La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, auteur de la question n° 843, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et européennes.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à titre liminaire, je voudrais préciser que je vise par cette question non des personnes en particulier, mais le fonctionnement – ou plutôt le dysfonctionnement – de nos ambassades.
Le ministère des affaires étrangères est sans aucun doute le plus « grenello-compatible », car on y recycle les agents fonctionnaires, les agents ou les amis en mal d’exotisme.
Sourires
Le poste d’attaché de presse de l’ambassade des Émirats Arabes Unis, qui était nécessaire, a ainsi été attribué à un agent de Cultures France qui ne parle ni arabe – admettons… – ni anglais. Avouez que cela pose un problème !
Il a donc fallu toute l’inventivité de notre ambassadeur pour créer un poste de secrétaire général de l’ambassade, qui nous coûte 10 000 euros par mois, à quoi il faut ajouter les primes d’expatriation : on ne peut en effet pas, compte tenu de son statut, le rapatrier. Avouez que la révision générale des politiques publiques, la RGPP, n’est pas très bien appliquée sur ce point !
Un autre ambassadeur dans un pays du Golfe a un goût très prononcé et connu pour l’alcool, alors que la consommation publique en est interdite !
Et que dire de cette personne nommée ministre plénipotentiaire au Quai d’Orsay, poste le plus important dans un pays dont le rôle est essentiel pour trouver des solutions au conflit du Proche-Orient, et qui a fait toute sa carrière à Médecins du monde ?
Cerise sur le gâteau – pardonnez-moi cette expression, monsieur le secrétaire d’État –, je suis étonnée, vous le comprendrez, que le nouvel attaché culturel à Mascate, désignée capitale culturelle du monde arabe par l’UNESCO, vienne du Yémen. Vous me direz que ce n’est pas loin et que c’est bon signe. Pas du tout, car, au Yémen, il était conseiller pour l’agriculture, et non pour la culture ! Je suppose que cette nomination à un poste aussi important est due à une erreur de « copier-coller » !
Monsieur le secrétaire d’État, combien de temps encore le ministère des affaires étrangères et notre économie vont-ils supporter ces erreurs de casting ?
Tous les rapports de la commission de la culture comme de la commission des affaires étrangères préconisent pourtant des recrutements locaux, moins chers et beaucoup plus efficaces pour notre action culturelle. Vous le savez, nos agents sont bien implantés dans ces pays, qu’ils connaissent parfaitement. En outre, le problème de leur promotion personnelle ne se pose pas.
Madame le sénateur, je vous remercie de cette question rafraichissante, qui rappelle certains de nos bons auteurs du début du XXe siècle, tel Anatole France.
Je vous prie d’excuser M. le ministre des affaires étrangères et européennes, Bernard Kouchner, en charge de la totalité de ces nominations – le modeste secrétaire d’État que je suis ne s’occupe que de la partie européenne –, qui ne peut être présent ce matin et m’a donc demandé de vous transmettre sa réponse.
Le recrutement des personnels servant dans nos ambassades, dans celles du Golfe arabo-persique comme dans celles d’autres régions du monde, donne lieu à un examen minutieux des profils des agents et du contenu des postes à pourvoir.
Toutes nos représentations diplomatiques comptent des emplois qui, en raison des exigences de confidentialité et des contraintes d’habilitation, sont à pourvoir par des agents titulaires du ministère des affaires étrangères et européennes, le MAEE, ou par des agents en détachement d’autres administrations. Les emplois de la chancellerie diplomatique, des services consulaires, du chiffre ou du poste de défense entrent, notamment, dans cette catégorie. Il n’est alors pas possible de recourir à des agents de recrutement local.
Le MAEE, engagé comme les autres départements ministériels dans la RGPP, a recours à des recrutements d’agents locaux lorsqu’il identifie des fonctions qui peuvent, sans remettre en cause les obligations suscitées, être occupées par ces personnels. Nos ambassades accueillent d’ailleurs de nombreux recrutés locaux, et ce dans le monde entier.
L’envoi d’agents titulaires du MAEE dans la zone arabo-persique fait l’objet d’une analyse des besoins détaillée, notamment sur le plan linguistique. Le MAEE s’attache ainsi à privilégier l’affectation de locuteurs arabes dans nos postes de la zone. Nombre des titulaires du MAEE servant actuellement dans cette région sont de parfaits arabisants qui, de surcroît, connaissent bien le Golfe.
Enfin, il faut noter qu’à l’automne 2010 l’ensemble des chefs de poste nommés dans les pays concernés seront de parfaits arabisants !
J’ajoute à titre personnel, madame le sénateur, que j’ai pris note des cas que vous avez mentionnés, et que je ne manquerai pas de les examiner de très près.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse et de l’attention que vous pourrez porter à ces sujets. Je précise que je suis surtout préoccupée par le poste culturel, qui est un poste de base.
Dieu merci, Allah akbar et Barouch Hachem – soyons œcuméniques
Sourires
Mais s’agissant du poste culturel, il nous faut un poste régional, occupé par un agent recruté localement, connaissant bien la région.
Il y a du travail, et la marge de progression est extrêmement importante ; mais je ne doute pas que, de remarque en remarque, de commission en rapport, nous parvenions, dans un délai plus raisonnable que celui qui nous sépare de l’époque d’Anatole France, à mener une politique culturelle cohérente dans cette région du monde.
À ce propos, vous me pardonnerez de souligner que le rédacteur de votre réponse voulait sans doute parler du Golfe persique et non du Golfe arabo-persique…
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, auteur de la question n° 969, adressée à M. le ministre de la culture et de la communication.
Monsieur le secrétaire d’État, vous voici interrogé sur les dysfonctionnements de différents ministères…
Ma question a trait aux Archives de France.
Le rapport de Jean-François Hébert sur la future Maison de l’Histoire de France a évoqué sept localisations possibles pour cette création. Parmi celles-ci figurait le « quadrilatère » des Archives nationales à Paris, constitué des hôtels de Rohan et de Soubise.
Je ne peux manquer de m’interroger sur le bien-fondé de cette Maison de l’histoire de France, qui consiste à mettre l’Histoire en maison. Mais mon propos s’en tiendra à des sujets plus urgents, plus concrets, si je puis dire.
Les représentants des salariés des Archives de France ont considéré dès le départ qu’une telle installation constituerait un démantèlement du site des Archives nationales à Paris et témoignerait d’une remise en cause des équilibres programmés pour la prochaine ouverture du centre d’archives de Pierrefitte-sur-Seine en 2012.
Il est d’ailleurs à noter que, dans la liste des sept sites envisagés pour cette Maison de l’Histoire de France, figurent des sites à ce jour totalement vides, sous-exploités ou sous-occupés.
Malgré ces éléments, le Président de la République a annoncé lui-même, le 12 septembre dernier, que la Maison de l’Histoire de France sera installée précisément sur le quadrilatère parisien des Archives nationales.
Cette annonce a évidemment suscité une émotion importante parmi les personnels, lesquels occupent l’hôtel de Soubise depuis le 16 septembre dernier. En effet, la solution qui a été retenue parmi les diverses possibilités pose de nombreux problèmes.
Cette émotion va d’ailleurs au-delà des personnels, puisque l’action de ces derniers est largement soutenue. Ils ont notamment fait circuler une pétition à l’occasion des Journées européennes du patrimoine 2010. Tout cela doit être pris en considération.
Les personnels estiment que la Maison de l'Histoire de France se construirait au mépris de la conservation et de la communication des sources de l’Histoire, d’où une contradiction totale entre le fait de vouloir mettre en musée l’Histoire de France et celui de brader en quelque sorte la richesse que constituent les archives de la nation.
Pour toutes ces raisons, il me semble nécessaire de relancer le dialogue quant au lieu d'implantation de la Maison de l'Histoire de France.
Par ailleurs, que compte faire le Gouvernement pour maintenir comme sites de plein exercice les trois centres franciliens des Archives nationales que sont Pierrefitte-sur-Seine, Paris et Fontainebleau, ainsi que pour doter le service à compétence nationale des Archives de moyens humains et matériels suffisants ?
Madame le sénateur, je vous prie tout d’abord d’excuser le ministre de la culture et de la communication, M. Frédéric Mitterrand, qui, ne pouvant être présent ce matin, m’a demandé de vous transmettre sa réponse.
Le 9 mars 2004, le Président de la République a annoncé sa décision de faire construire un nouveau centre pour les Archives nationales à Pierrefitte-sur-Seine. Cet élément majeur pour une refondation des Archives nationales, qui seront désormais déployées sur trois sites – Paris, Fontainebleau et Pierrefitte-sur-Seine – et disposeront de plus de 165 000 mètres carrés, à comparer avec les 34 000 mètres carrés du site parisien, a été porté dès l'origine par le ministère de la culture et de la communication. Il s'est accompagné d'un changement statutaire avec la création d'un service à compétence nationale ainsi que d'une politique soutenue d'investissement et de création d'emplois.
Aujourd'hui, le chantier du bâtiment de Massimiliano Fuksas est très avancé, ce qui permet d'envisager une inauguration du bâtiment fin 2011 et l’ouverture au public au cours du premier semestre 2013 de l'un des centres d'archives les plus modernes d'Europe. Dans un contexte dont vous connaissez pourtant la difficulté, le prochain triennal budgétaire sanctuarise complètement les investissements nécessaires à l'achèvement de ce grand équipement culturel tant attendu par la communauté des historiens, des chercheurs et bien sûr des citoyens.
Pour ce qui est des emplois, on peut observer que le ministère de la culture et de la communication a déjà fait un effort considérable en faveur des Archives nationales dont les effectifs sont passés de 369 équivalents temps plein au 1er janvier 2007 à 447 au 1er mai 2010. La cible d'un effectif de 515 à l'ouverture du site de Pierrefitte-sur-Seine, début 2013, est confirmée, et un plan de recrutement est mis en place pour remplir cet objectif.
Le 12 septembre 2010, le Président de la République a annoncé que la future Maison de l'Histoire de France s'installerait sur le site parisien des Archives nationales. Cette décision ne remet nullement en cause la destination et les activités des Archives nationales sur leur site parisien : toutes les missions fondamentales qu'elles exercent, de la conservation à l'accueil du public, seront maintenues. La localisation sur un même site des Archives nationales et de la Maison de l’Histoire de France revêt un intérêt scientifique et culturel majeur, de nature à faire émerger des synergies et des projets communs innovants. Le projet de la Maison de l'Histoire de France se fera en relation étroite avec les Archives nationales, dans un dialogue approfondi. Par ailleurs, les services du ministère de la culture veilleront à ce que l'installation de la Maison de l'Histoire de France soit en complète adéquation avec le projet scientifique, culturel et éducatif des Archives nationales, actuellement en cours d'élaboration.
Il n'y aura pas de réduction des mètres linéaires d'archives conservées dans le quadrilatère du fait du projet de la Maison de l'Histoire de France. En effet, et comme cela avait été arbitré, les Archives de l'Ancien Régime resteront sur le site parisien : l'affectation des espaces classés « monuments historiques » des Grands Dépôts de Louis-Philippe et Napoléon III sera maintenue. De même, les fonds de minutes des notaires déjà conservées sur le site parisien jusqu'en 1900 y seront maintenus.
Les deux institutions, au service de l'Histoire, seront pleinement complémentaires et leur coopération contribuera à faire du quadrilatère des hôtels de Rohan et de Soubise un grand « campus pour l'Histoire » au cœur de Paris, destiné à la conservation et à la valorisation des sources de l’Histoire ainsi qu'à la diffusion auprès du plus large public des travaux réalisés à partir de celles-ci.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de m’avoir apporté la réponse du ministre de la culture. Le regroupement que vous évoquez paraît idyllique, alors même que les personnels le jugent difficile. Dans une telle situation, une concertation avec les personnels serait à mon avis judicieuse, et il serait utile que le ministre de la culture y soit disposé.
Les personnels des Archives nationales ont tout à fait le souci de la valorisation du site, mais il semble difficile que les nouveaux aménagements proposés ne soient pas en fait réalisés au détriment des Archives nationales !
Par ailleurs, l’argument financier qui a été évoqué est pour le moins douteux, puisque la simple réhabilitation des bâtiments classés du site parisien était estimée à 76 millions d’euros en 1999. Ce montant ne comprenait pas de changement d’affectation.
Dès lors, on peut être très sceptique quant aux propos du ministère, qui projette d'établir sur le site parisien un auditorium, des espaces d'accueil du public et des centres de recherche, pour 60 millions d'euros.
Je crois donc sincèrement que, s’agissant de ces projets, une réelle concertation avec les personnels concernés serait très utile.
La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, auteur de la question n° 915, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le secrétaire d’État, cette question n’est pas seulement la mienne : je relaie également celle de Françoise Laborde, membre du groupe du RDSE. Nous avons en effet l’une et l’autre interrogé le ministre de l’éducation nationale sur la situation des auxiliaires de vie scolaire, ou AVS, des emplois de vie scolaire, ou EVS, et des assistants d’éducation, ou AE.
Depuis la promulgation de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, chacun reconnaît les efforts et les progrès réalisés. Néanmoins, la lenteur à tenir les engagements en matière de scolarisation des enfants atteints d'un handicap ou d'une maladie invalidante infléchit nettement le bilan positif de l'application de cette loi.
À ce titre d'ailleurs, nous avons été de nombreux sénateurs à saisir le 28 octobre 2009 M. le ministre de l'éducation nationale, au motif particulier du non-respect, par le Gouvernement, de l'article 79 de la loi de 2005. Celle-ci prévoyait expressément la création par le Gouvernement, « dans un délai d’un an à compter de la publication de la présente loi, [d’]un plan des métiers, qui aura pour ambition de favoriser la complémentarité des interventions médicales, sociales, scolaires au bénéfice de l'enfant, de l'adolescent et de l'adulte présentant un handicap ou un trouble de santé invalidant ».
Aujourd’hui, il ne s’est rien passé, et chacun peut s’étonner que l’engagement ferme et public pris par l’État, par la voix des ministres, soit resté sans effet. Avant septembre 2010, un nouveau métier d’accompagnant devait ainsi être créé, permettant d’offrir des perspectives de carrière et de mobilité à celles et ceux qui ont choisi de s’engager non seulement dans l’accompagnement des élèves handicapés, mais aussi dans l’assistance aux personnes âgées ou dépendantes. Vous comprendrez, monsieur le secrétaire d’État, que nous souhaiterions vous entendre préciser – c’est notamment mon cas puisque mon département connaît des situations relativement dramatiques – si, oui ou non, le Gouvernement entend atteindre les objectifs annoncés, et en particulier élaborer ce plan des métiers.
Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence du ministre de l’éducation nationale, M. Luc Chatel, qui m’a demandé de vous transmettre sa réponse et de vous rassurer pleinement quant aux objectifs du Gouvernement.
La scolarisation des enfants handicapés et la recherche d'une réponse adaptée à la situation de chacun d'entre eux constituent en effet une priorité pour le Président de la République et pour tout le Gouvernement.
