire du contrôleur et de ses compétences.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 2, présenté par M. Hyest au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du premier alinéa de cet article, après le mot :

décret

insérer les mots :

du Président de la République

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Cette précision est destinée à affirmer l'importance de la mission reconnue au contrôleur général ; elle figure d'ailleurs dans le statut de plusieurs autorités administratives indépendantes, comme la HALDE et le CSA.

J'indique à M. Mermaz que nous avions bien pensé à un décret en conseil des ministres ; c'est ce que nous avions prévu dans la proposition de loi de 2001. Mais cela nécessiterait un renvoi à la loi organique : la loi organique détermine les nominations qui sont faites en conseil des ministres et renvoie à un décret pour la fixation de la liste. On ne peut donc pas prévoir dans le présent texte - et Robert Badinter ne me démentira pas - que le décret sera pris en conseil des ministres.

Je rappelle que la nomination sera contresignée par au moins cinq ministres.

C'est tout de même le Président de la république qui nomme à tous les emplois civils et militaires de l'État ! La mission du contrôleur général est tellement importante que celui-ci ne peut être nommé que par décret du Président de la République, et non par un décret simple.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 50, présenté par M. Détraigne et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du premier alinéa de cet article, après le mot :

décret

insérer les mots :

en Conseil des ministres

La parole est à M. Yves Détraigne.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps les amendements n° 50 et 51 rectifié.

Ces deux amendements ont pour objet de conforter le rôle, la place et le pouvoir du contrôleur général, car il est important - cela a été souligné à de nombreuses reprises - que le contrôleur général ait une autorité morale et une indépendance qui soient incontestables. Il est donc nécessaire que la procédure de nomination soit mieux encadrée que celle qui est prévue dans le projet de loi.

Avec l'amendement n° 50, je proposais que le contrôleur général soit nommé par décret en conseil des ministres. Mais j'ai bien entendu les propos de M. le rapporteur. Je retire donc cet amendement au profit de celui que M. Hyest vient de nous présenter. L'idée est que la nomination du contrôleur général fasse l'objet non pas d'un décret simple, mais d'un décret du Président de la République.

L'amendement n° 51 tend à prévoir que la nomination ait lieu après avis des commissions compétentes de chaque assemblée. Cette proposition s'inscrit dans la ligne de ce que souhaite le Président de la République et des réflexions engagées par la commission présidée par M. Balladur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 50 est retiré.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 3 est présenté par M. Hyest, au nom de la commission.

L'amendement n° 51 rectifié est présenté par M. Détraigne et les membres du groupe Union centriste - UDF.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Dans la première phrase du premier alinéa de cet article, avant les mots :

pour une durée

insérer les mots :

, après avis de la commission compétente de chaque assemblée,

La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 3.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Cet amendement vise à associer le Parlement, sous la forme d'un avis consultatif des commissions des lois de l'Assemblée nationale et du Sénat, à la procédure de nomination du contrôleur général.

Cette disposition - qui est parfaitement conforme à la Constitution actuelle - s'inscrit dans l'esprit des positions défendues par le Président de la République. Il y a d'ailleurs des précédents : le président de la Commission de régulation de l'énergie est nommé après avis des commissions du Parlement compétentes en matière d'énergie.

Si, demain, compte tenu des engagements du président de la République, la Constitution évolue pour associer encore plus complètement le Parlement aux nominations les plus importantes, nous aurons tout loisir de modifier un certain nombre de textes concernant les nominations.

Toutefois, nous tenons, sans attendre, à donner notre avis sur la nomination de ce personnage très important dont l'autorité, la compétence et le magistère moral doivent faire l'objet d'un relatif consensus.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Détraigne, pour présenter l'amendement n° 51 rectifié ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Je le retire au profit de l'amendement de la commission, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 51 rectifié est retiré.

L'amendement n° 19, présenté par MM. Lecerf et Portelli, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du premier alinéa de cet article avant les mots :

pour une durée

insérer les mots :

parmi quatre candidats proposés pour deux d'entre eux par la commission des lois de l'Assemblée nationale et pour les deux autres par la commission des lois du Sénat

La parole est à M. Jean-René Lecerf.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

et par la commission des lois : il s'agit d'associer le Parlement à la désignation du contrôleur général des lieux de privation de liberté.

L'amendement tend à prévoir que la commission des lois du Sénat et celle de l'Assemblée nationale proposent chacune deux candidats - il est quelquefois plus facile d'en proposer deux plutôt qu'un seul, pour des raisons aisées à deviner - parmi lesquels le Président de la République effectuerait son choix.

Toutefois, pour montrer à Mme la garde des sceaux ma bonne volonté - dont elle ne doute d'ailleurs pas ! -, je suis tout à fait prêt à retirer cet amendement et à voter contre les autres, à la condition qu'elle accepte au moins l'un d'entre eux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

L'amendement n° 61 tend à compléter celui de la commission en prévoyant que l'avis des commissions sur la nomination du contrôleur général est rendu à la majorité des deux tiers. Il me paraît préférable de nous en tenir à la proposition de la commission, qui peut se prévaloir d'un précédent...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Je n'ai pas à me justifier, monsieur Sueur ! Vous demandez toujours « pourquoi ? » !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Vous connaissez très bien la réponse !

Cette solution nous paraît préférable parce que demander l'avis des commissions, c'est déjà aller très loin. Je vous garantis que l'avis sera forcément consensuel, sinon nous nous trouverions dans une situation que nous ne souhaitons pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

L'amendement n° 82 est satisfait par les amendements n° 2 et 3 de la commission.

Quant à l'amendement n° 19, il ouvre une piste de réflexion intéressante sur la procédure de nomination du contrôleur général et constitue une alternative à la formule proposée par l'amendement n° 3 de la commission.

La solution retenue par la commission me paraît préférable, parce qu'elle peut se prévaloir d'un précédent et qu'elle s'inscrit dans le cadre constitutionnel actuel, sans préjuger des éventuelles évolutions qui seront retenues en matière de nomination, notamment dans le cadre de la commission présidée par M. Balladur. Je vous rappelle que ce sont les parlementaires qui réviseront la Constitution !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Il va de soi que si un dispositif encore plus favorable aux droits du Parlement devait être retenu en matière de nomination, il s'appliquerait au contrôleur général.

Je demande donc le retrait de cet amendement au profit de ceux de la commission.

Monsieur le président, afin de simplifier le débat, la commission demande le vote par priorité des amendements n° 2 et 3.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La priorité est ordonnée.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble de ces amendements ?

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Sur l'amendement n° 61, le Gouvernement émet un avis défavorable pour la raison que M. le rapporteur a indiquée...

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Je vais vous la donner !

Le Président de la République a installé le 18 juillet la commission, présidée par M. Balladur, qui est en charge de faire des propositions sur la réforme de nos institutions.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Bret

Il n'y a pas de sénateurs dans cette commission !

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Il s'agira notamment du pouvoir de nomination à de hautes fonctions. Ce pouvoir de nomination s'appliquera au contrôleur général lorsque nous aurons les conclusions de la commission Balladur.

Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements n° °61 et 82.

L'amendement n° 2 prévoit que le contrôleur général est nommé par décret du Président de la République, à l'instar des nominations des hautes autorités. Le Gouvernement émet un avis favorable.

En ce qui concerne l'amendement n° 3, je reprendrai la même argumentation : la commission présidée par Édouard Balladur doit formuler des propositions. Le Gouvernement émet un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Il n'y a pas de sénateur dans cette commission !

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

S'agissant de l'amendement n° 19, pour les mêmes raisons que pour l'amendement n° 3, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Louis Mermaz, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

J'interviendrai sur les amendements n° 2 et 3, car je ne suis pas sûr que les autres amendements seront mis aux voix si ceux-ci sont adoptés.

En vérité, notre débat voit cohabiter deux personnages : M. Hyest « version 2001 » - on ne cesse de le lui rappeler - et M. Balladur qui, depuis qu'il ne s'est pas présenté aux dernières élections, a pris une importance qui doit l'étonner lui-même.

Rires

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Nous avons des responsabilités à prendre et il n'est pas nécessaire de se demander, pendant des mois, ce que pense M. Balladur pour faire notre travail.

Pour ma part, je m'oppose à ces amendements et je voterai l'amendement présenté par M. Charles Gautier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Monsieur Mermaz, chacun n'a que l'importance qu'il se donne...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Vous avez été extrêmement désagréable vis-à-vis de M. Edouard Balladur !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Vous nous dites que l'on est en deçà de la proposition de loi adoptée en 2001. Je vous ai expliqué pourquoi il ne me paraissait pas utile, s'agissant du décret, de préciser « en conseil des ministres ». C'est la seule différence par rapport au texte de 2001 ! Je préfère que le contrôleur général soit nommé par décret du Président de la République ; je pense que tout le monde peut être d'accord sur cette formule.

Mes chers collègues, dans le cadre constitutionnel actuel, et même si le Gouvernement y est défavorable, il est important que nous puissions donner notre avis sur la nomination de cette personnalité, qui doit remplir un certain nombre de conditions. Car le projet de loi instituant un contrôleur général des lieux de privation de libertés sera adopté avant la révision de la Constitution.

D'ailleurs, la semaine dernière, la commission des lois avait adopté cet amendement à l'unanimité. Depuis, vos propositions vont plus loin. Pour ma part, je suggère d'être raisonnable et j'insiste pour que l'amendement n° 3 soit adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le rapporteur, les amendements n° 2 et 3 constituent des avancées qui sont loin d'être négligeables.

Ah ! sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Et puisque nous ne pouvons nous exprimer que sur ces deux amendements, car vous avez demandé leur vote par priorité, monsieur le rapporteur - peut-être auriez-vous pu d'ailleurs vous en dispenser - je dirai que nous regrettons beaucoup que vous ne preniez pas en compte cette idée des trois cinquièmes défendue par Louis Mermaz et Robert Badinter.

De deux choses l'une : ou bien il ne faut pas modifier notre législation en raison de l'existence de la commission Balladur, mais telle n'est pas votre position, monsieur le rapporteur, ou bien il faut progresser, nonobstant cette commission, laquelle vient à peine de commencer à travailler.

Par ailleurs, je tiens à vous dire, madame la ministre, vous qui êtes la gardienne du droit, que je trouve tout de même quelque peu singulier que vous puissiez invoquer devant nous le fait que le Parlement ne pourrait pas légiférer dans ce domaine en raison de l'existence d'une commission.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Je n'ai pas dit cela !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je ne vois vraiment pas sur quel fondement nous limiterions notre pouvoir de légiférer parce qu'il existerait une commission, quel que soit le caractère éminent des membres de celle-ci.

Monsieur le rapporteur, nous regrettons que vous n'acceptiez pas l'avancée que nous suggérons. En effet, comme l'a dit excellemment Robert Badinter, il est évident que nous pourrions prendre en compte dès maintenant une proposition qui avait été formulée par plusieurs candidats, et tout particulièrement par Nicolas Sarkozy, lors de la campagne présidentielle.

Pour que ces autorités très importantes soient reconnues de tous, il est fondamental de faire figurer dans notre droit un nécessaire accord de la majorité et de l'opposition. Mes chers collègues, cette avancée constituerait un gage de consensus et d'adhésion dans le pays.

Nous voterons les deux amendements de la commission, mais nous regrettons le rejet de cette avancée complémentaire, qui aurait constitué un véritable changement dans nos institutions.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Henri de Richemont, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri de Richemont

Je voterai, bien entendu, les amendements n° 2 et 3, mais je me demande à quoi sert notre vote, madame le garde des sceaux, car vous avez dit tout à l'heure que la révision de la Constitution intervenant après la commission Balladur s'appliquera à la nomination du contrôleur général.

Si la commission Balladur propose de nommer les membres des hautes autorités aux trois cinquièmes et que la révision de la Constitution s'applique aux trois cinquièmes, il faudra attendre la révision de la Constitution pour nommer le contrôleur général. Dès lors, à quoi sert de voter ce texte maintenant ?

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

En conséquence, les amendements n° 61 et 82 n'ont plus d'objet.

Je mets aux voix l'amendement n° 3.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

En conséquence, l'amendement n° 19 n'a plus d'objet.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 4 est présenté par M. Hyest au nom de la commission.

L'amendement n° 83 rectifié est présenté par Mme Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après le premier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

Il ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l'occasion des opinions qu'il émet ou des actes qu'il accomplit dans l'exercice de ses fonctions.

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 4.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Cet amendement vise à renforcer la protection du contrôleur général par une disposition qui se retrouve dans le statut de plusieurs autorités administratives indépendantes et qui interdit toute action judiciaire à l'occasion d'opinions ou d'actes accomplis dans l'exercice de la mission. Cette précision nous semble indispensable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour défendre l'amendement n° 83 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Nous regrettons que cet amendement, qui est identique à celui de la commission, laquelle s'en est inspirée, soit appelé après l'amendement de la commission. Mais nous ne pouvons que nous féliciter qu'il ait été repris puisque c'est un amendement plus que nécessaire, qui repose sur l'immunité pénale du contrôleur.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Les amendements n° 4 et 83 rectifié visent à renforcer la protection accordée au contrôleur général, à l'instar du statut des autorités indépendantes. Le Gouvernement émet donc un avis favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Je mets aux voix les amendements identiques n° 4 et 83 rectifié.

