Intervention de Marie-Agnès Labarre

Réunion du 22 octobre 2010 à 14h30
Réforme des retraites — Vote sur l'ensemble

Photo de Marie-Agnès LabarreMarie-Agnès Labarre :

Vous êtes des machines à remonter le temps de la démocratie et du progrès social.

Vous êtes restés désespérément sourds à nos explications et à nos propositions, sourds aux offres de dialogue des responsables syndicaux, qui ne s’y feront peut-être pas prendre deux fois, sourds à notre exigence d’organiser un référendum, sourds aux grondements de la rue.

Ah, la rue ! C’était un objectif de votre chef que de la « mater ». Qu’il y prenne garde : on ne mate pas impunément un peuple en colère !

À la fin de l’épreuve parlementaire, je peux affirmer que votre bilan est remarquable. D’aucuns disent ici – d’autres le pensent, mais sans oser le dire – que vous avez changé les règles, mais rien réglé. Ces esprits chagrins ont tort, la preuve : en achevant ce débat au coup de sifflet du maître de vos destins personnels respectifs, vous avez réglé son compte au Parlement. En programmant la mise à mort de la retraite par répartition, vous avez réglé son compte à la solidarité nationale et à notre pacte républicain.

Vous avez réglé leur compte aux femmes, aux jeunes, aux chômeurs, aux victimes de carrières longues, pénibles ou dangereuses. N’est-ce pas remarquable ?

Vous dites que vous avez eu le courage de dire la vérité aux Français. C’est faux. Ce qui est vrai, c’est que vous avez menti avec autant d’aplomb que de persévérance.

Vous avez menti par vos comparaisons européennes : ce n’est pas parce qu’ils y étaient contraints que nos voisins – y compris sociaux-démocrates, hélas ! – ont fait les poches des pauvres gens. C’est parce qu’ils n’ont pas eu le courage de répudier le traité de Lisbonne, de défier le FMI et de prendre l’argent là où il est !

Vous avez menti sur la démographie. Non, la France n’est pas un pays vieillissant. C’est simplement un pays où, grâce à vous, il n’y a pas de boulot pour les jeunes, où il n’y en a plus pour les seniors, et où il y a de la précarité entre les deux !

Vous avez menti à propos de la retraite des femmes.

Vous avez menti -– et comment ! – sur la pénibilité, dont je me demande si vous l’avez déjà éprouvée un jour en dehors de cette enceinte. D’ailleurs, il n’y a plus de métiers pénibles ou dangereux, il n’y a plus que des salariés inaptes à la vie moderne et des tire-au-flanc !

Vous avez menti enfin sur l’efficacité de votre réforme. Votre retraite, c’est la charité garantie par la répartition, payée par les actifs au profit des retraités, mais c’est surtout le financement de tout le reste par la capitalisation, payée par les nantis pour eux-mêmes.

Deux questions, avant que vous ne nous quittiez pour aller fêter ça avec Guillaume et Nicolas…

À qui profitera votre réforme ? Aux assureurs et aux gestionnaires des fonds de pension. Vous garantissez leur profit, tandis qu’eux ne garantissent en aucun cas la retraite de leurs clients.

La politique serait-elle au service des affaires ? Vos récents exploits, monsieur le ministre, démontrent que ce mélange des genres vous est étranger...

Qui trinquera ? Celui à qui on demandera de fournir 85 % de l’effort alors qu’il peine à se loger et à se nourrir, celui qui devra cotiser deux ans de plus et percevra moins, celui qui, vivant plus longtemps peut-être, sera privé de deux ans de retraite en bonne santé.

Vous faites mal aux Français, monsieur le ministre « sarko-commandé », et vous leur faites peur : en semant le doute sur la pérennité de la répartition, vous les obligez à jouer leur fin de vie au casino boursier. C’est cela qui est irresponsable !

Les Français ont déjà compris que le déficit des retraites n’était qu’une broutille au regard des milliards d’exonérations que rien ne justifie, sinon votre passion pour les éleveurs de chevaux et les cultivateurs de truffes...

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