Intervention de Hervé Novelli

Réunion du 28 septembre 2010 à 9h30
Questions orales — Artisans et régime de l'auto-entrepreneur

Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation :

Monsieur le sénateur, certains aspects du régime de l’auto-entrepreneur peuvent effectivement susciter des inquiétudes, particulièrement dans le secteur du bâtiment. C’est une question très importante, et il m’appartient d’apaiser ces craintes en vous apportant des réponses précises.

En premier lieu, je voudrais rappeler pourquoi l’auto-entreprise ne constitue pas, comme on le dit trop souvent, une concurrence déloyale pour les autres formes d’exercice, en termes tant d’exonération du paiement de la TVA que de niveau de charges.

Certes, il est exact que l’auto-entrepreneur n’est pas assujetti à la TVA – cette règle vaut d’ailleurs aussi pour le régime de la micro-entreprise, qui fonctionne depuis près de vingt ans sans inspirer les mêmes inquiétudes –, mais, en contrepartie, il achète ses fournitures et ses matières premières toutes taxes comprises et il ne peut déduire la TVA de ces achats, dont le montant est souvent significatif dans le domaine du bâtiment et des travaux publics.

Une étude, que je tiens à votre disposition, réalisée non par le ministère, mais par l’Ordre des experts-comptables, et actualisée en avril dernier, a montré que le niveau de charges supporté par les artisans relevant du régime de l’auto-entreprise était comparable à celui des autres artisans. À cet égard, la crainte récurrente que vous avez relayée s’explique par la comparaison directe souvent faite, à tort, entre le taux de taxation de droit commun des artisans, qui est de 45 %, et celui des auto-entrepreneurs, qui est de 21, 3 %. Or ces taux différents s’appliquent à des assiettes qui sont elles-mêmes différentes ! En effet, l’artisan est imposé sur ses bénéfices, alors que l’auto-entrepreneur l’est sur l’intégralité de son chiffre d’affaires. Le régime de l’auto-entrepreneur est d’ailleurs très peu attractif en cas d’investissements importants.

En second lieu, je voudrais souligner que l’auto-entrepreneur qui réalise un chiffre d’affaires a l’obligation de le déclarer. C’est seulement en l’absence de chiffre d’affaires qu’il n’est, en l’état actuel du droit, pas tenu à déclaration. Par ailleurs, il convient de rappeler que les auto-entrepreneurs qui ne déclarent pas de chiffre d’affaires pendant plus de trois ans sont automatiquement radiés du régime. Bien entendu, en l’absence de chiffre d’affaires, ils ne bénéficient pas de droits additionnels en matière de retraite.

Les auto-entrepreneurs ont le droit de ne pas exercer d’activité pendant un trimestre : ce régime instaure en fait un « permis d’entreprendre », que chacun peut utiliser à volonté, notamment en cas d’activité complémentaire ou saisonnière. C’est précisément cette souplesse qui fait le succès du dispositif.

Un rapport d’évaluation qui sera rendu public très prochainement tend à confirmer que la mise en œuvre du régime de l’auto-entreprise contribue à réduire le champ de l’économie souterraine, en permettant à des travailleurs dits « au noir » de rentrer dans un cadre légal, où ils sont soumis à des cotisations. Selon ce rapport, près de 23 % des auto-entrepreneurs ont régularisé leur situation antérieure grâce à ce régime.

L’auto-entrepreneur est un entrepreneur comme un autre, qui doit respecter les règles d’exercice de son activité. S’il souhaite exercer une activité artisanale dans le secteur du bâtiment, il est soumis à la réglementation applicable à tous les professionnels de ce secteur, en termes de formation et de qualification professionnelle préalable, d’application des normes techniques, d’hygiène et de sécurité, de déclaration et d’emploi des salariés – le cas est relativement rare –, d’assurance et de responsabilité ou encore de facturation à la clientèle. J’ai veillé à ce que toutes ces règles s’appliquent et à ce que des contrôles soient menés. En particulier, j’ai institué l’obligation, pour l’auto-entrepreneur, de prouver sa qualification professionnelle quand son type d’activité l’exige.

Le rapport d’évaluation du régime de l’auto-entrepreneur que je viens d’évoquer est en voie d’achèvement. Il permet d’établir un premier bilan statistique et une évaluation du fonctionnement du régime, y compris dans le secteur du bâtiment. Ont participé au pilotage de cette évaluation les administrations, les caisses de sécurité sociale dont relèvent les auto-entrepreneurs, les chambres consulaires, les organisations patronales, y compris l’Union professionnelle artisanale, et les représentants des auto-entrepreneurs.

Je suis bien sûr attentif aux préoccupations des organisations professionnelles du bâtiment et des travaux publics. J’entends lutter avec détermination contre d’éventuels abus liés à l’utilisation de ce nouveau régime.

Comme vous l’avez dit, monsieur le sénateur, le régime de l’auto-entrepreneur a dynamisé l’esprit d’entreprise en France : il a changé radicalement la perception de l’entreprenariat par nos compatriotes, ce dont je suis très heureux. Je veillerai, soyez-en certain, à ce qu’il n’y ait pas de dérives ; le cas échéant, je me montrerai impitoyable, car je souhaite le succès de ce nouveau régime. Pour cela, il importe de montrer que les inquiétudes qu’il a pu susciter ne sont pas fondées. Je vais m’atteler à cette tâche dans les semaines qui viennent.

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