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 46, présenté par M. Yung est ainsi libellé :

Après le premier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

Il est choisi parmi des personnalités de haute moralité ayant une expérience professionnelle reconnue dans le domaine de l'administration de la justice, en particulier en matière de droit pénal et d'administration pénitentiaire ou policière, ou dans les divers domaines ayant un rapport avec le traitement des personnes privées de liberté.

La parole est à M. Richard Yung.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Nous avons tous souligné l'importance du choix de la personnalité qui occupera la fonction de contrôleur général : celle-ci devra avoir de l'expérience dans le domaine du droit et de l'administration pénitentiaire ; elle devra aussi être une référence morale.

Vous m'objecterez que cela va de soi, que ce n'est pas la peine de l'inscrire dans la loi, que le Gouvernement nommera forcément une personnalité de cette envergure. Je n'en doute pas, mais il est important de le graver dans le marbre de la loi, en tout cas pour les premières nominations. Je pense, par exemple, que le contrôleur des prisons britanniques, prisons que Mme le garde des sceaux a visitées récemment, représente une telle autorité morale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Il est évident que les critères prévus par le protocole facultatif présideront au choix de la personnalité appelée à occuper ces fonctions.

Faut-il néanmoins les inscrire dans la loi ? Les statuts des autorités administratives indépendantes - le Médiateur de la République, le président de la Commission nationale de déontologie de la sécurité, la CNDS, le président de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, la HALDE - ne prévoient pas des éléments qualificatifs concernant les personnalités désignées au sein des autorités indépendantes, car ils sont considérés comme allant de soi.

Il serait donc singulier de le préciser pour le seul cas du contrôleur général. En outre, la procédure de nomination proposée par la commission dans son amendement permettra au Parlement de s'assurer que ces critères seront effectivement réunis.

Par conséquent, la commission demande le retrait de l'amendement n° 46. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Monsieur le sénateur, le caractère de haute moralité est implicite pour un tel poste, comme il l'est pour toutes les nominations à la discrétion du Gouvernement ou entrant dans le cadre de missions régaliennes.

Par ailleurs, vous limitez l'expérience requise au seul domaine de l'administration pénitentiaire et policière. Toutefois, la mission du contrôleur général dépasse ce cadre. Si je prends l'exemple de la Grande-Bretagne, l'inspectrice en chef des prisons, médecin de formation, était militante au sein d'une association des droits de l'homme. Or, bien que sa mission concerne d'autres domaines, je puis vous dire que, depuis 2001, elle effectue un travail formidable.

C'est la raison pour laquelle nous ne souhaitons pas limiter les domaines de compétences de la personnalité qui sera retenue pour remplir cette mission.

En conséquence, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Oui, monsieur le président, je le maintiens, car les raisons qui ont été avancées tant par M. le rapporteur que par Mme le garde des sceaux ne me semblent pas convaincantes.

M. le rapporteur argue du fait que cette précision serait singulière. Mais, s'agissant d'une nomination de cette importance, pourquoi n'innoverions-nous pas ?

Par ailleurs, cet amendement ne tend pas à limiter l'expérience du contrôleur général à l'administration pénitentiaire puisqu'il vise l'ensemble des domaines ayant un rapport avec le traitement des personnes privées de liberté.

Enfin, m'opposer le fait que cette précision est inutile ne me convainc pas. La Haute Assemblée s'honorerait en intégrant cet alinéa, qui ne fait que préciser des points sur lesquels un consensus s'est dégagé.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 5, présenté par M. Hyest au nom de la commission est ainsi libellé :

Après le mot :

incompatibles

rédiger ainsi la fin du troisième alinéa de cet article :

avec tout autre emploi public, toute activité professionnelle et tout mandat électif.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Le projet de loi a entendu définir un régime d'incompatibilités très complet pour le contrôleur général.

Dans cet esprit, et afin de donner à cette personnalité la possibilité de se consacrer entièrement à sa mission, l'amendement tend à compléter ce régime en prévoyant également une incompatibilité avec « tout autre emploi public ».

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Favorable.

L'amendement est adopté.

L'article 2 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 6, présenté par M. Hyest au nom de la commission est ainsi libellé :

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Aux articles L. 194-1, L. 230-1 et au cinquième alinéa de l'article L. 340 du code électoral, les mots : « et le Défenseur des enfants » sont remplacés par les mots : «, le Défenseur des enfants et le Contrôleur général des lieux de privation de liberté ».

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Il convient de compléter le code électoral. Par parallélisme avec le Médiateur de la République et le Défenseur des enfants, le contrôleur général ne peut être candidat à un mandat de conseiller général, municipal ou régional pendant la durée de ses fonctions, s'il n'exerçait pas l'un de ces mandats antérieurement à sa nomination.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Favorable.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2.

Le contrôleur général des lieux de privation de liberté est assisté de contrôleurs qu'il recrute en raison de leur compétence dans les domaines se rapportant à sa mission.

Les fonctions de contrôleur sont incompatibles avec l'exercice d'activités en relation avec les lieux contrôlés.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Gautier

Le texte que nous examinons constitue une avancée par rapport aux textes proposés précédemment, puisque le contrôleur a dans son champ de compétences non seulement les prisons, mais aussi tous les autres lieux de privation de liberté, même si cette définition nous paraît un peu floue.

Toutefois, le choix du Gouvernement d'étendre à ce point le champ de compétences du contrôleur général n'est pas sans conséquences. Ainsi, ce sont quelque 5 500 lieux de privation de liberté que le contrôleur général devra visiter. Autant dire que son utilité sera relativement nulle s'il n'a pas la possibilité de déléguer certaines de ses compétences.

Le texte prévoit que le contrôleur général puisse se faire assister de contrôleurs. Pourtant, ni le projet de loi ni même son exposé des motifs ne détaillent le nombre, les fonctions et les missions de ces contrôleurs.

Il nous semble important de prévoir un nombre important de contrôleurs. En Grande-Bretagne, au minimum 40 personnes assistent le contrôleur. Ce chiffre nous paraît être un minimum pour les seules prisons, qui sont au nombre de 200, sur les 5 500 lieux concernés.

De même, afin de garantir une aide efficace au contrôleur général, il importe que les contrôleurs puissent être recrutés en fonction de leurs connaissances dans tel ou tel domaine entrant dans le champ de compétences du contrôleur général.

Enfin, il est essentiel que le contrôleur général dispose de tous les moyens nécessaires à la mise en oeuvre de sa tâche. Sans moyens, son existence sera fortuite, et nous n'améliorerons en rien les conditions actuelles.

C'est pourquoi l'article 3 du projet de loi nous semble trop peu précis.

Madame la ministre, pouvez-vous d'ores et déjà nous donner quelques informations, et surtout quelques chiffres en la matière ? Pouvez-vous nous rassurer sur les moyens matériels et humains qui seront mis à la disposition du contrôleur général ? Pouvez-vous nous décrire l'organisation interne de cette nouvelle autorité administrative indépendante ?

Je vous remercie des précisions que vous nous apporterez.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 62, présenté par MM. C. Gautier, Badinter, Mermaz, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :

Après les mots :

est assisté de contrôleurs

Rédiger comme suit la fin du premier alinéa de cet article :

dont le nombre, le statut et les conditions de nomination sont définies par décret en Conseil d'État.

La parole est à M. Charles Gautier.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Gautier

Si nous avons pris acte, avec satisfaction, de l'initiative du Gouvernement d'instituer un contrôleur général pour l'ensemble des lieux de privation de liberté, conformément à l'engagement pris par la France auprès des Nations unies de mettre en place un mécanisme national de prévention des traitements inhumains et dégradants, nous souhaitons que ce contrôle soit effectif.

En effet, la mission du contrôleur général va couvrir environ 5 500 lieux de privation de liberté relevant de la compétence des ministres de la justice, de l'intérieur et de la santé et comprenant 188 établissements pénitentiaires, plus de 200 zones d'attente et locaux de rétention administrative, 4 000 locaux de garde à vue, 1 000 secteurs psychiatriques des centres hospitaliers et 138 locaux d'arrêt des armées.

Compte tenu de la multiplicité des lieux concernés, de leur diversité et de leur spécificité, si l'on veut que le contrôleur général assure pleinement sa mission, il est bien évident qu'il faut lui adjoindre un grand nombre de contrôleurs.

À titre d'exemple, en Grande-Bretagne, où vous vous êtes rendue la semaine dernière, madame la ministre, l'inspectrice en chef des prisons, qui assure les visites pour le seul domaine pénitentiaire, bénéficie d'une équipe de 41 personnes.

Nous considérons donc que l'évaluation des besoins en personnels, ainsi que le statut de ces derniers et les conditions de leur nomination, doivent être définis par décret en Conseil d'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 84, présenté par Mme Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :

Après le mot :

contrôleurs

rédiger comme suit la fin du premier alinéa de cet article :

dont le statut et les conditions de nomination sont définis par décret en Conseil d'État.

La parole est à M. Robert Bret.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Bret

Si l'article 3 prévoit bien que le contrôleur général sera assisté de contrôleurs, les conditions dans lesquelles ces derniers doivent être recrutés ne garantissent pas suffisamment, à nos yeux, la transparence nécessaire. En effet, il est simplement indiqué que le contrôleur général « est assisté de contrôleurs qu'il recrute en raison de leur compétence dans les domaines se rapportant à sa mission ».

Le débat que nous avons eu tout à l'heure à propos du mode de nomination du contrôleur général révèle l'importance de cette question en termes d'indépendance, de transparence, et de compétences. Les contrôleurs doivent, eux aussi, être nommés de la façon la plus transparente possible, en fonction, certes, de leur compétence dans les domaines d'intervention du contrôleur général, mais également de leur expérience professionnelle, car ce seront des hommes de terrain. Il n'est donc pas inconcevable de prévoir qu'ils doivent avoir acquis, outre leurs compétences théoriques, une certaine expérience professionnelle.

Notre souci est tout simplement d'éviter, sur un sujet aussi sérieux que le respect des droits de l'homme dans les lieux de privation de liberté, que l'on ne procède à des nominations de complaisance.

Nous préférons, par conséquent, que le statut et les conditions de nomination des contrôleurs soient strictement définis par décret en Conseil d'État, afin qu'ils soient uniformisés et répondent à des critères déterminés.

Je rappellerai pour mémoire que la proposition de loi que le Sénat avait adoptée en 2001 précisait que le statut et les conditions de nomination des contrôleurs des prisons étaient définis par décret en Conseil d'État. Autrement dit, le projet de loi doit garantir l'indépendance du contrôleur général et préciser ses conditions de nomination. Et il doit en faire autant pour les contrôleurs qui l'assistent.

Monsieur le président, je suis prêt à retirer cet amendement au profit de l'amendement n° 62, qui est plus précis dans la mesure où il pose également la question du nombre de contrôleurs à prévoir aux côtés du contrôleur général pour s'acquitter de cette tâche, qui sera grande.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Je vous renvoie, mes chers collègues, à l'article 11 du projet de loi, dont je rappelle ici les termes : « Les conditions d'application de la présente loi, notamment celles dans lesquelles les contrôleurs mentionnés à l'article 3 sont appelés à participer à la mission du contrôleur général des lieux de privation de liberté, sont précisées par décret en Conseil d'État. »

Le champ de cet article est plus large, puisque le décret ne fixera pas uniquement le nombre, le statut et les conditions de nomination des contrôleurs.

Je vous demande donc, mes chers collègues, de bien vouloir retirer vos amendements ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Je formulerai les mêmes observations.

Seul un décret en Conseil d'État peut fixer le nombre des contrôleurs, ou leur profil.

Comme certains d'entre vous l'ont indiqué ce matin, il faut aussi que nous nous adaptions aux besoins et aux demandes...

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Effectivement !

Ces amendements sont donc satisfaits par l'article 11 du projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Bret

Non, monsieur le président, je le retire au profit de l'amendement n° 62.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 84 est retiré.

La parole est à M. Louis Mermaz, pour explication de vote sur l'amendement n° 62.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Monsieur le rapporteur, je ne suis pas de votre avis ! L'article 11 du projet de loi dispose : « Les conditions d'application de la présente loi, notamment celles dans lesquelles les contrôleurs mentionnés à l'article 3 sont appelés à participer à la mission du contrôleur général des lieux de privation de liberté, sont précisées par décret en Conseil d'État. »

Nous ne parlons pas tout à fait de la même chose ! Ce qui nous préoccupe, c'est avant tout la nomination de ces contrôleurs ; nous verrons ensuite de quelle manière ils exerceront leurs fonctions.

Comme M. Gautier l'a souligné tout à l'heure, ce sont quelque 5 500 lieux de privation de liberté qui sont concernés. Il est donc évident que le nombre des contrôleurs est un point essentiel si l'on veut que le contrôleur général puisse vraiment exercer ses prérogatives. À cet égard, il serait d'ailleurs souhaitable que Mme le garde des sceaux précise que les contrôleurs nommés par décret en Conseil d'État auront des prérogatives semblables à celles du contrôleur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Ils doivent pouvoir exercer un droit de visite inopinée s'ils le jugent nécessaire, se faire remettre les documents indispensables, rencontrer les personnels ou les détenus s'ils le souhaitent. Bref, ils doivent avoir les mêmes prérogatives que celles dont jouit le contrôleur général ; sinon, cette institution serait tout à fait surréaliste.

