… et que les certitudes affichées hier ont débouché sur une autre réalité ?
La loi TEPA était censée, notamment grâce au bouclier fiscal, provoquer un choc, le « choc de la croissance ». Or, loin de relancer notre économie, cette loi a, au contraire, aggravé une situation de crise qui, certes, est née ailleurs, est mondialisée, voire systémique, selon certains membres du Gouvernement, mais qui, en fin de compte, aboutit à une France industrielle et économique à deux vitesses.
Au vu des grands indicateurs, messieurs les secrétaires d’État, chers collègues de la majorité, l’entêtement n’est plus de mise.
Vous dites, monsieur Poniatowski, que les grandes entreprises payent beaucoup d’impôts. Or le plafonnement à 3, 5 % de la valeur ajoutée de la taxe professionnelle des entreprises – M. Didier Guillaume l’a souligné tout à l’heure, s’agissant des départements – a aujourd’hui des conséquences très douloureuses pour les collectivités.
Ainsi, s’agissant de la région Bourgogne, c’est une somme de 20 millions d’euros qui n’est pas perçue par les collectivités, bien qu’elle ait été votée, et qui pourrait être affectée à l’accompagnement du plan de relance, plan auquel le Gouvernement demande à ces mêmes collectivités de participer à 50 %, après avoir par ailleurs bloqué leurs ressources !
Il existe bel et bien un plafonnement qui fait que les grandes entreprises sont aujourd’hui favorisées par rapport aux autres. Les profits des géants du CAC 40 n’ont, jusqu’en 2008, jamais été aussi élevés : 220 millions d’euros par jour pendant cinq ans ! Certes, ils ont un peu baissé depuis, mais ces grands groupes faisaient-ils alors, en matière d’investissements ou de salaires, des efforts à la hauteur de ces profits record ?
En réalité, la prospérité des grandes entreprises, qui peuvent jouer à plein la carte de la mondialisation, n’a pas, sur le reste de l’économie, autant de retombées qu’on pourrait l’espérer.
Monsieur Novelli, pour avoir jadis exercé à peu près les mêmes fonctions que vous, je n’ignore rien des difficultés de votre tâche. Vous et moi le savons, la crise révèle que notre tissu économique de PME est, en comparaison des grands groupes, aujourd’hui à la peine. Or c’est le dynamisme des PME qui est créateur d’emplois nouveaux.
Avant la déflagration boursière, en 2008, le taux de profit des PME, calculé par l’INSEE, était déjà pratiquement au plus bas depuis dix ans.
La France est donc coupée en deux : d’un côté, des entreprises prospères, aux dirigeants surpayés, aux actionnaires choyés et, de l’autre côté, une économie à bout de souffle, où se développent la précarité, les CDD et l’intérim, quand il y en a encore…
Dans une situation exceptionnelle, nécessité fait loi : alors que les déficits explosent – je n’insiste pas ! –, la contribution exceptionnelle, et donc limitée dans le temps, est une solution à envisager.
Pourquoi refuser la possibilité de renforcer l’investissement dans les nouveaux secteurs économiques qui feront l’offre de la France dans la reprise ?
La politique fiscale est une arme anti-crise, incontournable dans le cadre de tout plan de relance. La majorité la refuse et, comme François Rebsamen l’a rappelé tout à l’heure, elle a rejeté nos propositions dans ce sens, qu’elles portent sur la fiscalité des ménages ou sur celle des entreprises. Au reste, cette arme manque aussi aujourd’hui au plan de relance européen. Or c’est la fiscalité qui détermine la capacité des régions à l’investissement et l’emploi.
François Rebsamen et d’autres ont évoqué le cas de Total.
Faut-il le préciser, 13 milliards d’euros de bénéfice, cela ne fait pas 13 milliards d’impôt sur les sociétés qui vont rentrer dans les caisses de l’État, contrairement à ce qu’a prétendu M. Frédéric Lefebvre, porte-parole de l’UMP. Pour lui, le fait qu’une très grande entreprise fasse des bénéfices en période de crise est simplement une bonne nouvelle, et il est vrai que nous ne pouvons que souhaiter voir nos entreprises dégager des bénéfices.
Cependant, le calcul de M. Lefebvre est d’autant plus étrange que Total ne réalise que 5 % de ses profits en France. Nous aimerions d’ailleurs savoir, messieurs les secrétaires d’État, combien le groupe Total verse à l’État français au titre de l’impôt sur les sociétés.