Intervention de Lucette Michaux-Chevry

Réunion du 12 mars 2009 à 22h15
Développement économique de l'outre-mer — Vote sur l'ensemble

Photo de Lucette Michaux-ChevryLucette Michaux-Chevry :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, depuis trois jours, j’ai l’impression que la France a parlé à la France. Jamais, depuis que j’exerce des responsabilités publiques, on avait eu un débat aussi long, aussi fouillé sur l’outre-mer. Nous avons eu parfois quelques joutes et plaisanteries ! J’avais vraiment le sentiment d’être en outre-mer, où les accès de rage, les propos durs n’empêchent pas la sympathie.

Monsieur le secrétaire d’État, vous avez vécu une période très difficile. C’est le moment de vous rendre publiquement hommage. Je n’aurais jamais pu supporter ce que vous avez enduré. Tel un coureur de fond, vous avez affronté des conditions extrêmement difficiles lorsque vous êtes venu en Guadeloupe. Je vous l’ai déjà dit, j’avais peur, car l’étincelle s’approchait doucement, sûrement, de la poudre. Je connais bien l’outre-mer et ses violences, dont ma famille a, hélas ! beaucoup souffert.

Vous avez eu le courage de dire publiquement aux Domiens que vous ne connaissiez pas l’outre-mer, et vous vous êtes fait applaudir parce que vous avez tenu le langage de la vérité.

Vous avez écouté tout le monde, ce qui n’était pas facile vu le brouhaha dans lequel on travaillait. Convoqués à 10 heures, nous commencions souvent à midi pour terminer à 4 heures du matin, et tout cela au son des tambours !

Vous n’avez cessé de revoir le texte, malgré le combat organisé concernant l’essence, malgré les socio-professionnels qui ont donné des coups de boutoir pour « casser » votre projet et qui ont pris la responsabilité historique de bloquer les rues.

Vous avez reçu, écouté, essayé de comprendre, tout en gardant une très grande sérénité. Vous êtes parti, puis vous êtes revenu. Ceux qui vous avaient fortement critiqué – il est habituel, en outre-mer, de critiquer –, qui avaient appelé aux manifestations silencieuses et au blocage total, ont été les premiers à vous recevoir de nouveau. Vous avez même quasiment été séquestré en Guadeloupe, puisqu’on ne voulait plus que vous repartiez !

Le texte qui nous est soumis offre le reflet des contradictions des outre-mer. Réussissons-nous toujours à nous comprendre, à nous connaître ? De la Guyane à la Guadeloupe, en passant par la Martinique et Saint-Pierre-et-Miquelon, avons-nous une vision globale de ce que nous représentons ? Nous sommes, disons le franchement, des enfants très gâtés d’une France qui a toujours fait preuve à notre égard d’une attention affectueuse.

Mais aujourd'hui cette forme de paternalisme n’est plus supportée par notre jeunesse, qui souhaite être traitée à égalité de droits et de devoirs. Souvenez-vous, le lendemain de votre arrivée en Guadeloupe, vous avez entendu les jeunes vous dire qu’ils aspiraient à travailler. L’un d’entre eux vous a même avoué qu’il avait brûlé des poubelles pour s’amuser, même si le maire allait lui tirer les oreilles !

Alors que les conditions étaient fort difficiles et que vous subissiez des critiques – mais c’est ça la politique ! –, vous avez rétabli le dialogue. Vous avez essayé de traduire dans les textes – que l’on peut toujours critiquer – la réalité du terrain.

C’est vrai, il faut davantage de logements sociaux, notamment pour les personnes âgées ; c’est vrai, il faut aller plus loin sur le dossier de la continuité territoriale, dont on parle depuis des années. Vous voulez l’excellence pour l’outre-mer afin de le repositionner dans le bassin caribéen. Vous souhaitez que notre jeunesse soit formée et responsabilisée.

Vous avez écouté tous les représentants politiques, et il faut vous en rendre hommage. Élue depuis très longtemps, je ne me souviens pas d’avoir vu sur un texte de loi autant de réunions, d’échanges, d’écoute, de courriers et de propositions. Et c’est ce que nous devons retenir aujourd’hui. Certes, le texte n’est pas parfait, mais il ne le sera jamais.

Monsieur le secrétaire d’État, nous attendons des états généraux un complément, un grand débat, un déballage, afin de développer la connaissance, notamment la vôtre, de l’outre-mer. Et je me réjouis que de nombreux parlementaires métropolitains soient intervenus – en bien ou mal, peu importe ! – dans ce débat.

Le grand malaise qui frappe l’outre-mer est né du sentiment que nos problèmes n’intéressaient plus la métropole. Le grand désordre, les immenses défilés qu’ont connus Basse-Terre, Pointe-à-Pitre, Fort-de-France et la Réunion seront bientôt oubliés. Ce qui restera, c’est la volonté de la métropole de prendre à bras-le-corps les problèmes de ces hommes et femmes qui vivent à des milliers de kilomètres et qui conservent dans leur cœur le sentiment très profond d’appartenir à une même nation et de partager les mêmes valeurs. Et là est l’essentiel, ce soir !

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