Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 22 octobre 2010 à 22h15
Département de mayotte — Adoption d'un projet de loi organique et d'un projet de loi en procédure accélérée

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes aujourd’hui saisis de deux textes qui vont concrétiser les vœux exprimés par les électrices et les électeurs mahorais à l’occasion du référendum du 29 mars 2009. Leur adoption fera de l’île de Mayotte le 101e département français et le 5e d’outre-mer.

Sachez que nous respectons ce choix, car nous sommes respectueux du suffrage universel et du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Nous regrettons non pas l’issue de cette consultation, mais les modalités et le contexte dans lequel elle est intervenue.

Il conviendrait, me semble-t-il, même si ce n’est pas le chemin le plus facile, de rétablir certaines vérités en les dépouillant de tous les artifices d’un langage dans lequel le pacte pour la départementalisation de Mayotte a enfermé la réalité.

Je ne voudrais pas m’y attarder ce soir, car j’étais revenue sur ce point très longuement lors de mon intervention qui a précédé le référendum. Je m’en tiendrai donc à l’essentiel.

Je le répète, aujourd’hui, nous sommes devant un fait déterminant : 95, 2 % des Mahorais se sont prononcés pour la départementalisation, et nous en prenons acte. Il ne s’agit pas, ce soir, d’entrer dans des polémiques. Nous aurons d’ailleurs l’occasion d’évoquer ultérieurement ce parcours historique.

Quoi qu’il en soit, nous souhaitons que les Mahorais bénéficient exactement des mêmes droits que nos concitoyens métropolitains. Mais nous craignons, madame la ministre, qu’ils ne soient victimes, eux aussi, de la politique antisociale et régressive du Gouvernement. Nous ne souhaitons pas que la départementalisation ne se justifie qu’au regard des enjeux économiques et stratégiques liés au positionnement de ce territoire, car, à Mayotte, comme en métropole, des hommes et des femmes souffrent, ont des besoins et aspirent à vivre mieux.

Ainsi, je ne vous cache pas que le processus de départementalisation, au regard des importants reculs sociaux intervenus en métropole, nous conduit à nous interroger sur l’avenir de Mayotte.

Comptez-vous mettre en œuvre à l’échelle de ce territoire la même politique que celle qui est menée à l’encontre de nos collectivités et qui réduit à néant l’autonomie financière des départements, en leur transférant des compétences nouvelles sans compensation, en gelant leurs dotations financières et en s’attaquant de front à la démocratie locale, notamment par la suppression de la clause générale de compétence ?

Les Mahorais ont voté massivement en faveur de la départementalisation, sans doute parce qu’ils se sentent Français, mais aussi parce qu’ils ont besoin de services publics et qu’ils croient la France en mesure de répondre à leurs attentes.

Or la révision générale des politiques publiques, pièce maîtresse du vaste plan de destruction de notre modèle social, est, à l’heure actuelle, dévastatrice. Elle bouleverse au quotidien l’organisation administrative et le contenu de l’action publique, et elle a conduit à supprimer plus de 100 000 postes de fonctionnaires.

À Mayotte, tout comme en France métropolitaine, la population a besoin d’un véritable service public de l’éducation. Or une grande part des suppressions de postes dues à la RGPP sont intervenues dans l’éducation nationale. La France métropolitaine manque cruellement d’enseignants et Mayotte en fera sans doute aussi les frais, malheureusement.

Les Mahorais ont également besoin, comme nos concitoyens métropolitains, d’un véritable service public de santé. Or Mayotte risque de pâtir du démantèlement de ce secteur.

À vrai dire, l’ensemble de nos services publics ont été démantelés par la politique voulue par le Président de la République, mise en œuvre par le Gouvernement et acceptée par la majorité parlementaire.

La vérité est que ce gouvernement, notamment en raison des options idéologiques auxquelles il a souscrit, n’est pas en mesure d’offrir de véritables services publics aux ultramarins, comme aux métropolitains.

Par ailleurs, le traitement de l’immigration, aujourd’hui particulièrement problématique à Mayotte, risque, au regard de la politique actuellement menée avec zèle par le Gouvernement et le ministre Éric Besson, de prendre des proportions encore plus dramatiques qu’actuellement.

Vous savez, mes chers collègues, que j’ai souvent l’occasion d’intervenir sur toutes les questions relatives à l’immigration, ce sujet me préoccupant personnellement. Comme d’autres – je n’ai pas le monopole en la matière –, les conditions de rétention de centaines d’hommes, de femmes et d’enfants dans le centre de rétention de Mayotte, conditions qualifiées d’« indignes de la République », tant par la Commission nationale de déontologie de la sécurité que par la Défenseure des enfants, m’inquiètent.

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