Vous l'avez du reste dit vous-même, monsieur le sénateur, nous avons en fait considérablement progressé en ce domaine. L'effort sans précédent que nous fournissons porte en effet déjà ses fruits. L'année scolaire dernière, plus de 185 000 enfants handicapés ont pu être scolarisés en classe ordinaire, soit 30 000 de plus qu'il y a trois ans et 40 % d'élèves handicapés de plus qu'il y a cinq ans.
Pour certains de ces élèves, la scolarisation est rendue possible par la présence d'un auxiliaire de vie scolaire, ou AVS, qui, dans 50 % des cas, se trouve être un assistant d'éducation recruté sous un contrat de droit public d'une durée maximale de six ans.
Entre la rentrée 2008 et la rentrée 2009, le nombre d'élèves accompagnés a enregistré une progression de 20, 2 %. Au 30 juin 2010, 56 631 élèves bénéficiaient de cet accompagnement.
Cependant, comme vous le savez, nous avons été confrontés, pour la rentrée 2010, à un problème particulier : plusieurs centaines de contrats d'AVS étaient susceptibles de s'interrompre parce qu'ils atteignaient le terme non renouvelable de six ans, risquant ainsi de créer une rupture dans l'accompagnement des élèves handicapés. Pour éviter cette rupture, le Gouvernement a souhaité mettre en place un dispositif de conventionnement avec des associations.
Les 1er et 9 juin derniers, en présence de Nadine Morano, Luc Chatel a donc signé deux conventions avec huit fédérations d’associations. Ce nouveau dispositif est mis en œuvre à compter de cette rentrée.
Ces conventions, qui permettent le recrutement d’AVS par des associations de personnes handicapées ou engagées en faveur des publics à besoins particuliers, contribuent à organiser la mise en place d’une offre de services continue, notamment entre le domicile et l’école, ce qui est l’une des demandes le plus souvent formulées par les familles concernées. La formation continue, prise en charge dans le cadre de la subvention d’État, renforce encore la professionnalisation progressive des auxiliaires et contribue à la pérennisation des emplois.
Comme vous le voyez donc, madame Escoffier, la scolarisation des élèves handicapés et le devenir des auxiliaires sont l'objet de notre attention constante. Avec cette coopération renforcée entre le ministère de l'éducation nationale, le secrétariat d'État chargé de la famille et de la solidarité et les associations concernées, nous engageons une nouvelle étape dans notre effort en faveur de la scolarisation des enfants handicapés et de la continuité des emplois qui les accompagnent. Nous devons tout faire pour leur assurer une véritable égalité des chances et construire leur avenir.
Je tiens bien sûr à remercier M. le secrétaire d’État de la réponse qu’il m’a faite, et j’appelle évidemment de mes vœux une concrétisation très rapide. Mon département de l’Aveyron ne manque pas d’exemples contraires pour le moins inquiétants.
Ce plan des métiers, qui est attendu, n’existe toujours pas ; or, vous n’en avez pas parlé, monsieur le secrétaire d’État. Il reste donc un problème à régler, et je sais que ma collègue Françoise Laborde et moi-même abordons cette rentrée scolaire avec les mêmes difficultés que par le passé. Nous savons que le prochain budget prévoira de nouvelles suppressions de poste, et cela ne manque pas de nous inquiéter encore davantage.
La parole est à Mme Catherine Procaccia, auteur de la question n° 980, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.
Ma question porte sur la possibilité d’une remise en cause des rythmes scolaires actuels et sur un éventuel retour à la semaine de quatre jours et demi.
M. le ministre de l’éducation nationale a en effet lancé une consultation nationale sur les rythmes scolaires et a mis en place un comité de pilotage qui, à mon grand étonnement, a rapidement évoqué la remise en cause de la semaine de quatre jours, décidée par le précédent ministre de l’éducation nationale. Cette éventualité ne manque pas d’inquiéter les communes, les parents d’élèves et les enseignants.
En effet, contrairement à une idée répandue, la semaine de quatre jours ne constitue pas une innovation datant de 2008. Un quart des écoles françaises l’appliquaient déjà avant cette date, et les communes, mais aussi les enseignants et les parents d’élèves qui bénéficient de ce dispositif depuis plusieurs années se posent des questions sur son avenir. Certains d’entre eux m’ont d’ailleurs fait part de leurs inquiétudes.
Ainsi, à Vincennes, commune dont je fus maire-adjoint à l’enseignement, la semaine de quatre jours s’applique depuis 1998. J’en ai moi-même été à l’initiative et, aujourd’hui, pas moins de 4 000 élèves des écoles maternelles et primaires sont concernés.
Afin de respecter le nombre de jours correspondant aux obligations du code de l’éducation, nous avions mis en place un calendrier scolaire spécifique, avec des cours les lundi, mardi, jeudi et vendredi et, parallèlement, une réduction de la durée des vacances de printemps et d’été. Chaque année, ce calendrier devait être approuvé par chacun des douze conseils d’école, à la demande spécifique de l’inspecteur d’académie.
Je souhaiterais donc savoir si le cas particulier des écoles qui pratiquaient déjà la semaine de quatre jours avant 2008 est effectivement intégré dans la réflexion du groupe de travail, et si M. le ministre de l’éducation nationale envisage de prendre des dispositions particulières pour ces communes qui ne relèvent pas du « droit commun récent ».
Enfin, s’agissant du rythme scolaire et du sport l’après-midi, j’attire votre attention sur les établissements situés en milieu urbain dense : toute modification pose un problème d’organisation, qu’il s’agisse des centres aérés – il peut être difficile pour les parents d’y emmener leurs enfants les mercredis après-midi –, des activités sportives diverses ou de la restauration scolaire. Surtout, dans ces communes, les équipements sportifs ne seront jamais suffisamment nombreux pour accueillir tous les élèves chaque après-midi.
Comment M. le ministre de l’éducation nationale entend-il concilier ces impératifs matériels réels avec d’éventuels projets pédagogiques ?
Madame la sénatrice, vous avez souhaité attirer l’attention de Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, porte-parole du Gouvernement, sur l’évolution des rythmes scolaires, et plus précisément sur l’éventuelle remise en cause de la semaine de quatre jours.
Luc Chatel est retenu ce matin par d’autres obligations et m’a donc demandé de bien vouloir vous répondre.
Je voudrais tout d’abord vous rappeler qu’il s’agit d’un sujet très ancien, débattu depuis de très nombreuses années au sein de la communauté éducative.
Comme vous l’avez souligné, la réglementation antérieure permettait aux conseils d’école, après autorisation de l’inspection d’académie, de déroger au calendrier national. Il s’agissait dans la plupart des cas de répondre à la demande des parents d’élèves, qui souhaitaient organiser la semaine autour des quatre jours afin, notamment, de libérer le samedi matin. Le temps d’enseignement ainsi perdu était compensé le plus souvent par un allongement de la durée de l’année scolaire, variable selon les dispositifs choisis. Vincennes, commune dont vous étiez l’élue, madame la sénatrice, tout comme d’autres villes du Val-de-Marne, avait opté pour ce type d’aménagement qui, s’il était dérogatoire, n’en était pas moins concerté.
Que s’est-il passé en 2008 ? Le Gouvernement a décidé non pas de généraliser la semaine de quatre jours, mais de supprimer les cours le samedi matin, ce qui ne revient pas exactement au même, cette suppression pouvant en effet déboucher sur une semaine de quatre jours ou sur une semaine de quatre jours et demi qui inclut le mercredi matin. Dans tous les cas, la décision devait être prise après une concertation menée au niveau local, dans les communes et les écoles.
Dans la plupart des cas, la semaine de quatre jours l’a emporté, avec pour conséquence un allongement non pas de l’année scolaire, mais de la journée scolaire.
Cette première étape ayant été franchie, le ministre de l’éducation nationale a souhaité relancer le débat autour des rythmes scolaires, en ouvrant la conférence nationale sur les rythmes scolaires qui doit rendre ses premières conclusions au mois de décembre prochain.
L’objet de ces travaux n’est absolument pas centré sur la semaine de quatre jours, qu’il n’est pas question, aujourd’hui, de remettre en cause. Le Gouvernement attend les conclusions de la conférence et prendra, bien évidemment, toutes ses responsabilités.
L’essentiel est de savoir quels rythmes correspondent le mieux aux besoins des enfants, afin qu’ils puissent étudier dans les meilleures conditions. Mais d’autres éléments sont également à prendre en compte : comment s’organisent les collectivités locales ? Quelles sont les conséquences économiques des choix effectués ? Vous avez raison de le souligner, madame la sénatrice, de nombreuses questions doivent être traitées, en gardant à l’esprit que l’intérêt de l’enfant doit impérativement rester au cœur de nos débats.
Nous pourrons bien entendu rediscuter de cette question au mois de décembre, lorsque la conférence, qui comprend par ailleurs un sénateur parmi ses membres, rendra son rapport. Je rappelle toutefois que la remise en cause de la semaine de quatre jours ne constitue pas la finalité première de cette conférence.
Je suis très heureuse d’entendre qu’il n’est pas question de remettre en cause la semaine de quatre jours. J’avais en effet été très étonnée de constater que, sur la question des rythmes scolaires, la première piste évoquée était précisément celle-ci.
Moi qui me suis battue pour mettre en place la semaine de quatre jours – Vincennes a été l’une des premières communes du Val-de-Marne à l’instaurer, d’autres ayant suivi après –, je sais qu’il existe en la matière un certain nombre d’ayatollahs qui refusent de laisser les enfants à leurs parents et qui préfèrent les voir en permanence à l’école. Pour l’avoir vécu et pour avoir bataillé pendant des années à côté des parents, puis des enseignants, je sais très bien comment les chronobiologistes et autres spécialistes pensent à l’intérêt de l’enfant ! Mais l’intérêt de ce dernier, c’est peut-être aussi d’être avec ses parents ! De surcroît, les théories sur l’intérêt de l’enfant décrivent un idéal qui doit être adapté aux circonstances particulières : en ville, la plupart des parents travaillent ; en milieu rural, il faut véhiculer les enfants en différents endroits…
Je suis satisfaite de la réponse de sagesse que vous m’avez transmise, monsieur le secrétaire d’État. Elle me rassure et rassurera les collectivités.
Au-delà d’une théorie sur les rythmes de l’enfant, il y a une pratique dont les collectivités locales ne peuvent pas être exclues. Nous avons besoin de pouvoir accueillir ces enfants, et il est hors de question d’impliquer les communes dans des frais impossibles de création de gymnases. J’espère que tous les sénateurs partagent ce point de vue. Nous ne disposons pas tous de bois et de plaines pour permettre aux enfants de faire du sport tous les après-midi !
La parole est à M. Philippe Paul, auteur de la question n° 999, adressée à M. le secrétaire d'État chargé des transports.
Monsieur le secrétaire d’État, l’avant-projet du schéma national des transports, publié le 12 juillet dernier dans le cadre du Grenelle de l’environnement, met à plat les priorités françaises en matière d’infrastructures de transport pour les vingt à trente années à venir.
À cette lecture, nous notons avec inquiétude une possible inversion des priorités ferroviaires dans l’ouest, qui favoriserait la ligne ferrée Nantes-Rennes, composante du futur aéroport Notre-Dame-des-Landes, au détriment des liaisons Quimper/Brest-Rennes-Paris. Cette inversion, si elle se confirmait, contribuerait à accentuer l’enclavement géographique du Finistère, enclavement particulièrement néfaste pour l’attractivité du territoire : implantations d’entreprises compromises, sous-exploitation du tourisme de courts séjours, déséquilibre de l’aménagement du territoire… Les craintes sont nombreuses et toutes étroitement liées les unes aux autres. La compétitivité de la Bretagne, et particulièrement du Finistère, passe nécessairement par le développement de son accessibilité.
Ajoutons à ces inquiétudes le volet développement durable pour lequel les modes de transport alternatifs jouent un rôle fondamental, ou encore la nécessité de garantir une véritable équité territoriale.
J’attire également votre attention sur la nécessité de réduire les temps de parcours sur les liaisons Brest/Quimper-Rennes. En l’état actuel du dossier, la seule création de la ligne à grande vitesse entre Le Mans et Rennes, si elle ne s’accompagne pas de gains de temps entre la pointe bretonne et Rennes, risque d’instaurer une fracture territoriale. Rennes serait certes à une heure trente de Paris, mais il faudrait toujours compter deux heures supplémentaires pour rejoindre Brest ou Quimper.
Le développement économique de l’ouest de notre pays ne doit pas se limiter à une ligne Rennes-Nantes.
N’oublions pas non plus que la compétitivité du secteur de l’industrie agro-alimentaire nécessite une desserte efficace. Le contexte actuel de la filière nous incite à accentuer encore davantage nos efforts dans ce sens.
Aujourd’hui, tous les acteurs économiques, sociaux ou politiques du Finistère, toutes tendances confondues, expriment leurs inquiétudes et se retrouvent autour d’un objectif commun : rendre le territoire attractif et compétitif, et contribuer ainsi au développement global de notre pays.
Aussi, monsieur le secrétaire d’État, je vous demande de m’apporter dès aujourd’hui des assurances sur le fait que le Gouvernement entend bien confirmer aux Bretons le caractère prioritaire du projet des lignes Brest/Quimper-Rennes, et donc son inscription au schéma national des infrastructures de transport, afin d’atteindre l’objectif que nous partageons tous : relier la pointe du Finistère à Paris en trois heures. Il y va de la vitalité et de la compétitivité du Finistère et, par conséquent, de la Bretagne.
Monsieur le sénateur, vous interrogez le Gouvernement sur l’inscription au schéma national des infrastructures de transport, le SNIT, des lignes ferroviaires Brest-Paris et Quimper-Paris.
Comme vous le savez, l’avant-projet du SNIT a été présenté au Comité national du développement durable et du Grenelle de l’environnement le 12 juillet dernier. Ce document est un outil au service d’une mise en œuvre des orientations décidées dans le cadre du Grenelle. Il doit permettre au système de transport de l’État d’évoluer de manière à intégrer pleinement les enjeux de la mobilité durable.
Le projet proposé fait l’objet de discussions depuis le mois de juillet, et il est également soumis pour avis à l’Autorité environnementale. Il sera retravaillé jusqu’au mois d’octobre ou novembre et sera ensuite soumis à la consultation du public, des élus locaux concernés et du Conseil économique, social et environnemental. Enfin, il fera l’objet d’un débat au Parlement d’ici à la fin de l’année.
En matière ferroviaire, l’avant-projet du SNIT souligne la volonté de doter la France d’un réseau complet et de grande qualité. C’est le mode de transport privilégié, tant pour les voyageurs que pour le fret. Ainsi, 4 000 kilomètres de lignes ferroviaires sont inscrits, dont le projet de ligne à grande vitesse Bretagne-Pays de Loire.
