Intervention de Raymonde Le Texier

Réunion du 1er mars 2005 à 16h30
Réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise — Discussion d'une proposition de loi

Photo de Raymonde Le TexierRaymonde Le Texier :

Lacordaire disait : « Entre le fort et le faible, c'est la liberté qui opprime et la loi qui libère ».

Privé de toute protection en matière de droit du travail autre que celles qui sont garanties par l'Union européenne, le salarié va pouvoir se rendre compte de lui-même de la justesse de cette citation. Car, aujourd'hui, le droit du travail devient l'exception et la dérogation la norme.

Et ce n'est pas fini : dans ce gouvernement, on n'oublie jamais que le gâteau n'est vraiment bon que si l'on y ajoute une cerise !

Revenons donc à ce merveilleux compte épargne-temps, dans lequel le salarié peut placer ses heures supplémentaires, son repos compensateur, ses primes, ses jours de RTT, une semaine de congés payés, ... et un raton laveur, pour que l'inventaire soit complet.

Se pose alors la question de la gestion de ce fameux compte épargne-temps. En effet, même si tout est fait pour neutraliser et retarder l'exercice du droit de tirage des salariés, il semble difficile de ne pas provisionner ce compte.

Or, si les employeurs ont intérêt à développer le compte épargne-temps, plus les sommes placées y sont importantes, plus le besoin de détourner l'obligation de provisionner les sommes théoriquement dues aux salariés se fait pressant.

Qui peut garantir, dans ces conditions, l'abondement réel des sommes placées dans le compte épargne-temps ? Quelle garantie ce dernier offrira-t-il dès lors qu'il alimentera des plans d'épargne retraite fondés sur des placements en bourse ? Que se passera-t-il en cas de redressement judiciaire ou de liquidation de l'entreprise ? Cette question est loin d'être anecdotique, lorsqu'on sait que la durée de vie d'une PME est en moyenne de cinq ans.

En fait, le compte épargne-temps est surtout un jackpot pour l'employeur : les salaires sont captés pour devenir un outil financier au seul bénéfice des patrons et des banquiers. En siphonnant directement les salaires à la source, il sert d'accélérateur à l'épargne retraite. C'est un mécanisme de crédit très efficace consenti aux employeurs par leurs salariés à travers deux éléments essentiels du contrat de travail : le salaire et la durée du travail.

Le compte épargne-temps, qui ne rapporte aucun intérêt et ne tient pas compte de l'inflation, sera en revanche pour le salarié un placement pour le moins médiocre et hasardeux. Ce dernier ferait mieux de se faire payer ses heures supplémentaires et de placer les sommes ainsi obtenues sur un compte rémunéré !

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