Intervention de Michel Magras

Réunion du 12 mars 2009 à 15h00
Développement économique de l'outre-mer — Article 20

Photo de Michel MagrasMichel Magras :

Cet amendement vise à exclure expressément Saint-Barthélemy du champ de la défiscalisation du logement social.

Je sais qu’un tel amendement peut surprendre, surtout au regard du cliché, repris un peu partout, selon lequel on ne voudrait pas de logement social à Saint-Barthélemy. J’avancerai donc quelques arguments.

Premier point, mon amendement est non pas contre le logement social, mais contre la défiscalisation dans le secteur du logement, qu’il soit social ou pas.

Deuxième point, je pense connaître mieux que quiconque les conditions dans lesquelles les logements se construisent à Saint-Barthélemy. Or les dispositions prévues dans le projet de loi n’y permettront pas la défiscalisation, car les taux ne correspondent pas à la réalité du coût de la vie. À l’inverse, il se pourrait bien que certaines entreprises soient tentées de nous imposer un type de logement qui ne réponde plus aux normes d’urbanisme, d’architecture ou de sécurité telles qu’elles sont définies dans notre collectivité.

Troisième point, le logement locatif privé assure une véritable part de l’économie locale à Saint-Barthélemy. Un grand nombre de personnes, en particulier des salariés touchant à peine le SMIC, ont compris depuis une vingtaine d’années qu’il valait mieux investir l’argent de la vente d’une parcelle de terrain dans la construction de logements assurant un revenu secondaire. En conséquence, vous n’entendrez jamais ces personnes, même au SMIC, se plaindre de la vie chère et vous ne rencontrerez pas plus d’assistés sociaux parmi elles, parce qu’elles ont un revenu parallèle.

Bien entendu, nous avons conscience des dérives qui s’engagent aujourd'hui : la demande étant supérieure à l’offre, les loyers se sont envolés et la collectivité entend bien les maîtriser sur son territoire.

Quatrième point, notre île a des traditions. L’une de ces dernières, à laquelle nous étions tous farouchement accrochés, voulait qu’un jeune, avant de fonder son foyer, se construise sa maison. Hier, c’était avec l’aide des parents, des amis, de la famille. Aujourd'hui, c’est grâce à la vente d’une parcelle de terrain. Mais la tradition se perpétue. De très nombreux jeunes, y compris ceux qui viennent de l’extérieur, ont compris l’importance fondamentale qu’il y a à accéder le plus vite possible à la propriété : avoir sa propre maison.

Bien entendu, la collectivité s’est rendu compte que ce système ne pouvait fonctionner pour tout le monde. Elle a donc mis en place un droit de préemption qu’elle utilise pour acheter des terrains qu’elle met ensuite à la disposition des jeunes pour la construction de logement ou qu’elle échange avec des jeunes dont les terrains sont en zone inconstructible.

Enfin, j’avancerai un dernier argument, et il est de poids. Nous avons tous entendu ce matin M. le secrétaire d'État dire, en réponse à la commission des finances, que la collectivité de Saint-Barthélemy avait la compétence en matière de logement et n’était de ce fait pas concernée par les amendements qui venaient d’être votés, point qui a été confirmé lorsque j’ai moi-même sous-amendé un amendement de M. Virapoullé.

Je rappellerai que la collectivité de Saint-Barthélemy, en plus de la compétence en matière de logement, exerce la compétence en matière d’urbanisme et, mieux encore, en matière fiscale. Il serait donc tout de même malvenu que le législateur impose une défiscalisation dans des domaines de compétence qui relèvent exclusivement de la collectivité !

Mes chers collègues, j’ai tenu à dresser cet argumentaire pour que chacun comprenne ma position, qui, je le sais, est encore une position singulière par rapport à l’outre-mer ; bien sûr, je soutiens la démarche que vous défendez, mais j’aimerais que vous compreniez la mienne et que vous acceptiez de voter mon amendement.

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