Intervention de Odette Terrade

Réunion du 12 mars 2009 à 15h00
Développement économique de l'outre-mer — Article 20

Photo de Odette TerradeOdette Terrade :

Cet article 20 est l’un des articles clés du projet de loi. Il porte en effet sur la question de la défiscalisation des opérations de construction de logements avec la mise en exergue d’une priorité au financement d’opérations de construction de logements sociaux.

À dire vrai, nous approuvons sur le fond que la dépense fiscale destinée à l’outre-mer soit réorientée, abandonnant les rivages rebattus de la construction de logements à visée spéculative pour ceux de la réalisation de logements sociaux.

Rappelons quelques faits : les trois quarts des foyers fiscaux de l’outre-mer sont non imposables au titre de l’impôt sur le revenu ; par conséquent, dans l’hypothèse vraisemblable où ils ne sont pas propriétaires de leur résidence principale, ils sont parfaitement en droit de demander un logement social.

Mais voici des éléments encore plus précis : en 1999, 40 % des habitants de la cinquième circonscription législative de la Réunion – cela couvre les cantons de Bras-Panon, Sainte-Marie, Sainte-Suzanne, Saint-André, Saint-Benoît, La Plaine-des-Palmistes et Salazie – occupaient des logements dépourvus d’eau chaude. Et l’on comptait encore plus de 2 000 logements sans sanitaires intérieurs ! Dans la seconde circonscription de la Guyane, qui couvre l’essentiel de ce grand département, sauf l’agglomération de Cayenne, on comptait moins de 45 % de logements pourvus de l’eau chaude et plus de 20 % de logements dépourvus de point d’eau.

Dans les deux cas, si nous pouvons penser que la situation s’est quelque peu améliorée depuis, nous n’en sommes cependant pas tout à fait certains, notamment au vu des articles relatifs à la zone des cinquante pas qui montrent que tout est loin d’être réglé.

Toujours est-il que la priorité au logement social est une évidence.

Dans les départements d’outre-mer, il faut en effet construire beaucoup de logements sociaux en s’appuyant sur des réserves foncières faibles et assez peu extensibles, sauf peut-être en Guyane, tout en ayant le souci de résoudre les problèmes éventuels de sur-occupation, de confort des logements, comme de résorption des habitats insalubres, en faisant disparaître progressivement l’habitat de fortune ou construit illégalement et, pour finir, en respectant des normes de construction antisismique et anticyclonique.

Le tout se fait évidemment dans le cadre de financements tendus, adossés à une ligne budgétaire unique particulièrement réduite, et en sollicitant des organismes d’HLM et des collectivités locales disposant de moyens somme toute plutôt réduits au regard de l’immensité de la tâche.

Le portage des opérations de réalisation de logements sociaux, tel qu’il est prévu par cet article 20, montre une partie des problèmes auxquels nous sommes confrontés.

Le dispositif de défiscalisation a manifestement conduit au renchérissement du foncier, ce qui a contraint les collectivités locales et les organismes d’HLM à mobiliser d’autant plus de moyens pour pouvoir piloter quelques opérations.

Que l’on change quelque peu le fusil d’épaule est finalement plutôt bienvenu, mais appelle néanmoins quelques observations supplémentaires.

Et user de la priorité affichée à la construction de logements en saisissant l’occasion de réaliser quelques menues économies comptables n’est pas plus admissible !

Dans l’urgence de la situation, il ne faut pas hésiter à mobiliser les moyens nécessaires à la résolution des problèmes. Il importe, à notre sens, de savoir très vite si d’autres mesures peuvent être menées pour faciliter la réalisation des programmes locatifs sociaux qu’attendent à juste titre les mal-logés de l’outre-mer français. N’y a-t-il pas moyen, s’agissant notamment de l’utilisation du domaine public, et malgré les imperfections du cadastre dont nous avons déjà parlé, de concevoir des opérations de cession de terrains disponibles à titre gratuit ou avec une importante minoration, prise en charge en sus de la ligne budgétaire unique, en vue de réaliser dans de meilleures conditions encore des opérations de construction ?

Une telle démarche peut, de ce fait, apparaître plus pertinente – on joue alors sur le prix principal et non pas seulement sur les coûts fiscaux accessoires – qu’une simple exonération de droits de mutation.

En tout cas, la situation de l’outre-mer en matière de logement doit appeler à l’innovation, à la recherche du moindre coût pour le meilleur service rendu et au nécessaire effort de solidarité que nous devons aux populations aujourd’hui victimes du mal-logement.

Tels sont les points que le groupe CRC-SPG souhaitait porter à la connaissance du Sénat avant l’examen de cet article.

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