La majoration de 10 % du complément de libre choix du mode de garde en fonction des contraintes horaires des parents pourrait être considérée comme une avancée, à ceci près qu’il est difficile d’apprécier la portée de cette réforme sans connaître les intentions du Gouvernement quant au barème de la majoration de la prestation et à la définition des horaires atypiques. Un certain nombre de clarifications sont donc, à nos yeux, nécessaires.
De plus, cette mesure privilégie les parents les plus aisés qui recourent à un mode d’accueil individuel, assistant maternel ou garde à domicile. Or il est indispensable, afin d’offrir un véritable libre choix de mode de garde aux familles, qu’un soutien financier soit également destiné aux places en structures d’accueil collectif qui font le choix d’offrir des amplitudes horaires plus importantes ou expérimentent des mesures innovantes.
En effet, ne nous y trompons pas, les familles souffrent plus encore de la pénurie de l’offre de garde à horaires atypiques que des difficultés à financer les services existants.
Les caisses d’allocations familiales disposaient de plusieurs outils financiers pour subventionner les actions innovantes, mais, avec la mise en place des nouvelles normes du contrat « enfance et jeunesse », les structures qui développaient des horaires atypiques ont été pénalisées. En effet, à titre d’exemple, la CAF pose comme condition à son éventuel financement un taux d’occupation minimum de 70 % pour les établissements et de 60 % pour les centres de loisirs. Cette exigence nous paraît peu réaliste, et les structures en question la dénoncent d’ailleurs régulièrement.
Ne serait-il pas envisageable de raisonner sur un taux d’occupation globale par rapport à l’ensemble des structures existantes sur une commune, plutôt que structure par structure ?
Enfin, et surtout, prévoir une telle majoration ne réglera pas le problème de l’offre de garde, qui sera de plus en plus criant concernant l’accueil pour des horaires atypiques, si j’en crois la volonté du Gouvernement de favoriser le travail le dimanche. En effet, nous le savons tous, une proposition de loi en ce sens a été déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale.
Si nous pouvons approuver le développement de formes d’accueil adaptées aux familles au sein desquelles les parents travaillent selon des horaires atypiques, c’est aussi à la condition de s’interroger sur la légitimité de la forte augmentation de ce genre d’horaires.
Si cette légitimité est avérée dans certains cas – je pense notamment aux professions de santé –, elle ne l’est pas, sauf exception, pour les professions dont l’objet est d’offrir un service aux consommateurs.
Pour le salarié, le libre choix de son horaire de travail n’existe pas. À travers cette majoration, vous rendez donc la politique familiale complice d’une évolution qui contraint les parents à travailler tard le soir, voire la nuit, qui contraint les femmes élevant seules leurs enfants à travailler en horaires décalés.