Il s’agit d’un amendement important.
Tout d’abord, il tend à supprimer les habilitations prévues aux 1° et 3° du I de l'article 32. En effet, de telles habilitations sont prévues à l’article 74-1 de la Constitution, auquel le Gouvernement a souvent recours, à moins qu’il ne requière une habilitation par matière. Nous préférerions qu’il suive cette procédure.
Au-delà, se pose un problème de fond, qui est le respect des droits fondamentaux. On ne devient pas un département français avec une justice cadiale, une inégalité de droits entre les femmes et les hommes ou le mariage des mineurs.
Comme le soulignait tout à l’heure notre collègue du groupe CRC-SPG, les Mahorais attendent de la départementalisation, et c’est légitime, l’égalité des droits. En tant qu’habitants d’une île ayant fait l’objet d’une départementalisation en 1946, nous savons bien qu’une telle démarche est un long marathon, semé d’embûches, comportant des contradictions et nécessitant un effort particulier de la part à la fois de la population concernée et de la nation dans son ensemble.
Qu’il s’agisse de l’éducation, de la santé, de la production, du respect des lois, le chemin de la départementalisation n’est vraiment pas un chemin facile. Je le précise pour que nous ne l’empruntions pas pour Mayotte avec l’intention d’aller vite. L’objectif n’est pas de faire vite : il est de faire bien, en avançant lentement mais sûrement, en respectant l’identité des populations et en amenant progressivement cette identité à s’intégrer dans l’identité nationale.
Nous le savons d’expérience, toute rupture identitaire est porteuse de crises et d’explosions qui ne sont pas obligatoirement liées à la situation sociale.
L'habilitation prévue à l'article 32 permet au Gouvernement d'actualiser et d'adapter le système juridictionnel et le statut civil de droit local en vigueur à Mayotte. Il s’agit notamment d’organiser l’extinction des fonctions juridictionnelles des cadis, la justice cadiale ne fonctionnant pas, chacun le sait, sur le principe du contradictoire, de modifier le statut civil de droit local pour assurer l'égalité de droits entre les hommes et les femmes, ce qui est fondamental du point de vue de la citoyenneté française, et d’interdire le mariage pour les mineurs en portant l’âge légal à dix-huit ans.
En tout état de cause, je pense que cette disposition pourra être modifiée par nos collègues députés. En effet, le vote des Mahoraises et des Mahorais sur la départementalisation se déroulera le 29 mars prochain et, ainsi que M. le secrétaire d’État nous l’a indiqué, le présent projet de loi devrait être examiné par l’Assemblée nationale au début du mois d’avril.
L’amendement que nous avons déposé résulte des conclusions de la mission d’information effectuée à Mayotte au mois de septembre 2008 et conduite par M. le président de la commission des lois. Nous vous proposons de l’adopter. Ensuite, si cela se révèle nécessaire, les députés pourront améliorer la rédaction de cette disposition après le vote, que nous espérons positif, sur la départementalisation à Mayotte.