Intervention de Philippe Marini

Réunion du 25 novembre 2008 à 16h00
Loi de finances pour 2009 — Débat sur les recettes des collectivités territoriales

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce débat sur les recettes des collectivités territoriales et sur les articles qui s’y rapportent dans le projet de loi de finances est déjà une habitude assez ancienne.

Ce qui est ainsi devenu une coutume sénatoriale permet de formuler un certain nombre de remarques, venant se placer en facteur commun des différents articles relatifs à ces recettes.

À la vérité, madame le ministre, nous avons un peu anticipé, au cours de nos dernières séances, sur les finances des collectivités territoriales en traitant de l’article 9, qui, sans faire formellement partie de ce bloc, en relève fiscalement et économiquement. Il s’agissait en effet de la taxe générale sur les activités polluantes, la TGAP, dans son volet concernant les déchets, élément qui conditionne lui-même la taxe d’enlèvement des ordures ménagères ou la redevance d’enlèvement des ordures ménagères. Nous avons pu parvenir, dans ce domaine, en présence d’Éric Woerth, puis de Christine Lagarde, à un dispositif consensuel auquel l’ensemble des groupes de notre Haute Assemblée a été en mesure de participer.

Je rappellerai tout d’abord que les collectivités territoriales, dans une période de difficultés, de rareté de l’argent public, de crise financière, doivent prendre leur juste part de l’effort consenti par tous, notamment par l’État. Il ne serait pas concevable que, dans cette situation difficile, les gestionnaires des différents budgets publics, aux différents niveaux, ne soient pas associés au respect de normes, de disciplines qui doivent s’appliquer à tous.

Cela conduit notre commission à souscrire à la définition de l’enveloppe globale des concours de l’État, qui sont compris dans la norme d’évolution de 2 %. Cela nous conduit également, fût-ce sans plaisir, à accepter l’inclusion du fonds de compensation de la TVA dans ladite enveloppe, étant entendu que ce fonds est totalement préservé, c'est-à-dire que chaque collectivité ayant réalisé des investissements obtiendra le juste retour arithmétique de ses investissements sous forme de remboursements de la TVA, avec le décalage habituel.

Contrairement à ce que l’on entend trop souvent, ici ou là, le fait d’inclure le FCTVA dans l’enveloppe dite « normée » ne change rien au calcul des droits de chaque collectivité ayant réalisé un investissement à de tels remboursements.

Il n’en reste pas moins que cette contrainte pèse sensiblement sur les variables d’ajustement. Ce poids est, d’année en année, de plus en plus lourd parce que les variables d’ajustement forment une enveloppe décroissante et que le même taux de diminution s’appliquant à une enveloppe qui, en valeur absolue, décroît d’année en année, l’exercice est de plus en plus cruel.

Cette situation est aggravée, pour 2009, par l’inclusion du fonds de compensation de la TVA dans l’enveloppe normée. Puisque le fonds de compensation continue à évoluer à son rythme, c’est-à-dire beaucoup plus vite que la norme de 2 %, il est clair que la répercussion s’opère sur nos fameuses variables d’ajustement.

Par conséquent, de la même manière que l’an dernier, la commission des finances a souhaité rendre cet effort plus supportable. En effet, il ne faut pas oublier, mes chers collègues, que cet effort s’impose à tous, notamment aux différents niveaux de collectivités territoriales. Qu’il s’agisse de collectivités rurales ou urbaines, de communes, d’intercommunalités, de départements ou de régions, la baisse des variables d’ajustement se fait sentir sur tous les budgets locaux.

Nous avons formulé des propositions sous forme d’un amendement global, dont nous sommes prêts à débattre avec le Gouvernement. Nous savons que certains éléments sont susceptibles de retenir son intérêt, d’autres un peu moins ; mais l’essentiel, pour nous, c’est le volume global.

Nous voudrions que, d’une manière ou d’une autre, à partir de gages qu’il va nous falloir trouver ensemble, une petite centaine de millions d’euros soit ajoutée au total des variables d’ajustement entre la loi de finances initiale et le prochain collectif budgétaire.

Ainsi, vous le voyez, madame le ministre, monsieur le ministre, la commission des finances du Sénat est tout à fait ouverte au dialogue sur ce sujet.

Nous souhaitons aussi qu’une attention particulière soit portée aux transferts de charges au détriment des budgets locaux. Je ne parle pas là spécifiquement des transferts de charges résultant d’une décision explicite, voire d’une norme affichée comme telle. Je parle aussi des transferts insidieux, qui chargent la barque à un point que les élus locaux considèrent comme insupportable.

Permettez-moi de vous donner un exemple, parmi beaucoup d’autres, de cette situation qui est vécue par de nombreuses communes dans bien des départements.

Il s’agit de l’ordonnance du 8 septembre 2005 relative aux monuments historiques et aux espaces protégés, dont vous n’êtes responsables ni l’un ni l’autre, puisque vous n’étiez pas membre du Gouvernement à ce moment-là, monsieur le ministre, et qu’en ce qui vous concerne, madame la ministre, le département ministériel dont vous aviez la charge n’avait pas directement trait aux budgets locaux.

Cette ordonnance a créé, au sein du code du patrimoine, une série d’articles tirant les conséquences du principe selon lequel le propriétaire a la responsabilité de la conservation du monument historique classé ou inscrit qui lui appartient.

Jusqu’à présent, une petite commune, par exemple de moins de 1 000 habitants, qui a un ou plusieurs monuments historiques, se contentait d’inscrire dans son modeste budget sa seule participation de 25 %. Aujourd'hui, sans qu’on en ait eu vraiment conscience lorsque la décision a été prise, les dispositions de l’ordonnance l’obligent à y inscrire la totalité de l’enveloppe.

Au final, cette commune, dont la surface financière est forcément très réduite, doit monter l’opération, attendre la subvention de l’État, c'est-à-dire du ministère de la culture, le cas échéant, celle du département, et assumer le risque complet de l’opération, alors qu’elle n’y contribuera en fin de compte que pour 25 % au maximum.

Je pourrais vous donner de nombreux exemples de telles situations.

Si je parle de transfert insidieux, c’est que, à la vérité, le Parlement n’a jamais voté sur ce point. Il y a bien eu une loi d’habilitation, mais ce fut donc à peine une loi !

J’ajoute que l’entrée en vigueur de cette ordonnance a été fixée à une date très tardive : le 1er janvier 2008.

Peut-être le président Hyest a-t-il l’exemple d’une situation de cette nature dans son département…

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