Ce projet, qui apportera une contribution majeure en réduisant les temps de parcours globaux vers la Bretagne de trente-sept minutes, fait son chemin : trois entreprises concourent en effet pour sa réalisation et doivent présenter leur offre mi-octobre. Ainsi, le contrat de partenariat public-privé devrait être mis au point en fin d’année.
Parallèlement, un important programme de travaux, s’inscrivant dans la réalisation de l’objectif partagé de mettre Brest et Quimper à trois heures de Paris, est en cours sur les lignes existantes. Ce programme supprime de nombreux passages à niveau et permettra aux trains de circuler plus vite sur les deux axes.
L’enveloppe financière prévue pour ces opérations dans le cadre des contrats de plan État-région a été augmentée grâce au plan de relance que vous avez voté, monsieur le sénateur, la participation de l’État s’établissant à 52 millions d’euros.
Comme vous pouvez le constater, le Gouvernement est vigilant à la qualité et à l’amélioration de la desserte ferroviaire du Finistère.
Monsieur le secrétaire d’État, j’éprouvais quelques craintes avant d’entendre votre réponse, et je les ai malheureusement toujours : j’espérais en effet des garanties un peu plus formelles pour l’inscription de ces lignes ferroviaires au SNIT. Visiblement, rien n’est encore fait. En tout cas, la Bretagne et les Bretons resteront extrêmement attentifs à l’évolution du dossier. Vous pouvez compter sur notre mobilisation, toutes tendances confondues, car c’est un équipement que nous attendons impatiemment depuis des décennies ! La façon dont tout cela prend tournure est extrêmement décevante. Nous resterons donc non seulement vigilants mais extrêmement mobilisés sur ce dossier.
La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, auteur de la question n° 984, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.
Monsieur le secrétaire d’État, je ne veux pas imaginer que l’échangeur de Pujaudran, dans le Gers, sur la route nationale 124, devienne l’archétype de décisions absurdes qui conduisent au gâchis de l’argent public.
L’État a investi 2 millions d’euros pour créer une voie de délestage, pour la durée des travaux du contournement de Léguevin entre Pujaudran et Toulouse, puis l’a abandonnée au lieu de l’utiliser comme seconde branche de l’échangeur, ce qui oblige les riverains à traverser le village pour aller vers Auch. C’est un gaspillage inacceptable des deniers de l’État au moment où l’on tente de justifier le retard des travaux de la route nationale 124 par le manque de financement.
Un investissement de 300 000 euros suffirait pour adapter cette voie, qui desservirait ainsi la partie gersoise et compléterait un demi-échangeur orienté uniquement vers Toulouse par son symétrique orienté vers Auch. Ces travaux permettraient à cinq véhicules sur six de ne plus traverser le village et sécuriseraient l’ensemble de la commune et les usagers de la route.
Les pouvoirs publics doivent rectifier une erreur évidente, admise par les préfets successifs, entraînant un gaspillage choquant alors que l’on demande au pays un effort financier considérable. La déviation de Pujaudran, réalisée en 1989, avait permis entre autres objectifs de sécuriser le village en déviant la circulation des véhicules lourds. Or, depuis la mise en service de la déviation de Léguevin en juillet 2009, la situation s’est grandement détériorée, en matière tant de sécurité routière que d’environnement : le trafic local dans la traversée de la commune a été multiplié par trois dès le premier jour ; entre août et décembre 2009, il a encore doublé, et il continue de progresser régulièrement ; l’insécurité ainsi que les nuisances et la pollution pour les habitants de la commune sont proportionnelles à cette croissance.
Le programme de modernisation des itinéraires routiers, le PDMI, de décembre 2009 prend seulement en compte les travaux de la route à deux fois deux voies et non les aménagements inhérents à la déviation.
Le prochain PDMI est prévu pour 2014. Or, la commune de Pujaudran ne peut attendre quatre ans pour assurer la sécurité à ses habitants !
Quand l’échangeur sera-t-il réalisé dans sa totalité ? Il doit l’être car – vous l’aurez compris, monsieur le secrétaire d’État – aucune autre hypothèse n’est envisageable en raison de son absurdité.
Monsieur le sénateur, j’entends bien le contexte local très délicat que vous évoquez quand vous me faites part des nuisances occasionnées sur la commune de Pujaudran depuis la mise en service de la déviation de Léguevin en juillet 2009.
Ces nuisances sont, me semble-t-il, à comparer au niveau de circulation relevé dans cette traversée.
Le trafic observé dans cette commune lors des campagnes de comptage réalisées fin 2009 est essentiellement local. Le trafic en provenance de Toulouse ne passe en effet plus par Pujaudran, et seul le trafic en provenance de Léguevin traverse cette ville. C’est pourquoi nos comptages ont montré, par exemple, que le trafic de transit ne s’élevait qu’à une douzaine de camions pour les marchandises, ce qui ne constitue à mon avis pas une gêne anormale pour une commune située à proximité de l’aire urbaine de Toulouse.
Je tiens à rappeler que la déviation de Pujaudran a permis à cette commune de bénéficier, lors de sa mise en service en 1989, de l’allégement du trafic de la route nationale 124. Soulignons, même si ce n’est pas forcément très positif, que la commune de Léguevin a dû attendre 2009 pour sa déviation et que celle de Gimont n’en a pas encore.
Par ailleurs, vous le savez, les projets routiers nationaux constituent aujourd'hui une priorité retenue dans le cadre du programme de modernisation des itinéraires routiers, le PDMI. Cette priorité consiste à poursuivre la mise à deux fois deux voies de la route nationale 124 en déviant les dernières agglomérations. Dans le contexte budgétaire très contraint qui est le nôtre et que vous connaissez, il n’est pas envisagé à ce jour de compléter à court terme ce demi-échangeur, ce qui, par ailleurs, imposerait bien évidemment la réalisation d’une nouvelle enquête publique.
Pour autant, j’entends bien vos observations et je mesure votre mécontentement, monsieur le sénateur. Je comprends bien que les décisions antérieures n’ont pas forcément été idéales et qu’il nous est encore nécessaire de travailler ce dossier. C’est pourquoi, compte tenu des demandes de modification des systèmes d’échanges sur l’ensemble de l’axe routier Toulouse-Auch, une étude générale va être réalisée par la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement de Midi-Pyrénées. Cette étude intégrera la problématique de Pujaudran, et c’est à son issue que pourront être précisés les éventuels travaux à réaliser et les modalités de leur financement. Je demanderai bien évidemment que les éléments techniques les plus précis possible soient d'ores et déjà élaborés pour cet aménagement.
Monsieur le secrétaire d’État, je suis un peu consterné que vous m’opposiez comme argument majeur le fait que certaines villes aient attendu plus longtemps… Je vous signale que, pour construire huit kilomètres sur l’A 124, on compte trois ans, que le Gers ne comporte que vingt kilomètres de route à deux fois deux voies, ce qui en fait l’un des départements les plus pauvres à cet égard ; je déplore surtout que, pour couvrir les absurdités d’une administration, vous mettiez en cause la sécurité d’enfants ! Une école est en effet implantée au milieu de cette commune. Dès lors, lorsqu’on m’objecte qu’il n’y a qu’une douzaine de camions par jour, je n’ose pas envisager un accident… Qui sera responsable ? C’est, hélas ! une hypothèse que l’on doit formuler. Je ne comprends pas que, pour 300 000 euros, on sacrifie un investissement de 2 millions d’euros réalisé antérieurement.
Je ne suis absolument pas satisfait de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État. J’avais attiré l’attention de votre cabinet pour que vous ne vous contentiez pas de lire une réponse qui vous a été préparée ! Je vous demande maintenant de sensibiliser le ministère concerné. La sécurité des enfants est en jeu, et je ne fais pas de démagogie : c’est un vrai risque ! Et que l’on ne me dise pas que d’autres communes attendent plus longtemps, car une telle réponse est inacceptable !
La parole est à Mme Odette Terrade, auteur de la question n° 976, adressée à M. le secrétaire d'État chargé des transports.
Monsieur le secrétaire d'État, après l’adoption du texte relatif au Grand Paris, le prolongement de la ligne 14 en Val-de-Marne jusqu’à l’aéroport d’Orly fait partie des pistes à l’étude.
Le prolongement de cette ligne 14 et sa connexion avec l’ensemble des lignes du réseau sont aujourd’hui nécessaires compte tenu des enjeux du territoire du Val-de-Marne, tant pour faciliter la mobilité des populations, pour désenclaver les nombreux quartiers d’habitats collectifs, que pour desservir des équipements déjà existants ou à venir.
En effet, une large bande de territoire située entre la vallée de la Bièvre et la route départementale 7 n’est actuellement pas desservie par les transports collectifs lourds. Ce secteur est pourtant riche en pôles économiques en devenir ou déjà existants, notamment avec la présence de nombreux hôpitaux, et fort de plus de 400 000 habitants, alors qu’il constitue à ce jour l’une des zones des communes de première couronne de la région parisienne les moins bien desservies par les transports collectifs.
Le pôle d’Orly tout proche est le premier pôle économique du sud francilien en termes d’emplois, avec 173 000 emplois et plus de 1 million de mètres carrés de locaux d’entreprises.
Dans le cadre de l’opération d’intérêt national Orly-Rungis-Seine Amont, ce secteur va constituer un territoire de projet majeur partagé entre l’extension des mètres carrés de bureaux, le développement du transport multimodal et les enjeux du marché d’intérêt national, ou MIN, de Rungis, avec son bassin d’emplois de 1 200 entreprises et ses 12 000 emplois.
Or ce pôle d’Orly est très difficilement accessible en transports collectifs. L’accès par l’automobile y est très largement majoritaire, avec les autoroutes A6, A86 et A106, et, en conséquence, toutes ces voies sont saturées.
C’est pourquoi, malgré la création d’une liaison de tramway à l’horizon 2013, des progrès restent à faire en ce qui concerne les modes lourds de transports collectifs type métro ou RER.
La création d’une infrastructure de transports en commun reliant ce territoire à Paris est donc un enjeu majeur pour déployer toutes les potentialités de ce secteur ; dans ce cadre, le prolongement de la ligne 14 constitue une occasion de répondre pleinement à ces objectifs.
De plus, le désengorgement nécessaire du RER B et de la ligne 7 desservant l’ouest de ce secteur, qui seront saturés à terme du fait de l’accroissement de la demande, est un autre objectif à satisfaire rapidement. Le prolongement de la ligne 14 apparaît donc comme indispensable pour soulager leurs fréquentations et pour assurer aux populations un confort et une amélioration de leurs déplacements.
À ce propos, toujours dans l’intérêt des populations concernées, ce prolongement de la ligne 14 devrait être connecté à toutes les lignes de transports existantes ou en projet, à l’image du projet Orbival, porté par les élus, toutes tendances politiques confondues, et le soutien de plus de 60 000 Val-de-Marnais, afin d’offrir un meilleur accès aux populations des villes traversées en créant un nombre suffisant de gares.
Si trois stations sont d’ores et déjà envisagées dans ce projet – à Villejuif, au MIN de Rungis et à l’aéroport d’Orly –, les enjeux précédemment évoqués posent la question de la création d’au moins deux nouvelles stations : une première au carrefour des communes de Villejuif, l’Haÿ-les-Roses et Chevilly-Larue, une seconde autour du Pont de Rungis en lien avec le RER C, pour accroître l’offre de transport et mieux accompagner la mutation de ce secteur prévue dans le cadre de l’opération Seine Amont.
Il conviendrait donc que les études en cours intègrent dès maintenant le mode souterrain pour ne pas aggraver la coupure urbaine et les nuisances aux habitants dans tout ce secteur, déjà marqué par la présence de plusieurs autoroutes et de grandes emprises foncières, qui fracturent l’aménagement urbain et font subir quotidiennement de nombreuses nuisances aux populations riveraines.
C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, dans le cadre du prolongement de la ligne 14 en Val-de-Marne, pouvez-vous me préciser les dispositions envisagées en termes de maillage territorial, de concertation locale et d’accessibilité pour les populations ?
Madame le sénateur, vous soulignez à juste titre l’enjeu de maillage du territoire que comporte le projet de réseau du Grand Paris. Le tracé et les emplacements des gares qui seront retenus devront recueillir le consensus le plus large possible. Vous le savez, un débat public sera organisé à cette fin entre le 30 septembre 2010 et le 31 janvier 2011. De nombreuses réunions – plus de soixante – seront organisées dans les différents territoires concernés par le projet. Elles permettront l’expression des élus locaux et des futurs utilisateurs du réseau du Grand Paris sur le projet, afin que celui-ci corresponde le plus possible à leurs attentes.
S’agissant de la desserte du Val-de-Marne, il est envisagé, à ce stade des études, que le département accueille environ un cinquième des stations du réseau du Grand Paris, ce qui lui permettrait d’être le deuxième département d’Île-de-France le mieux desservi.
S’agissant plus précisément de votre question, à savoir le prolongement de la ligne 14 entre l’Institut Gustave-Roussy à Villejuif et l’aéroport d’Orly, une station pourrait desservir le marché de Rungis au niveau de la porte de Thiais, à proximité de la SILIC, la société immobilière de location pour l’industrie et le commerce.
En outre, toutes les stations situées dans le Val-de-Marne seraient en correspondance – cela répond, me semble-t-il, à votre question – avec des transports en commun en site propre et des lignes d’autobus, ce qui constituerait une nette amélioration du maillage du territoire.
En tout état de cause, aujourd'hui, toutes les options sont envisagées. C’est l’objet même du débat public lancé à partir du 30 septembre – je vous invite bien évidemment à y prendre part – que de pouvoir étudier avec les élus locaux et l’ensemble des utilisateurs quelles sont les dessertes les plus intelligentes pour améliorer la vie de nos concitoyens au quotidien et pour permettre le développement, notamment économique, de la région capitale.
Monsieur le secrétaire d’État, j’ai bien pris note de vos précisions. Il est vrai que la consultation démarre dans le cadre du projet du Grand Paris. La population du Val-de-Marne est très motivée et extrêmement mobilisée, notamment sur le projet Orbival, qui a déjà recueilli plus de 60 000 signatures.
Le Gouvernement pourra compter sur la mobilisation des élus et de la population du département pour que ces projets répondent le mieux possible à des enjeux, tant humains qu’économiques, qui concernent l’ensemble de la région parisienne.
La parole est à M. François Marc, auteur de la question n° 982, adressée à M. le secrétaire d'État chargé des transports.
Ma question porte sur l’objectif d’assurer une desserte ferroviaire de l’extrémité de la Bretagne en moins de trois heures depuis Paris. J’ai déjà interpellé sur ce sujet plusieurs ministres, dont celui des transports, ainsi que le président de RFF, Réseau ferré de France.
Nous sommes inquiets de constater que RFF n’a visiblement reçu aucune commande au titre de la phase 2 de ce projet. Nous avons même pu lire, à la page 106 de l’avant-projet de SNIT, le schéma national des infrastructures de transport, que la Bretagne est classée parmi « les territoires restant à l’écart du réseau des lignes à grande vitesse ». Les choses sont donc très claires !
