Intervention de Robert Hue

Réunion du 7 mai 2009 à 15h00
Aides publiques aux entreprises — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Robert HueRobert Hue :

Cependant, telle sœur Anne, nous ne voyons rien venir…

En effet, hormis les déclarations du Président de la République lui-même sur la nécessité de rendre compte de l’engagement des deniers publics et celles de M. Xavier Bertrand sur la conditionnalité des aides publiques, où en sommes-nous ?

Sur toutes ces questions, rien n’est venu modifier l’ordre des choses. Ainsi, les groupes Auchan et Carrefour peuvent, sans la moindre difficulté, continuer à développer emplois précaires et temps partiel subi, sans encourir d’autre sanction que bénéficier de toujours plus d’allégements de cotisations sociales ! Et que l’on ne tente pas une diversion en orientant le débat sur le cas des PME et des PMI, car elles font généralement preuve de transparence : nous parlons ici des grands groupes, qui bien souvent les étranglent d’ailleurs…

Cela dit, pour avancer dans le débat et savoir exactement à quoi s’en tenir, il importe de définir ce que nous entendons par « aides publiques aux entreprises ».

Chacun l’aura compris, les sommes considérables dévolues aux allégements de cotisations sociales constituent un élément clé de ces aides publiques : quelque 40 milliards d’euros de recettes fiscales transférées alors que le déficit budgétaire atteint 104 milliards d’euros, cela pose question !

Cependant, les aides publiques, ce sont aussi, par exemple, les multiples aides directes dont bénéficient les entreprises, qu’elles proviennent des collectivités locales, de l’État ou, parfois, de l’Europe. Les modalités de contrôle de ces aides sont d’ailleurs fort diverses et aucunement unifiées, avec toutes les dérives que cela suppose.

Les aides publiques aux entreprises, ce sont aussi les très importantes dépenses fiscales que l’État prend désormais en charge en lieu et place des entreprises normalement redevables, au travers des allégements de l’impôt sur les sociétés ou de la taxe professionnelle, des dispositions relatives au crédit d’impôt, de certaines mesures spécifiques concernant d’autres droits et taxes, du crédit d’impôt recherche : autant de dispositifs dont aucun élément fondamental n’est venu, pour l’heure, démontrer le bien-fondé. Il serait sans doute instructif de faire, par exemple, le bilan du plafonnement de feu la taxe professionnelle au regard de la situation de l’emploi dans les entreprises !

En outre, que dire des 360 milliards d’euros d’aides publiques aux banques prévus dans le plan de sauvetage de cet automne, même quand il s’agit de garanties, et non d’aides directes ?

Madame la ministre, mes chers collègues, il est apparu au fil du temps que, faute d’avoir fixé des conditions plus précises de contrôle des sommes avancées par l’État pour secourir les banques françaises, on ne pouvait éviter ni la chute du cours de l’action Natixis, ni l’affaire Bouton, ni encore la persistance de l’inégalité d’accès au crédit au détriment des PME et TPE !

Pourtant, selon un sondage du CSA de la semaine dernière, 90 % des Français – excusez du peu ! – estiment nécessaire de contrôler les aides publiques et de ne les accorder aux entreprises que si celles-ci s’engagent à maintenir l’emploi. Ils ont raison, d’autant que le montant des aides publiques aux entreprises est parvenu à un niveau jamais atteint auparavant : 40 milliards d’euros d’allégements de cotisations sociales, 20 milliards d’euros d’exonérations de taxe professionnelle, 10 milliards d’euros d’aides directes à l’automobile et plus de 320 milliards d’euros de garanties aux établissements bancaires !

Ce constat donne tout son sens à notre proposition de loi, mais vous n’entendez rien, comme en témoigne, à mon sens, le rapport de la commission des finances ! Certes, ce constat, vous affirmez le partager – il serait difficile de faire autrement ! –, mais cela s’arrête là.

Votre opposition est purement idéologique. Non seulement vous nous accusez d’entretenir un climat de suspicion envers les entreprises, mais vous écrivez également, monsieur le rapporteur, que nos propositions constituent un dispositif bureaucratique empreint de lourdeur et n’apportant aucune réelle plus-value, pour reprendre un mot qui vous est cher !

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