Comment un contrôleur général pourrait-il faire face à des tâches aussi multiples et se rendre, en l'espace de quelques mois, voire de quelques années, dans 5 500 lieux de détention ?

De même, il est essentiel de préciser dans ce décret en Conseil d'État - et le Gouvernement devrait s'en préoccuper -que ces contrôleurs seront spécialisés. Car on ne demande pas les mêmes connaissances lorsqu'il s'agit de visiter une zone d'attente, un centre de rétention, un lieu de garde à vue dans un commissariat ou une gendarmerie, un centre de dépôt du palais de justice, une maison d'arrêt ou un établissement pour peine. Il faut examiner cette question si l'on veut que cette institution fonctionne.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

L'article 3 du projet de loi dispose : « Le contrôleur général des lieux de privation de liberté est assisté de contrôleurs qu'il recrute en raison de leur compétence dans les domaines se rapportant à sa mission. »

Et l'article 11 prévoit : « Les conditions d'application de la présente loi, notamment celles dans lesquelles les contrôleurs mentionnés à l'article 3 sont appelés à participer à la mission du contrôleur général des lieux de privation de liberté, sont précisées par décret en Conseil d'État. »

Interviennent donc, dans un premier temps, le recrutement et la mission puis, dans un second temps, la déclinaison en décret en Conseil d'État.

Le nombre de contrôleurs ne peut pas être fixé par un décret en Conseil d'État. En effet, une augmentation du nombre de lieux de privation de liberté devra s'accompagner d'un accroissement des effectifs de contrôleurs.

Les contrôleurs interviendront par délégation du contrôleur général. Le Sénat va, d'ailleurs, examiner un amendement sur ce sujet.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 28 rectifié, présenté par Mme Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Les contrôleurs sont placés sous la seule autorité du contrôleur général des lieux de privation de liberté.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Cet amendement porte sur l'indépendance des contrôleurs et sur la responsabilité hiérarchique.

Il a été rectifié pour tenir compte des travaux de la commission, au cours desquels il a été décidé de parler non pas de hiérarchie, mais d'autorité.

Afin de garantir la totale indépendance des contrôleurs des lieux de privation de liberté, il convenait de mentionner que les contrôleurs relevaient de la seule autorité du contrôleur général.

L'exclusivité du contrôle hiérarchique du contrôleur général est une garantie qui doit être inscrite dans la loi. Elle ne doit pas relever du pouvoir exécutif, qui en déterminera les contours par voie réglementaire.

La disposition prévue dans cet amendement peut sembler superfétatoire, mais il convient malgré tout de l'inscrire dans la loi. Elle apporte, en effet, la garantie de l'indépendance des contrôleurs au regard de tout autre autorité, notamment pénitentiaire, avec laquelle ils peuvent, en raison de leurs compétences spécifiques, entretenir des relations, si ce n'est amicales, à tout le moins professionnelles. Or, l'autorité doit être exercée par le contrôleur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

La commission considère que cette précision est utile. Les contrôleurs sont placés sous la seule autorité du contrôleur général, qui est responsable de leur recrutement.

J'ajoute, monsieur Mermaz, qu'un amendement qui a été déposé à l'article 6 déterminera les conditions de délégation de pouvoir par le contrôleur général. Ainsi, la boucle sera bouclée. Ces précisions devraient être de nature à répondre à vos préoccupations.

M. Louis Mermaz fait un signe d'assentiment.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

En revanche, le nombre de contrôleurs étant appelé à évoluer, il ne peut être fixé par un décret en Conseil d'État.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Le Gouvernement est favorable à cet amendement. Il convient, en effet, que les contrôleurs soient placés sous l'autorité exclusive du contrôleur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

Madame le garde des sceaux, le nombre des contrôleurs constitue une donnée essentielle. Je pense que chacun de nous souhaiterait avoir au moins une indication à ce sujet.

Le nombre de lieux à vérifier est d'environ 5 700 : pourriez-vous nous dire de quel ordre sera celui des contrôleurs ? Seront-ils une vingtaine, une trentaine, une quarantaine, comme en Grande-Bretagne, une cinquantaine, voire une soixantaine ? Sans moyens, cette institution ne serait qu'un faux-semblant. Ce n'est certainement pas votre intention et ce ne serait pas concevable.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 29, présenté par Mme Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Les contrôleurs sont indépendants et exercent leur mission dans les conditions fixées par le troisième alinéa de l'article 2.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Cet amendement porte également sur l'indépendance des contrôleurs.

Nous avons amplement évoqué leur nombre, leur indépendance et les moyens de travail dont ils disposeront.

Les contrôleurs exercent des missions dans un cadre qui n'est pas parfaitement défini dans le projet de loi. C'est pourquoi je m'interroge : pourront-ils exercer un autre emploi ? Seront-ils fonctionnaires ou contractuels ? Seront-ils missionnés pour des visites ponctuelles ou en qualité d'assistants permanents ? Ce sont autant de questions qui sont encore sans réponse.

Il subsiste un certain flou, qui sera peut-être levé par décret. L'article 3 précise simplement que les contrôleurs ne devront pas exercer d'activité en relation avec les lieux contrôlés. Cette garantie n'est pas suffisante. L'indépendance des contrôleurs doit être inscrite dans la loi. L'interdiction d'exercer une autre activité professionnelle ou un mandat électif qui est imposée au contrôleur général, dans les conditions fixées par le troisième alinéa de l'article 2, doit également s'appliquer aux contrôleurs.

J'ajoute que cet amendement est compatible avec l'amendement n° 5, qui a été défendu par M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

L'amendement prévoit que les contrôleurs sont indépendants et, par le renvoi au troisième alinéa de l'article 2, que leurs fonctions sont incompatibles avec toute autre activité professionnelle ou tout mandat électif.

Il est évident, en premier lieu, que les contrôleurs présentent les mêmes garanties d'indépendance que le contrôleur général. Faut-il pour autant leur appliquer un régime d'incompatibilité aussi rigoureux que celui qui s'attache au contrôleur général ?

L'article 3 dispose seulement que les fonctions de contrôleurs sont incompatibles avec l'exercice d'activités en relation avec les lieux contrôlés.

Prévoir un régime d'incompatibilité plus complet aurait sans doute pour effet de raréfier le vivier des candidats contrôleurs. Certaines activités peuvent ne pas être incompatibles avec la mission de contrôleur. En outre, le contrôleur n'est pas obligé d'exercer sa mission à temps plein. D'autres corps de métiers, les médecins par exemple, pourraient être intéressés. Vouloir trop encadrer le statut des contrôleurs irait, me semble-t-il, à l'encontre de l'objectif qui est recherché.

C'est pourquoi la commission souhaite le retrait de cet amendement. A défaut, elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 3 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Voici le résultat du scrutin pour l'élection de deux délégués suppléants du Sénat représentant la France à l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à l'assemblée de l'Union de l'Europe occidentale.

Nombre de votants : 133

Majorité absolue des votants : 67

Bulletins blancs ou nuls : 0

Suffrages exprimés : 133

Ont obtenu :

- M. Laurent Béteille : 133 voix

- M. Roland Ries : 122 voix

MM. Laurent Béteille et Roland Ries ayant obtenu la majorité absolue des suffrages des votants, je les proclame délégués suppléants du Sénat représentant la France à l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à l'assemblée de l'Union de l'Europe occidentale.

Applaudissements

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Nous reprenons la discussion du projet de loi instituant un contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 4.

Le contrôleur général des lieux de privation de liberté et ses collaborateurs sont astreints au secret professionnel pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont pu avoir connaissance en raison de leurs fonctions, sous réserve des éléments nécessaires à l'établissement des rapports, recommandations et avis prévus aux articles 8 et 9.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 86, présenté par Mme Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :

Rédiger ainsi le début de cet article :

Le contrôleur général des lieux de privation de liberté, ses collaborateurs et les contrôleurs sont astreints

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Il s'agit d'un amendement de précision.

L'article 4 dispose que le contrôleur général et ses collaborateurs sont astreints au secret professionnel. En revanche, il est muet s'agissant des contrôleurs. Or nous considérons que les contrôleurs doivent, comme le contrôleur général, y être soumis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Cette précision n'est pas indispensable, car les contrôleurs sont bien entendu des collaborateurs du contrôleur général.

C'est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement. A défaut, elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice

Le Gouvernement partage l'avis de la commission.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 7 est présenté par M. Hyest, au nom de la commission.

L'amendement n° 87 est présenté par Mme Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

En vue d'assurer le respect des dispositions relatives au secret professionnel, il veille à ce qu'aucune mention permettant l'identification des personnes dont le nom lui aurait été révélé ne soit faite dans les documents publiés sous son autorité.

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 7.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Cet amendement tend à apporter une précision qui figure dans plusieurs statuts d'autorités administratives indépendantes.

Pour garantir le secret professionnel auquel le contrôleur général est astreint, la commission propose d'interdire toute mention permettant l'identification du nom d'une personne qui lui aurait été révélé dans le cadre des ses pouvoirs d'investigation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 87.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Nous considérons, avec M. le rapporteur, que la confidentialité est indispensable. Il s'agit en outre d'une exigence internationale puisque l'alinéa 2. de l'article 21 du protocole facultatif à la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants dispose que : « Les renseignements confidentiels recueillis par le mécanisme national de prévention seront protégés. Aucune donnée personnelle ne sera publiée sans le consentement exprès de la personne concernée ».

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

Je suis favorable à cet amendement. Toutefois, je m'interroge : cette disposition restera-t-elle applicable si le contrôleur général fait une dénonciation au parquet en vertu de l'article 40 du code de procédure pénale ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

J'invite M. Charasse à bien vouloir rester parmi nous, puisque le Sénat va examiner un amendement qui répond à sa préoccupation !

Les amendements sont adoptés.

L'article 4 est adopté.

Toute personne physique ainsi que toute personne morale s'étant donné pour objet le respect des droits fondamentaux peut porter à la connaissance du contrôleur général des lieux de privation de liberté des faits ou situations susceptibles de relever de sa compétence.

Le contrôleur général des lieux de privation de liberté peut être saisi par le Premier ministre et les membres du Gouvernement et du Parlement. Il peut aussi se saisir de sa propre initiative.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Je tiens à saluer la rédaction du premier alinéa de l'article 5, dont je me permets de vous rappeler les termes : « Toute personne physique ainsi que toute personne morale s'étant donnée pour objet le respect des droits fondamentaux peut porter à la connaissance du contrôleur général des lieux de privation de liberté des faits ou situations susceptibles de relever de sa compétence. »

Cette rédaction large va dans le bon sens. Elle permettra au contrôleur général de fonder la haute moralité que nous évoquions voilà un instant.

La parole est difficilement libre dans les prisons. Les victimes et les témoins de faits laissant présumer l'existence d'infractions pénales ou de fautes disciplinaires ont beaucoup de difficultés à se faire entendre. La crainte d'une sanction ou d'un préjudice n'aide pas à la liberté de la parole.

Par ailleurs, les autorités de contrôle existantes - la Commission nationale de déontologie de la sécurité, la CNDS, le Médiateur de la République, la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, la HALDE - ne peuvent être saisies que par l'intermédiaire de parlementaires.

Nous allons donc dans le bon sens, cette saisine directe et confidentielle étant certainement la solution la plus appropriée. Il serait bon, me semble-t-il, que la personne privée de liberté soit informée, par une autorité quelconque, au moment où elle pénètre dans le lieu privatif de liberté, de son droit à s'exprimer et à saisir le contrôleur général. Peut-être même faudrait-il prévoir - mais cela ne relève pas du domaine de la loi - l'instauration, dans un tel lieu, de boîtes aux lettres confidentielles permettant aux personnes qui le souhaitent de saisir le contrôleur général, tout en conservant leur anonymat.

Nous saluons aussi - nous y reviendrons - la proposition de prévoir sa saisine par d'autres autorités telles que le Médiateur de la République, le Défenseur des enfants, le président de la CNDS, la Commission nationale de déontologie de la sécurité, et celui de la HALDE, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 88, présenté par Mme Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa de cet article, remplacer les mots :

ainsi que toute personne morale s'étant donnée pour objet le respect des droits fondamentaux

par les mots :

ou morale

La parole est à M. Robert Bret.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Bret

Nous soutiendrons l'amendement n° 8 qui a été déposé par la commission des lois, car il est destiné à élargir les possibilités de saisine du contrôleur général aux autorités administratives indépendantes que sont le Médiateur de la République, le Défenseur des enfants, le président de la CNDS et celui de la HALDE.

Une telle disposition ne pourra, en effet, que rendre plus fructueuse la collaboration entre des organes dont le champ d'activité est différent, mais qui sont parfois confrontés à des faits identiques.

