Intervention de Isabelle Pasquet

Réunion du 22 octobre 2010 à 14h30
Réforme des retraites — Vote unique

Photo de Isabelle PasquetIsabelle Pasquet :

La procédure que vous nous avez imposée pour examiner les amendements restants a notamment eu pour effet d’éviter que nous parlions sérieusement des difficultés particulières rencontrées par les personnes en situation de handicap.

Je le regrette d’autant plus que notre assemblée a toujours été très sensibilisée sur le sujet, tous groupes politiques confondus, et que, contrairement à ce qu’annonçait hier notre collègue Dominique Leclerc, la « commission n’a pas réalisé une avancée importante ». Elle a fait un premier pas important pour les parents d’enfants handicapés puisqu’ils pourront conserver la possibilité de bénéficier d’une retraite sans décote à 65 ans.

Nous ne pouvons toutefois pas nous en réjouir puisque nous défendions pour notre part – comme la majorité des associations entrant dans le champ du handicap – la possibilité d’offrir aux parents d’enfants handicapés de bénéficier d’un droit à départ anticipé à la retraite, c’est-à-dire avant 60 ans. Car – les parents ne le savent que trop – leur implication, qui n’est pas sans répercussion sur leur déroulement de carrière et donc sur leur retraite, ne cesse pas une fois que l’enfant a atteint l’âge de la majorité. Bien au contraire ! L’allongement de l’espérance de vie profite aussi – qui peut s’en plaindre ? – aux personnes en situation de handicap.

Or, cette chance ne s’est pas accompagnée d’une véritable politique publique en termes de création de structures ou d’établissements d’accueil. C’est encore bien souvent sur les parents que pèsent la responsabilité et l’accompagnement quotidien des personnes en situation de handicap, particulièrement lorsqu’elles sont vieillissantes. Cela est tellement vrai que cette question est la première des inquiétudes exprimées par les parents d’enfant handicapé, y compris quand ceux-ci sont devenus de véritables adultes. Et plus le temps passe, plus les besoins en accompagnement augmentent alors que, dans le même temps, l’usure commence à se faire sentir sur les corps des parents.

C’est ce constat qui nous a conduits à proposer un amendement, dont vous avez refusé de débattre, tendant à accorder pour les parents d’enfant handicapé, la possibilité d’un départ à la retraite sans décote dès 60 ans.

Par ailleurs, je regrette que vous ayez également refusé les amendements que nous vous proposions concernant le niveau même des pensions des personnes en situation de handicap. Pourtant, nous le savons toutes et tous, la seule solution réside dans le travail, vous l’avez dit vous-même ce matin, monsieur le ministre.

Nous avions formulé deux propositions équilibrées. La première revenait à instaurer une majoration de cotisations sociales à l’encontre des employeurs qui ne respecteraient pas leur obligation d’emploi. Dans la seconde proposition, nous demandions que les périodes d’inactivité professionnelle subie en raison même de ce refus soient considérées – pour ce qui relève du calcul des annuités – comme réellement effectuées.

De notre point de vue, rien ne justifie que les personnes en situation de handicap, tout comme les comptes sociaux, soient les victimes de l’obstination des employeurs à écarter durablement les personnes handicapées du monde du travail.

Monsieur le ministre, hier, vous nous avez affirmé que le Gouvernement faisait d’importants efforts pour élever le niveau des pensions des personnes handicapées. Il n’en demeure pas moins que ce sont bien parmi elles que l’on compte les plus démunies des retraités. La situation est grave : des centaines de milliers de personnes en situation de handicap ou de maladie invalidante, quel que soit leur âge, sont condamnées à vivre toute leur vie sous le seuil de pauvreté.

C’est la raison pour laquelle nous avions proposé, sous forme de rapport, que, dans le pire des cas, la pension de retraite des personnes en situation de handicap ne soit pas inférieure à la pension d’invalidité qu’elles percevaient. Seule cette mesure peut permettre de compenser les carrières professionnelles fractionnées par la maladie. Cette question est d’autant plus importante que les personnes en situation de handicap doivent souvent assumer elles-mêmes des frais importants liés à leur situation, notamment à cause du plafonnement des aides.

Enfin, je voudrais dénoncer le fait que les périodes réalisées au titre d’auxiliaire dans la fonction publique ne seront plus comptabilisées comme constituant la carrière de l’agent. Les auxiliaires de vie scolaire, qui exigent à raison la reconnaissance d’un véritable statut, seront demain les victimes d’une telle décision, et je crains fort qu’elle ne participe à les décourager, alors qu’ils jouent un rôle fondamental dans l’accompagnement et l’insertion scolaire et sociale des enfants en situation de handicap.

Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne voterai pas ces amendements.

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