… rien n’indique que la vigueur du breton, faute de texte, soit moins bien assurée que celle du corse, l’environnement politique, culturel, les motivations des associations et des enseignants pouvant suppléer avec efficacité l’absence de texte.
De même, ce ne sont pas les sanctions de l’instituteur de la IIIe République, même si elles ont pu particulièrement y contribuer, qui ont réduit l’influence des langues régionales. En effet, la punition de l’élève n’a jamais empêché la vigueur de celles-ci dans le monde rural ; c’est seulement la désertification qui a conduit à leur dépérissement.
De même, c’est la grande diversité de ces langues, dont la richesse va toujours de l’oralité à un écrit plus ou moins élaboré, qui rend complexe l’homogénéité de traitement. Dès lors, comment en sortir ?
Une première voie a été suggérée lors de la discussion du 29 janvier par notre collègue Michel Charasse : procéder, sans révision préalable, à la ratification des seules dispositions de la charte qui n’ont pas été déclarées contraires à la Constitution et qui permettraient de donner une meilleure place aux langues régionales.
Cette voie est séduisante, mais des doutes raisonnables subsistent sur la divisibilité de la charte : peut-on autoriser sa ratification pour ainsi dire par morceaux sans porter atteinte à son économie générale ?
En outre, nous gardons à l’esprit que le Conseil constitutionnel a entendu contrôler la constitutionnalité de la charte, indépendamment de la déclaration interprétative donnée par le Gouvernement de son sens et de sa portée
L’autre voie qui vient naturellement à l’esprit est donc de procéder à la révision constitutionnelle nécessaire à la ratification de la charte, par exemple en inscrivant dans la Constitution la garantie du respect des langues régionales.
Devons-nous nous en tenir à un débat de principe ? Croyez-vous profondément, madame le ministre, que le respect des langues régionales, qui font partie de notre patrimoine culturel, porte par lui-même une réelle atteinte au principe d’égalité et à l’unité du peuple français ?
Une troisième voie consiste à emprunter d’autres moyens qu’un instrument international et à renforcer, en droit interne, le cadre légal institué en faveur de nos langues régionales ; je pense notamment aux efforts accomplis en la matière dans le domaine de la culture, de l’enseignement et des médias.
En revanche, la pire des voies serait de considérer – à notre sens à tort – que la loi prévoit déjà tout ce que la Constitution permet et, en conséquence, de ne rien faire ou de codifier des textes existants.
Comment surmonter, madame le ministre, de tels obstacles ? Comment ne pas éprouver, d’ailleurs, une forte émotion quand un ancien nous quitte, emportant avec lui le secret d’une langue ?
Comment ne pas penser à l’oralité de certaines langues ? Si Jules César avait invité Cicéron à adhérer à sa politique, il lui aurait dit tout simplement : « veni cum ego ». Je pourrais tout autant inviter à venir avec moi un militant, partisan de la défense des langues régionales, pour faire campagne sur cette question.
J’ai déclaré à l’Assemblée de Corse, car il faut toujours nuancer son propos, que j’étais prêt, s’agissant des langues régionales que l’on parle facilement mais que l’on écrit difficilement, …