Cependant, nous souhaitons que le champ d'application du premier alinéa de l'article 5, qui concerne la possibilité de porter à la connaissance du contrôleur général des faits ou des situations susceptibles de relever de sa compétence, soit aussi large que nécessaire.

Nous proposons donc de supprimer la précision « s'étant donnée pour objet le respect des droits fondamentaux », afin d'en rester à la formulation « toute personne physique ou morale ».

Certes, nous l'avons bien entendu, la commission des lois a indiqué que cette formulation devait être entendue au sens large, puisqu'elle inclut de très nombreuses associations, notamment les barreaux. Il paraît également évident que, en pratique, les organisations qui oeuvrent dans le domaine des droits de l'homme, au sens où on l'entend communément, seront certainement, en raison même de leur objet, les plus promptes à informer le contrôleur général.

Mais nous voulons exprimer notre inquiétude, comme l'a fait la CNCDH, la Commission nationale consultative des droits de l'homme quand elle a observé que la rédaction de ce premier alinéa pouvait sembler « maladroite ». Il est, en effet, fait mention de « toute personne physique », sans aucune condition, alors qu'il est prévu que les personnes morales doivent s'être « données pour objet le respect des droits fondamentaux ». Une telle formulation semble exclure certaines personnes, en particulier les syndicats. Leurs responsables ne pourront intervenir qu'à titre individuel, en tant que personnes physiques, alors qu'il serait plus logique qu'ils le fassent au nom de leur organisation.

Comme la CNCDH, nous proposons en conséquence de supprimer la référence au respect des droits fondamentaux, à l'instar de ce qui est prévu pour la CNDS.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Comme l'a noté M. Bret, la notion de « personne morale s'étant donnée pour objet le respect des droits fondamentaux » apparaît d'ores et déjà très souple et susceptible d'englober un grand nombre d'organismes, allant des associations de défense des droits de l'homme aux barreaux.

Au demeurant, que je sache, les syndicats défendent aussi les droits fondamentaux. On ne pourra donc pas leur objecter cet alinéa.

En outre, une association a toujours un président. En tant que personne physique, celui-ci pourra saisir le contrôleur général.

Selon moi, la rédaction retenue pour cet article est tout à fait satisfaisante, dans la mesure où elle couvre un champ très large. Elle me semble suffisante pour permettre la communication des informations au contrôleur général.

Par conséquent, je vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer cet amendement.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

La position du Gouvernement est identique à celle qui vient d'être exprimée par M. le rapporteur. Je demande donc, moi aussi, le retrait de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Bret

J'aurais souhaité, madame la garde des sceaux, que vous vous engagiez de manière plus précise, comme l'a fait M. le rapporteur. Si les organisations syndicales, en la personne de leur secrétaire général ou d'un autre responsable, sont vraiment concernées par les dispositions prévues dans cet article, je ne verrai pas d'inconvénient à retirer cet amendement.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

La rédaction de cet article vise à permettre au plus grand nombre de réclamations de voir le jour. Les termes « toute personne physique » concernent la personne détenue, retenue ou hospitalisée d'office. Quant à l'expression « toute personne morale s'étant donnée pour objet le respect des droits fondamentaux », elle vise effectivement à restreindre le nombre de personnes morales concernées.

Un syndicat, bien entendu, est une personne morale qui défend des droits fondamentaux. Ce texte ne vise pas à les restreindre, bien au contraire. Simplement, les personnes morales doivent avoir un lien avec le respect des droits fondamentaux.

Encore une fois, comme l'a indiqué M. le rapporteur, une association dont l'objet n'est pas lié au respect des droits fondamentaux peut tout à fait saisir le contrôleur général en tant que personne physique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Après les précisions qui viennent de vous être apportées, retirez-vous votre amendement, monsieur Bret ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 88 est retiré.

L'amendement n° 30 rectifié, présenté par Mme Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller est ainsi libellé :

Après le premier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

Aucun contrôle ni aucune restriction ne peut être exercé par les autorités responsables des lieux de privation de liberté sur les correspondances que les personnes privées de liberté adressent au contrôleur général des lieux de privation de liberté.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Cet amendement concerne le contrôle exercé sur la correspondance des personnes privées de liberté. En effet, l'institution d'un contrôleur général des prisons ne sert à rien si ces personnes ne peuvent le saisir par voie écrite.

Les chances qu'un contrôleur s'entretienne avec une personne qui en a besoin semblent infimes : alors que l'on dénombre 5 500 lieux de privation de liberté, le nombre de contrôleurs est encore inconnu à ce jour. Dans ces conditions, comment s'assurer qu'une personne pourra saisir le contrôleur général ou s'entretenir avec lui, si ce n'est en préservant la correspondance qu'elle lui destine ?

Il convient de garantir que toute personne pourra, dans le cadre de sa privation de liberté, saisir par écrit le contrôleur général, et qu'aucun contrôle ne sera exercé sur sa correspondance.

Cette exigence découle non seulement de la logique, mais également des prescriptions internationales en matière de correspondance. En effet, l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantit à toute personne privée de liberté, notamment les détenus, la possibilité de maintenir un contact avec l'extérieur et le respect de leur correspondance.

Le contact avec l'extérieur est souvent la seule satisfaction dont une personne privée de liberté peut encore jouir. C'est une possibilité importante, surtout lorsqu'il s'agit de faire connaître les conditions, quelquefois inhumaines et dégradantes, dans lesquelles elle se trouve. Il est donc fondamental qu'une telle liberté soit explicitement préservée.

En conséquence, cet amendement prévoit qu'« aucun contrôle ni aucune restriction ne peut être exercé par les autorités responsables des lieux de privation de liberté sur les correspondances que les personnes privées de liberté adressent au contrôleur général des lieux de privation de liberté ».

C'est, d'ailleurs, déjà le cas lorsque les détenus s'adressent aux parlementaires. Il ne semble donc pas possible de prévoir moins pour la saisine du contrôleur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

La commission estime que la mesure proposée n'appelle aucune objection. Elle présente, cependant, un caractère réglementaire et doit prendre la forme d'un arrêté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Il est évident - Mme le garde des sceaux le confirmera - que cet arrêté complètera la liste des autorités avec lesquelles le détenu, ou celui qui est privé de liberté, peut correspondre sans que l'administration pénitentiaire exerce un contrôle.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, dont les dispositions ne sont pas d'ordre législatif.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Cette question renvoie à l'article R.40 du code de procédure pénale. Comme nous l'avons prévu pour la HALDE, nous ferons en sorte que les personnes privées de liberté puissent correspondre librement avec le contrôleur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 30 rectifié est-il maintenu, madame Boumediene-Thiery ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Puisque vous apporterez une garantie sur ce sujet par décret, madame la garde des sceaux, je retire cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Cela ira encore plus vite, puisque ce sera un arrêté ! Il n'y aura pas besoin de passer par toute la machinerie habituelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 30 rectifié est retiré.

L'amendement n° 8, présenté par M. Hyest au nom de la commission est ainsi libellé :

Compléter le dernier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Il peut en outre être saisi par le Médiateur de la République, le Défenseur des enfants, le président de la Commission nationale de la déontologie de la sécurité et le président de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Le contrôleur général pourra, aux termes du projet de loi, être saisi par le Premier ministre et les membres du Gouvernement et du Parlement. Par ailleurs, il pourra s'autosaisir.

Comme M. Bret l'a souligné, il serait souhaitable d'ouvrir cette possibilité de saisine au Médiateur de la République, au Défenseur des enfants, au président de la CNDS et au président de la HALDE.

La commission des lois est donc heureuse de soumettre à votre approbation, mesdames, messieurs les sénateurs, cet amendement, qui a été défendu par anticipation sur toutes les travées de l'hémicycle.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Favorable.

L'amendement est adopté.

L'article 5 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 9, présenté par M. Hyest au nom de la commission est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans la première phrase du quatrième alinéa de l'article 4 de la loi n° 2000-494 du 6 juin 2000 portant création d'une commission nationale de déontologie de la sécurité, après les mots : « président de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité » sont insérés les mots : «, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté ».

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Cet amendement est en cohérence avec l'amendement n°8, qui prévoit la saisine du contrôleur général par le président de la CNDS. Il est logique d'instaurer une réciprocité.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Favorable.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.

Les deux amendements suivants sont présentés par M. Détraigne et les membres du groupe Union centriste - UDF.

L'amendement n° 56 est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 1er de la loi n° 2000-196 du 6 mars 2000 instituant un Défenseur des enfants est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le contrôleur général des lieux de privation de liberté peut saisir le Défenseur des enfants si, au cours de ses visites, il a constaté des faits qu'il estime contraires aux droits de l'enfant. »

L'amendement n° 57 est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 4 de la loi n°2004-1486 du 30 décembre 2004 portant création de la haute autorité de lutte contre les discriminations est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le contrôleur général des lieux de privation de liberté peut saisir la Haute autorité lorsqu'il constate, à l'occasion de ses visites, des faits susceptibles de constituer des discriminations. »

La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter ces deux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Ces amendements procèdent de la même logique que celle qui a prévalu pour la rédaction de l'amendement n° 9.

L'amendement n° 56 vise à prévoir que le contrôleur général de lieux privatifs de liberté puisse saisir le Défenseur des enfants.

Quant à l'amendement n° 57, il tend à ce que le contrôleur général puisse saisir la Haute autorité de lutte contre les discriminations.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

La commission a prévu la possibilité, pour le Défenseur des enfants et pour le président de la HALDE, de saisir le contrôleur général. Les amendements qui prévoient la réciproque ne sont pas indispensables, puisque toute personne peut le saisir directement. Par conséquent, il n'est pas besoin de prévoir une saisine indirecte !

La commission demande donc le retrait de ces deux amendements, qui lui paraissent superflus.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Il partage l'avis de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Les amendements n° 56 et 57 sont-ils maintenus, monsieur Détraigne ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Il s'agit de savoir si le contrôleur général des lieux privatifs de liberté est une personne physique ou une personne morale dans l'exercice de ses fonctions.

Monsieur le rapporteur, le texte que vous venez d'évoquer concerne-t-il toute personne, qu'elle soit physique ou morale ?

M. le rapporteur acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Tel semble être le cas. Par conséquent, ces amendements deviennent redondants et je les retire.

Le contrôleur général peut visiter à tout moment, sur le territoire de la République, tout lieu où des personnes sont privées de leur liberté par décision d'une autorité publique.

Avant toute visite, le contrôleur général informe les autorités responsables du lieu de privation de liberté. Toutefois, il peut décider de procéder à une visite sans préavis lorsque des circonstances particulières l'exigent.

Ces autorités ne peuvent s'opposer à la visite du contrôleur général que pour des motifs graves liés à la défense nationale, à la sécurité publique, à des catastrophes naturelles ou à des troubles sérieux dans l'établissement où la visite doit avoir lieu. Elles proposent alors son report.

Le contrôleur général reçoit des autorités responsables du lieu de privation de liberté toute information ou pièce utile à l'exercice de sa mission. Lors des visites, il peut s'entretenir, dans des conditions assurant la confidentialité, avec toute personne dont le concours lui paraît nécessaire.

Le caractère secret des informations et pièces dont le contrôleur général demande communication ne peut lui être opposé, sauf si leur divulgation est susceptible de porter atteinte au secret de la défense nationale, à la sûreté de l'État, à la sécurité des lieux de privation de liberté, au secret de l'enquête et de l'instruction, au secret médical ou au secret professionnel applicable aux relations entre un avocat et son client.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Voilà un article qui présente de nombreuses restrictions mentales et vise à « emmailloter » le contrôleur général. Comme un quotidien du soir l'évoquait hier, il s'agit de « la mise en place d'un système de contrôle rigoureux du contrôleur ».

Selon les termes de l'article 6, « le contrôleur général peut visiter à tout moment, sur le territoire de la République, tout lieu où des personnes sont privées de leur liberté par décision d'une autorité publique. »

Nous souhaiterions - nous le proposerons, d'ailleurs, par voie d'amendement - que soient également visés les lieux de détention et d'enfermement placés à l'étranger sous autorité civile ou militaire française.

Le deuxième alinéa de l'article 6 est un petit chef-d'oeuvre linguistique : « Avant toute visite, le contrôleur général informe les autorités responsables du lieu de privation de liberté. Toutefois, il peut décider de procéder à une visite sans préavis lorsque des circonstances particulières l'exigent. » Pourquoi pas ?

Nous sommes plusieurs, sénateurs ou députés, à nous être rendus dans des prisons, qu'il s'agisse de maisons d'arrêt ou de centrales où l'on purge de longues peines. Il nous arrivait parfois d'avertir la direction de ces établissements - elle le comprenait fort bien - de notre visite qu'à quelques kilomètres seulement !

