Intervention de Jean-Étienne Antoinette

Réunion du 12 mars 2009 à 15h00
Développement économique de l'outre-mer — Article 20

Photo de Jean-Étienne AntoinetteJean-Étienne Antoinette :

Permettez-moi, avant l’examen de cet article, de faire une remarque de fond : la question du logement social en outre-mer est trop grave, trop tragique même pour qu’on achemine ainsi vers le marché de la spéculation ce qui constitue avant tout un droit fondamental de la personne humaine, un droit que vous avez même rendu opposable !

Ce droit touche à des problématiques sociales lourdes, ainsi qu’à des problématiques de santé publique particulièrement tenaces en outre-mer, où l’insuffisance de logements décents produit son corollaire dans la prolifération de l’habitat spontané et insalubre.

Ce droit fondamental, c’est d’abord à une politique publique volontariste de le garantir, sans compter sur le bon vouloir d’investisseurs qu’il va falloir appâter, ce qui, quoi qu’on fasse, produit des effets d’aubaine et des effets pervers.

Si la loi Girardin a justement produit ces effets pervers d’augmentation de la spéculation foncière, par exemple, ce marché du logement libre et intermédiaire a tout de même trouvé preneur. Il y avait de la demande ! Des entreprises du BTP ont prospéré, des emplois ont été créés et des familles ont accédé à des produits correspondant à leur évolution sociale et économique.

Outre-mer, 80 % de la population relève du logement social. C’est dire que 20 % ou presque dépasse les plafonds de ce dernier, ce qui n’est pas négligeable. Par ailleurs, au sein même de la population relevant du logement social, la mobilité professionnelle et économique existe un tant soit peu et aboutit donc aux aspirations de nombreux foyers à un parcours résidentiel ascendant, du collectif à l’individuel, du locatif à l’accession, du social à l’intermédiaire.

Pensez-vous que, en recentrant sur le logement social un dispositif conçu pour le logement libre, vous répondrez véritablement aux attentes des populations d’outre-mer les plus nécessiteuses, alors que cette approche, qui va soumettre la réponse au bon vouloir des investisseurs, dépend du degré d’attractivité du dispositif proposé ?

Mais passons sur l’opportunité. Puisque les jeux sont faits et que l’approche est décidée, parlons d’efficacité !

Malgré les modifications du texte actuel, on semble avoir oublié que trois évolutions majeures sont survenues depuis : je veux parler de la crise financière, du plafonnement des niches fiscales et de la mise en œuvre de la loi Scellier. J’ajouterai l’impact médiatique de la situation sociale dans les Antilles françaises, qui provoque un désengagement massif des investisseurs et des concours bancaires. Dans ce climat social et économique incertain, aux données aléatoires, peut-on imaginer aujourd’hui que les contribuables vont prendre le risque d’investir sur un produit peu rentable dans un département d’outre-mer ?

L’architecture d’une politique de logement dans les DOM devrait porter sur la diversification des produits offerts aux populations, avec les perspectives suivantes : premièrement, maintien et confortement de la LBU, avec une adaptation des paramètres de financement assurant l’équilibre des opérations et une dotation annuelle de 270 à 300 millions d’euros ; deuxièmement, maintien d’une défiscalisation patrimoniale par le logement intermédiaire, ce qui supposerait une adaptation de la loi Scellier donnant un avantage aux DOM ; troisièmement, mise en œuvre d’un dispositif de défiscalisation en location-accession ; quatrièmement, maintien d’un fonds d’aménagement urbain permettant d’assurer le financement des opérations d’aménagement. Il convient de prendre en compte les handicaps de l’outre-mer, liés, en général, aux plans de prévention des risques et aux retards en matière de viabilisation primaire.

En intégrant ces propositions dans une programmation annuelle du logement par département, il nous paraît possible d’assurer une relance du logement social et intermédiaire. C’est un peu le sens des divers amendements proposés par mes collègues et moi-même, amendements auxquels vous serez attentifs, j’espère.

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