Il va de soi que nous ne pouvons nous satisfaire de cette situation, d’autant que l’objectif n° 1 du contrat de plan État-région était de ramener à trois heures le temps de trajet entre Brest ou Quimper et Paris, cela étant jugé « impératif pour le développement économique de la région ».
Grâce à l’implication active des collectivités concernées et de la région, la phase 1 du contrat de plan État-région est en bonne voie d’achèvement. Comme vous l’avez indiqué tout à l'heure, monsieur le secrétaire d'État, trente-sept minutes de temps de trajet seront gagnées sur la ligne Le Mans-Rennes, et cinq autres grâce à la suppression de passages à niveau, soit un gain total de quarante-deux minutes. Toutefois, le train le plus rapide met aujourd'hui quatre heures vingt-deux pour relier Quimper ou Brest à Paris. À la suite du gain de quarante-deux minutes que j’évoquais à l’instant, ce temps sera ramené à trois heures quarante. Or l’État s’est engagé à le réduire à moins de trois heures !
Nous sommes d’autant plus inquiets que M. Borloo a déclaré récemment dans la presse que le principe de la création d’une ligne à grande vitesse Nantes-Rennes avait été entériné. Le renvoi aux calendes grecques de la réalisation des lignes TGV Brest-Rennes et Quimper-Rennes semble donc très clairement envisagé par l’État.
Devant ce constat, monsieur le secrétaire d'État, ma question est simple : l’État a-t-il réellement la volonté d’atteindre l’objectif de trois heures de temps de trajet sur lequel il s’est officiellement engagé en 2007 ? Compte-t-il respecter l’épure du document officiel qu’il a signé le 12 avril 2007 ? Les 100 millions d'euros de crédits prévus par l’État pour les études de la phase 2 – qui auraient dû être lancées depuis deux ans déjà ! – seront-ils inscrits au budget de 2011 ? Pour l’heure, RFF n’a toujours reçu aucune commande ! Enfin, va-t-on réviser le SNIT pour y intégrer cette exigence fondamentale ?
Alors que Strasbourg sera à une heure cinquante-cinq de Paris et Bordeaux à deux heures cinq, est-il concevable que trois heures quarante soient nécessaires pour rejoindre Brest ou Quimper depuis la capitale ? C’est tout à fait inadmissible ! Monsieur le secrétaire d'État, cela fait deux ans que nous attendons que la phase 2 soit engagée : nous demandons aujourd’hui des réponses précises à nos questions.
Monsieur le sénateur, à l’instar de M. Paul, vous m’interrogez sur l’objectif, inscrit dans le contrat de projet État-région de Bretagne, de réduire à trois heures le temps de trajet entre Paris et Brest ou Quimper. Je vous confirme l’engagement de l’État sur ce point.
Comme je l’ai indiqué à votre collègue, le Gouvernement est très attentif à l’amélioration de la desserte ferroviaire de la région Bretagne. Mais cela ne se fera pas du jour au lendemain !
La première étape consiste notamment à supprimer 41 des 102 passages à niveau existant sur les lignes Paris-Brest et Paris-Quimper. Je souligne que 210 millions d’euros sont consacrés à ces travaux, qui permettront aux trains de circuler plus vite et réduiront en outre les risques d’accidents aux ouvrages de franchissement.
En parallèle – c’est la deuxième étape –, le projet de ligne à grande vitesse Bretagne-Pays de la Loire permettra de réduire dans une mesure importante les temps de parcours vers la Bretagne. Vous l’avez dit, monsieur le sénateur, ce sont près de cinquante minutes qui seront ainsi gagnées. C’est là un premier progrès très important, me semble-t-il. Comme je l’ai souligné tout à l'heure, mon collègue Dominique Bussereau souhaite que le contrat de partenariat public-privé soit finalisé pour cette tranche dès cette année.
Je vous assure de la mobilisation du Gouvernement quant à la desserte du Finistère. Nous avons notamment veillé à ce que les dessertes de Brest et de Quimper soient inscrites à l’avant-projet de SNIT qui vient d’être soumis à concertation, au titre de la garantie d’une desserte optimisée des territoires à l’écart du réseau des lignes à grande vitesse.
Ces travaux seront réalisés selon un calendrier rapproché et ne seront donc pas affectés par le projet de ligne à grande vitesse Nantes-Rennes, qui a vocation à s’inscrire, à terme, dans une nouvelle liaison ferroviaire transversale Est-Ouest, elle aussi très importante.
Ainsi, la modernisation des lignes et l’optimisation de l’exploitation permettront au grand Ouest breton de bénéficier, comme vous le souhaitez, de la diffusion de l’effet de la grande vitesse qui sera suscité par la réalisation de la ligne Bretagne-Pays de la Loire.
Monsieur le secrétaire d’État, je ne pensais pas entendre un tel aveu de renoncement de la part du Gouvernement… Vous nous avez dit clairement que l’engagement pris de réaliser la phase 2 ne pourrait être tenu du jour au lendemain. Or je vous signale que l’État a signé cet engagement voilà deux ans !
Par ailleurs, vous nous confirmez que la Bretagne figure bien parmi les territoires laissés à l’écart des lignes TGV, et vous nous parlez simplement d’ « optimisation ». Vous confirmez ainsi le désengagement de l’État, qui piétine le contrat de projet qu’il avait signé ! D’ailleurs, à la fin de votre intervention, vous avez indiqué que la réalisation du TGV Rennes-Nantes constitue aujourd'hui la priorité. En définitive, le TGV bifurquera à Rennes vers Nantes et la Vendée, au lieu de poursuivre comme prévu vers Brest et Quimper. La Bretagne intérieure se trouve donc exclue.
Les éléments de réponse que vous nous avez apportés ne font donc que confirmer les craintes qui étaient les nôtres, notamment depuis les déclarations, l’été dernier, de M. Borloo : la Bretagne est aujourd'hui mise à l’écart en matière de desserte par le TGV ! Je déplore très vivement cette situation ; les Finistériens ne pourront accepter un tel désengagement de l’État, qui renie ici sa signature.
La parole est à M. Jacques Mézard, auteur de la question n° 985, adressée à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État.
Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les retards constatés dans la mise en place du logiciel Chorus.
La mise en œuvre du système d’information financière Chorus devait permettre à l’État de disposer d’un outil unifié et fiable retraçant en temps réel l’ensemble des opérations affectant les finances publiques et permettant d’assurer un suivi performant des dépenses. D’un coût de plus de 1, 3 milliard d’euros, ce projet considérable visait à rassembler dans un progiciel de gestion intégrée les fonctionnalités du plus grand nombre d’applications ministérielles et interministérielles de dépenses, de recettes non fiscales et d’inventaires.
Le déploiement du projet Chorus a débuté en 2008, mais la mise en place de cet outil s’accompagne de difficultés considérables et, à ce jour, le dispositif n’est pas véritablement opérationnel.
La Cour des comptes a déjà constaté, à l’occasion de la certification des comptes de l’État, les dommages dus au retard dans la mise à jour des systèmes d’information financière de l’État. Dans son rapport rendu cette année sur la certification des comptes de l’exercice 2009, elle a noté la lenteur de la mise en place du nouveau système d’information Chorus.
La mise en œuvre de ce logiciel dans plusieurs ministères, notamment ceux de la défense et de l’éducation nationale, a engendré de graves dysfonctionnements. Ont ainsi été pointées du doigt les difficultés rencontrées par le ministère de la défense pour payer nombre de fournisseurs, des reports de règlement de factures menaçant l’activité, voire l’existence même, de certaines PME dont la situation de trésorerie est tendue, et entraînant des retards de paiement des sous-traitants en cascade.
Les problèmes dus à un manque de formation et d’accompagnement des utilisateurs et à un certain nombre de dysfonctionnements techniques ont été évoqués pour justifier les ratés du projet et le fait qu’il ne soit pas encore pleinement opérationnel. Aux mois de mai et de juin derniers, des déclarations du ministère ont donné à entendre que, en raison de la nécessité de mener des travaux complémentaires, le déploiement du logiciel Chorus ne serait pas généralisé avant le 1er janvier 2012, alors que 2011 était l’échéance initialement prévue.
Monsieur le secrétaire d'État, ces derniers engagements seront-ils tenus ? Par ailleurs, quelles mesures seront prises afin d’assurer une mise en œuvre rapide et efficace du logiciel Chorus, qui contribuerait à l’assainissement de la situation de notre budget ?
Je vous prie, monsieur le sénateur, de bien vouloir excuser l’absence de mon collègue François Baroin, retenu ce matin par le Comité des finances locales.
Comme vous l’avez très justement souligné, l’État s’est engagé dans une réforme sans précédent de l’organisation de ses services de gestion de la dépense et dans une rénovation de l’ensemble de ses outils.
Dans le cadre de la certification des comptes de l’État, la Cour des comptes a précisé, à juste titre, que l’État devait disposer d’un outil de gestion et de production des comptes permettant d’automatiser et de retracer sans erreurs les opérations réalisées. Pour répondre à cette exigence, l’État a donc mis en place le progiciel Chorus.
Il s’agit non pas d’un simple outil informatique, mais d’un projet de transformation majeure de la fonction financière de l’État, qui concerne plus de 30 000 gestionnaires dans tous les ministères, répartis sur l’ensemble du territoire. Il a pour objet de doter l’État d’un système d’information financière, budgétaire et comptable intégré, qui doit permettre de mettre totalement en œuvre la loi organique relative aux lois de finances.
En janvier dernier, ce nouvel outil a été déployé auprès de 12 000 agents répartis dans les ministères de la défense, de l’intérieur, de la justice, de l’éducation nationale et de la recherche. Plus de 60 000 jours de formation ont été dispensés. Au début du mois de juin, au moment même où la Cour des comptes faisait état des réserves que vous avez évoquées, monsieur le sénateur, Chorus avait permis de régler environ 20 milliards d’euros de dépenses, notamment auprès des fournisseurs de l’État.
Cependant, nous constatons quelques retards d’exécution, qui font bien évidemment l’objet de toute l’attention du Gouvernement. Pour y remédier, un plan d’action a été engagé par le comité d’orientation stratégique du projet et mis en œuvre par la direction générale des finances publiques, la DGFIP, et les ministères concernés, notamment celui de la défense. Ce plan vise en particulier à mettre en place une cellule de traitement en urgence des factures des fournisseurs de l’État, afin d’éviter tout retard préjudiciable à ceux-ci. Le ministre chargé du budget a ainsi demandé à ce que tous les retards soient rattrapés dans les prochaines semaines.
Par ailleurs, à la suite des derniers déploiements, le ministre chargé du budget a demandé que l’estimation du coût du projet soit actualisée et qu’elle soit communiquée, en toute transparence, à l’occasion de l’examen du prochain projet de loi de finances. Contrairement à ce que l’on a pu entendre dire, il semblerait qu’il n’y ait pas, à ce stade, de dérive du projet.
Enfin, s’agissant du respect du calendrier d’exécution et de paiement des dépenses, la fin du déploiement du logiciel Chorus dans l’ensemble des ministères doit intervenir le 1er janvier 2011 pour la tenue des comptes en 2012, comme l’a indiqué le Premier ministre voilà quatre mois, dans un courrier à la Cour des comptes.
Tels sont les éléments de réponse que je souhaitais vous apporter, monsieur le sénateur.
Monsieur le secrétaire d'État, je prends acte avec satisfaction du fait que le logiciel Chorus sera pleinement opérationnel le 1er janvier 2011, mais la situation demeure néanmoins préoccupante, s’agissant d’un investissement lourd de 1, 3 milliard d’euros.
Au mois de juin dernier, M. Baroin avait donné raison à la Cour des comptes : l’État fixe des délais de paiement très ambitieux pour le secteur privé, sans se les appliquer ! Il importe de progresser, et je me félicite, monsieur le secrétaire d'État, de ce que vous ayez la volonté de poursuivre dans cette voie.
La parole est à M. Jacques Berthou, auteur de la question n° 947, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.
Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur la dégradation des services apportés aux assurés sociaux des industries électrique et gazière, les IEG, suite à la mise en place, en 2007, de la Caisse d’assurance maladie des industries électrique et gazière, la CAMIEG, en lieu et place des 104 caisses mutuelles complémentaires et d’action sociale – les CMCAS – qui existaient jusqu’alors.
En effet, cette transition opérée dans la précipitation a entraîné, pour le système d’assurance maladie des IEG, de nombreux dysfonctionnements qui semblent toujours d’actualité et qu’il n’est plus possible d’accepter.
Niant le rôle de proximité de la caisse et prônant la centralisation, le décret instituant la CAMIEG a été publié le 30 mars 2007 pour une application imposée au 1er avril 2007. Du jour au lendemain, on est passé d’une gestion de proximité, via les 104 CMCAS, à une gestion centralisée assurée par la CAMIEG, sise à Nanterre, sans donner à celle-ci les moyens et le temps nécessaires pour prendre en charge correctement cette mission.
Alors que quelque 600 personnes assuraient l’efficacité du fonctionnement des CMCAS, la CAMIEG n’en emploie plus que 200, soit une réduction des effectifs des deux tiers. De plus, la Caisse nationale d’assurance maladie, qui s’était engagée contractuellement dès 2005 à traiter la totalité des feuilles de soins, n’a pas respecté cet engagement. L’échéance a été repoussée de mois en mois, et nous attendons toujours le nouvel outil informatique qui permettra à la CNAM de traiter l’ensemble des feuilles de soins.
Les conséquences de ces bouleversements sont graves : de nombreux remboursements souffrent de retards importants ; les dossiers, lorsqu’ils ne sont pas tout simplement perdus, comportent des erreurs ; enfin, il est plus que difficile de contacter la CAMIEG par téléphone pour obtenir des informations. Aujourd’hui, certains assurés sociaux se trouvent dans des situations insoutenables, et doivent même parfois renoncer aux soins qu’ils envisageaient, faute de moyens.
Je tiens également à mettre l’accent sur la situation des retraités, qui ont vu progressivement leur cotisation augmenter, alors que, dans le même temps, la participation de l’employeur était supprimée, ce qui remet en cause la vocation de solidarité intergénérationnelle de la caisse.
Madame la ministre, je vous demande de bien vouloir répondre à une légitime inquiétude et de me faire connaître les dispositions que vous envisagez de prendre pour mettre un terme à cet état de choses.
Pour ma part, j’estime que l’augmentation des effectifs, la modernisation des systèmes informatiques de la CNAM, la mise en place des antennes de proximité et la restauration de la prise en charge patronale du régime de santé des retraités des IEG permettraient de redonner toute sa qualité à l’organisation des soins et des remboursements pour les personnels des IEG, qui était autrefois citée en exemple.
Avant de donner la parole à Mme la ministre de la santé et des sports, je tiens à souligner sa constante assiduité aux séances de questions orales. Tous les membres de la Haute Assemblée y sont très sensibles.
