Intervention de Odette Terrade

Réunion du 22 octobre 2010 à 14h30
Réforme des retraites — Vote sur l'ensemble

Photo de Odette TerradeOdette Terrade :

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, avec cette réforme, les femmes payent le prix fort ! Elles seront les premières à en faire les frais. Pourtant, nous sommes bien en 2010 et, avec ce texte que vous avez mené à marche forcée, l’égalité entre les hommes et les femmes reste un vague idéal, réalisé seulement dans les discours du Gouvernement ou dans ses communiqués mensongers publiés dans la presse, alors même que notre pays a chuté de dix-sept rangs au classement des pays selon ce critère : 137e sur 142.

Mais les femmes de notre pays ne sont pas dupes ; elles savent bien que, par cette réforme, les inégalités déjà profondément établies dans notre société sont aggravées et deviennent un couperet au-dessus de leur espérance d’une vie meilleure.

Dans notre système par répartition, le montant des retraites des femmes est le reflet de leur parcours professionnel, s’articulant entre temps partiel souvent imposé, salaires inférieurs à ceux des hommes, congés de maternité, congé parental… Les femmes sont clairement défavorisées tout au long de leur carrière et, avec votre réforme, elles devront subir les conséquences des inégalités patriarcales de notre société jusque dans leur retraite.

Certes, à eux seuls, les systèmes de retraite ne peuvent corriger toutes les inégalités professionnelles et sociales dont les femmes sont victimes. Ils ne peuvent cependant pas les ignorer ni rejeter l’essentiel des corrections à opérer sur la solidarité nationale.

Pour garantir des ressources pérennes à nos retraites par répartition, il fallait trouver d’autres financements que ceux des seuls salariés et ne pas demander toujours plus d’efforts aux femmes. Notre groupe avait formulé des propositions que vous avez délibérément refusées. Pourtant, les moyens existent : les entreprises du CAC 40 disposent aujourd'hui d’un matelas de 146 milliards d’euros de trésorerie, soit une hausse de 5 % par rapport à l’an dernier. La crise ne les a donc pas affaiblies tant que cela.

Alors qu’aujourd’hui les femmes peuvent partir à la retraite à 65 ans à taux plein, avec votre texte prétendument en leur faveur, il leur faudra dorénavant être nées entre 1951 et 1955, avoir élevé au moins trois enfants, avoir interrompu leur activité professionnelle pour élever ces enfants et avoir validé avant cette interruption ou réduction d’activité un nombre de trimestres minimum qui sera fixé plus tard.

Que dire aussi du dispositif destiné aux mères de famille fonctionnaires que vous avez brisé en le plaçant sous le joug du rapprochement public-privé, au détriment du choix de vie de ces milliers de femmes.

Par ailleurs, selon vous, la question de l’égalité serait réglée pour les nouvelles générations : c’est faux puisqu’à 30 ans les femmes salariées totalisent déjà deux trimestres de cotisation de moins que leurs collègues masculins. Aujourd'hui, quatre femmes sur dix perçoivent des retraites de 600 euros, et cette réforme n’y changera rien !

Une nouvelle fois, vous maniez avec beaucoup de brio l’art d’annoncer le pire pour faire apparaître le moins pire comme une avancée progressiste. Avec vous, et ce texte l’illustre hélas magnifiquement, un recul est présenté comme une avancée !

Malgré les recommandations de la HALDE, du COR, et de notre délégation aux droits des femmes, vous refusez de prendre en compte le rôle social des femmes, au travers tant de leurs maternités, qui assurent le renouvellement des générations, que du rôle indispensable qu’elles jouent directement dans l’économie de notre pays.

Exiger l’égalité entre les femmes et les hommes, c’est entraîner l’ensemble de notre société vers le haut. Or vous effectuez le choix inverse et tirez vers le bas nos concitoyennes : leur niveau de pension va se réduire comme peau de chagrin et leur droit à la retraite sera infiniment plus faible et fragilisé.

Bref, vous avez choisi, pour les femmes de ce pays, la précarité, l’iniquité et l’inégalité.

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