En revanche, je me souviens d'une délégation sénatoriale - que je ne nommerai pas - qui avait averti huit jours avant sa venue la direction de l'établissement qu'elle s'apprêtait à visiter. Les détenus qui y purgeaient leur peine nous avaient dit, à nous les députés - je siégeais alors à l'Assemblée nationale - qui venions visiter l'établissement quelque temps après, sans avoir averti de notre arrivée, qu'ils avaient été invités à fourbir, nettoyer et récurer leur prison dans la perspective de cette visite sénatoriale annoncée !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Cela peut vous sembler anecdotique, mais il faut avoir la possibilité de venir inopinément pour apprécier la réalité des choses. Si, dans le cadre de sa mission, le contrôleur général veut saisir les choses sur le vif, il vaut mieux qu'il n'avertisse pas de ses visites. Au contraire, s'il veut traiter sur le fond un certain nombre de questions, il vaut mieux alors qu'il prévienne. Enfin, s'il veut s'assurer que les recommandations qu'il a faites au Gouvernement ont été suivies d'effet, il a intérêt, là encore, à prévenir qu'il réitérera ses visites.

Le troisième alinéa de l'article 6 dispose : « Ces autorités ne peuvent s'opposer à la visite du contrôleur général » - cette rédaction est satisfaisante parce qu'elle est conforme au protocole que la France vient de signer - « que pour des motifs graves » - cela se gâte ! - « liés à la défense nationale, à la sécurité publique, à des catastrophes naturelles ou à des troubles sérieux dans l'établissement où la visite doit avoir lieu. » - il ne reste plus qu'à s'incliner !

M. Robert Bret rit.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Cela est tout à fait contraire au texte de la convention facultative à laquelle nous avons souscrit.

Le quatrième alinéa prévoit : « Le contrôleur général reçoit des autorités responsables du lieu de privation de liberté toute information ou pièce utile à l'exercice de sa mission. Lors des visites, il peut s'entretenir, dans des conditions assurant la confidentialité, avec toute personne dont le concours lui paraît nécessaire. » Nous n'avons rien à objecter, sinon qu'il faudra veiller à préciser que par « toute personne », l'on entend aussi bien un détenu, un membre du personnel pénitentiaire ou des intervenants extérieurs - qu'il s'agisse d'éducateurs ou de travailleurs sociaux. Cette précision serait la bienvenue.

Le cinquième alinéa dispose : « Le caractère secret des informations et pièces dont le contrôleur général demande communication ne peut lui être opposé, » - cela débute toujours très bien ! - « sauf si leur divulgation est susceptible de porter atteinte au secret de la défense nationale, à la sûreté de l'État, à la sécurité des lieux de privation de liberté, » - il est heureux qu'on ne vise pas les catastrophes naturelles ! - « au secret de l'enquête et de l'instruction, au secret médical ou au secret professionnel applicable aux relations entre un avocat et son client. »

Si l'administration - en l'occurrence le Gouvernement - veut s'opposer à toute communication de pièces au contrôleur général, elle dispose, en vertu de cet alinéa, de tous les arguments nécessaires à cette fin. J'aimerais que vous me citiez une seule circonstance qui n'entre pas dans le champ d'application de cette longue énumération !

Là encore, cette rédaction est incompatible avec les termes du protocole facultatif. C'est pourquoi nous avons déposé un certain nombre d'amendements afin que soit véritablement respecté le contrôleur général et qu'il puisse exercer ses fonctions.

M. Jean-Pierre Sueur applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

L'article 6 du projet de loi est important, puisqu'il précise les conditions dans lesquelles le contrôleur général pourra exercer ses responsabilités. On mesure au nombre d'amendements qui ont été déposés sur cet article toute l'importance qu'il y a à le faire.

Je reviendrai sur quelques-uns des points qu'a évoqués M. Mermaz.

Au premier alinéa, les termes « sur le territoire de la République » suscitent plusieurs interrogations. Cette formulation signifie-t-elle que les lieux de privation de liberté placés sous le contrôle des autorités françaises à l'étranger échapperont au contrôle extérieur ?

L'article 4 du protocole facultatif dispose que « chaque État partie autorise (...) à effectuer des visites (...) dans tout lieu placé sous sa juridiction ou sous son contrôle ? »

Il n'y a donc aucune raison pour que le contrôleur n'ait pas accès aux locaux d'arrêt des armées ou de la gendarmerie, qu'ils soient situés sur terre ou sur mer, même si les autorités militaires peuvent y être quelque peu rétives.

Ce premier alinéa de l'article 6 est tout aussi restrictif, car il ne vise que les personnes privées de liberté par décision d'une autorité publique. Or certaines personnes souffrant de maladies psychiatriques peuvent être hospitalisées à la demande d'un tiers, souvent un membre de leur famille, conformément aux dispositions des articles L. 3212-1 à L. 3212-12 du code de la santé publique.

L'hospitalisation sur demande d'un tiers correspond en général à une privation de liberté avec le « consentement exprès ou tacite d'une autorité publique ». C'est ce qu'affirme notamment l'ancien commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, Álvaro Gil-Robles, qui, dans son rapport sur le respect effectif des droits de l'homme, indiquait que « l'hospitalisation d'office ou à la demande d'un tiers s'apparente à une privation de liberté. »

Nous demandons que ce cas de figure entre dans les compétences du contrôleur général.

Quant au deuxième alinéa du présent article, il est très en retrait. À l'instar des parlementaires, qui, en vertu de l'article 719 du code de procédure pénale, « sont autorisés à visiter à tout moment les locaux de garde à vue, les centres de rétention, les zones d'attente et les établissements pénitentiaires », le contrôleur général des lieux de privation de liberté et ses collaborateurs devraient pouvoir effectuer toutes leurs visites de manière inopinée. Il serait vraiment paradoxal, mes chers collègues, que le contrôleur général dispose en quelque sorte de moindres possibilités d'accès aux lieux de privation de liberté que les parlementaires, en particulier si ses visites doivent être inopinées ou impromptues !

Cela ne signifie pas pour autant que toutes ses visites seront inopinées. Dans certains cas, il devra avertir de sa venue, par exemple s'il veut traiter d'une question précise. Mais il doit pouvoir agir, dans ce domaine, de manière discrétionnaire.

S'agissant des raisons qui sont avancées, on se demande bien en quoi des lieux de privation de liberté peuvent être concernées par les questions de défense nationale - mais peut-être nous éclairera-t-on à ce sujet -, de sécurité publique- normalement, l'ordre public est par définition assuré au sein d'un établissement pénitentiaire ; si tel n'est pas le cas, le contrôleur général des prisons a alors tout intérêt à intervenir - ou par les catastrophes naturelles.

Bien sûr, dans le cas d'une mutinerie ou si des opérations de maintien de l'ordre par la force publique sont nécessaires à l'intérieur d'un lieu de privation de liberté, on n'imagine pas que le contrôleur général s'interpose entre les policiers et les détenus.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Encore une fois, ce problème doit être laissé à son appréciation. Il n'est pas souhaitable qu'il doive demander aux autorités la permission de se rendre dans un lieu privatif de liberté et qu'il soit tout loisible à celles-ci de la lui refuser.

Enfin, s'agissant des informations et des pièces qu'il peut demander, je ne peux que faire miennes les observations de notre collègue Louis Mermaz.

On imagine, dans le cas de malades souffrant de troubles psychiatriques, situations difficiles et douloureuses, que si le secret médical pouvait être opposé au contrôleur général, les observations et les constats qu'il pourrait faire lors de ses visites seraient complètement vidés de leur sens.

De la même façon, il peut être important de savoir si, dans une prison, tel détenu souffre de telle pathologie et suit tel type de traitement. Ces informations doivent pouvoir être communiquées au contrôleur général pour lui permettre d'apprécier dans leur globalité la situation des personnes qu'il visite.

Pour toutes ces raisons, il nous paraît que ces restrictions sont arbitraires. Au fond, elles amoindrissent considérablement ce projet de loi, qui, par ailleurs, va dans le bon sens.

C'est pourquoi nous avons déposé un certain nombre d'amendements visant à lever ces restrictions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

J'évoquerai dans mon propos le problème de la compétence territoriale du contrôleur général, puisque l'amendement que nous avions déposé sur ce point a été déclaré irrecevable en application de l'article 40 de la Constitution.

Le présent projet de loi a retenu comme critère de définition des lieux de privation de liberté les lieux situés sur « le territoire de la République ». Or, si l'on s'en tient à cette définition, seront exclus de tout contrôle les lieux de privation de liberté situés à l'étranger, alors même qu'ils sont sous la responsabilité de l'État.

Prenons le cas de l'Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l'Union européenne, FRONTEX.

La France a mis à disposition de FRONTEX des moyens humains et matériels pour mener des opérations hors de son territoire, aux frontières de l'Europe. Ces zones font-elles partie des « territoires de la République » ? Au vu des conditions de rétention - parfois véritablement inhumaines -qui peuvent régner dans ces lieux, il serait bienvenu que ceux-ci fassent partie intégrante du domaine de compétence du nouveau contrôleur des lieux de privation de liberté.

Et quid des casernes et des bases de l'armée situées en pays étranger ? Cette dernière possède des lieux de privation de liberté appelés « locaux d'arrêt des armées ». Échappent-ils au domaine de compétence du contrôleur du seul fait qu'ils ne sont pas situés sur le « territoire de la République » ?

Cette définition territorialisée du périmètre d'action du contrôleur des lieux de privation de liberté est à la fois floue et restrictive. Afin de faire en sorte que tous les lieux de privation de liberté dépendants de l'État soient réellement pris en compte dans ce projet de loi, nous demandions que soit défini clairement ce périmètre d'application.

C'est pourquoi, à la notion de « territoire de la République », nous souhaitions que soit substituée l'expression « tout lieu relevant de la juridiction ou du contrôle de l'État ».

De cette façon, le projet de loi aurait été conforme à l'article 4 du protocole facultatif, dont il nous paraît à bien des égards n'être qu'une application a minima.

L'article 40 de la Constitution ne nous a pas permis d'envisager cette extension de la compétence du contrôleur général. Nous espérons toutefois, madame le garde des sceaux, que vous pourrez répondre à l'ensemble de nos questions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Pensez-vous qu'on puisse assimiler les prisons avec les hôpitaux psychiatriques ? Chaque fois que l'on crée des confusions, on risque de faire naître des ambiguïtés, voire de susciter des malaises. Il n'est pas possible de mettre sur un même plan un prisonnier, victime de lui-même puisqu'il a été condamné, et un malade.

Ici même, lors de l'examen de la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, j'avais insisté - pour finalement m'en réjouir - pour que la partie consacrée aux hospitalisations en milieu psychiatrique soit déconnectée du problème de la délinquance.

Aussi, ma crainte est qu'on ne crée une confusion entre la situation d'un malade qui, quoiqu'il refuse de se soigner, a besoin d'être pris en charge médicalement et d'être hospitalisé en milieu spécialisé, le cas échéant parce qu'il est dangereux pour lui-même ou pour autrui, avec la situation d'un détenu dans une prison.

De grâce, prenons garde de ne pas créer une telle confusion ! On a trop longtemps nié, dans notre pays, la réalité de la maladie mentale. On l'a parfois montrée du doigt à un moment où l'on aurait dû, au contraire, l'assimiler à toute autre maladie qui se soigne dans des lieux spécialisés, à la seule différence que, parce qu'il y a maladie mentale, il y a refus des soins. Et c'est ce qui explique, par exemple, le placement d'office.

Donc, mes chers collègues, je voudrais attirer votre attention sur ce point tout à fait particulier que constitue le secret médical. Il doit être ô combien affirmé ! Si l'on fait la moindre entorse à ce principe - et Dieu sait s'il existe des risques de dérapage -, on ne peut plus assurer les meilleurs soins aux uns et aux autres.

Le texte ne comporte pas de risques de dérive, mais il est important, madame le garde des sceaux, que vous nous confirmiez que, dans votre esprit et selon l'approche qui est la vôtre - nous la soutenons -, aucune confusion n'est possible entre la manière dont on va traiter un malade mental et celle qui va s'appliquer à une personne privée de liberté pour une autre raison.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

Je souhaiterais attirer l'attention du Sénat sur le problème de la compétence du contrôleur pour des lieux situés hors du territoire de la République.

En effet, il faut bien mesurer que nous adoptons cette institution pour garantir les droits fondamentaux et pour nous mettre en conformité avec des engagements internationaux qui ont été évoqués, comme le protocole facultatif se rapportant à la convention des Nations unies contre la torture.

Or l'article 4 de ce protocole est formel :

« Chaque État Partie » - c'est nous - « autorise » - cela veut dire doit autoriser- « les mécanismes visés aux 2 et 3 » - c'est-à-dire le contrôleur - « à effectuer des visites, conformément au présent protocole, dans tout lieu placé sous sa juridiction ou sous son contrôle » - ces termes ont été ajoutés - « où se trouvent ou pourraient se trouver des personnes privées de liberté sur l'ordre d'une autorité publique ou à son instigation, ou avec son consentement exprès ou tacite », c'est-à-dire tout lieu de détention, quelle que soit la forme de cette détention, lorsqu'il y a exercice de la juridiction ou du contrôle.

Or il existe un cas d'une extraordinaire importance, c'est celui des opérations extérieures. Je n'évoquerai pas ici - ce serait vraiment malvenu s'agissant de la France et des forces françaises - ce qui se passe précisément dans certains lieux en Irak. Mais je tiens à souligner que des personnes civiles sont détenues, retenues, cantonnées dans des lieux de détention, parfois par centaines ou par milliers, sous le contrôle des forces françaises.