Vous avez la parole, madame la ministre.
Monsieur le président, je vous remercie de ces cordiales paroles d’accueil.
Le décret constitutif de la Caisse d’assurance maladie des industries électrique et gazière a certes été publié le 30 mars 2007, monsieur Berthou, mais le passage de l’ancien dispositif à cette nouvelle organisation ne s’est pas fait du jour au lendemain, comme vous semblez le laisser entendre dans votre question.
La conception de la CAMIEG résulte d’un relevé des propositions des partenaires sociaux de la branche en date du 5 septembre 2006, ayant fait l’objet d’un accord entre les employeurs et les organisations syndicales des IEG. Le délai séparant la remise du relevé des propositions des employeurs et des organisations syndicales de la parution du décret me paraît raisonnable pour la mise en place d’une réforme de cette ampleur.
C’est cet accord des partenaires sociaux qui a notamment prévu qu’une gestion centralisée des prestations en nature du régime prenne la suite des 106 caisses mutuelles complémentaires et d’action sociale réparties sur le territoire, dont la gestion était certes citée en exemple, mais pour sa mauvaise qualité…
Dès septembre 2006, cet accord a servi de base au travail qui a associé les services des ministères de la santé, de l’industrie et du budget, la réforme ayant imposé de revoir l’organisation administrative et comptable, les relations conventionnelles avec les autres organismes de sécurité sociale, les règles d’affiliation et la définition des prestations. La période de septembre 2006 à janvier 2007 a été consacrée à ces travaux et aux différentes étapes de la validation interministérielle des projets de texte.
Dès février 2007, les différents organismes et organisations professionnelles intéressés par ce projet –organisations syndicales et patronales, Conseil supérieur de l’électricité, CNAMTS, Agence centrale des organismes de sécurité sociale, ou ACOSS – ont été saisis, pour une parution des textes fin mars 2007.
En tout état de cause, le décret du 30 mars 2007 aménageait, dans son article 12, une période transitoire jusqu’au 30 septembre 2007. Pendant celle-ci, qui a d’ailleurs été prolongée par la suite, les caisses mutuelles complémentaires et d’action sociale ont continué d’assurer la gestion du régime pour le compte de la CAMIEG. La phase transitoire vers la nouvelle organisation du régime avait donc été anticipée et prévue dès la conception de cette dernière.
Néanmoins, il est vrai, je le reconnais, que la caisse a connu dès sa création une situation difficile, avec une dégradation de la qualité de service envers les assurés et les professionnels de santé.
Deux facteurs ont contribué à ces dysfonctionnements : d’une part, la complexité du passage d’une gestion effectuée précédemment par 106 caisses mutuelles complémentaires et d’action sociale à un seul organisme ; d’autre part, l’architecture atypique du régime dans le paysage de la protection sociale en France, puisqu’il s’agit d’un régime de sécurité sociale qui comporte deux niveaux obligatoires, de base et complémentaire, avec, dans certains cas, des ayants droit relevant du seul niveau complémentaire.
La CNAMTS s’est engagée à fournir un système d’infogérance pour ce régime. Il est vrai que, eu égard à la complexité que j’évoquais, ce projet informatique a été retardé. Mes services se sont cependant fortement impliqués dans la résolution de ces difficultés en réunissant à plusieurs reprises les différents partenaires. Le nouveau système informatique a été livré par la CNAMTS en août dernier. Il est actuellement en phase de test et devrait être opérationnel à la fin de l’année.
Des plans d’action ont été lancés par la caisse et des progrès réels peuvent être constatés. Depuis 2009, le délai moyen de traitement des prestations a été ramené à sept jours pour les feuilles de soins papier et à trois jours pour les feuilles de soins électroniques, soit des délais similaires à ceux du régime général, sinon meilleurs. Le stock des réclamations, qui a pu s’élever jusqu’à 158 000 au cours de l’année 2008, est descendu à 10 000 à la fin de 2009 et est encore en baisse depuis le début de l’année 2010. Des moyens supplémentaires temporaires ont été accordés à la CAMIEG pour renforcer sa plateforme téléphonique, ainsi que le service chargé de l’affiliation des bénéficiaires.
Pour ce qui concerne les effectifs, une mission de l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, avait été chargée d’effectuer une évaluation du personnel nécessaire. Les coûts de gestion de l’ancien système étaient de 11 % du montant des prestations, contre moins de 5 % dans le régime général : il s’agissait bien là d’un contre-modèle de gestion, monsieur le sénateur !
Dans ce contexte, il me paraît normal que des économies de fonctionnement aient été réalisées, au bénéfice d’ailleurs des comptes du régime, qui sont excédentaires.
Par ailleurs, en complément de la centralisation du régime, le réseau des antennes régionales est en cours de déploiement et son fonctionnement fera l’objet d’une évaluation.
Enfin, le financement du régime est assuré, pour le fonds des actifs, par des cotisations des employeurs et des salariés, et, pour le fonds des inactifs, par des cotisations des actifs et des pensionnés.
Il est vrai que, malgré les excédents que j’ai évoqués, se pose actuellement une difficulté spécifique pour le fonds des inactifs, dont les comptes pourraient se trouver en déficit dans les prochaines années et pour lequel je souhaite que les partenaires sociaux élaborent une solution permettant d’accroître la solidarité intergénérationnelle.
Madame la ministre, vous avez reconnu l’existence des dysfonctionnements très importants sur lesquels j’ai attiré votre attention. Je souhaite qu’ils ne perdurent pas, afin que nous n’ayons pas à refaire le même constat dans l’avenir.
La parole est à Mme Mireille Schurch, auteur de la question n° 950, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.
Madame la ministre, ma question porte sur l’avenir du centre hospitalier de Montluçon, dont le personnel, la direction et les usagers, ainsi que l’ensemble des élus du bassin montluçonnais, apprécieront vivement votre présence dans cet hémicycle ce matin.
Quelque 180 000 habitants, répartis entre trois régions administratives, relèvent du centre hospitalier de Montluçon. Le personnel de l’établissement et sa direction, très mobilisés, veillent à adapter au mieux l’activité aux besoins de la population, à partir des données épidémiologiques et démographiques collectées.
Pour faciliter la continuité des soins, l’établissement a su s’organiser en réseau, notamment par le biais de conventions de partenariat avec le centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand. Il cherche actuellement à améliorer l’organisation médicale du service des urgences, en concertation avec les hôpitaux de Vichy et de Moulins.
Enfin, le centre hospitalier de Montluçon disposera, grâce à la livraison prochaine d’un deuxième plateau technique venant compléter le premier plateau, le pôle mère-enfant et le pôle logistique, d’équipements performants. Ces investissements importants et nécessaires ont pu être réalisés grâce à l’emprunt d’environ 92 millions d’euros. L’établissement était en mesure de faire face au remboursement de ces emprunts à l’époque où ils ont été contractés.
À l’issue de la réforme hospitalière liée à la mise en œuvre du plan Hôpital 2007, l’instauration de la tarification à l’activité, conjuguée à l’évolution défavorable de la démographie médicale, et le contrat de retour à l’équilibre budgétaire ont bouleversé l’activité de l’établissement et rendu déficitaire sa situation financière, à l’instar de celle de la majorité des hôpitaux de France. Ce déficit, cumulé avec l’endettement, crée aujourd’hui une situation inextricable.
Les efforts accomplis en matière de rigueur dans la gestion et de réorganisation des services ont seulement permis de limiter les déficits au titre des exercices 2008 et 2009. Il n’est pas possible aujourd’hui de demander à des personnels qui ne peuvent prendre leurs jours de congés légaux d’effectuer encore plus d’heures supplémentaires, de réduire davantage encore les effectifs des services sans risquer de voir se multiplier les absences ou les arrêts de travail.
Toute l’équipe du centre hospitalier, qu’il s’agisse du personnel ou de la direction, multiplie les efforts, en organisant des services de soins de suite, afin de pallier le manque de lits d’aval, ou en créant un service spécifique pour les personnes atteintes de polypathologies. Ce plan de restructuration permet de mieux répondre encore aux besoins de la population et de conserver la vocation pluridisciplinaire de cet établissement, mais le gain financier reste très modeste, ces adaptations s’effectuant à moyens constants. L’endettement du centre hospitalier de Montluçon atteint 96 % de son patrimoine.
Dans ces conditions, les banques réduisent les facilités financières, et l’établissement vient d’obtenir avec peine le renouvellement de sa ligne de trésorerie. L’absence chronique de moyens compromet la bonne utilisation du plateau technique qui va être livré, et donc le développement futur de l’activité.
Le cumul du remboursement des intérêts et du capital emprunté et des charges de gestion place ce centre hospitalier dans une situation que ne rencontrent que très peu d’hôpitaux publics. Toutes les possibilités de rachat de crédits ont été exploitées ; aucune issue n’est possible sans une aide exceptionnelle pour ramener l’endettement à un taux conforme aux règles habituelles de gestion.
Madame la ministre, quelles actions pouvez-vous envisager rapidement afin de recapitaliser cet établissement indispensable qu’est l’hôpital public de Montluçon ?
Vous m’interrogez, madame la sénatrice, sur la situation de l’hôpital de Montluçon.
L’hôpital public est le pilier du système de santé français. À Montluçon comme ailleurs, je souhaite qu’il puisse répondre aux besoins de santé de la population. La France est le pays où les dépenses hospitalières par habitant sont les plus élevées et compte le maillage hospitalier le plus dense au monde.
Afin de poursuivre son développement et de dégager des marges de manœuvre pour investir, l’hôpital public doit être financièrement à l’équilibre. À cet égard, madame la sénatrice, je dois vous dire très respectueusement que vous avez proféré une énorme contre-vérité : en effet, le budget de 67 % des hôpitaux publics français est à l’équilibre ou excédentaire, et ce pourcentage est encore plus élevé pour les établissements du type du centre hospitalier de Montluçon. Globalement, la situation de l’hôpital public en France ne cesse de s’améliorer, le déficit étant en constante diminution depuis 2007. Par conséquent, se trouver en déficit n’est pas la situation normale pour un hôpital public ! L’objectif d’un retour à l’équilibre peut donc être atteint pour le centre hospitalier de Montluçon, qui doit consentir les efforts nécessaires pour cela.
Dans cette optique, un plan de retour à l’équilibre a été signé à la fin de 2008 et a fait l’objet d’un avenant au début de cette année. Ce contrat intègre deux volets, concernant l’un la maîtrise des dépenses, l’autre l’accompagnement de l’établissement dans le développement de nouvelles activités liées aux besoins du bassin de population.
Ainsi, sont prévus une extension de l’unité d’hospitalisation à domicile, l’ouverture d’un service de soins de suite, le développement de l’activité d’oto-rhino-laryngologie et des coopérations avec les autres centres hospitaliers du département et la clinique voisine. Vous l’avez d’ailleurs dit, madame la sénatrice, les partenariats et les coopérations sont l’une des clés du développement de l’hôpital public.
Nous accompagnons l’établissement dans ses efforts : une aide financière exceptionnelle de 3, 35 millions d’euros lui a été attribuée. Chaque fois qu’un établissement fait des efforts, je le soutiens. Les premiers résultats sont perceptibles, le déficit étant passé de 13 millions d’euros en 2008 à 8 millions d’euros en 2009. Les déficits cumulés restent élevés, puisqu’ils ont été estimés à la fin de 2009 à 23 millions d’euros. Il convient de poursuivre l’action engagée. Un nouveau directeur est arrivé en avril 2009 et mène actuellement une réflexion avec l’ensemble de la communauté médicale en vue de définir un programme stratégique – médical, cela va de soi – pour les années à venir.
Je serai particulièrement attentive à la situation du centre hospitalier de Montluçon, qui doit rester un établissement de référence pour la région. Bien entendu, nous le soutiendrons dans ses efforts, comme nous soutenons les autres établissements en situation financière difficile, qui constituent, je le répète, une minorité.
J’ai pris bonne note de votre engagement à accompagner le centre hospitalier de Montluçon dans ses efforts, madame la ministre. Sa direction, son équipe médicale et ses usagers vous remercient de ces propos.
La situation de cet établissement est extrêmement fragile, et il importe de la conforter. En dépit des efforts consentis et des partenariats engagés, le service d’ophtalmologie a été fermé, le service d’accueil des urgences, où il manque un chef urgentiste, est surchargé en raison de la réduction du nombre de lits, tandis que les soins intensifs en cardiologie ne sont plus assurés.
Le centre hospitalier de Montluçon a donc grand besoin du soutien que vous venez de promettre. Je ne doute pas que vous resterez attentive à la situation de l’hôpital public dans le bassin montluçonnais, et je vous en remercie par avance.
La parole est à M. Christian Cambon, auteur de la question n° 970, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.
J’espère, madame la ministre, que vous serez également attentive au devenir d’une grande structure hospitalière de la région d’Île-de-France, et plus particulièrement du Val-de-Marne.
En effet, les plus vives inquiétudes pèsent aujourd’hui sur l’avenir du pôle d’excellence cardiovasculaire du centre hospitalier universitaire Henri-Mondor-Albert-Chenevier. Le service de chirurgie cardiaque de cet hôpital est, semble-t-il, menacé de fermeture, dans le cadre d’une restructuration annoncée en mars dernier par l’agence régionale de l’hospitalisation d’Île-de-France.
Or la mise en œuvre de ce projet mettrait en péril un pôle cardiologique de référence, unique en Île-de-France et dans l’est parisien. À terme, c’est la qualité des soins rendus aux habitants de son bassin de santé – le Val-de-Marne et la Seine-et-Marne – qui serait remise en cause.
Une telle fermeture ne se justifierait que par une logique comptable. L’unique critère pris en compte par l’ARH serait le nombre des interventions lourdes réalisées sur une année, au mépris de toute autre considération. Pourtant, vous le savez, madame la ministre, les maladies cardiovasculaires représentent aujourd’hui la deuxième cause de mortalité en France après les cancers. La qualité de leur prise en charge et l’efficacité des moyens d’intervention sont donc un enjeu majeur de santé publique.
Or, au CHU Henri-Mondor-Albert-Chenevier, les services de chirurgie cardiaque, de chirurgie vasculaire, de cardiologie médicale et de réadaptation sont réunis au sein d’un pôle cardiovasculaire de renommée internationale. Ce pôle assure, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, la prise en charge des habitants de tout l’est francilien, puisqu’il est le seul centre de chirurgie cardiaque du Val-de-Marne et, au-delà, de la Seine-et-Marne, qui est, je le rappelle, le département le plus vaste de France. La fermeture de ce service aurait donc pour premier effet d’accentuer fortement le déséquilibre de l’offre de soins qui pénalise déjà notre territoire au regard de l’ouest parisien. Une telle décision serait lourde de conséquences pour nos concitoyens, plus de 1 200 000 personnes composant le bassin de santé de cet hôpital.
