Intervention de Jean-Jacques Jégou

Réunion du 15 juin 2010 à 14h30
Débat sur « la loi hôpital patients santé et territoires un an après » — Débat

Photo de Jean-Jacques JégouJean-Jacques Jégou :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, juste avant l’examen du projet de loi HPST, le Sénat avait organisé avec vous, madame la ministre, un débat thématique intitulé « L’hôpital en question ». Beaucoup nous était alors promis avec le projet de loi HPST. Les résultats attendus de ce texte étaient d’ailleurs au cœur du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

Nous voilà donc aujourd’hui réunis pour dresser un bilan, un an après la promulgation de la loi HPST. C’est peut-être un peu tôt… Tous les décrets d’application ne sont pas encore parus, comme l’a indiqué M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales, et les agences régionales de santé se mettent en place progressivement.

Mais ce débat est utile, car il permet de prendre la mesure des efforts qui restent à mener dans le secteur hospitalier. Par ailleurs, ainsi que l’ont dit certains de nos collègues, la mission confiée à Jean-Pierre Fourcade permettra de nous éclairer sur l’application de la loi.

La loi HPST constitue une nouvelle étape dans la réforme de l’hôpital, après la tarification à l’activité, les plans Hôpital 2007 et Hôpital 2012 ou encore la réforme du régime budgétaire et comptable des hôpitaux.

Je retiens principalement deux mesures : la modernisation de la gouvernance hospitalière et la mise en place des ARS, qui devraient permettre un décloisonnement de l’offre des soins ambulatoires, hospitaliers et médico-sociaux, ainsi qu’un meilleur suivi de l’hôpital, le pilotage par la performance étant inscrit dans les missions de ces structures.

Toutefois, comme je viens de le dire, des chantiers importants nous attendent encore, en particulier dans le contexte dégradé de nos finances publiques. Selon les dernières données de la commission des comptes de la sécurité sociale, le déficit de l’assurance maladie devrait s’élever à plus de 10, 6 milliards d’euros en 2009 – pour le seul régime général – et atteindre 13, 1 milliards d’euros en 2010. Il n’était « que » de 4, 4 milliards d’euros en 2008.

Dans ce contexte, l’hôpital constitue un levier de réforme important, les dépenses hospitalières représentant environ la moitié des dépenses de santé relevant du champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM.

Un des premiers chantiers est sans doute le mode de financement de nos hôpitaux.

La T2A a, sans conteste, eu des effets bénéfiques. Mais elle présente également des biais auxquels il convient d’être attentif : plus d’activités engendrant plus de ressources, elle peut en effet inciter à « faire de l’activité ».

Plus de transparence et de pilotage dans l’attribution des dotations au titre des missions d’intérêt général et à l’aide à la contractualisation, les fameuses MIGAC, est également indispensable. Ces enveloppes, en forte augmentation, représentent près de 8 milliards d’euros, et la mission de contrôle que je mène actuellement sur ce sujet, en ma qualité de rapporteur pour avis du projet de loi de financement de la sécurité sociale, me montre les marges de progrès qui existent en la matière.

Je voudrais surtout m’assurer, madame la ministre, que le montant des dotations MIGAC, notamment pour l’aide à la contractualisation, soit en adéquation avec les services réellement rendus et que ces enveloppes ne servent pas de variable d’ajustement pour aider certains établissements de santé à passer le cap de la tarification à l’activité...

Deuxième chantier : la convergence tarifaire.

Nous en avons longuement, et vigoureusement, débattu lors de l’examen du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale. Vous avez proposé, madame la ministre, de reporter de 2012 à 2018 l’achèvement de la convergence tarifaire entre les établissements de santé du secteur public et ceux du secteur privé. Je m’étais opposé à ce report de six ans. J’espère qu’il ne portera pas un coup d’arrêt au processus de convergence, essentiel pour l’efficience de notre système de soins.

Troisième chantier : le retour à l’équilibre des établissements de santé.

Le Président de la République a fixé l’objectif d’équilibre financier de tous les établissements publics en 2012. Malgré une amélioration depuis 2008, près de 40 % des hôpitaux, selon les travaux récents de nos collègues députés, demeurent en déficit, ce qui permet de prendre la mesure des efforts qui restent à accomplir.

Cela m’amène à m’interroger sur deux points : l’investissement hospitalier et le périmètre des missions de l’hôpital.

Sur le premier point, le plan Hôpital 2007 a sans conteste relancé l’effort d’investissement des hôpitaux, contribuant ainsi à améliorer la qualité des infrastructures hospitalières et à les adapter à l’évolution des techniques médicales. Cependant, ces mesures ont surtout été financées par l’endettement, et, comme le notait la Cour des comptes, la viabilité économique des projets n’a pas toujours été assurée. Au moment où le plan Hôpital 2012 est en marche, il me semble essentiel de tirer toutes les leçons du premier plan et de veiller à la soutenabilité de cette politique.

Sur le second point, l’alternative à l’hospitalisation est également, selon moi, un enjeu essentiel. Elle doit passer par la poursuite du développement de la chirurgie ambulatoire et des structures intermédiaires entre l’hôpital et les soins de ville.

Le quatrième chantier, qui me tient particulièrement à cœur, est l’informatisation de notre système de santé.

La commission des finances a formulé de nombreuses propositions en ce domaine et avait, en particulier, appelé à une refonte du pilotage des systèmes d’information de santé. Mes travaux datent toutefois de 2006.

Des mesures ont été prises. Je pense notamment à la création de l’Agence pour les systèmes d’information de santé partagés. Mais où en est-on du dossier médical personnel, le DMP ? J’avais pris acte en 2009, madame la ministre, de votre souhait de relancer ce projet. Le déploiement d’une première version est-il toujours prévu pour la fin de l’année ?

Je le répète : la réforme de l’hôpital ne peut se concevoir sans une action résolue de développement des systèmes d’information, dans un cadre interopérable.

Voilà les quatre principaux points que je souhaitais aborder sur l’hôpital. Les enjeux vont au-delà de la seule loi HPST.

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