Intervention de Denis Badré

Réunion du 29 novembre 2006 à 11h00
Loi de finances pour 2007 — Participation de la france au budget des communautés européennes

Photo de Denis BadréDenis Badré, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Nous sommes réunis ce matin pour examiner l'article 32 du projet de loi de finances pour 2007, qui fixe à 18, 696 milliards d'euros le montant du prélèvement effectué sur les recettes de l'État au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes.

Ce chiffre peut paraître important. En valeur absolue, il l'est dans la mesure où il représente 6, 9 % de nos recettes fiscales nettes. Il est tout de même modéré si l'on considère qu'il correspond à 1 % de notre produit intérieur brut, le PIB, puisque le projet de loi de finances pour 2007 table sur un PIB de 1 856 milliards d'euros.

Ces 18, 696 milliards d'euros représentent également, ce qui relativise notre débat, la moitié des crédits réservés à la mission « Défense » et un tiers des crédits réservés à la mission « Enseignement scolaire ». Le coût de l'Europe pour notre budget reste donc très modéré, et cela d'autant plus si l'on considère que ces 18, 696 milliards d'euros sont l'un des meilleurs investissements que la France puisse faire.

Bien sûr, une analyse en termes de « retour net », qui est détestable et que je critique régulièrement, tendrait à démontrer que la France n'en a pas du tout pour son argent puisque notre pays est contributeur net. Ce débat est bien peu communautaire. Je m'y arrête de nouveau pour condamner ce type d'approche, qui fait du mal à la France et à l'Europe.

Cette analyse, qui nous classe parmi les contributeurs nets, dénature l'image de l'Europe aux yeux des Français. Affirmer que l'Europe a un coût pour la France en limitant la comptabilité des retours à ce qui est chiffrable et localisable dans chaque pays n'est ni honnête ni juste.

Le meilleur exemple est la politique agricole commune, la PAC, dont le retour est supérieur à 10 milliards d'euros. En rappelant l'importance de cette somme, on dresse certains Français contre d'autres, ce qui est désastreux.

On n'insiste pas assez sur le fait que les crédits réservés aux pays concernés par l'élargissement donnent très souvent lieu à des investissements réalisés par des entreprises d'autres États, notamment par des entreprises françaises.

Ces crédits sont comptabilisés au titre des sommes accordées à ces États, mais nous en bénéficions également puisqu'ils élargissent notre marché, ce qui n'est pas sans intérêt pour notre pays.

Je peux citer également l'exemple des crédits des réseaux transeuropéens. Il est évident que, lorsqu'on aménage un port, un aéroport ou une voie de communication dans un des pays de l'Union, cette infrastructure profite à l'ensemble des autres pays, car elle rapproche entre eux les citoyens des différents États de l'Union.

Cette démonstration vaut également pour la libre circulation et le marché unique, dont tout le monde bénéficie. Or il n'y a de retombées chiffrables, identifiables, dans aucun des États membres ! Mais c'est tout l'intérêt pour notre pays d'investir 18, 696 milliards d'euros dans le budget des Communautés européennes.

La démonstration vaut aussi pour la défense ou la mise en place d'une politique communautaire de la recherche ou de l'énergie, dont tout le monde bénéficiera, sans que les retombées soient forcément localisables dans tel ou tel pays.

Consacrer 18, 696 milliards d'euros de notre budget pour garantir durablement la démocratie, la paix et la liberté, c'est ce qui est le moins localisable, mais le plus bénéfique et ce n'est pas cher payé ! C'est moins coûteux, en tout cas, que n'importe quelle guerre !

Le débat sur le « retour net », que je condamne, défait l'Europe et ramène chaque État dans ses frontières, en négligeant le fait qu'aucun des États membres de l'Union n'a plus d'avenir aujourd'hui s'il s'enferme à l'intérieur de ses frontières.

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