De plus, la rapidité de l’intervention est une question de vie ou de mort pour les victimes d’accidents cardiaques et cardiovasculaires et pour les accidentés polytraumatisés : jeter ces patients dans les encombrements de Paris serait contraire à toute logique médicale. La qualité d’un service doit-elle se mesurer au nombre d’opérations pratiquées ou, plus finement, au volume d’interventions lourdes évitées grâce aux techniques les plus avancées ?
Le service de cardiologie médicale de ce CHU, deuxième structure francilienne d’accueil des patients atteints d’affections cardiovasculaires après la Pitié-Salpêtrière, arrive très largement en première position pour toutes les activités se substituant à la chirurgie cardiaque lourde. Je pense notamment aux coronarographies et aux angioplasties, ainsi qu’à l’implantation de stimulateurs ou de défibrillateurs.
Cette qualité de prise en charge et l’intensité du travail de prévention expliquent la relative stagnation du nombre des actes opératoires. Une telle situation est entièrement bénéfique, tant pour les patients que pour les comptes de l’assurance maladie.
Si ce service, menacé de fermeture, assure les urgences et prend en charge les patients traités au sein des autres unités, il est aussi en pointe pour la formation des jeunes chirurgiens cardiaques et la production scientifique. Sa disparition aurait une forte incidence sur la cohérence et la complémentarité de l’ensemble des soins et services proposés au sein du pôle cardiaque le plus important d’Île-de-France. Elle sonnerait le glas de l’excellence médicale et scientifique de ce fleuron de notre médecine publique. Une telle décision serait aussi en totale contradiction avec le projet, déjà bien engagé, de département hospitalo-universitaire cardio-pulmonaire mené dans le cadre de la loi « Hôpital, patients, santé et territoires » et viderait de sens un volet important du contrat d’objectifs stratégiques élaboré avec l’université Paris-Est Créteil Val-de-Marne.
Vous comprendrez donc, madame la ministre, l’inquiétude tant des praticiens du CHU Henri-Mondor que des habitants du Val-de-Marne et de la Seine-et-Marne devant ce projet de fermeture d’une structure dont la nécessité et l’excellence ne sont plus à démontrer. Aussi vous serais-je reconnaissant de bien vouloir nous indiquer quel arbitrage vous comptez rendre sur ce dossier. J’espère que vous pourrez nous rassurer.
Vous m’interrogez, monsieur le sénateur, sur l’avenir du pôle d’excellence cardiovasculaire de l’hôpital universitaire Henri-Mondor, où je me suis rendue à plusieurs reprises.
L’Assistance publique-Hôpitaux de Paris conduit actuellement une réflexion sur l’organisation de l’activité de chirurgie cardiaque, à la suite de la publication du nouveau schéma régional d’organisation sanitaire, le SROS, portant sur l’activité de cardiologie. Je tiens à vous rassurer, monsieur le sénateur : il ne s’agit absolument pas d’une démarche comptable.
Il convient de réfléchir à l’avenir des quatorze centres franciliens de chirurgie cardiaque, dont l’activité tend à stagner. La rareté des équipes médicales incite à regrouper les sites pour améliorer la qualité des soins. En effet, si nous maintenions quatorze centres de chirurgie cardiaque dans la région francilienne, celle-ci diminuerait : la pratique de la chirurgie cardiaque, de moins en moins généraliste, suppose une équipe nombreuse, pluridisciplinaire et extrêmement qualifiée, condition indispensable pour améliorer la qualité et la sécurité des prises en charge. Par ailleurs, il n’y a aucun problème d’accès aux soins en Île-de-France, s’agissant d’une activité qui est, pour l’essentiel, programmée.
Ainsi, le SROS cardiologie, adopté par l’agence régionale de santé d’Île-de-France le 27 mai 2010 à la suite d’une réflexion médicale, préconise un regroupement des activités autour de dix sites de chirurgie cardiaque adulte d’excellence dans la région parisienne. Il ne s’agit donc pas, monsieur le sénateur, d’une vision malthusienne des choses !
L’AP-HP est évidemment concernée par l’orientation prise par le SROS et devrait donc réduire de quatre à trois le nombre de ses sites de chirurgie cardiaque. Il se trouve que le CHU Henri-Mondor est celui d’entre eux qui réalise le plus faible nombre d’interventions : c’est très logiquement ce fait qui a été pris en considération, et non pas une vision comptable des choses. Il s’agit, je le répète, d’assurer la meilleure qualité des soins possible, grâce à des équipes pluridisciplinaires extrêmement étoffées.
Cependant, la suppression de l’activité de chirurgie cardiaque ne remet pas en cause la qualité de la filière cardiovasculaire de cet établissement. En effet, celle-ci comprend d’autres activités tout aussi importantes, assurées par des équipes tout à fait remarquables, comme les soins intensifs de cardiologie, la rythmologie interventionnelle, la cardiologie clinique, les soins de suite et de réadaptation à orientation cardiologique.
L’AP-HP poursuit sa réflexion. En tout cas, quel que soit le choix finalement arrêté, qui sera fondé non sur des considérations comptables, mais sur le souci d’améliorer la qualité des soins, la continuité des soins sera assurée et l’excellence du CHU Henri-Mondor ne sera absolument pas remise en cause. La chirurgie cardiaque ne constitue que l’un des maillons de la filière de prise en charge cardiologique. Soyez assuré, monsieur le sénateur, que ma seule préoccupation est l’excellence de l’AP-HP et de l’offre de soins pour la population francilienne.
Madame la ministre, je vous donne bien volontiers acte de ce que ce redéploiement ne repose pas sur une logique comptable ; j’en suis heureux, sans être pour autant totalement rassuré. Je souhaiterais, à tout le moins, que vous usiez de votre influence auprès de l’ARH pour qu’elle améliore la concertation avec les médecins concernés, qui n’ont manifestement pas tous compris le sens de la décision à venir.
Par ailleurs, je ne saurais trop insister sur la nécessité de prendre en compte les logiques géographiques : alors que l’on ne cesse de parler d’un rééquilibrage au sein de l’Île-de-France, il conviendrait de ne pas affaiblir les pôles de santé de l’est parisien, où les habitants sont en droit d’attendre une qualité de soins identique à celle dont bénéficie la population de l’ouest parisien.
La parole est à M. Yannick Botrel, auteur de la question n° 978, adressée à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
Les restaurants scolaires, et donc les communes, ont l’obligation de se fournir auprès d’établissements agréés pour les produits carnés, en application du règlement européen n° 853/2004.
En effet, les cuisines des restaurants scolaires qui livrent un site de restauration différent du lieu de confection des repas ne peuvent désormais s’approvisionner qu’auprès de fournisseurs agréés. Cela amène les petites communes rurales à renoncer à recourir au commerce local, qu’elles sont pourtant soucieuses de maintenir, parce qu’il ne peut justifier d’un tel agrément.
Cet agrément répond à un cahier des charges particulièrement contraignant, dont le respect implique bien souvent des travaux importants et coûteux de mise aux normes, hors de portée des petits commerces. Ceux-ci se trouvent donc dans l’impossibilité de fournir les restaurants scolaires et subissent une perte d’activité très pénalisante du point de vue économique. Pourtant, ces boucheries locales sont, très normalement, contrôlées et satisfont aux obligations réglementaires en matière de traçabilité des produits et de garantie sanitaire.
Cette situation va manifestement à l’encontre de la volonté souvent exprimée de maintenir les services commerciaux de proximité dans les communes rurales et, par ailleurs, compromet l’émergence de circuits courts. Elle est pénalisante pour les commerces ruraux de proximité, qui sont un élément essentiel de la vie des territoires. Parfois même, il s’agit d’une menace pour l’existence du commerce local, en grande partie dépendant des marchés passés avec la commune pour son restaurant scolaire.
Au-delà, c’est toute la population qui est concernée par cette question ; je pense en particulier aux personnes âgées et à celles qui ne peuvent se déplacer aisément, pour qui le recours à des commerces de proximité est une nécessité.
Une autre conséquence de l’application rigide de ces dispositions est l’allongement des circuits d’approvisionnement, en contradiction totale avec les principes définis par les récentes lois « Grenelle II » et de modernisation de l’agriculture et de la pêche, qui ont notamment pour objet de favoriser l’émergence de circuits courts.
Madame la ministre, vous me direz sans doute que la seule solution, pour les établissements concernés, consiste à déposer une demande d’agrément auprès de la direction départementale des services vétérinaires. À cela, on peut objecter que satisfaire aux conditions d’obtention de l’agrément induit pour le commerçant un coût que ne peut justifier, économiquement, le seul marché de la restauration scolaire.
Peut-être me direz-vous également que vous n’avez aucun pouvoir sur la réglementation sanitaire communautaire. Pour ma part, je pense au contraire que celle-ci peut être adaptée, et je vous demande en conséquence d’examiner quelles dispositions pourraient être arrêtées afin de prendre en considération la réalité très concrète des communes rurales.
Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de M. Le Maire, qui me donne le plaisir de répondre à votre question. Cela n’est pas illégitime, dans la mesure où l’alimentation scolaire n’est pas sans lien avec la santé publique !
Vous avez interrogé mon collègue Bruno Le Maire sur les problèmes engendrés, pour les commerces de détail locaux, par l’obligation faite aux restaurants scolaires, dans certains cas, de s’approvisionner auprès d’établissements agréés.
L’exemple qui vous préoccupe est celui d’une cuisine scolaire qui livre des sites de restauration extérieurs. Il s’agit donc d’une « cuisine centrale », établissement qui doit être titulaire d’un agrément sanitaire.
Cet agrément sanitaire est requis par la réglementation communautaire, plus précisément par le règlement n° 853/2004, qui fixe les règles spécifiques d’hygiène applicables aux denrées alimentaires d’origine animale. Il convient de rappeler que les obligations qui en résultent existaient dès avant son entrée en vigueur, compte tenu des contraintes sanitaires particulières liées à l’activité de restauration collective.
En vertu de ce texte, l’obligation d’agrément s’applique aux commerces de détail qui fournissent des denrées alimentaires d’origine animale à d’autres commerces de détail.
Dans le cas d’une cuisine centrale, on comprend qu’aucune dérogation à cette obligation ne soit possible, compte tenu des risques particuliers liés à la préparation de repas destinés à être consommés sur des sites extérieurs. Pour les mêmes raisons, et sans dérogation possible, ses fournisseurs doivent également disposer d’un agrément.
En revanche, une dérogation est possible lorsqu’un commerce de détail, par exemple un boucher, entend livrer des cantines scolaires préparant et distribuant leurs repas sur place, sous réserve que la quantité fournie n’excède pas huit cents kilogrammes de viande par semaine et ne représente pas plus de 30 % de son activité. Sinon, le boucher local est tenu de demander et d’obtenir un agrément.
Cependant, il convient de ne pas exagérer l’importance des démarches qu’il est nécessaire d’engager pour l’obtention de cet agrément. En effet, celle-ci n’implique pas nécessairement d’investissements importants, contrairement à ce que laisse entendre votre question. Elle repose d’abord sur une évaluation préalable du mode de fonctionnement du professionnel, destinée à vérifier qu’il garantit bien le respect des exigences d’hygiène. Si tel est le cas, aucun investissement supplémentaire n’est requis.
En définitive, la réglementation me paraît bien concilier les nécessaires impératifs de sécurité et les contraintes des commerçants locaux.
Madame la ministre, au moment de déterminer le destinataire de cette question, j’ai effectivement hésité entre vous et M. le ministre de l’agriculture ! Je vous remercie de votre réponse très détaillée.
Je faisais allusion à une situation antérieure à l’application très stricte de la réglementation européenne. Il va de soi qu’il n’a jamais été question, dans mon esprit, de faire abstraction des règles de sécurité régissant la restauration collective ; il s’agit seulement de prendre en compte des situations ponctuelles très concrètes.
Que recouvre l’expression « cuisine centrale » ? Elle ne désigne parfois qu’un simple restaurant scolaire qui approvisionne une cantine située à proximité immédiate. Cet exemple illustre la réalité de nos territoires.
En tout état de cause, les précisions que vous avez apportées sont de nature à faire avancer les choses.
La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, auteur de la question n° 974, transmise à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur le faible développement du secourisme en France.
Chaque année, 50 000 personnes décèdent à la suite d’accidents domestiques, de la vie quotidienne ou de la route, qui constituent la première cause de mortalité dans notre pays. Or, alors que 80 % des Allemands sont formés aux premiers secours, seulement 27 % de nos concitoyens, selon une enquête de la Croix-Rouge, ont bénéficié d’une telle formation et sont titulaires d’un diplôme de secourisme, tandis que 17 % d’entre eux ont suivi une initiation. Un récent rapport de l’Académie nationale de médecine déplore cette situation.
En outre, la loi ne contient aucune définition claire de ce qu’est le secourisme, alors que deux pratiques différentes coexistent : celle du citoyen témoin, bénéficiaire d’une information ou d’une formation courte, qui porte secours de manière volontaire et bénévole ; celle de la personne engagée dans une action associative ou professionnelle, pour qui secourir fait partie intégrante de son métier, voire représente une source de revenus.
De plus, notre système original de prise en charge des urgences par le service d’aide médicale urgente, le SAMU, dissuade les secouristes bénévoles, premiers témoins, de s’investir complètement, et la crainte de poursuites pénales l’emporte sur le bénéfice de l’action secouriste.
Dès lors, comme le préconise le rapport de l’Académie nationale de médecine, le secourisme pourrait être reconnu comme grande cause nationale, à l’instar de la sécurité routière voilà quelques années.
Cela pourrait conduire, par exemple, à envisager différentes mesures : rendre le diplôme de secourisme obligatoire pour toute personne en situation de responsabilité à l’égard d’un groupe, pour tout pratiquant de sport à risque, pour les candidats aux permis de conduire une voiture ou une moto, de naviguer ou de chasser, pour les nouveaux inscrits à l’université ou les élèves des grandes écoles ; instaurer un parcours civique secouriste pendant toute la vie du citoyen, avec mise à jour périodique des connaissances obligatoires, tant pour les professionnels que pour les bénévoles ; garantir au sauveteur la protection civile et pénale en l’exonérant de toute responsabilité juridique, sauf faute lourde ou inacceptable ; instaurer une charte éthique du secouriste pour accompagner la démarche technique de formation, afin de promouvoir une attitude respectueuse des victimes et de leurs droits essentiels tout en prévenant des débordements coupables ; harmoniser les politiques nationales en la matière à l’échelon européen.
Madame la ministre, le Gouvernement est-il sensibilisé à cette cause ? Quelle est sa position sur ce sujet ?
Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser M. Hortefeux, qui ne pouvait malheureusement être présent ce matin.
Vous attirez l’attention de M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales sur le faible développement du secourisme citoyen en France, alors que, chaque année, 50 000 personnes décèdent de mort subite ou d’accident.
