L'opération avait pour but de stabiliser le pays, d'éradiquer le terrorisme des talibans et celui d'Al-Qaïda. Mais n'y a-t-il pas enlisement ? N'assiste-t-on pas en Afghanistan à un Irak, un Vietnam, une Algérie bis ? C'est, en tous les cas, l'avis de James Jones, une personnalité qui sait de quoi elle parle puisqu'il n'est autre que le prédécesseur de John Craddock à la tête de l'OTAN !
Dans un rapport, il a souligné « l'impasse » où se trouvent les troupes alliées en Afghanistan. Et nous en envoyons encore d'autres ! Pour lui, « nos forces ne pourront éliminer les talibans par des moyens militaires aussi longtemps qu'ils pourront à tout moment se replier au Pakistan ». Les éliminer ici, c'est les voir réapparaître ailleurs.
La question de fond est celle de la position que nous allons réellement adopter pour gérer la sortie du conflit, la transition vers la paix. Sachant que, à ce sujet, des divergences importantes d'appréciation existent entre la Grande-Bretagne et les États-Unis, les deux principaux protagonistes de la coalition, quel camp allons-nous choisir ?
Ce que nous pensons, nous, c'est que le futur de l'Afghanistan sera déterminé par les progrès ou les échecs dans le domaine civil. Dans ces conditions, la guerre que nous menons limite-t-elle vraiment l'essaimage du terrorisme ou, au contraire, ne l'alimente-t-elle pas ?
Dès lors, est-il prévu que nos troupes participent plus activement à des actions civiles, à la reconstruction, au développement ? C'est ce que peut laisser espérer la déclaration sur la stratégie politico-militaire qui devrait être adoptée au sommet de l'OTAN de Bucarest, déclaration qui plaide en faveur d'une prise de relais à terme du conflit par l'armée afghane et, surtout, d'une approche « globale » de la question associant action militaire et efforts de développement et de reconstruction.
Mais, pour reconstruire et développer, il faut, certes, des hommes, mais il faut surtout des moyens, donc, de l'argent. Or, plus du tiers de l'aide promise à l'Afghanistan par les pays occidentaux pour la période 2002-2008 n'a pas encore été fournie !
Nous envoyons 1 000 hommes supplémentaires, mais la part de l'aide internationale de la France - 80 millions de dollars - restera proportionnelle à son engagement militaire actuel. Elle est très inférieure à celle de la Grande Bretagne - 1, 2 milliard de dollars - et à celle de l'Allemagne - 768 millions de dollars. A-t-on l'intention de l'augmenter en proportion ?
Par ailleurs, quelle part de l'aide promise jusqu'ici avons-nous réellement versée ?
Alors, c'est vrai, tout cela a un coût. Parlons-en, justement de ce coût ! C'est le deuxième grand enjeu que nous voyons, l'enjeu budgétaire.
La part de l'aide française à l'Afghanistan est faible, comparée à celle de la Grande-Bretagne ou de l'Allemagne. Mais, dans le même temps, celui du budget de nos OPEX, nos opérations extérieures, s'envole.
Les OPEX sont systématiquement sous-financées en lois de finances, ce qui pose, une fois encore, la question du rôle du Parlement.
Même s'il est vrai que, ces dernières années, des efforts ont été entrepris pour limiter le gap entre ce qui est provisionné et ce qui est vraiment dépensé, le problème demeure. Vous le savez, monsieur le ministre, à la fin de 2007, il a fallu combler un trou de 273 millions d'euros. Et, contrairement à ce que vous avez dit, aucune rallonge n'est intervenue. Les millions manquants ont été ponctionnés sur les crédits d'équipement. C'est autant de moins pour la modernisation de nos armées !
Pour 2008, le problème revient, plus énorme que jamais, surtout avec la décision dont nous débattons. Les OPEX devraient représenter 850 millions d'euros, alors que le budget 2008 n'en avait provisionné que 460 millions ! Où trouvera-t-on la différence ?