Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre collègue Gérard Bailly a souhaité aborder aujourd'hui la question de la fièvre catarrhale ovine et, plus largement, celle de la sécurité sanitaire dans notre pays.
Dans mon département de la Réunion, cette maladie, réglementée depuis 2000, de même que la rhinotrachéïte infectieuse bovine, maladie non réglementée communément appelée IBR, sont également présentes, bien que non endémiques.
Si le virus de l'IBR existe à la Réunion, il ne rencontre cependant pas de conditions favorables à son expression et est peu virulent. La circulation du virus reste faible et, dans les élevages atteints, les animaux contaminés ne présentent généralement pas de signes cliniques permettant d'identifier la maladie.
En 2003, 444 animaux sont importés de France métropolitaine et d'Allemagne par deux coopératives locales et voyagent sur le même bateau ; 164 d'entre eux ont une sérologie négative à l'IBR ; en revanche, cette sérologie n'est pas pratiquée sur les 125 autres têtes de bétail, qui bénéficient uniquement d'un vaccin vivant contre l'IBR, appelé Iffavax. D'après le rapport d'expertise, cette vaccination effectuée sur des animaux dont, selon toute vraisemblance, six étaient sérologiquement positifs avant leur départ, a eu pour effet de faire flamber la maladie. Livrés aux éleveurs après quatre semaines de transport maritime, ces animaux ont pu contaminer l'ensemble de leur cheptel.
Il a été démontré que cette maladie affaiblit les bovins et qu'elle peut contribuer à faciliter l'émergence d'autres affections, notamment la fièvre catarrhale ovine, qui a été constatée sur certains cheptels. Ce facteur n'est vraisemblablement pas unique, mais son action débilitante faisant le lit d'autres affections n'a pas été contestée par les experts.
Je souhaiterais vous parler brièvement du cas d'un éleveur dont le cheptel entier a été contaminé par l'IBR, à la suite de la livraison de bêtes malades importées de métropole en 2003 et livrées par les coopératives locales.
Malgré ses nombreuses interventions auprès des services vétérinaires, il aura fallu attendre l'année 2007 et la nomination d'un nouveau directeur des services vétérinaires pour que sa voix soit entendue. Le frère de cet éleveur, qui travaille, lui aussi, sur l'exploitation, est atteint de chlamydiose, maladie dont les conséquences médicales peuvent être très graves. L'éleveur lui-même a contracté une fièvre, forme humaine de la FCO. Un premier test a été réalisé pour la fixation du point zéro de l'infection, et un second est en cours d'analyse pour vérifier la contamination.
Je suis intervenue personnellement et à plusieurs reprises auprès du ministre de l'agriculture, votre prédécesseur, pour l'alerter sur ce dossier et lui demander pourquoi un arrêté du 10 mai 2006 rendant obligatoire le dépistage de l'IBR s'applique uniquement à la France métropolitaine et pas outre-mer, mais aussi pour réclamer une mission d'enquête.
Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir mandaté un inspecteur du Conseil général de l'agriculture pour réaliser une expertise sanitaire. Les responsabilités ont été établies. Le dossier de cet éleveur a connu aujourd'hui des avancées significatives et son professionnalisme, qui a été un moment contesté, est maintenant reconnu.
En effet, un arrêté préfectoral de force majeure ordonnant l'abattage des bovins de son exploitation a été pris et l'éleveur a été indemnisé en conséquence. Son cas n'est malheureusement pas unique dans le département et je souhaite vivement que les autres éleveurs dans cette situation bénéficient également d'un arrêté de force majeure et soient indemnisés pour la perte de leurs bêtes.
À la suite de cette affaire, et compte tenu des risques de contamination dus potentiellement à de nombreuses maladies touchant les bovins lors des introductions d'animaux vivants dans le département, le groupement régional de défense sanitaire des bovins de la Réunion a élaboré une charte sanitaire d'introduction. Elle prévoit notamment, en sus des obligations légales, que des attestations soient fournies par rapport à l'IBR, en particulier un test individuel négatif de moins de trois mois.
Par ailleurs, je tiens à souligner que le sérotype de FCO présent à la Réunion est différent de celui dont étaient porteuses les bêtes malades importées. Des experts locaux m'ont fait part de leur inquiétude liée à la possibilité d'une mutation génétique permettant l'émergence d'une nouvelle souche du virus, qui pourrait être beaucoup plus virulente.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, je demande que soit réalisée une analyse sous contrôle de tous les cheptels du département pour déterminer précisément les sérotypes de FCO présents dans l'île, mais aussi que soient réalisées des analyses sérologiques pour les autres maladies existantes : BVD, chlamydiose, fièvre Q, leucose...
Afin d'éviter qu'une telle situation ne se reproduise, il est souhaitable, comme le proposent MM. Gérard Bailly et François Fortassin dans leur rapport, Revenons à nos moutons, de mettre en place des stratégies complémentaires.
Il s'agit, à court terme, et après avoir dressé l'état des lieux des pertes économiques des exploitations, de revaloriser l'indemnisation de l'animal mort à hauteur de sa valeur vénale, ou du moins aussi près de cette dernière que possible. Il conviendrait également que les animaux morts depuis le début de la période de circulation virale fassent l'objet d'une indemnisation comme ceux qui ont été euthanasiés par la suite et que les pertes indirectes induites par la maladie soient couvertes.
À plus long terme, il est indispensable de réfléchir à la mise en place d'un dispositif de gestion et d'indemnisation des risques sanitaires. Sur ce point précis, il semble que, monsieur le ministre, vous soyez déjà en train de réfléchir à la mise en place d'un fonds sanitaire.
À l'heure actuelle, le dispositif français de couverture des risques sanitaires repose sur des mécanismes distincts dans les domaines végétal et animal et sur des modalités de financement différentes. Comme l'ont souligné mes collègues Gérard Bailly et François Fortassin, il devient urgent de mettre en place un dispositif cohérent qui permette aux pouvoirs publics et aux professionnels d'indemniser les conséquences des aléas sanitaires.