Conscient de la nécessité de refonder la notion de protection des populations, le Gouvernement a défini, dans le cadre de la loi du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, les grandes orientations de l’éducation aux actions de secourisme. L’objectif général que vous avez évoqué, madame la sénatrice, et que le Gouvernement partage pleinement, est donc d’ores et déjà inscrit dans la loi.
Le taux de 27 % de citoyens formés aux premiers secours en 2008 auquel vous faites référence correspond au nombre de secouristes formés par la Croix-Rouge, sur un total de 412 983 certificats de compétences délivrés cette année-là.
Ce taux est en progression d’environ 3 % par an depuis plusieurs années, notamment grâce à l’action conjointe des ministères de l’éducation nationale et de l’intérieur en vue de sensibiliser et de former les jeunes élèves aux gestes élémentaires des premiers secours et à la connaissance du risque.
Un comité de pilotage tripartite réunissant les ministères de l’intérieur, de la santé et de l’éducation nationale, auquel est invité le ministère du développement durable, a été mis en place en 2006 pour mettre en œuvre l’éducation aux risques des élèves. Un document pédagogique a été élaboré à destination de ceux-ci, intitulé « Éduquer à la responsabilité face aux risques ». En outre, un outil pédagogique visant à aider les professeurs a été mis en place à travers la revue « Risques et Savoirs ». Enfin, la direction de la sécurité civile a multiplié les initiatives auprès des acteurs de terrain qui contribuent aux actions de l’éducation nationale.
Par ailleurs, les journées « défense et citoyenneté » intègrent d’ores et déjà cette sensibilisation. Le ministère de l’intérieur a demandé à la direction de la sécurité civile de densifier ce volet, en étroite collaboration avec le ministère de la défense, au travers notamment d’une sensibilisation aux possibilités d’engagement en qualité de sapeur-pompier volontaire.
La mise en œuvre de l’engagement de service civique permettra également d’accroître le nombre de jeunes gens sensibilisés ou formés aux gestes de premier secours.
Enfin, je rappellerai tout l’intérêt que le ministère de l’intérieur porte au mouvement associatif impliqué dans le domaine de la sécurité civile et aux bénévoles membres des associations agréées de sécurité civile. Depuis plusieurs années, la direction de la sécurité civile subventionne à hauteur de 84 000 euros les associations agréées de sécurité civile qui dispensent des formations de secourisme ou dont les équipes de secours doivent être qualifiées en matière de premiers secours.
Ce travail de sensibilisation implique la multiplication d’initiatives et de partenariats avec tous les acteurs publics ou privés de la sécurité civile, dont l’Institut français des formateurs risques majeurs et protection de l’environnement, les sapeurs-pompiers et les associations de sécurité civile.
Madame la sénatrice, les orientations que vous préconisez sont pleinement partagées par le Gouvernement, qui, en 2011, année européenne du volontariat, encouragera l’ensemble des initiatives concrètes, dont celles que vous avez évoquées pour illustrer votre propos.
Je vous remercie de cette réponse, madame la ministre.
Je ne savais pas que 2011 avait été déclarée année européenne du volontariat. À cet égard, je souhaiterais que vous déployiez toute votre force de persuasion auprès du ministre de l’intérieur pour que le secourisme devienne grande cause nationale.
Peut-être le Sénat pourrait-il, monsieur le président, offrir la possibilité à ses membres et à son personnel de se former au secourisme. Je vous suggère de relayer cette proposition auprès de la conférence des présidents !
Je ferai part de votre suggestion à M. le président du Sénat, ma chère collègue, mais je puis vous indiquer que le personnel de la Haute Assemblée est d’ores et déjà formé à l’utilisation des défibrillateurs.
La parole est à M. Bernard Piras, auteur de la question n° 953, adressée à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Ma question porte sur la fixation à 65 ans de l’âge limite pour les professeurs invités dans les universités.
Ainsi, l’Institut des hautes études de l’Amérique latine, l’IHEAL, rattaché à l’Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3, bénéficie de quatre chaires de professeur invité : la chaire Simon Bolivar, la chaire Alfonso Reyes, la chaire Antonio Nariño, la chaire Pablo Neruda.
Ces chaires sont un élément fondamental de la politique de coopération internationale de l’IHEAL et de Paris 3. Elles permettent de tisser des liens avec de nombreuses universités latino-américaines, mais aussi nord-américaines ou européennes, et de consolider un large réseau scientifique.
Dans ce cadre, la fixation à 65 ans par la réglementation ministérielle de l’âge limite des professeurs invités est particulièrement dommageable.
Ainsi, le grand écrivain Carlos Fuentes, qui était venu à Paris inaugurer la chaire Alfonso Reyes en octobre 1999, s’est vu refuser par le rectorat de Paris un séjour de quatre mois à l’IHEAL parce qu’il était âgé de plus de 65 ans.
Lors de l’année universitaire 2007-2008, le professeur bolivien Jorge Lazarte, titulaire d’un doctorat en Sorbonne et par ailleurs ancien vice-président de l’Assemblée constituante bolivienne, avait été invité pour le premier semestre. Le 12 décembre 2007, date anniversaire de ses 65 ans, il a cessé d’être rémunéré, alors que son cours devait se terminer au début du mois de janvier 2008.
Invité au titre d’une chaire, le professeur colombien d’origine espagnole Jesús Martín-Barbero, docteur de l’École des hautes études en sciences sociales et autorité internationalement reconnue en matière d’analyse des médias, séjourne en France depuis quatre mois, mais ne peut être rémunéré en tant que professeur invité.
Cet âge limite de 65 ans a également empêché d’inviter des personnalités telles qu’Amartya Sen, 77 ans, prix Nobel d’économie en 1998 et professeur d’économie et de philosophie à Harvard, ou Joseph Stiglitz, 67 ans, prix Nobel d’économie en 2001, actuellement professeur d’économie à Columbia.
Madame la ministre, des mesures seront-elles prises pour assouplir, voire supprimer, cette disposition réglementaire, dont l’application est très préjudiciable à la renommée de nos universités ?
Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord d’excuser Mme Valérie Pécresse, qui ne pouvait être présente ce matin et m’a demandé de vous répondre.
Vous avez saisi la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche du problème de la limite d’âge de 65 ans pour l’intervention de personnalités extérieures dans les universités.
Au moment où le Gouvernement développe une politique volontariste d’emploi des seniors, je comprends votre souci qu’une réponse positive soit donnée à ceux qui désirent mettre leur expérience, leur talent et leur savoir au service des plus jeunes dans l’enseignement supérieur.
C’est un sujet important, car bien souvent des personnalités de renom sont amenées à intervenir à l’occasion d’une conférence ou d’un cycle de conférences. La limite d’âge ne doit pas être un obstacle à leur participation aux activités d’enseignement dès lors qu’il s’agit bien d’interventions ponctuelles.
La situation est cependant différente quand des personnes retraitées sont amenées à intervenir en qualité de professeurs invités. Ceux-ci peuvent en effet se voir confier un service d’enseignement pour une durée pouvant aller d’un mois au minimum à un an, calculé sur la base d’un demi-service d’enseignement. Vous comprendrez qu’ils soient alors considérés comme accomplissant un service régulier, correspondant à l’occupation d’un emploi. Dans ce cadre, ils relèvent, en matière de limite d’âge, de l’article 20 de la loi du 8 août 1947 relative à la limite d’âge des auxiliaires, applicable aux personnels non titulaires de la fonction publique.
Il n’est donc pas possible, monsieur le sénateur, de déconnecter la condition d’âge pour ces professeurs de celle qui est fixée pour les personnels titulaires. Toutefois, je vous précise que l’une des dispositions de l’article 20 du projet de loi portant réforme des retraites portera progressivement cette limite d’âge de 65 à 67 ans. Cette mesure devrait permettre à un plus grand nombre de personnes retraitées de faire profiter les étudiants de leur talent et de leurs compétences dans les domaines de l’excellence intellectuelle et professionnelle. C’est une disposition importante, car les seniors peuvent jouer un rôle précieux, à l’université comme ailleurs.
Je vous remercie de cette réponse, madame la ministre.
Je constate que les choses bougent un peu, ce qui est normal en cette période de vif débat sur l’âge du départ à la retraite, marqué par l’intransigeance du Gouvernement.
J’aimerais que notre échange puisse contribuer à une meilleure prise en considération de la situation de personnalités internationalement reconnues sur le plan scientifique, au travers peut-être d’un dispositif encadré de dérogations.
La parole est à M. Jean-Paul Amoudry, auteur de la question n° 946, adressée à Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi.
Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur le calcul de la compensation-relais instituée par l’article 2 de la loi de finances pour 2010 au profit des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale dotés d’une fiscalité propre.
Au titre de cette année de transition, il est en effet prévu que les collectivités territoriales et les EPCI à fiscalité propre perçoivent de l’État une compensation pour la perte de recettes résultant de la suppression de la taxe professionnelle. Il est également prévu que la compensation ainsi mise en place permette d’assurer à chaque collectivité des ressources au moins équivalentes au produit de la taxe professionnelle perçu au titre de l’année 2009.
Or, les collectivités territoriales ayant fait le choix, dans un louable souci de clarté, de fiscaliser leurs contributions aux syndicats intercommunaux auxquels elles adhèrent se heurtent à un refus de l’administration pour obtenir la compensation correspondant à cette part de fiscalité.
Tirant argument de l’article 1640 B du code général des impôts, selon lequel le taux retenu pour le calcul est le « taux de taxe professionnelle de la collectivité ou de l’établissement public », l’administration ne tient pas compte du fait que la ressource fiscale produite dans chaque commune comprend également la contribution fiscalisée aux syndicats intercommunaux ; elle ne retient, dès lors, que le taux voté par la commune, et non le taux global, qui seul pourtant traduit la réalité de l’effort fiscal consenti par la collectivité.
En effet, la contribution fiscalisée instaurée au bénéfice des syndicats en lieu et place de contributions versées à partir des budgets communaux est bien constitutive du produit fiscal des communes et devrait donc être prise en compte pour évaluer à son vrai niveau la contribution fiscale consentie par les communes pour financer leurs charges, que celles-ci soient assumées dans le cadre du budget communal ou par délégation à un EPCI.
Ainsi, en l’état actuel du calcul de cette compensation-relais, les communes concernées perdent une part significative de leur produit fiscal et sont lourdement pénalisées.
Telle n’était pas, me semble-t-il, la volonté du législateur. Aussi vous serais-je reconnaissant, monsieur le secrétaire d’État, de bien vouloir m’indiquer quelles mesures le Gouvernement pourrait envisager de prendre pour que les mécanismes mis en place par la réforme de la taxe professionnelle permettent d’assurer à toutes les collectivités, y compris à celles ayant fait le choix de fiscaliser leurs contributions aux syndicats intercommunaux, le maintien du niveau de ressources prévu par la loi de finances de 2010.
Monsieur le sénateur, vous avez appelé l’attention du Gouvernement sur les modalités de calcul de la compensation-relais perçue au titre de l’année 2010 en lieu et place du produit de la taxe professionnelle, pour les communes qui appartiennent à des syndicats intercommunaux sans fiscalité propre.
Tout d’abord, l’article 1640 B du code général des impôts prévoit que les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre perçoivent au titre de l’année 2010 une compensation-relais en contrepartie de la perte de recettes résultant de la suppression de la taxe professionnelle.
Pour les communes et les EPCI à fiscalité propre, cette compensation-relais comporte deux composantes.
La première est égale soit au produit de la taxe professionnelle perçu en 2009, soit, si cela est plus favorable, au produit déterminé à partir des bases théoriques de la taxe professionnelle pour 2010 qui résulterait de l’application au titre de 2010 des dispositions relatives à cette taxe dans leur version en vigueur au 31 décembre 2009 par le taux de taxe professionnelle pour 2009, dans la limite du taux de taxe professionnelle pour 2008 majoré de 1 %.
La seconde composante est égale au produit résultant des augmentations de taux de la cotisation foncière des entreprises décidées par la commune ou l’EPCI.
Ce mode de calcul, adopté à la suite de discussions nourries à l’Assemblée nationale et au Sénat, garantit que la compensation-relais ne pourra être en aucun cas inférieure au produit de la taxe professionnelle perçu en 2009.
En revanche, les syndicats intercommunaux, c’est-à-dire les EPCI sans fiscalité propre, qui sont financés par des contributions fiscalisées ne perçoivent pas de compensation-relais.
En effet, ces syndicats votent un produit qui est réparti entre les communes membres. La part afférente à chaque commune est ensuite répartie entre les contribuables des différentes taxes levées au profit de la commune. Ces EPCI disposent donc d’une ressource garantie. Par conséquent, il n’y a pas lieu de majorer le montant de la compensation-relais des communes membres de tels syndicats, dès lors que ces derniers perçoivent les impositions mises en recouvrement à leur profit.
Cela étant, dans certains cas particuliers, notamment lorsqu’il y a passage d’une contribution fiscalisée du syndicat à une contribution budgétaire, lorsque le syndicat intercommunal est absorbé par un EPCI à fiscalité propre ou lorsque la commune reprend des compétences du syndicat, ce mode de calcul peut présenter un certain nombre de difficultés. Des cas, peu nombreux, m’ont été signalés ou l’ont été aux services de la direction générale des finances publiques. Ils ont fait l’objet d’un traitement individualisé dans le courant de l’année 2010 ou vont être très prochainement traités.
Comme vous le voyez, monsieur le sénateur, nous nous sommes attachés à prendre en compte les situations spécifiques liées à l’organisation des intercommunalités dans les territoires.
Je remercie M. le secrétaire d’État de sa réponse, mais les solutions dont il a esquissé les contours me laissent néanmoins perplexe.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez indiqué qu’il ne s’agissait pas d’accorder une compensation aux syndicats sans fiscalité propre ; je suis parfaitement d’accord avec vous sur ce point.
Cependant, ce ne sont pas les syndicats, bénéficiaires de dotations des communes membres qui, elles, sont fiscalisées, qui seront pénalisés puisque, pour couvrir leurs charges, les collectivités seront bien obligées de leur apporter des contributions. J’ai à l’esprit le cas d’une commune, relativement importante, qui va se trouver pénalisée puisque la contribution fiscalisée qu’elle apportait au syndicat ne donnera lieu à aucune compensation. Je me permettrai de revenir ultérieurement de façon plus spécifique sur ce cas particulier.
La parole est à M. Rémy Pointereau, auteur de la question n° 952, adressée à M. le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.
L’application de la circulaire du 1er février 2007, faisant suite à un arrêté du 24 juillet 2006, qui précise les mises aux normes techniques à réaliser avant juillet 2011 dans les établissements recevant du public de deuxième groupe, notamment les petits hôtels, est imminente. Je rappelle que cet arrêté avait été pris peu après un incendie survenu dans un hôtel parisien tenu par ce qu’il est convenu d’appeler un « marchand de sommeil ».