Il ne serait pas admissible que soient ainsi créées des sortes d'espaces réservés où les contrôles qui s'imposent ne seraient pas exercés, comme si l'on avait quelques doutes, à cet égard, sur des actes qui pourraient s'y commettre. Ce n'est pas concevable.

Il convient que l'autorité et le contrôleur général aient la possibilité de se rendre, par exemple, en Côte-d'Ivoire ou en Afghanistan, et qu'ils puissent, le cas échéant, se livrer sur place aux contrôles nécessaires. Ces visites sont non seulement prescrites par la convention, mais elles constituent notre devoir, dans l'intérêt majeur de ceux qui sont détenus et de ceux qui les détiennent. Il ne peut y avoir, dans ce domaine, de zone d'exception.

Il faut que nous puissions échapper à toute forme de soupçon, et nous n'y parviendrons pas si nous estimons que le contrôle est nécessaire uniquement sur le territoire de la République. Non, la convention internationale et le protocole facultatif s'y rapportant sont formels : il y va de l'intérêt majeur de ceux qui sont détenus ou retenus ainsi que des autorités et des forces françaises de toute nature.

On nous a opposés la question du financement ; je pense que notre éminent collègue M. Charasse aura l'occasion d'intervenir sur ce point. En matière de droits fondamentaux, de libertés publiques, de droit pénal, cela ne se fait pas depuis 1958. Alors, je serais vraiment navré que l'on dise que, hors du territoire de la République, les autorités de la République échappent à tout contrôle de ce contrôleur général.

Nous sommes en présence d'une question essentielle et, à cet égard, je souhaiterais que la position adoptée soit reconsidérée.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

Monsieur le président, madame le garde des sceaux, je crois qu'il faut clarifier la question des opérations extérieures, les OPEX, dont parlait à l'instant M. Badinter, et plus généralement le problème de la présence française militaire à l'étranger au regard de votre texte.

Quand nos armées interviennent en opération extérieure, avec l'accord du pays dans lequel elles exercent leur mission, par exemple dans le cadre d'un accord bilatéral militaire ou autre, tout est placé, en principe, sous l'autorité civile du pays concerné. Et par conséquent, ce qui peut se passer en matière de contrôle à l'intérieur des unités relève des accords qui ont pu être conclus avec ce pays.

La plupart du temps, cependant, ces interventions ont lieu à la demande ou avec l'accord de l'ONU ou d'une autre organisation internationale. Dans ce cas, mes chers collègues, c'est le pays responsable du détachement militaire qui assure le contrôle pour le compte de l'ONU et qui doit lui en rendre compte.

Donc, le pays - par exemple la France - est responsable de ce qui se passe à l'intérieur de ses installations militaires, et il doit mettre en place les dispositifs nécessaires pour rendre compte à l'ONU et, éventuellement, pour effectuer les contrôles qu'elle sollicite.

Donc, qui effectue aujourd'hui les contrôles dont nous parlons ? Normalement, c'est l'autorité militaire, c'est-à-dire, par exemple, le contrôle général des armées - encore qu'il ne soit pas forcément compétent en toutes matières- et, pour les militaires français à l'étranger, les tribunaux aux armées. Ceux qui n'ont pas le statut de militaires français et qui sont, par exemple, prisonniers dans un camp occupé par la France, sont sous statut onusien, et on en revient à ma question de départ.

Donc, madame le garde des sceaux, il faut préciser, dans ce cas, comment les choses se passent. Personnellement, même si je ne suis pas toujours favorable à des interventions civiles intempestives en cours d'opération militaire - c'est une position traditionnelle de la République qui remonte au président Édouard Daladier en 1940 et aux instructions qu'il avait adressées pour interdire les contrôles parlementaires en cours d'opération militaire-, la question soulevée pose un vrai problème.

Il faut, enfin, examiner la situation de nos implantations militaires à l'étranger, dans le cadre d'accords de coopération, d'ailleurs pour la plupart jamais ratifiés. Je pense notamment à nos positions en Afrique. Là où se trouve, par exemple, un camp militaire à Abidjan ou à Djibouti, l'armée française est présente et sa situation est la même que pour la caserne de Castelnaudary, de Bourges ou autres. Il y a, à l'intérieur de l'emprise militaire, des locaux disciplinaires, une prison militaire, et les tribunaux militaires sont compétents. Mais nous sommes en situation d'extraterritorialité et on peut donc considérer, comme c'est le cas d'une ambassade, que nous sommes toujours fictivement sur le territoire de la République.

Donc, a priori, lorsque le contrôle peut avoir lieu en tous points du territoire de la République, cela veut dire que, dans les implantations militaires françaises qui ne relèvent pas des OPEX de l'ONU, on se trouve fictivement sur le territoire de la République, comme dans une ambassade où l'autorité de police compétente en cas d'infraction est le consul général du secteur, et non pas l'ambassadeur, contrairement à ce que l'on croit. Par conséquent, monsieur le président, tout cela mérite d'être clarifié.

J'ajouterai une observation.

On a évoqué l'article 40 de la Constitution. Je ne sais pas ce qu'a fait la commission des finances, et je me garderai bien de désavouer son autorité, qu'il m'arrive d'exercer, en ce qui concerne les décisions qu'elle a pu prendre en matière de recevabilité. Mais, chaque fois que l'on discute de textes pénaux ou très voisins de la procédure pénale, il a été admis depuis 1958 - Michel Debré lui-même, l'un des auteurs de la Constitution, l'a dit et l'a écrit, et le Conseil constitutionnel s'est toujours bien gardé d'intervenir en la matière - que l'article 40 n'était pas opposable. Sinon, il nous serait interdit de diminuer le tarif d'une amende, puisque nous réduirions les ressources publiques.

Je ne connais pas le contenu des amendements en cause. Il n'empêche que ces questions ne peuvent pas être évacuées à la légère. On ne peut pas se trouver - je conclurai par cela, monsieur le président - dans une situation dans laquelle un certain nombre de démembrements extérieurs de la République, fictifs ou pas, qu'il s'agisse d'une mission que nous exécutons pour le compte de l'ONU dans le cadre de la Charte onusienne créant pour nous des obligations ou d'une implantation militaire qui bénéficie de l'extraterritorialité, échappent aux conventions internationales, de l'ONU ou autres, signées par la France ou aux règles générales de la législation française en matière de protection des libertés et des droits.

Telles sont, monsieur le président, les quelques observations que je souhaitais formuler, étant entendu que, comme toujours, il faut arriver à concilier les choses de manière à ne pas perturber la mission difficile de l'armée française dans des circonstances graves et périlleuses. Mais j'ai la faiblesse de penser que, si le Gouvernement désigne un contrôleur général qui a le sens - et un haut sens - des responsabilités et de l'État, il saura faire preuve, je n'en doute pas - et n'en doutez pas non plus s'il est bien choisi -, du discernement nécessaire : il connaîtra son devoir en ce qui concerne la conciliation nécessaire entre les droits individuels, les droits et les obligations de la nation, et les droits humains collectifs

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 90, présenté par Mme Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :

Compléter le premier alinéa de cet article par les mots :

ainsi que tous les équipements et installations les composant. Il peut être accompagné de ses collaborateurs.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Force est de constater que ce texte se distingue particulièrement par son imprécision. L'article 6 nous indique que le contrôleur peut visiter tout lieu de privation de liberté. Pourtant, l'aspect vindicatif de cette formulation ne masque pas le flou qui règne sur la définition de ces fameux « lieux de privation de liberté ». Ainsi, une interprétation a minima pourrait conduire à considérer comme lieu de privation de liberté la simple cellule où est détenu le prisonnier ou la chambre du malade.

Prenons le cas de l'hospitalisation des détenus. En décembre 2003, l'accouchement d'une détenue menottée à l'hôpital Sud Francilien d'Évry avait suscité de la part du ministère de la justice des commentaires scandalisés, mais il y eut beaucoup moins d'émoi, un an plus tard, lorsque le ministère ordonna que tous les malades soient non seulement entravés mais menottés dans le dos.

Comme le constate l'Observatoire international des prisons, pour le moindre examen, des prisonniers peuvent passer plusieurs heures menottés. Dans ces conditions, de plus en plus de détenus refusent les extractions médicales. Or rien ne précise dans la loi si les équipements hospitaliers recevant des personnes privées de liberté rentrent dans le périmètre d'action du contrôleur.

De la même manière, qu'en est-il des conditions de travail en prison ? Les détenus peuvent se voir proposer du travail de service général, c'est-à-dire lié au fonctionnement des établissements pénitentiaires. Certains détenus travaillent même à l'extérieur de ces établissements, en semi-liberté, pour le compte de collectivités publiques, d'associations ou d'entreprises. Le « SMIC détenu » s'élève à 45 % du SMIC à l'extérieur et le droit du travail est inexistant.

Hormis ceux qui travaillent en dehors des murs des prisons, les détenus ne signent aucun contrat de travail. Ils n'ont pas le statut juridique de salarié. Il n'existe donc aucune disposition relative à la durée de l'emploi et de la période d'essai, au contenu du poste, aux objectifs professionnels ou au licenciement. Ils n'ont pas droit à des compensations financières en cas de maladie ou d'accident du travail.

Ce sont donc des « faux salariés », qui n'ont aucune possibilité d'expression collective.

Le travail est encore considéré par les directions pénitentiaires comme un outil essentiel de gestion de la détention, plutôt que comme une mesure favorisant la réinsertion des personnes incarcérées.

Certaines entreprises peuvent considérer le travail pénitentiaire comme une variable d'ajustement à la conjoncture économique. En effet, les ateliers de détenus offrent, dans certains cas, les caractéristiques d'un sous-traitant.

Dans ces conditions, le contrôleur des lieux de privation de liberté aura-t-il accès aux locaux où travaillent les personnes incarcérées ? Pourra-t-il observer leurs conditions de travail ? Si l'ampleur de sa mission l'exige, pourra-t-il être accompagné de ses collaborateurs ?

Avec une formulation aussi vague du périmètre d'action du contrôleur, tous ces points semblent quelque peu difficiles à cerner. C'est pourquoi nous demandons que ce périmètre soit précisé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

La précision ne paraît pas nécessaire. En effet, dans la mesure où le contrôleur pourra se déplacer partout dans les locaux collectifs ou individuels qui constituent le lieu d'enfermement, il est évident qu'il pourra visiter tous les équipements et installations, y compris les chaudières, les ascenseurs, etc. Il pourra se rendre dans tous les lieux d'enfermement quels qu'ils soient.

Dès lors, la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Je partage les observations de M. le rapporteur. J'ajoute que le contrôleur pourra également visiter la maternité où une détenue accouche, puisque dès lors qu'une personne est détenue, le lieu où elle se trouve devient un lieu de privation de liberté.

Le Gouvernement émet, lui aussi, un avis défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 10, présenté par M. Hyest, au nom de la commission est ainsi libellé :

Compléter le premier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Il peut aussi visiter, dans les mêmes conditions, tout établissement de santé habilité à recevoir des patients hospitalisés sans leur consentement visé à l'article L. 3222-1 du code de la santé publique.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Il existe deux régimes d'hospitalisation sans consentement, qu'il convient d'examiner séparément, à savoir l'hospitalisation d'office et l'hospitalisation à la demande d'un tiers.

Si les patients hospitalisés d'office relèvent d'une décision émanant d'une autorité publique et entrent d'ores et déjà dans le champ de compétence du contrôleur général, la situation des patients hospitalisés à la demande d'un tiers est plus complexe, sachant que, d'une part, l'hospitalisation ne fait pas l'objet d'une décision formalisée, en dehors de son inscription dans le « Registre de la loi », visé à l'art L. 3212-11 du code de la santé publique, et que, d'autre part, l'admission est prononcée par le directeur de l'établissement d'accueil, que ce dernier soit de statut public ou privé. S'il appartient au secteur privé à but lucratif, la qualité d'agent public ne peut pas être reconnue au directeur de l'établissement.

Dans la mesure où il est souhaitable que le contrôleur général puisse exercer ses compétences au regard de ces situations d'hospitalisation qui engendrent une restriction des libertés du patient, il paraît nécessaire de préciser clairement que les établissements de santé sont également visés par le premier alinéa de l'article 6.

Je précise à notre collègue Jacques Blanc qu'il faut se garder de toute confusion. Ce qui compte, ce n'est pas la qualité des personnes, mais bien la protection de leurs libertés fondamentales, qu'il s'agisse de détenus ou de personnes retenues. Jusqu'à preuve du contraire, une personne reconduite à la frontière n'a pas pour autant commis un délit ! À partir du moment où elle est retenue, on vérifie sa situation et l'on peut même s'apercevoir qu'elle a le droit de rester sur le territoire. Les situations sont donc extrêmement diverses.

C'est exactement la même chose pour l'hospitalisation d'office ou l'hospitalisation à la demande d'un tiers. Nous nous devons de viser expressément les lieux d'hospitalisation si nous voulons répondre au protocole facultatif à la Convention des Nations unies.

