Quand vous vivez dans un bassin d’emploi et une région sinistrés, quand vous allez, après des années de fidélité à votre entreprise, vous inscrire au chômage, quand les files d’attente au pôle emploi anéantissent tout espoir de retrouver du travail, il est naturel d’en appeler aux pouvoirs publics pour réclamer plus de justice.
Quand en même temps les Français découvrent que certains profits, bonus ou parachutes dorés représentent plusieurs centaines d’années de SMIC, quand un journal titre aujourd’hui : « Le temps des inégalités fait son grand retour », « Hausse des salaires : des cadres gâtés », « Le niveau de vie des riches progresse plus vite que celui des pauvres », comme le révèle l’étude de l’INSEE mentionnée par François Rebsamen, alors il ne faut pas s’étonner de trouver dans la rue des centaines de milliers de gens aux profils différents : salariés craignant pour leur emploi, chômeurs de fraîche date dont l’avenir s’est obscurci et dont les perspectives de retour à l’emploi ont été anéanties, étudiants qui s’interrogent sur la valeur de leurs études et de leur bagage, fonctionnaires qui s’inquiètent de l’avenir du service public où rentabilité et profits ont remplacé devoir et solidarité, et tout simplement citoyens qui ne veulent plus de cette société bloquée reproduisant les injustices et les inégalités sociales et se disant que décidément non seulement l’ascenseur social est bloqué, mais qu’il a aussi tendance à descendre !
C’est notamment ce que disent les jeunes générations qui, dans un sondage récent, dont chacun a pris connaissance, pensent que leurs conditions de vie seront moins bonnes que celles de leurs parents.
Les Français demandent donc une redistribution sociale et un soutien au pouvoir d’achat. Avec plus de justice sociale, il est indispensable qu’il y ait plus de solidarité.
J’évoquerai maintenant la situation que connaissent les collectivités locales. Le désengagement financier de l’État à leur égard se poursuit. Ce sont pourtant elles qui portent également de façon très forte les valeurs de solidarité. Il s’agit bien sûr de solidarité territoriale, mais aussi de solidarité envers les plus démunis.
Je veux prendre, sur ce sujet, deux exemples concernant plus particulièrement le département que j’ai l’honneur de présider, mais qui valent pour l’ensemble des départements. Je ne dispose pas des chiffres consolidés.
Je veux évoquer le fonds d’urgence pour l’habitat et le logement et le revenu minimum d’insertion.
L’utilisation du fonds de solidarité énergie permet d’intervenir spécifiquement pour l’aide au maintien dans leur logement des personnes les plus fragiles : aide aux impayés de loyers et participation au paiement des factures d’eau, d’électricité et de chauffage...
Dans mon département de la Drôme, depuis le mois de janvier, 600 personnes sont concernées chaque mois, contre 300 en 2008. Le nombre de bénéficiaires a donc doublé, ce qui représente plus de 1 million d’euros de dépenses supplémentaires, soit une augmentation de 32 %, à la seule charge du département.
En ce qui concerne la prise en charge du RMI, qui participe évidemment à la solidarité nationale, là encore le constat est le même. Pour les trois premiers mois de 2009, on compte 580 RMIstes supplémentaires, ce qui représentera 3 millions d’euros de plus à la charge du département, absolument non compensés.
Pour ces raisons et pour beaucoup d’autres, le Gouvernement doit donner un signal fort. C’est le sens de cette question, qui vise à demander une plus grande justice sociale et une solidarité nationale accrue.
Permettez-moi de vous livrer cette citation : « Ce système où celui qui est responsable d’un désastre peut partir avec un parachute doré, […] où l’on exige des entreprises des rendements trois ou quatre fois plus élevés que la croissance de l’économie réelle, ce système a creusé les inégalités, il a démoralisé les classes moyennes et alimenté la spéculation sur les marchés […]. L’économie de marché, c’est le marché régulé, le marché mis au service du développement, au service de la société, au service de tous. Ce n’est pas la loi de la jungle, ce n’est pas des profits exorbitants pour quelques-uns et des sacrifices pour tous les autres. »