Un certain nombre de maires m’ont fait part de leur inquiétude quant à la pérennité de ces petits hôtels, souvent situés en zone rurale, qui ne pourront être mis aux normes faute de financement privé. Nous risquerions alors d’assister à des fermetures d’établissements, ce qui pourrait accroître les difficultés économiques des territoires ruraux les plus fragiles.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez été alerté sur cette situation cet été, par un rapport du Contrôle général économique et financier, le CGEF, qui relève du ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi. Ce rapport révèle que ces mesures, couplées aux dispositions relatives à l’accessibilité des lieux recevant du public aux handicapés, applicables avant 2015, pourraient entraîner la disparition de 3 000 à 4 000 établissements familiaux en cinq ans, soit 30 % du parc hôtelier indépendant.
Bien évidemment, il n’est pas question ici de remettre en cause les mises aux normes, notamment celles qui touchent à la sécurité des établissements recevant du public, quels qu’ils soient. Je tiens simplement à souligner que les travaux nécessaires à ces mises aux normes ont un coût important, difficilement supportable par les exploitants des plus petits établissements.
Monsieur le secrétaire d’État, dans un entretien accordé au journal Le Parisien/Aujourd’hui en France le 20 juillet dernier, vous déclariez avoir saisi de cette question le Premier ministre et demandé la tenue d’une réunion interministérielle. Pourriez-vous aujourd’hui nous préciser les suites que le Gouvernement entend donner à votre initiative ? Afin de tenir compte, en particulier, de la crise financière et économique que traverse notre pays, un moratoire ne pourrait-il être envisagé pour prolonger les délais prescrits par la circulaire du 1er février 2007 ? À défaut, ne pourrait-on accorder des aides publiques aux exploitants d’hôtels pour la réalisation de travaux de sécurité ?
Monsieur le sénateur, la question que vous soulevez revêt une grande importance pour l’ensemble de nos territoires ruraux, compte tenu du rôle qu’y jouent des milliers d’hôtels indépendants concourant grandement à l’attractivité de notre pays.
J’avais saisi le Contrôle général économique et financier après avoir été alerté par nombre d’hôteliers très inquiets des mises aux normes successives exigées : à l’échéance du 1er janvier 2011 en matière de sécurité incendie s’est ajoutée celle de 2015 pour l’accessibilité des bâtiments aux handicapés, en application de la loi de 2005.
Cette accumulation de normes pose problème, à l’heure de l’importante réforme du classement hôtelier. Je voudrais que les hôteliers puissent se concentrer sur l’amélioration de la qualité de l’offre et ne soient pas tétanisés par une multiplication des normes. J’ai donc effectivement demandé au Premier ministre un arbitrage interministériel sur les différentes échéances concernant l’hôtellerie. Dans un souci de lisibilité et de cohérence, je souhaite un alignement des dates : retenir l’année 2015 me semblerait pertinent, car cela laisserait à nos hôteliers le temps à la fois de s’engager dans la réforme de la classification hôtelière et de mettre leurs établissements aux normes – normes qu’il conviendrait certainement, du reste, de revoir.
Cette proposition d’alignement des dates fait actuellement l’objet de discussions interministérielles. Celles-ci sont parfois un peu difficiles, je ne vous le cache pas, mais j’ai bon espoir d’aboutir, eu égard à l’importance des enjeux.
Au-delà de cette harmonisation des échéances obligatoires, je tiens à rappeler que les hôteliers installés en zone rurale qui souhaitent rénover leur établissement peuvent aujourd'hui bénéficier de traitements préférentiels.
Ainsi, dans le cadre du plan de rénovation du secteur hôtelier, la Caisse des dépôts et consignations et OSEO ont, à ma demande, créé une offre spécifique permettant d’accompagner financièrement la modernisation de l’hôtellerie française. Ces prêts participent au financement des travaux de rénovation et de mise aux normes. Ils sont destinés aux hôteliers qui s’engagent dans la nouvelle procédure de classement de l’hébergement touristique marchand que j’ai engagée au travers de la loi de juillet 2009.
Afin de répondre à la difficulté, pour les hôteliers, d’assurer une mise de fonds propres, le dispositif institué comporte un produit spécifique : le prêt participatif pour la rénovation hôtelière, le PPRH, assorti d’un taux réduit grâce à l’intervention de la Caisse des dépôts et consignations. Ce prêt, mis en place par OSEO, a pour objet de faciliter la réalisation du plan de financement des entreprises du secteur hôtelier. À cette fin, une enveloppe de 120 millions d'euros sur trois ans est ouverte depuis 2009 par OSEO.
Les caractéristiques de ce produit de financement sont les suivantes : le montant unitaire du prêt peut atteindre 120 000 euros et doit être au moins le double de celui du PPRH ; ce prêt est accompagné obligatoirement d’un prêt bancaire d’une durée au moins égale à celle du prêt participatif pour la rénovation hôtelière ; il est assorti d’un taux préférentiel, de 150 points de base inférieur à celui du marché, sans qu’aucune garantie soit demandée à l’hôtelier, et s’étale sur sept ans avec un différé de remboursement de deux ans. Le PPRH est à taux préférentiel pour les hôtels n’excédant pas trois étoiles, situés dans des agglomérations de moins de 500 000 habitants, l’entreprise bénéficiaire devant être une PME au sens européen du terme.
Monsieur le sénateur, nous allons, je le crois, aboutir à un accord qui sera de nature à clarifier l’avenir pour les hôteliers de ce pays, lesquels ont besoin de visibilité.
L’ensemble des mesures que je viens d’évoquer est de nature à permettre à la profession de répondre aux impératifs de mise aux normes et d’assurer la modernisation de l’hôtellerie familiale et indépendante.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Je sais votre attachement au secteur de l’artisanat et du commerce, et je ne doute pas que votre ténacité permettra d’obtenir un alignement des échéances sur 2015 et des aides pour la rénovation de nos petits hôtels.
S’il est certes fondamental d’édicter des normes en matière de sécurité et d’accessibilité, on tombe aujourd’hui dans la démesure. L’administration se surprotège en appliquant de manière excessive le principe de précaution. Cette tendance se manifeste également pour l’aménagement des bâtiments communaux : les normes sont toujours plus élevées, et les maires n’en peuvent plus. Or le risque zéro n’existe pas. Dans ces conditions, soit l’on multiplie les normes en donnant aux maires les moyens de les respecter, soit l’on assouplit les règles afin de permettre la réalisation de projets à moindre coût, dans un contexte économique difficile.
La parole est à M. Adrien Gouteyron, auteur de la question n° 971, adressée à M. le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.
Monsieur le secrétaire d'État, la très importante loi du 4 août 2008 a insufflé une dynamique nouvelle à notre économie et créé le régime de l’auto-entrepreneur.
Dans un premier temps, ce régime a été l’objet de quelques critiques, parfois même de craintes, que nous avons relayées. Ces craintes étaient compréhensibles, dans la mesure où il s’agissait d’un dispositif tout à fait nouveau, à propos duquel les artisans installés ou en voie d’installation pouvaient légitimement s’interroger.
La Haute-Loire compte 4 600 entreprises artisanales, dont 39 % appartiennent au secteur du bâtiment. Ces entreprises emploient 16 800 personnes, soit 16 % de la population active du département. L’artisanat occupe donc une place considérable dans un département comme le mien.
Monsieur le secrétaire d'État, les fortes craintes suscitées par la création du régime de l’auto-entrepreneur, relayées à l’époque tant par le Sénat que par l’Assemblée nationale, continuent de s’exprimer, ce qui nous inquiète.
Le régime de l’auto-entrepreneur a connu un succès considérable, puisqu’il concernerait maintenant quelque 450 000 entreprises.
C’est davantage : 600 000 !
En Haute-Loire, au premier semestre, 177 inscriptions au registre national du commerce et des sociétés sur 472 sont le fait d’auto-entrepreneurs.
Un tel succès n’est nullement étonnant, dans la mesure où ce régime se caractérise par une grande simplicité des procédures administratives et par un allègement très important de charges, sujet dont il est souvent question dans cette enceinte. Ainsi, un taux réduit de charges s’applique en dessous d’un certain seuil de chiffre d’affaires : 32 000 euros pour les services, 80 000 euros pour le secteur du commerce. En outre, les auto-entrepreneurs n’ont pas à préfinancer les charges, puisque ces dernières ne sont acquittées qu’en fonction du chiffre d’affaires déclaré. Quant à la simplification administrative, un portail internet dédié permet aux candidats à l’auto-entreprise d’obtenir immédiatement un numéro d’affiliation à l’URSSAF.
Or, et j’insiste sur ce point, monsieur le secrétaire d'État, il n’y a pas, à ma connaissance, d’obligation de déclaration du chiffre d’affaires, ce qui rend le contrôle difficile. Quelque 40 % des auto-entrepreneurs s’abstiendraient de déposer une telle déclaration, mais peut-être pourrez-vous m’apporter des éclaircissements sur ce point.
La formation était un autre sujet de craintes. À cet égard, je souhaite que le décret récemment paru soit effectivement appliqué et que les services de l’État puissent contribuer à la mise en œuvre de son dispositif dans nos départements.
Vous l’aurez compris, monsieur le secrétaire d’État, il ne s’agit pas pour moi de remettre en cause le régime de l’auto-entreprise. Il convient simplement de s’assurer qu’un équilibre satisfaisant a été trouvé : un dispositif visant à favoriser la création d’entreprise et le dynamisme économique ne doit pas mettre en péril le socle que représente l’artisanat dans notre pays.
Monsieur le sénateur, certains aspects du régime de l’auto-entrepreneur peuvent effectivement susciter des inquiétudes, particulièrement dans le secteur du bâtiment. C’est une question très importante, et il m’appartient d’apaiser ces craintes en vous apportant des réponses précises.
En premier lieu, je voudrais rappeler pourquoi l’auto-entreprise ne constitue pas, comme on le dit trop souvent, une concurrence déloyale pour les autres formes d’exercice, en termes tant d’exonération du paiement de la TVA que de niveau de charges.
Certes, il est exact que l’auto-entrepreneur n’est pas assujetti à la TVA – cette règle vaut d’ailleurs aussi pour le régime de la micro-entreprise, qui fonctionne depuis près de vingt ans sans inspirer les mêmes inquiétudes –, mais, en contrepartie, il achète ses fournitures et ses matières premières toutes taxes comprises et il ne peut déduire la TVA de ces achats, dont le montant est souvent significatif dans le domaine du bâtiment et des travaux publics.
Une étude, que je tiens à votre disposition, réalisée non par le ministère, mais par l’Ordre des experts-comptables, et actualisée en avril dernier, a montré que le niveau de charges supporté par les artisans relevant du régime de l’auto-entreprise était comparable à celui des autres artisans. À cet égard, la crainte récurrente que vous avez relayée s’explique par la comparaison directe souvent faite, à tort, entre le taux de taxation de droit commun des artisans, qui est de 45 %, et celui des auto-entrepreneurs, qui est de 21, 3 %. Or ces taux différents s’appliquent à des assiettes qui sont elles-mêmes différentes ! En effet, l’artisan est imposé sur ses bénéfices, alors que l’auto-entrepreneur l’est sur l’intégralité de son chiffre d’affaires. Le régime de l’auto-entrepreneur est d’ailleurs très peu attractif en cas d’investissements importants.
En second lieu, je voudrais souligner que l’auto-entrepreneur qui réalise un chiffre d’affaires a l’obligation de le déclarer. C’est seulement en l’absence de chiffre d’affaires qu’il n’est, en l’état actuel du droit, pas tenu à déclaration. Par ailleurs, il convient de rappeler que les auto-entrepreneurs qui ne déclarent pas de chiffre d’affaires pendant plus de trois ans sont automatiquement radiés du régime. Bien entendu, en l’absence de chiffre d’affaires, ils ne bénéficient pas de droits additionnels en matière de retraite.
Les auto-entrepreneurs ont le droit de ne pas exercer d’activité pendant un trimestre : ce régime instaure en fait un « permis d’entreprendre », que chacun peut utiliser à volonté, notamment en cas d’activité complémentaire ou saisonnière. C’est précisément cette souplesse qui fait le succès du dispositif.
Un rapport d’évaluation qui sera rendu public très prochainement tend à confirmer que la mise en œuvre du régime de l’auto-entreprise contribue à réduire le champ de l’économie souterraine, en permettant à des travailleurs dits « au noir » de rentrer dans un cadre légal, où ils sont soumis à des cotisations. Selon ce rapport, près de 23 % des auto-entrepreneurs ont régularisé leur situation antérieure grâce à ce régime.
L’auto-entrepreneur est un entrepreneur comme un autre, qui doit respecter les règles d’exercice de son activité. S’il souhaite exercer une activité artisanale dans le secteur du bâtiment, il est soumis à la réglementation applicable à tous les professionnels de ce secteur, en termes de formation et de qualification professionnelle préalable, d’application des normes techniques, d’hygiène et de sécurité, de déclaration et d’emploi des salariés – le cas est relativement rare –, d’assurance et de responsabilité ou encore de facturation à la clientèle. J’ai veillé à ce que toutes ces règles s’appliquent et à ce que des contrôles soient menés. En particulier, j’ai institué l’obligation, pour l’auto-entrepreneur, de prouver sa qualification professionnelle quand son type d’activité l’exige.
Le rapport d’évaluation du régime de l’auto-entrepreneur que je viens d’évoquer est en voie d’achèvement. Il permet d’établir un premier bilan statistique et une évaluation du fonctionnement du régime, y compris dans le secteur du bâtiment. Ont participé au pilotage de cette évaluation les administrations, les caisses de sécurité sociale dont relèvent les auto-entrepreneurs, les chambres consulaires, les organisations patronales, y compris l’Union professionnelle artisanale, et les représentants des auto-entrepreneurs.
Je suis bien sûr attentif aux préoccupations des organisations professionnelles du bâtiment et des travaux publics. J’entends lutter avec détermination contre d’éventuels abus liés à l’utilisation de ce nouveau régime.
Comme vous l’avez dit, monsieur le sénateur, le régime de l’auto-entrepreneur a dynamisé l’esprit d’entreprise en France : il a changé radicalement la perception de l’entreprenariat par nos compatriotes, ce dont je suis très heureux. Je veillerai, soyez-en certain, à ce qu’il n’y ait pas de dérives ; le cas échéant, je me montrerai impitoyable, car je souhaite le succès de ce nouveau régime. Pour cela, il importe de montrer que les inquiétudes qu’il a pu susciter ne sont pas fondées. Je vais m’atteler à cette tâche dans les semaines qui viennent.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse très complète. De telles précisions étaient nécessaires.
Comme je l’ai indiqué, il n’est pas question pour moi de contester les objectifs visés au travers de la création du nouveau régime, ni même les modalités essentielles de celui-ci. Il importe simplement de combattre d’éventuelles dérives, et je constate que telle est bien votre volonté. Naturellement, je transmettrai votre réponse aux organisations professionnelles qui m’ont saisi, en espérant qu’elle soit de nature à les tranquilliser.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures dix, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.