Tel est l'objet de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Tout d'abord, nous aurons à revenir sur le sujet de l'hospitalisation d'office, puisqu'un texte spécifique consacré aux problèmes psychiatriques a été annoncé par le précédent ministre de l'intérieur, devenu Président de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer si ce texte est susceptible de venir bientôt en discussion ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Il répond à un vrai besoin. Le sujet, qui avait été évoqué à l'occasion de la discussion du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, n'a pas été approfondi pour ne pas créer de confusion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Ensuite, notre rapporteur évoque la différence entre les établissements privés et publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

En réalité, ce qui compte, ce n'est pas la nature de l'établissement, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

... c'est l'objet de l'hospitalisation.

Chaque département compte un ou plusieurs établissements habilités par le représentant de l'État dans ce département pour soigner des personnes atteintes de troubles mentaux qui relèvent des chapitres II et III du titre Ier du code de la santé publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Certains malades refusent, parce qu'ils sont malades, les soins médicaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Dans ce cas, nous sommes obligés de passer par une violation de leur liberté.

Quelle sécurité pourra apporter à ces malades le contrôleur qui, a priori, ne sera pas un spécialiste médical ?

Il existe déjà toute une série de procédures - qui seront peut-être revues dans le texte à venir -, notamment la saisine du procureur, et de règles très strictes destinées à éviter les risques d'hospitalisation injustifiée...

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Je ne vois pas l'intérêt des visites du contrôleur pour ces malades-là.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Je le redis très clairement, je ne vois pas ce qu'elles peuvent leur apporter, si ce n'est entraîner la confusion.

Je souhaiterais avoir une réponse sur ce point. En effet, notre mission vise à donner toutes les garanties aux malades...

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

...afin qu'ils trouvent, même s'ils se les voient imposer, les meilleurs soins susceptibles de leur donner des chances dans la vie.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 10.

Je veux répondre à présent aux questions posées par M. Blanc.

Tout d'abord, la loi relative à la prévention de la délinquance, qui a été adoptée le 5 mars 2007, comprenait quatre articles portant sur l'hospitalisation sous contrainte et, en particulier, sur les hospitalisations d'office pour irresponsabilité pénale.

Ces dispositions visaient la sécurité publique. Nous les avons disjointes du reste du texte pour les reprendre dans le cadre d'une réforme plus large de la loi de 1990 sur la santé mentale, conformément à l'engagement pris. Il s'agit, par exemple, dans le cas d'une personne hospitalisée d'office - parce qu'elle a commis un crime -, qui retourne dans sa commune à sa sortie de l'établissement de santé, de communiquer l'information au maire et au préfet pour des raisons de sécurité.

Le moment de la discussion de ce texte dépendra de la fixation de l'ordre du jour des prochains travaux du Parlement.

Ensuite, s'agissant du présent projet de loi, le contrôleur général a pour mission de vérifier que les conditions de prise en charge des personnes privées de leur liberté sont respectueuses de leurs droits fondamentaux. Dans le cadre d'un hôpital psychiatrique, il s'agit de personnes hospitalisées sous contrainte à la suite d'une décision administrative ou judiciaire. Il n'appartient pas au contrôleur d'émettre un avis sur le bien-fondé des soins apportés ; il n'est pas médecin.

Par conséquent, ce qui compte, ce n'est pas le lieu de l'hospitalisation, ...

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

... mais bien le fait que ces personnes sont hospitalisées sous contrainte à la suite d'une décision de justice ou d'une décision administrative.

Ces dispositions ne concernent donc pas le malade qui entre à l'hôpital pour soigner une dépression. Elles ne portent nullement atteinte au secret médical et ne s'immiscent aucunement dans le protocole de soins qui pourra être imposé à l'hospitalisé d'office.

Elles s'appliquent à des personnes hospitalisées d'office, qui ont commis des troubles sérieux à l'ordre public ou des crimes.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Je suis saisi de onze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 52, présenté par M. Détraigne et les membres du groupe Union centriste - UDF est ainsi libellé :

Supprimer les deuxième et troisième alinéas de cet article.

La parole est à M. Yves Détraigne.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

L'article 6 porte, notamment, sur les conditions d'accès du contrôleur général aux lieux de privation de liberté. Elles ont autant d'importance pour asseoir sa crédibilité que les conditions de sa nomination, dont nous avons longuement débattu à l'article 2.

Tout comme nous avons fait évoluer ces dernières, il me paraît nécessaire d'en faire autant pour les conditions dans lesquelles il peut intervenir et pénétrer dans un lieu privatif de liberté.

En effet, selon le deuxième alinéa de l'article 6, tel qu'il est rédigé, le contrôleur général doit obligatoirement - parce que le présent de l'indicatif a valeur d'impératif dans un texte juridique - informer les autorités responsables de sa prochaine venue, sauf circonstances particulières, dont on ne sait pas très bien ce qu'elles peuvent être.

Cependant, les autorités peuvent s'opposer à la visite du contrôleur général pour des motifs graves, énumérés au troisième alinéa, à savoir ceux qui sont liés à la défense nationale, à la sécurité publique, à des catastrophes naturelles ou à des troubles sérieux dans l'établissement où la visite doit avoir lieu.

Autant dire que les motifs d'opposition à la visite annoncée sont si nombreux qu'ils risquent de réduire considérablement l'accès du contrôleur général aux lieux. De toute façon, cette rédaction laisse planer un doute quant aux faits susceptibles d'intervenir sur les lieux entre l'annonce de sa venue et le moment de son arrivée.

À l'évidence, il s'agit non pas de mettre en cause l'action des responsables de ces lieux, mais tout simplement, je le répète, d'asseoir la crédibilité des interventions du contrôleur général.

Pour avoir participé la semaine dernière à une journée entière d'auditions organisées par notre président, j'ai constaté que les personnes entendues, quelle que soit leur fonction, ont souligné dans leur quasi-totalité la nécessité, généralement considérée comme primordiale, de revoir les conditions dans lesquelles le contrôleur général pouvait accéder aux lieux privatifs de liberté.

Il me semble que ce n'est pas non plus un hasard si plus d'une dizaine d'amendements portent sur ce point.

Celui que je défends vise donc à inverser la logique du texte, en prévoyant que le contrôleur général doit pouvoir intervenir sans avoir l'obligation d'annoncer sa venue, ce qui ne signifie pas qu'il ne pourra pas prévenir, ce qu'il fera d'ailleurs dans bien des cas, par correction.

Toutefois, si l'on veut que sa fonction soit très rapidement crédible, il est essentiel qu'il puisse intervenir de manière inopinée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 20, présenté par MM. Lecerf et Portelli, est ainsi libellé :

Supprimer le deuxième alinéa de cet article.

La parole est à M. Jean-René Lecerf.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Nous sommes convaincus que, la plupart du temps, le contrôleur général informera de sa visite les autorités responsables du lieu de privation de liberté. Toutefois, nous pensons aussi qu'il doit pouvoir procéder à des visites inopinées chaque fois que cela lui paraît nécessaire ou utile.

Dans ces conditions, nous estimons maladroite la rédaction du deuxième alinéa de l'article 6, aux termes de laquelle l'avertissement serait la règle et la visite inopinée l'exception, en même temps qu'elle ne nous semble pas correspondre réellement à l'intention profonde du Gouvernement.

Cela ayant été précisé, je retire l'amendement n° 20, avec l'accord de Hugues Portelli, cosignataire, au profit de l'amendement n° 36 de Mme Boumediene-Thiery, qui prévoit la coordination avec le troisième alinéa de l'article : nous n'avions pas prévue celle-ci, non que nous l'ayons oubliée, mais parce qu'elle n'avait pas lieu d'être puisque nous proposions également la suppression de ce troisième alinéa.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 20 est retiré.

L'amendement n° 36, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :

I. Supprimer le deuxième alinéa de cet article.

II. Au début du troisième alinéa de cet article, remplacer les mots :

Ces autorités

par les mots :

Les autorités responsables du lieu de privation de liberté

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Ainsi que viennent de le préciser plusieurs collègues, dont M. Lecerf à l'instant, cet amendement porte sur la question de la visite.

Nous le savons, l'existence d'un contrôle inopiné des lieux de privation de liberté découle des engagements internationaux de la France. Le protocole facultatif se rapportant à la convention des Nations unies contre la torture précise, en effet, que les États s'engagent à autoriser des visites régulières, impromptues et sans autorisation préalable de tout lieu du territoire où des personnes sont privées de liberté.

Le caractère impromptu et l'absence d'autorisation préalable des visites sont des garanties fondamentales de l'effectivité du contrôle exercé par le contrôleur général : si celui-ci devait systématiquement aviser les autorités de ses visites, son pouvoir de contrôle n'aurait plus de sens. Aucune restriction de cette nature ne doit entraver son pouvoir de visite en tant que contrôleur général.

En vertu de l'article 719 du code de procédure pénale, les parlementaires ont eux-mêmes la possibilité de visiter les lieux de privation de liberté sans préavis ni autorisation préalable. L'ensemble des sénateurs sont d'accord sur ce point : comment pourrait-on donner moins au contrôleur général ? Il paraît, au contraire, nécessaire de lui donner davantage !

Dans la mesure où ces visites sont au coeur même de ses missions, il convient donc de supprimer l'obligation faite au contrôleur général de prévenir les autorités. En réalité, ce deuxième alinéa permettra à celles-ci, quand elles auront connaissance d'une visite imminente du contrôleur, de réfléchir aux « motifs graves » qu'elles pourront invoquer, parmi ceux qui sont prévus au troisième alinéa de ce même article, pour se soustraire à la visite. Il convient donc de laisser le contrôleur faire sa visite librement, sans conditions ni autorisation préalables.

C'est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement, dont la commission semblait penser ce matin que la formulation était la plus proche de ce que les sénateurs ici présents souhaitaient.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 64, présenté par MM. C. Gautier, Badinter, Mermaz, Sueur, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Rédiger comme suit le deuxième alinéa de cet article :

Le contrôleur général des lieux de privation de liberté et les contrôleurs peuvent visiter à tout moment les lieux de privation de liberté. Ils ont accès à l'ensemble des locaux composant le lieu privatif de liberté.

II. - En conséquence, rédiger ainsi le début de la première phrase du troisième alinéa de cet article :

Les autorités responsables du lieu de privation de liberté ne peuvent...

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

S'agissant des visites que peut effectuer le contrôleur général des lieux de privation de liberté, nous souhaitons nous aussi qu'elles puissent être prévues ou inopinées, et que les contrôleurs disposent de la même faculté.

Vous aurez remarqué, mes chers collègues, que notre amendement reprend exactement, une fois encore, les termes précis de la proposition de loi de nos collègues Jean-Jacques Hyest et Pierre-Guy Cabanel !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

J'insisterai sur le fait qu'il nous paraît véritablement absurde d'empêcher les visites inopinées du contrôleur général. En effet, plusieurs intervenants l'ont rappelé, la loi permet à tout parlementaire de procéder à des visites inopinées des lieux de privation de liberté : on ne comprendrait vraiment pas que cela ne soit pas possible au contrôleur général, alors que, de surcroît, c'est à nos yeux une condition pour que sa mission soit pleinement efficace. Au surplus, vous le savez, un certain nombre de textes internationaux considèrent que la possibilité de procéder à des visites inopinées est l'une des conditions de la pertinence et de l'efficacité de la mission d'un tel contrôleur.

Les arguments sont donc nombreux en faveur de cet amendement n° 64, au demeurant parfaitement convergent avec d'autres amendements qui ont été ou vont être présentés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 91, présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen est ainsi libellé :

Rédiger ainsi le deuxième alinéa de cet article :

Les autorités responsables du lieu de privation de liberté doivent prendre toutes les mesures pour faciliter la tâche du contrôleur général.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Le 17 juillet dernier, dans un communiqué commun, des associations et des syndicats concernés par ce projet de loi - l'Observatoire international des prisons ; l'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture, ou ACAT-France ; l'Association des secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire ; le Groupement étudiant national d'enseignement aux personnes incarcérées, ou GENEPI ; l'Interco-CFDT ; le Syndicat national de l'ensemble des personnels de l'administration pénitentiaire, ou SNEPAP-FSU ; le Syndicat de la magistrature... - ont estimé que ce projet de loi limitait bien trop les prérogatives du contrôleur général.

Leurs représentants estiment, en effet, qu'aucune restriction ne saurait être apportée au principe de libre accès du contrôleur général aux lieux de privation de liberté, aux informations et aux pièces qui lui sont nécessaires pour l'exercice de sa mission, conformément à l'esprit du protocole de l'ONU.

Or le projet de loi ne garantit ni à leurs yeux ni aux nôtres une réelle liberté d'aller et venir du contrôleur général dans ces lieux de privation de liberté.

Enfin, si l'on s'en tient à la lettre de l'article 6, la règle générale est que le contrôleur doit prévenir les autorités responsables, les visites sans préavis n'étant qu'une exception et restant soumises à des règles non précisées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 66, présenté par MM. C. Gautier, Badinter, Mermaz, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du deuxième alinéa de cet article, après les mots :

le contrôleur général informe

insérer les mots :

par tout moyen

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Il s'agit d'un amendement de précision, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 65, présenté par MM. C. Gautier, Badinter, Mermaz, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après les mots :

sans préavis

Supprimer la fin de la deuxième phrase du deuxième alinéa de cet article

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Le protocole facultatif prévoit que « chaque État partie autorise les mécanismes à effectuer des visites », ce qui signifie que les inspections doivent pouvoir être annoncées ou inopinées.

