Dans ces conditions, renforcer notre dispositif militaire dans ce pays apparaît clairement comme un gage d'allégeance donné aux États-Unis.
C'est aussi, à n'en pas douter, la contrepartie à la réintégration annoncée de notre pays dans les structures de commandement militaire d'une Alliance atlantique encore largement soumise aux États-Unis.
Admettez-le, c'est une position qui rompt brutalement avec la politique d'indépendance de la France. À la veille du sommet de Bucarest, cette position est malheureusement conforme à la volonté des États-Unis de transformer l'OTAN en une « Alliance globale », une alliance du monde occidental opposée aux pays émergents, agissant hors du cadre des Nations unies et se comportant en gendarme du monde, au service de la politique américaine.
Nous présiderons bientôt l'Union européenne, et cette réintégration laisse peu de crédibilité à une Europe de la défense réellement autonome. Tout cela éclaire d'un jour nouveau ce que nous avions dénoncé lors de la ratification du traité de Lisbonne, quand nous vous interpellions, ici même, mes chers collègues, sur le risque de subordination de la politique européenne de défense à l'OTAN.
Il faut en être conscient : en procédant de la sorte, c'est-à-dire en ramenant notre pays à un rang de supplétif des États-Unis, le capital de sympathie que la France a acquis dans le monde depuis une cinquantaine d'année serait rapidement dilapidé.
Monsieur le président, mes chers collègues, l'attitude du Président de la République, avec ses annonces répétées qui anticipent sur la réflexion engagée dans le cadre de la rédaction d'un nouveau livre blanc sur la défense et la sécurité, traduit une crainte du débat démocratique. Il n'est plus acceptable que des changements d'orientation aussi fondamentaux en matière de politique étrangère et de défense puissent s'opérer à la suite d'un simple débat concédé sous la pression des parlementaires, sans qu'il soit arbitré par le vote du Parlement.
Monsieur le Premier ministre, vous ne pouvez être, en paroles, favorable aux propositions de la commission Balladur tendant à revaloriser le rôle du Parlement en matière de politique étrangère et de défense, et refuser aujourd'hui un vote du Parlement. Accepter ce vote donnerait plus de crédibilité à vos bonnes intentions.