Intervention de Denis Badré

Réunion du 29 novembre 2006 à 11h00
Loi de finances pour 2007 — Participation de la france au budget des communautés européennes

Photo de Denis BadréDenis Badré, rapporteur spécial :

Personne ne peut s'y retrouver. Cela dit, j'évoquerai quelques signes encourageants.

Tout d'abord, sur cet aspect budgétaire, je tiens à saluer votre engagement personnel, madame la ministre. De tous les ministres avec lesquels j'ai eu le bonheur de travailler, vous êtes l'un des premiers à être le plus monté en ligne. C'est la réalité ; je l'ai constaté, car je travaille avec vous de manière assidue sur cette question.

Par ailleurs, l'idée d'intégrer la question du budget des Communautés européennes dans la réflexion menée sur le devenir de nos institutions progresse, ce qui est positif. Cette question n'était pas du tout évoquée dans le traité institutionnel ; c'était d'ailleurs la seule lacune que j'avais identifiée à l'époque. Mais peut-être n'était-il pas encore temps de le faire ! Aujourd'hui, nous devons approfondir cette réflexion, qui me semble susceptible de donner lieu à un vrai débat.

Dans ce budget, nous intervenons au cours de la procédure. Le Conseil européen a fixé l'augmentation des crédits de paiement à 3, 8 % par rapport au budget de 2006, alors que le Parlement européen demande une augmentation de 8, 9 %. La concertation qui s'est déroulée le 21 novembre dernier entre le Parlement et le Conseil a échoué.

Nous sommes donc dans le cours d'une procédure complètement floue et laborieuse, qui se situe elle-même dans un contexte particulier dans la mesure où ce budget sera le premier concerné par les nouvelles perspectives financières arrêtées pour les années 2007-2013. Au début de cette année, la présidence autrichienne s'est également déroulée dans des conditions particulièrement laborieuses. Nous voyons de nouveau surgir les difficultés auxquelles se heurte l'Union européenne pour prendre des décisions. Au-delà, elle est confrontée à d'autres difficultés, car on n'est au clair ni sur les compétences ni sur le principe de subsidiarité. En la matière, il faut faire des progrès significatifs.

Je me contenterai de dire que ce budget est bon pour ce qui concerne la recherche et les réseaux transeuropéens, et je constate que la rigueur progresse. Je vous propose donc, mes chers collègues, de voter l'article 32, considérant qu'il n'est pas de l'intérêt de la France d'ouvrir une nouvelle crise européenne, en refusant d'apporter sa contribution au budget européen. Mais, pour que notre vote prenne tout son sens, encore nous faut-il maintenant répondre à la vraie question : Que fait-on maintenant ?

Nous ne devons pas rester là à attendre la prochaine présidence, puis la prochaine élection, ou vice versa selon les Etats, pour prendre des décisions parce qu'il y a toujours une échéance à venir. Pourtant, en ce moment, on s'installe dans cette situation ! Il faut sortir de ce schéma et avancer. Une occasion nous en est donnée avec l'échéance de 2009.

Mon propos s'inscrit strictement dans le domaine budgétaire.

L'exercice budgétaire sur les perspectives financières pour 2007-2013 s'est conclu avec la promesse de rouvrir le débat à mi-parcours, en 2009. Or, le second semestre de 2008 sera sous la présidence française, une présidence qu'il nous faut préparer dès maintenant, notamment en liaison avec l'Allemagne, qui assurera la présidence au premier semestre de 2007. Nous devons savoir ce que nous voulons en faire et travailler, dès le 1er janvier 2007, avec nos partenaires allemands sur des sujets cruciaux pour l'avenir de l'Europe, à savoir la modernisation des recettes et la réforme de la structure budgétaire, la réforme durable de la PAC, la restauration d'une vraie politique agricole, la réussite des élargissements de 2004 et de 2007, le lancement d'une politique de la recherche et de l'énergie, les progrès à faire en matière de défense européenne.

J'y ajouterai une grande politique européenne de codéveloppement. Plus le temps passe, plus je pense que cette politique pourrait être une solution pour sortir de l'impasse. Pourquoi ne pas réfléchir à son lancement ?

Cette politique de codéveloppement viserait à assurer des équilibres, que la stratégie de Lisbonne a tenté d'établir, pour sa part, en matière de recherche et d'innovation, démontrant que l'Europe entend être présente sur le débat relatif à la répartition des activités dans le monde.

Oui, il faut être compétitif par rapport aux pays les plus avancés. En mettant en oeuvre une politique européenne de codéveloppement, on donnerait du sens à l'action menée par la stratégie de Lisbonne et on redonnerait un certain élan à l'Europe, en veillant à ne pas creuser plus encore l'écart existant entre les pays les plus en difficulté et ceux qui sont les plus avancés, entre ceux qui manquent de tout et n'ont d'autre solution que de pratiquer le dumping social ou écologique ou de recourir à l'émigration et ceux qui préparent des jours meilleurs.

Cette politique nous permettrait de progresser sur les débats qu'engage concrètement chaque État membre, et chaque Européen, sur l'immigration ou les délocalisations d'activités. Ainsi, l'Europe pourrait renouer avec sa vraie vocation : servir la paix, et nos jeunes retrouveraient un vrai projet susceptible de les mobiliser.

Pour ma part, je souhaiterais que la France fasse cette proposition à ses partenaires, qui attendent toujours beaucoup d'elle. Ne restons pas dans la situation qu'a décrite dernièrement Jean-Claude Juncker devant la délégation du Sénat pour l'Union européenne.

L'Europe, disait-il en substance, essaie de trouver des solutions pour redonner un élan à sa politique et évoque les cercles concentriques. Les Français se voient, bien évidemment, au centre de ces cercles, puisqu'ils doivent toujours être, selon eux, au centre de tout ! Or, il faut qu'ils sachent que, pour un certain nombre de leurs partenaires de l'Union européenne, notamment ceux qui ont voté en faveur de la Constitution européenne, en particulier les Luxembourgeois et les Espagnols, non seulement les Français ne sont pas au centre des projets qu'ils peuvent élaborer, mais ils n'en font pas du tout partie !

Ces propos, qui m'ont frappé, doivent nous ramener à une certaine humilité. Toutefois, sachant que nos partenaires attendent toujours beaucoup de nous, nous devons avoir l'ambition de leur proposer des solutions pour redonner un élan à l'Europe.

Montrons-leur que, plus que jamais, nous continuons à croire en l'Europe, celle de l'état de droit, de la paix et de la liberté plutôt que celle du « retour net ». Remettons-nous, avec ambition et modestie, au service de la construction européenne et, par là même, de notre pays.

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