Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi dont nous débattons aujourd’hui est examinée dans un contexte très particulier : celui d’une crise financière mondiale très grave, sans précédent depuis 1929, qui entraîne de nombreux pays de l’OCDE dans une récession économique dont nul ne connaît la durée ni l’issue.
Cette crise a donné au Parlement l’occasion de se prononcer à deux reprises sur des mesures proposées pour y faire face, soit de sa propre initiative, soit à la demande du Gouvernement, lors des débats relatifs au plan de relance et au projet de loi de finances rectificative pour 2009.
Cela étant, dans nos départements respectifs, que constatons-nous ? Partout, la même peur du lendemain, une défiance, parfois exacerbée, à l’encontre des banques et des établissements de crédit, ainsi qu’un climat social très tendu, notamment dans les territoires concernés par des fermetures d’entreprises ou par des plans sociaux de grande envergure, dont les ravages, en termes de chômage et de précarisation, risquent d’être considérables.
Je souligne d’ailleurs qu’il est parfois très curieux de constater que certaines entreprises, dont les bénéfices sont en constante et régulière augmentation, profitent de ce contexte de crise pour cesser leurs activités en France et les délocaliser sous des cieux plus propices, fiscalement parlant, souvent au cœur même de l’Union européenne, dans des États où les coûts salariaux sont particulièrement bas. Eu égard à l’appétit toujours plus vorace de certains groupes d’actionnaires, la crise a quelquefois bon dos !
C’est pourquoi l’idée de nos collègues du groupe CRC-SPG de mieux évaluer et de mieux contrôler l’utilisation des aides publiques allouées à certaines entreprises mérite plus que jamais toute notre attention.
Il s’agit de responsabiliser tant l’État, dans son rôle d’ordonnateur, que les entreprises concernées, au regard du respect de l’engagement pris de maintenir leurs activités et, par conséquent, les emplois sur le territoire national.
Rappelons que, dans la conjoncture actuelle, le soutien public est très important : renforcement des fonds propres des banques, renflouement de celles-ci à hauteur de 17 milliards d’euros, aides à la trésorerie des entreprises, etc. Le Gouvernement et le Parlement ont mis en œuvre toutes sortes de mesures propres à instaurer une capacité d’intervention rapide des pouvoirs publics pour éviter une faillite généralisée du système. Au regard de ces efforts exceptionnels, un contrôle est donc légitime et souhaitable, quelle que soit du reste la forme des aides publiques.
Cette nécessité d’assurer un contrôle plus efficace des aides est en outre renforcée par le comportement de certains patrons, notamment en matière d’attribution de primes de sortie ou de stock-options, à l’heure où les entreprises et les banques affichent des pertes colossales. Il est donc impératif de moraliser en amont les comportements patronaux tout en veillant, en aval, à ce que les aides financières soient efficacement utilisées.
Pourtant, rappelons que, sur proposition de notre excellent collègue Jean Arthuis lors des débats sur le projet de loi de finances rectificative pour 2009, un décret doit prochainement prévoir les conditions d’attribution ou de versement des éléments de rémunération variable, des indemnités et des avantages indexés sur la performance, ainsi que des rémunérations différées, à certains dirigeants, particulièrement lorsque leur entreprise a bénéficié d’aides de l’État.
À cet égard, l’État doit faire face à ses responsabilités, et les Français n’admettront jamais que, en cas de crise sociale aiguë, la faiblesse des futures dispositions réglementaires l’emporte sur la rigueur des engagements votés par le Parlement.
C’est donc dans la logique même de ces engagements que nous devons nous prononcer sur le bien-fondé de la proposition de loi qui nous est soumise. Dans un environnement tendu où, plus que jamais, notre pays a besoin qu’un dialogue social s’instaure, les premières victimes de la crise doivent pouvoir se sentir davantage impliquées dans le renforcement du contrôle de l’utilisation des aides publiques.
Les dispositions contenues dans la présente proposition de loi accordent-elles réellement un droit supplémentaire à la collectivité ? Ne risquent-elles pas simplement d’alourdir les procédures de contrôle déjà existantes ?
En réalité, elles ne doivent pas être le fruit d’un climat émotionnel, au demeurant légitime, mais doivent se fonder sur la raison et sur le souci de l’efficacité, sans être redondantes avec les missions de contrôle assurées par le Parlement et par la Cour des comptes.
Dans ces conditions, notre groupe ne s’opposera pas à l’adoption de cette proposition de loi émanant de nos collègues du groupe CRC-SPG. Certains de ses membres la soutiendront.