Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 3 juin 2008 à 21h30
Adaptation du droit des sociétés au droit communautaire

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Premièrement, il améliore certains dispositifs relatifs à la société européenne, dont la création, en 2001, a marqué « une avancée spectaculaire », comme le souligne fort justement M. le rapporteur. Cette création aurait dû logiquement entraîner des opérations de fusion transfrontalières. Or, on le sait, les obstacles n’ont pas été surmontés. L’un des enjeux du projet de loi est précisément de les lever.

Deuxièmement, avec ce texte, ces opérations bénéficieront d’un cadre communautaire spécifique, qui devrait permettre de supprimer les obstacles juridiques subsistant du fait de la disparité des droits nationaux, et je pense ici notamment au droit allemand. C’est certainement un facteur qui jouera en faveur de la compétitivité de nos entreprises. En effet, je le rappelle, l’Allemagne, notre principal partenaire commercial, a fait, sur l’initiative du Chancelier Schroeder et de sa majorité, un effort considérable en matière de compétitivité, effort qui lui permet aujourd’hui d’être bien mieux que nous orientée vers la demande des pays émergents.

Il est intéressant de prendre la mesure de l’obstacle principal qu’il fallait surmonter du point de vue de l’Allemagne, mais aussi des Pays-Bas et de la Suède. Ces pays disposent d’un système de participation des salariés qu’ils ne voulaient pas voir sacrifier au travers de ces fusions. M. Jacques Gautier a été particulièrement bien inspiré de rappeler cet aspect dans son rapport écrit.

C’est, du reste, ce que nous avions constaté avec nos collègues Philippe Marini et Christian Gaudin, en janvier 2007, lors d’une mission que nous avions effectuée dans ces pays et qui nous avait conduits, dans le rapport intitulé « La bataille des centres de décision », à préconiser le renforcement de la participation des salariés aux conseils d’administration et aux conseils de surveillance, ainsi que le renforcement de leur droit à consultation préalable pour obtenir des initiateurs d’offres publiques qu’ils explicitent leurs intentions industrielles, tout en facilitant l’exercice de ce droit par les comités de groupe.

Il est regrettable qu’en France cette « partie prenante » que constituent les salariés et leurs organisations représentatives ne soit pas prise en compte en amont des fusions, des acquisitions et de toutes autres opérations qui affectent la bonne marche des entreprises. Au moins peut-on espérer que la fusion transfrontalière bénéficiera aux salariés du côté français par la négociation prévue par la directive. Vous l’avez rappelé, monsieur le rapporteur, nos collègues députés y ont été attentifs.

Troisièmement, l’adaptation très tardive – trop tardive ! – du règlement du 22 juillet 2003, qui permet d’accueillir la société coopérative européenne est, à mes yeux, une réelle avancée compte tenu du poids économique que représentent les coopératives en Europe. Les coopératives installées sur notre sol ne peuvent qu’y gagner.

D’une manière générale, la singularité du statut coopératif est un atout dans un monde dominé par la finance et où une part trop belle est faite à la rentabilité à court terme, déconnectée de l’économie réelle.

Quatrièmement, au moment où se tiennent des assemblées générales d’actionnaires parfois très houleuses, notamment lorsqu’il s’agit des indemnités généreuses dont se gratifient certains dirigeants, sans rapport avec les résultats de l’entreprise, la transposition de la directive du 14 juin 2006 introduit dans le code de commerce des améliorations quant à l’information des actionnaires sur le gouvernement d’entreprise.

Bien que je croie beaucoup moins aux codes de bonne conduite qu’aux obligations législatives ou réglementaires, je pense que les dispositions transposées augmentent la transparence, notamment sur les opérations hors bilan. La crise financière que nous vivons nous a révélé qu’elles pouvaient être très dangereuses puisque c’est là que se dissimulent les origines de la fameuse crise des .

Les amendements proposés par la commission des lois et visant à l’effectivité de la loi n’appellent pas de remarques particulières.

Mes réserves portent plutôt sur les amendements de simplification, notamment au sujet du rapport sur le gouvernement d’entreprise : les modalités de participation des actionnaires aux assemblées générales seraient renvoyées aux dispositions des sociétés qui le prévoient. Le risque est, à mes yeux, d’affaiblir la portée de la directive à cet égard.

Toutefois, cette réserve n’affecte pas l’intérêt global de ces adaptations, qui, je le répète, sont cohérentes avec le choix du marché intérieur.

Bien sûr, il serait encore préférable d’avoir, à l’échelle européenne, des politiques communes visant à une croissance durable, porteuse d’emplois, et de bons emplois. Toutefois, je le reconnais, c’est un autre débat, que nous aurons à un moment ou à un autre.

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