Alors que nous débattions, récemment, du revenu de solidarité active, le RSA, chacun, dans cet hémicycle, se souciait du sort des personnes les plus éloignées de l’emploi. Nous expliquions pourquoi un acte qui nous paraîtrait facile à accomplir pouvait s’avérer insurmontable pour des personnes très fragilisées. Aujourd’hui, cet humanisme semble avoir totalement déserté certains bancs.
En assimilant automatiquement les indus à des fraudes, vous ne prenez pas le temps d’examiner les situations concrètes à l’origine de ce type de problèmes. Notre collègue députée Martine Billard avait choisi d’évoquer, à l’Assemblée nationale, un exemple parlant : celui du logement.
Une personne bénéficiaire d’une allocation logement peut se retrouver au chômage et ne plus être en mesure de payer son loyer, surtout si, de délai de carence en carence de l’administration, les sommes dues mettent un temps « abusivement tardif » à être versé.
En attendant, son allocation logement lui est supprimée, et la caisse d’allocations familiales lui demande de rembourser les montants indus perçus au cours des mois où elle ne payait pas de loyer. Cela peut paraître normal, mais notre pays connaît tout de même – il faut le rappeler – une forte crise du logement. Bien que prévenue des difficultés rencontrées par des personnes de bonne foi, la CAF supprime à ces dernières la totalité de l’allocation et leur demande de rembourser les indus.
Les conséquences de cette attitude sont disproportionnées par rapport aux sommes récupérées ! Elles s’avèrent très coûteuses tant financièrement que socialement. En effet, l’expulsion est bien souvent l’étape suivante, ces personnes ayant un budget tellement serré que toute rupture de l’aide entraîne une impossibilité de payer le loyer faute de parvenir à redresser le budget du ménage.
En voulant récupérer les indus sur d’autres allocations, le Gouvernement risque d’entraîner un phénomène de dégradation en chaîne. Au lieu de tendre la main aux personnes en difficulté, cet article aggrave leur situation, et ce d’autant plus que la rigueur observée en matière d’indus n’a pas d’équivalent en matière d’instruction des dossiers et de versement des aides. Cette rigueur n’est pas non plus compensée par un engagement politique réel contre la pénurie de logements sociaux.
Vous venez à peine de mettre en place le RSA que vous voulez déjà instaurer des mécanismes coercitifs pour sanctionner immédiatement la personne qui aurait indûment perçu vingt-cinq euros par mois ! De telles propositions ont des conséquences dramatiques sur le plan individuel, alors que leur enjeu financier global est totalement dérisoire.
Les personnels des CAF connaissent leur public et peuvent distinguer ce qui relève de la fraude de ce qui n’en relève pas. Laissons-leur une marge d’appréciation dans la gestion des relations des CAF avec les bénéficiaires des allocations.