Dans un pays où la dépense publique atteint 50 %, la relance est plus forte en laissant jouer ces stabilisateurs que dans un État où cette dépense s’élèverait à 20 %, 30 % ou 40 %. Il faut bien avoir à l’esprit cet élément car la structure même de la dépense de notre État conditionne les actions de relance que l’on peut mener. L’« édredon » est donc plus fort dans un État comme le nôtre que dans un pays qui n’aurait pas ce niveau de dépenses publiques.
Madame Bricq, ce projet de budget soutient l’économie. Ce n’est pas un budget procyclique, c’est-à-dire un budget qui accroîtrait la profondeur ou le rythme de la crise. Tout d’abord, par le biais des stabilisateurs automatiques, autrement dit le fait de ne pas chercher à compenser les déficits, qui eux-mêmes ont une action sur la croissance. Ensuite, parce que, dans ce budget, on finance des dépenses prioritaires, que vous connaissez fort bien. Un choix a été effectué, ce qui n’était pas souvent le cas jusqu’à présent : tous les secteurs étaient considérés comme prioritaires ce qui entraînait automatiquement une augmentation insensée de la dépense. Tel n’est pas du tout le cas dans ce projet de budget.
On peut contester nos priorités – c’est le jeu de la vie politique –, mais nous les assumons assez bien. Ces priorités concernent l’enseignement supérieur, la recherche, le Grenelle de l’environnement.
Dans ce projet de budget, le Gouvernement opère des choix et rejette l’augmentation des prélèvements obligatoires.
Monsieur Jégou, je partage votre point de vue, la dépense d’avenir un enjeu majeur. Le projet de budget en tient compte. Comme l’a rappelé récemment le Président de la République, d’ici à 2012, les dépenses d’investissement représenteront 175 milliards d’euros. Certes, nous donnons au mot « investissement » pas tout à fait le sens qui lui est donné ailleurs, puisqu’il s’agit de dépenses d’équipement, mais aussi de dépenses d’éducation, d’enseignement supérieur ou de recherche. Nous pourrons débattre de ce point de vue si vous le souhaitez.
Je note aussi votre engagement à lutter contre les niches fiscales et sociales, et ce n’est d'ailleurs pas la première fois que vous faites part de vos convictions sur ce sujet. En l’occurrence, nous avons encore bien du chemin à parcourir, mais le Gouvernement a déjà accompli des progrès notables, me semble-t-il.
Je tiens aussi à vous confirmer que la RGPP est en marche. Dès la semaine prochaine, après un travail de préparation intense – Christine Lagarde peut en témoigner –, qui nous a conduit à travailler avec tous les membres du Gouvernement et à examiner les actions menées dans chaque ministère, je présenterai une synthèse sur cette démarche en conseil des ministres.
Des heures de travail ont été nécessaires pour préparer cette communication, qui dressera le bilan de nos réalisations en la matière.
Toutefois, il ne s’agit pas pour moi d’un point d’arrivée, mais d’une étape dans un processus qui sera évidemment poursuivi, comme je l’ai déjà souligné en répondant à M. le rapporteur général.
Monsieur Foucaud, la solution ne réside évidemment pas dans la dépense publique, même si j’ai bien conscience que notre divergence sur ce point est politique.
Notre dépense publique est si élevée qu’il nous faut avant la réduire structurellement, même si nous pouvons bien sûr relancer l’économie, aider un secteur ou considérer qu’une dépense particulière est véritablement nécessaire.
En effet, nous vivons dans un État où la dépense publique est devenue trop importante, au point qu’elle constitue un frein aux investissements privés. Telle est en tout cas notre conviction.
En ce qui concerne les paradis fiscaux, j’estime que nous prenons ce problème à bras-le-corps, mais que nous ne pouvons le régler seuls : c’est l’affaire de nombreux États, sinon de la communauté internationale dans son ensemble.
La France avec ses 64 millions d’habitants ne peut vaincre seule les paradis fiscaux ! Une démarche collective est nécessaire. Il est toujours loisible de publier une tribune dans un journal ou de prononcer un discours condamnant les paradis fiscaux, mais le problème ne sera pas réglé pour autant ! Si nous voulons vraiment le résoudre, nous devons faire en sorte que l’OCDE, le G7, et toutes les autres instances internationales qui prennent les décisions dans ce bas monde agissent dans le même sens.
C’est ce que nous ferons, dès l’an prochain, notamment en publiant, en lien avec l’OCDE, la véritable liste des paradis fiscaux, comme nous nous y sommes engagés récemment.
Monsieur Bourdin, vous avez raison, me semble-t-il, de souligner que l’État doit agir de manière contra-cyclique, c'est-à-dire s’opposer à une phase de dépression économique ou de diminution de la croissance telle que nous l’avons connue dans le passé, et encore l’année dernière.
L’arme budgétaire existe, et nous nous en servons. Nous l’avons utilisée à travers le projet de loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat. De même, nombre de mesures de ce projet de loi de finances sont contra-cycliques et donc, d’une certaine façon, « anti-crise ».
Nous verrons s’il est nécessaire d’aller plus loin. Vous savez que le Président de la République et le Premier ministre ont souligné que nous ne fermerions aucune porte. Comment pourrions agir autrement, d'ailleurs, quand nous sommes aussi peu sûrs de l’avenir ? L’incertitude est totale. Le Gouvernement restera réactif, comme il se doit.
Monsieur de Montesquiou, comme plusieurs de vos collègues, vous vous êtes inquiété de l’avenir, ce qui est évidemment légitime.
Pour en avoir parlé avec vous en aparté, j’ai retenu que vous étiez plutôt favorable, comme Alain Lambert d'ailleurs, à ce que l’on appelle le « zéro valeur », c'est-à-dire la stabilisation des dépenses publiques en euros constants. Toutefois, pouvons-nous comprimer encore la dépense publique ?
J’apporterai deux réponses à cette question.
Tout d'abord, nous disposons d’une loi de programmation pluriannuelle, qui est plus contraignante qu’un simple débat d’orientation budgétaire. Ce document fait apparaître précisément les crédits affectés à chaque mission budgétaire. Vous pourrez vous y référer l’an prochain et pointer les divergences qui pourraient apparaître par rapport à nos prévisions, par exemple en matière culturelle, et qui poseraient problème. Il s'agit donc d’un instrument de contrôle et de maîtrise de la dépense publique.
Ensuite, la stabilisation en valeur des dépenses publiques, qui donc ne prend pas en compte l’inflation, s’applique déjà au total de la masse salariale et de l’intervention publique, à condition, il est vrai, d’en soustraire l’augmentation de la charge de la dette et des pensions. Nous agissons de façon responsable !