Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, oui, le pays doit engager des réformes en profondeur ! Oui, le pays doit assainir ses finances publiques ! Oui, cette tâche est difficile, surtout quand ces politiques se télescopent avec une crise financière mondiale, dont les répercussions sur l’économie réelle seront, je le crains, très dures !
Un plan de relance nous sera d’ailleurs proposé dans quelques semaines, probablement en janvier prochain, par le Président de la République.
Bien sûr, les collectivités locales, qui représentent 75 % des investissements publics en France, doivent être des partenaires de ce plan de relance. Mais elles ne peuvent l’être que si l’État a la volonté de les associer en toute confiance.
Vous le savez bien, madame le ministre, l’autonomie financière des collectivités locales se réduit aujourd’hui comme peau de chagrin. L’État leur verse à l’heure actuelle 64 % de leurs recettes de fonctionnement, contre 50 % il y a quinze ans.
Alors que les dotations et les compensations sont de plus en plus importantes, leur indexation sera limitée cette année à 2 %, ce qui représente, il est vrai, 0, 5 % de plus que l’inflation. Cependant, face à l’augmentation des dépenses de fonctionnement, il ne s’agit pas d’un geste exceptionnel en faveur des collectivités locales. Celles-ci sont en effet confrontées à une crise immobilière qui va limiter les droits de mutation, à des taux d’intérêt plus élevés et à des dépenses sociales en hausse.
L’équation budgétaire devient donc de plus en plus difficile pour les collectivités locales.
Madame le ministre, alors que l’environnement économique vient d’évoluer avec la crise financière mondiale et qu’un plan de relance s’avère nécessaire, fallait-il créer ce climat d’incompréhension avec les collectivités locales, en intégrant le remboursement de la TVA dans l’enveloppe normée ?
Je souhaite insister ici sur la nécessaire sortie du FCTVA, le fonds de compensation pour la TVA, du périmètre de l’enveloppe normée.
Son dynamisme est tel – il augmentera de 13 % en 2009 – que la progression du remboursement de cette fiscalité représentera plus de la moitié de l’évolution des transferts financiers vers les collectivités et, donc, pénalisera les autres dotations à hauteur d’environ 660 millions d’euros.
Cette moindre capacité d’investissement sera évidemment très dommageable à nos collectivités, tout comme aux entreprises qui réalisent ces investissements, donc à l’économie tout entière et à l’emploi.
Par ailleurs, il nous semble que ce remboursement devrait faire l’objet d’un traitement particulier : plus les collectivités investissent, plus elles versent de TVA à l’État. Il ne s’agit donc ni d’une subvention, ni d’une dotation globale, ni d’une dotation particulière, il s’agit du remboursement d’une taxe, comme c’est le cas pour les entreprises.
D’autres questions viennent aussi interférer avec le ralentissement de la progression des crédits. Par exemple, au moment où nous allons voter des budgets pour l’année 2009, comment concilier cette situation avec les mesures destinées à atténuer l’effet de la prise en compte du recensement de 2006 ?
Indépendamment de l’évolution de la dotation globale de fonctionnement, la baisse ou la stabilisation de nombreuses dotations est également très dommageable. Je pense notamment à la dotation globale d’équipement des communes – 485 millions d’euros –, à la dotation de développement rural – 131 millions d’euros –, à la compensation de la part « salaires » de la taxe professionnelle et à la compensation des pertes de base d’imposition à la taxe professionnelle – 264 millions d’euros au total – qui resteraient également stables.
L’avenir est donc incertain, et il est important de le sécuriser.
J’évoquais au début de mon propos les relations que l’État doit entretenir avec les collectivités, ce qui sous-entend que celui-ci doit leur laisser une réelle liberté pour réaliser leurs missions.
Le partenariat entre l’État et les collectivités doit alors être fondé sur la clarté et la confiance réciproque. Outre une transparence améliorée lors des transferts de compétence, il est nécessaire d’établir des relations financières justes, s’inscrivant dans des perspectives pluriannuelles juridiquement et économiquement plus sûres.
Madame le ministre, plutôt que de transférer la TVA dans l’enveloppe normée, j’aurais proposé que les collectivités soient associées, en toute confiance, au plan de relance et que, pendant trois ans, la TVA soit remboursée dans l’année même de réalisation des travaux.
Dans le cadre de ce nécessaire plan de relance, je serais même allé plus loin, parce que je suis convaincu que les réformes de structure nécessaires pour assainir les finances de l’État ne sont plus aujourd’hui les uniques remèdes : il nous faut organiser et activer la relance, en lui apportant un peu d’oxygène. C’est pourquoi j’aurais également proposé un prêt bonifié de la Caisse des dépôts et consignations aux collectivités qui s’engagent dans des investissements porteurs de développement durable, d’éducation et d’innovation. Je pense, entre autres éléments, aux équipements informatiques des écoles et des collèges.
On évoque par ailleurs le « millefeuille » français et, surtout, sa simplification. Les différentes commissions mises en place, notamment sur ce sujet, sont les bienvenues. Au-delà du nécessaire travail de clarification de l’organisation, c’est une question de finances publiques et, surtout, d’efficacité de la dépense qui est en jeu. Une telle simplification s’inscrit naturellement dans la révision générale des politiques publiques. Il faut mener cette réflexion à son terme.
En outre, le Président de la République a récemment annoncé que tout nouvel investissement réalisé à partir du 23 octobre dernier serait exonéré à 100 % de la taxe professionnelle jusqu’au 1er janvier 2010. Là encore, il est nécessaire non seulement de compenser cette exonération, mais également de prévoir une réforme en profondeur de la taxe professionnelle. Naturellement, elle doit être menée de concert avec l’ensemble des acteurs.
Madame le ministre, j’ai volontairement tenu des propos réalistes et empreints d’une certaine inquiétude. Les citoyens font confiance à leurs élus locaux, parce ceux-ci sont proches d’eux et à leur écoute. Les collectivités jouent ainsi un rôle de pivot relationnel entre l’État et les citoyens, d’interface entre ces deux mondes. Elles nouent avec eux des liens parfois tendus, souvent efficaces, mais toujours indispensables. Alors, respectez-les et faites attention à elles !