Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, le Président de la République a souhaité envoyer des troupes françaises supplémentaires en Afghanistan. Il a estimé que ce pays constituait un défi stratégique et que la France était déterminée à rester aux côtés de ses alliés aussi longtemps que nécessaire pour assurer la stabilité de ce pays.
Nous, sénateurs de I'UMP, partageons l'opportunité et la légitimité de cet objectif et de cette initiative. Cette dernière doit être envisagée non pas comme une rupture, mais comme une évolution des moyens mis à la disposition du gouvernement afghan en vue de lui permettre de faire face au durcissement de l'insurrection talibane et au développement d'une économie fondée sur le narcotrafic.
Cette décision fait suite à celle qui avait été prise en 2001, sous le gouvernement de Lionel Jospin, après un débat au Parlement.
Vu l'enjeu de cette décision pour notre pays, le Président de la République a clairement souhaité qu'un débat ouvert sur ce sujet se déroule au Parlement et nous ne pouvons que nous en féliciter. À l'heure où un renforcement du rôle du Parlement est envisagé par la prochaine révision constitutionnelle, il est à nos yeux indispensable d'informer la représentation nationale sur ce renforcement de la présence militaire française en Afghanistan, qui devrait être officiellement annoncé au prochain sommet de l'OTAN, dès demain, à Bucarest.
Le présent débat est d'autant plus opportun que ce sommet portera essentiellement sur une révision de l'approche alliée en Afghanistan avec la fixation des nouvelles priorités pour la reconstruction tant économique que démocratique indispensable au développement du pays.
II apparaît en effet qu'une meilleure coordination entre les acteurs sur le terrain est indispensable, notamment sous l'égide de l'ONU et de son nouvel envoyé spécial, tout en respectant la souveraineté du gouvernement afghan. Malgré les réels progrès constatés sur le terrain, davantage de contributions des alliés sont encore nécessaires.
C'est dans ce cadre que la France doit continuer, à notre avis, d'inscrire son action. Nous devons maintenir le lien entre un effort supplémentaire et une approche globale de la situation de l'Afghanistan, notamment en termes de développement.
Nous sommes conscients que la communauté internationale doit faire un effort considérable pour éviter un enlisement. La France doit prendre toute sa part à cet effort. Il s'agit de l'une des tâches les plus délicates que notre pays et l'OTAN aient jamais eu à entreprendre, mais c'est une contribution essentielle à la sécurité internationale. Tout échec entraînerait une déstabilisation générale de la région.
Ce qui se passe dans ce pays est, n'en doutons pas, d'une importance quasi mondiale. En effet, la fermentation mafieuse et islamiste, malgré la distance qui sépare la France de l'Afghanistan, constitue un élément de préoccupation. Car malgré les moyens employés par les différents pays occidentaux, il semble difficile d'ignorer que ces éléments pathogènes ne cessent de se renforcer.
La gravité des tensions interethniques et interconfessionnelles en Afghanistan dépasse largement le cadre de cet État et de la région. L'Afghanistan est devenu un épicentre terroriste et criminel par la propagation tant des idéaux islamistes que d'une économie criminalisée fondée sur le trafic de drogue : ces deux faits rendent nécessaire une coopération sous l'égide de l'OTAN ainsi que lors des opérations menées directement sous autorité américaine.
Nous savons quelles sont les conditions historiques et politiques qui ont amené l'Afghanistan à connaître le sort qui est aujourd'hui le sien.
Créée par le Conseil de sécurité des Nations unies, la Force internationale d'assistance à la sécurité est forte de quelque 43 000 hommes. Elle n'est pas une force des Nations unies ; elle est plutôt une coalition de pays volontaires avec un chef de file qui assume la responsabilité du commandement. Son extension au sud et à l'est a été complétée en octobre 2006, mais elle se heurte aux violences qui affectent particulièrement ces secteurs.
L'Alliance a pour objet de contribuer à créer les conditions qui permettront à l'Afghanistan, après des décennies de conflit, de destruction et de pauvreté, de disposer d'un gouvernement représentatif et de jouir d'un climat durable de paix et de stabilité.
L'OTAN joue un rôle clé dans le Pacte pour l'Afghanistan - plan quinquennal conclu entre le gouvernement afghan et la communauté internationale - qui fixe des objectifs relatifs à la sécurité, à la gouvernance et au développement économique du pays.
Depuis le début de l'opération, les objectifs sont donc clairs : éradiquer les talibans, l'extrémisme religieux, et mener une politique de développement social.
C'est dans ce contexte qu'il faut apprécier la décision du Président de la République. Il s'agit d'une décision politique forte qui répond à une réalité et à un besoin rencontrés sur le terrain. D'ailleurs, les talibans n'en sont pas dupes : dans un communiqué diffusé sur Internet, ils s'engagent « à chasser les forces étrangères en leur infligeant des coups douloureux » dès ce printemps.
Ces renforts étaient donc attendus pour mener à bien la mission de l'OTAN en Afghanistan, mission qui - je le rappelle à ceux qui l'oublient parfois un peu vite - s'effectue sous mandat de l'ONU.
Nous soutenons cette initiative, parce que nous sommes résolus à faire en sorte que la mission de la FIAS connaisse un succès sous tous ses aspects, civil et militaire.
Tout ce processus de sécurisation du pays a donc une légitimité et une légalité internationales. Il demande, avant d'être rejeté d'un revers de main, une juste et objective appréciation.
La FIAS n'est pas une force d'occupation ou d'oppression et elle ne le deviendra pas. Elle agit, au nom des Nations unies, pour la paix et la sécurité internationales. La France ne peut pas être absente de cette action, au risque de voir les talibans reprendre l'avantage, avec les conséquences que l'on imagine sur toute la région.
Mes chers collègues, je vous rappelle que la présence de la France en Afghanistan est de première ampleur. Nous comptons actuellement plus de 1 500 soldats sur place, dont près des deux tiers sont stationnés à Kaboul ; 300 instructeurs français forment l'armée afghane, alors que près de 200 militaires opèrent au sein d'unités afghanes et les accompagnent au combat. Nous sommes également présents à Kandahar, où sont basés nos Rafale et nos Mirage, qui apportent un soutien aérien aux forces de la coalition internationale.
Notre présence n'est donc pas anecdotique et mérite notre plus profond respect.
Je tiens, à ce propos, au nom du groupe UMP du Sénat, à rendre hommage au dévouement et au courage de nos troupes présentes sur le terrain.