Nous proposons donc que les visites sans préavis ne soient pas limitées aux seuls cas où « des circonstances particulières l'exigent », et ce d'autant plus, monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, qu'il est véritablement impossible de définir ces « circonstances particulières » ! Voilà bien une expression que l'on devrait bannir de la loi, parce qu'elle ne veut rien dire : tout est particulier, tout est singulier, tout est spécifique... Tous ces mots ne signifient rien. Il faut donc supprimer cette formulation, qui n'a vraiment pas de sens !

Au demeurant, si nous suivions cette recommandation de notre groupe, nous irions encore une fois dans le sens de l'excellente proposition de loi cosignée par notre collègue M. Hyest !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Les trois amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 21 est présenté par MM. Lecerf et Portelli.

L'amendement n° 67 est présenté par MM. C. Gautier, Badinter, Mermaz, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 92 est présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer le troisième alinéa de cet article.

La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour présenter l'amendement n° 21.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

On voit mal quelles raisons liées à la défense ou à la sécurité publique pourraient s'opposer à la simple visite du contrôleur général ; nous estimons, au contraire, que c'est peut-être justement lors de troubles sérieux que sa visite s'impose davantage. Pour ce qui est des catastrophes naturelles, il nous semble que la force majeure devrait suffire à justifier que la visite soit reportée.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons la suppression de cet alinéa de l'article 6.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Robert Badinter, pour présenter l'amendement n° 67.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

Je rejoins les propos qui viennent d'être tenus par M. Lecerf : on peut s'interroger sur la pertinence des restrictions indiquées dans cet alinéa ! Au nom de quoi invoquerait-on le secret de la défense nationale s'agissant d'une visite dans un lieu où les personnes, pour des raisons multiples, sont privées de leur liberté ? Quant aux catastrophes naturelles, il est évident que si un tsunami vient de se produire, il n'y aura pas de visite du contrôleur !

Il est tout aussi évident que le principe du libre accès est celui qui doit commander entièrement le texte que nous formons : l'espèce de frilosité qui caractérise ces restrictions n'a pas sa place ici, non seulement en considération du bon sens, non seulement compte tenu de la fonction et de la mission que nous assignons au contrôleur général, non seulement au regard de l'intérêt de l'administration pénitentiaire elle-même, mais parce qu'elle est contraire au texte même de la convention internationale à laquelle nous devons nous conformer !

Je rappelle que le protocole facultatif pose en son article 20 que les États parties s'engagent à accorder à leur contrôleur général l'accès à tous les renseignements concernant le nombre de personnes privées de liberté ainsi que celui des lieux de détention et leur emplacement ; l'accès à tous les renseignements relatifs au traitement de ces personnes et à leurs conditions de détention ; l'accès à tous les lieux de détention et à leurs installations et équipements...

Par conséquent, des réserves qui sont invoquées, la seule qui aurait un sens est le cas de force majeure ; mais ne va-t-elle pas de soi ? Il ne saurait y en avoir d'autres. En particulier, comme l'a rappelé M. Lecerf, les troubles sérieux dans l'établissement ne sauraient tenir lieu de motif : c'est précisément le moment où je pense que la présence du contrôleur peut être le plus utile.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 92.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 32, présenté par Mme Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller est ainsi libellé :

Dans le troisième alinéa de cet article, supprimer les mots :

ou à des troubles sérieux dans l'établissement où la visite doit avoir lieu

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Comme M. Lecerf et M. Badinter, je considère que le droit de visite du contrôleur général ne doit pas faire l'objet de limitations qui ne répondent pas à une nécessité impérieuse d'ordre public, et je m'interroge sur les « troubles sérieux dans l'établissement », sur les graves dysfonctionnements qui sont invoqués.

Moi aussi, je pense que c'est justement dans ces moments-là que le contrôleur général doit intervenir : quand des personnes privées de liberté se plaignent de ne pas être traitées avec le respect dû à leur personne ; quand des conflits surviennent entre les personnes privées de liberté ; quand, précisément, existent des « troubles sérieux dans l'établissement ». Car, si sa mission est d'éviter les problèmes, de les prévenir, il doit aussi contribuer à les régler quand ils se manifestent. Son pouvoir d'observation, de médiation, de contrôle, le place au premier plan quand il s'agit de résoudre des troubles de ce type.

Si les autorités responsables décident de repousser la date d'une visite parce que des troubles sérieux se produisent, c'est qu'elles entendent exclure de fait le contrôleur de sa mission première. L'empêcher de visiter des lieux de privation de liberté dans de telles circonstances, c'est, en effet, une fois de plus, limiter ses pouvoirs, ce qui est tout à fait inacceptable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Je ferai d'abord une observation générale.

Je ne crois pas que le projet de loi visait, dans l'esprit du Gouvernement, à empêcher les visites ; au demeurant, le protocole facultatif comporte lui-même des restrictions. Je pense cependant que le texte s'est inspiré du dispositif de l'inspection générale des prisons en Grande-Bretagne, dans lequel coexistent les visites programmées et les visites inopinées, mais qu'il l'a fait avec, je dirai, une certaine maladresse : à partir du moment où l'on donne au contrôleur général la possibilité de se rendre dans les établissements à tout moment, il ne faut pas, dans le même mouvement, lui imposer de prévenir de sa visite.

Monsieur Mermaz, il est quelquefois utile de prévenir, tout dépend du type de résultat que l'on escompte de l'inspection !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Puisque vous avez un petit peu brocardé les missions sénatoriales sur ce point, je dois rappeler que la commission d'enquête, que je présidais, s'était rapidement rendu compte qu'il était bien plus intelligent que quelques sénateurs visitent l'ensemble de l'établissement et se fassent présenter à tout moment tous les lieux - et pas seulement ceux qui avaient été repeints. Nous avons autant de flair que les députés, parfois même davantage, et nous n'étions pas dupes !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Non, cela ne s'est jamais produit, puisque nous avions décidé de prévenir la veille ! C'est donc que l'on vous a raconté des choses fausses - que bien entendu vous n'avez pas crues.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Pour un établissement parisien, un seul, nous avons effectivement prévenu huit jours auparavant : nous n'avons pas reproduit l'expérience, car nous n'étions pas prêts à nous « faire avoir » une seconde fois.

Quoi qu'il en soit, là n'est pas l'important. Ce qui est compte, je crois que nous pouvons tous en convenir, c'est de combiner visites prévues et visites inopinées, comme cela se pratique en Grande Bretagne, sans restreindre a priori le droit de visite.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

La commission est donc défavorable à l'amendement n° 52, qui vise à supprimer les deuxième et troisième alinéas de l'article 6.

Le troisième alinéa pose un problème différent du deuxième : il concerne les restrictions temporaires - je dis bien « temporaires » - aux visites du contrôleur général, lesquelles sont prévues par le protocole facultatif des Nations unies. Nous y reviendrons tout à l'heure.

Messieurs Lecerf et Portelli, j'aurais aimé émettre un avis favorable sur votre amendement, mais vous l'avez retiré, et à juste raison, au profit de l'amendement n° 36 de Mme Boumediene-Thiery.

Vous proposiez la suppression de l'information préalable des autorités responsables du lieu de privation de liberté avant les visites du contrôleur général. Le projet de loi ne fixe aucun délai pour cette information. À la limite, les autorités responsables pourraient être informées dans l'heure, voire dans la minute précédant la visite du contrôleur général. Dire simplement : « j'arrive », c'est une information, que je sache ! Cette disposition semble donc un peu superflue.

Le principe de l'information préalable n'est d'ailleurs pas prévu dans le protocole facultatif. De même, l'article 719 du code de procédure pénale ne le prévoit pas non plus pour le droit de visite des parlementaires. Il est donc préférable de laisser toute latitude au contrôleur général de choisir entre une visite programmée ou inopinée, selon le cas.

En accord avec M. Lecerf, nous émettons donc un avis favorable sur l'amendement n° 36 de Mme Alima Boumediene-Thiery, dont la rédaction est meilleure.

Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Pour la même raison, monsieur Sueur, c'est bien volontiers sans doute que vous vous rallierez à l'amendement n° 36, dont l'objet est identique à celui de l'amendement n° 64.

Les amendements n° 91, 66 et 65 sont, eux aussi, satisfaits par l'amendement n° 36.

Les amendements identiques n° 21, 67 et 92 tendent à supprimer le troisième alinéa de l'article 6. Ils visent donc à supprimer toute restriction au droit de visite du contrôleur général. La commission étant partagée sur ces amendements, elle s'en remet à la sagesse du Sénat.

Je rappellerai cependant, en tant que rapporteur, que des restrictions peuvent être justifiées dans les cas strictement et limitativement énumérés par l'article 6.

En outre, l'alinéa que l'amendement vise à supprimer reprend mot pour mot le point 2 de l'article 14 du protocole facultatif. Ces restrictions présentent un caractère provisoire. Elles ne conduisent qu'à un report de la visite.

J'en viens à l'amendement n° 32.

La notion de troubles sérieux susceptibles d'être opposés au droit de visite du contrôleur général figure au point 2 de l'article 14 du protocole facultatif. Cette disposition se justifie par la difficulté d'assurer la sécurité du contrôleur dans ces circonstances.

J'ajoute que le contrôleur général n'est pas un médiateur. De même qu'il est souhaitable que cette fonction ne soit pas rattachée au médiateur, de même le contrôleur n'a pas à exercer un rôle de médiation, qu'appellerait nécessairement une situation de trouble.

En revanche, il est souhaitable que le contrôleur général puisse se rendre sur les lieux dès que le calme est revenu pour s'interroger sur les raisons du trouble.

Je demanderai donc le retrait de cet amendement, qui n'a pas été adopté par la commission.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Tous ces amendements visent à supprimer les restrictions aux visites du contrôleur général prévues par l'article 6.

Or, aux termes de l'article 14 du protocole facultatif des Nations unies, il est possible de s'opposer aux visites inopinées du contrôleur général en cas d'impératifs graves et impérieux. Cet article prévoit, en effet, qu'« il ne peut être fait objection à la visite d'un lieu de détention déterminé que pour des raisons pressantes et impérieuses liées à la défense nationale, à la sécurité publique, à des catastrophes naturelles ou à des troubles graves là où la visite doit avoir lieu, qui empêchent provisoirement que la visite ait lieu ». Il ne s'agit donc que d'un report, non d'une interdiction.

Je vous donnerai un exemple précis : en 2003, la maison centrale d'Arles a été inondée. Dans un tel cas, il me semble préférable de reporter la visite du contrôleur.

De même, quand les détenus ne veulent pas remonter de promenade, il peut être préférable de mobiliser le personnel pénitentiaire pour les faire regagner leur cellule plutôt que pour permettre la visite du contrôleur général.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Il ne s'agit que d'un report de la visite, de restrictions temporaires. Pour des raisons de sécurité, nous souhaitons les maintenir, comme dans le protocole.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Évidemment, en cas de tremblement de terre, le Sénat suspend ses travaux !

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Imaginez que le contrôleur arrive au moment d'une évasion. Il sera peut-être plus urgent de s'occuper des conditions de sécurité du personnel et des détenus plutôt que d'accueillir le contrôleur !

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Pour ces raisons, nous sommes défavorables à l'amendement n° 52.

En revanche, nous sommes favorables à l'amendement n° 36.

Nous émettons un avis défavorable sur les amendements n° 91, 66 et 65.

Nous sommes également défavorables aux amendements identiques n° 21, 67 et 92, pour les raisons que je viens d'évoquer.

Enfin, nous sommes défavorables à l'amendement n° 32.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Monsieur Détraigne, l'amendement n° 52 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Je suis prêt à retirer cet amendement, monsieur le président, mais je dois dire que je n'ai pas très bien compris l'avis de M. le rapporteur.

Il a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 52, qui vise à supprimer les deuxième et troisième alinéas de l'article 6, mais il s'en est remis à la sagesse du Sénat sur les amendements identiques n° 21, 67 et 92, qui tendent précisément à supprimer le troisième alinéa !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Monsieur Détraigne, c'est vrai, mais je n'y peux rien. La commission a voté ainsi.

Je vous rappelle que nous nous sommes tous ralliés à l'amendement n° 36, qui tend à supprimer le deuxième alinéa de l'article 6 et à modifier la rédaction du troisième alinéa.

Votre amendement, qui visait très habilement à supprimer les deuxième et troisième alinéas, ne « colle » donc pas, de toute façon ! Je ne peux donc pas émettre un avis favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Monsieur Détraigne, votre amendement est-il toujours maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Je suis pleinement satisfait et je le retire donc au profit de l'amendement n° 36.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L'amendement n° 52 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 36.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

En conséquence, les amendements n° 64, 91, 66, 65, 21, 67 et 92 n'ont plus d'objet.

Je mets aux voix l'amendement n° 32.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Adrien Gouteyron.