Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous voici saisis d’un nouveau texte d’adaptation du droit interne au droit communautaire. Un de plus, seraient tentés de dire certains, tant il est vrai que, ces derniers temps, de telles transpositions ont occupé une part substantielle de l’agenda parlementaire.
Nous pouvons, certes, nous en féliciter, même si c’est aussi la preuve – en était-il encore besoin ? – qu’en matière de transposition la France a peu de leçons à donner à ses partenaires européens. En vérité, le fait que notre pays montre si peu d’empressement à se conformer au droit communautaire me semble bien regrettable.
Sur les quatre textes dont le présent projet de loi assure la transposition en droit interne, trois auraient déjà dû faire l’objet de mesures législatives depuis longtemps. Il s’agit là d’un ratio qui, vous en conviendrez, n’est pas flatteur.
Tout en formulant ce regret, je me félicite que l’approche de la présidence française de l’Union nous donne une excellente occasion de nous rattraper.
Je souhaite aussi que le zèle dont nous faisons preuve actuellement ne soit pas exclusivement conjoncturel, car, si nous n’accompagnons pas correctement l’intégration juridique communautaire, nous risquons de perdre la main dans l’élaboration même de la norme communautaire.
Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui est d’autant plus emblématique de cette nécessité d’être plus réactifs dans l’adaptation de notre droit qu’il porte sur une matière qui touche aux fondements de l’Union européenne : le droit des sociétés.
En effet, comme le faisait fort justement remarquer notre rapporteur, Jacques Gautier, le droit des sociétés constitue un domaine dans lequel les traités européens ont doté les institutions communautaires de compétences fortes.
Le lien entre le marché unique et le droit des sociétés est clair. L’achèvement du marché intérieur et l’amélioration de la situation économique et sociale dans l’ensemble de la Communauté qui en découle impliquent non seulement que les obstacles aux échanges commerciaux soient éliminés, mais aussi que les structures de production soient adaptées à la dimension communautaire du marché.
Or le cadre juridique dans lequel les entreprises évoluent au sein de la Communauté reste principalement fondé, aujourd'hui encore, sur les législations nationales, et cette situation entrave considérablement le regroupement de sociétés appartenant à différents États membres.
Le Conseil a, voilà quelques années, adopté d’abord un règlement relatif au groupement européen d’intérêt économique, puis un règlement relatif au statut de la société européenne. Je me permets de faire remarquer que ces instruments juridiques, surtout le second, qui a été mis en place en 2001, ont vu le jour après une période de blocage de près de trente ans ; on peut penser qu’ils constituaient une avancée, mais il s’agissait donc surtout du rattrapage d’un retard.
Les enjeux du texte que nous examinons ce soir sont, comme cela a été dit à plusieurs reprises, au nombre de deux.
S’agissant du règlement du 22 juillet 2003 relatif à la société coopérative européenne, il permet ce que n’autorisait pas le règlement de 2001 créant la société européenne. En effet, ce dernier ne concernait que les sociétés anonymes. Avec le règlement que nous transposons ce soir, c’est un autre modèle de société qui pourra se développer à l’échelle de l’Union. Il s’agit en fait de la reconnaissance de la possibilité d’entreprendre dans l’ensemble de la communauté sous une forme autre que celle de la société anonyme.
On sait que la coopérative est une forme d’entreprise à laquelle la France est particulièrement attachée.