Ces trois amendements portent sur les conséquences de la privatisation des sociétés d'autoroutes.
L'amendement n° II-394 concerne les tarifs qui seront réclamés des usagers une fois les concessions d'exploitation des autoroutes privatisées.
Avec mes amis socialistes, je suggère - étant entendu, vous l'aurez compris, que, dans mon groupe, nous ne sommes pas très favorables, c'est le moins que l'on puisse dire, à la privatisation des sociétés d'autoroutes, parce que c'est quand même une rente formidable de l'État qui file au secteur privé : alors que nous manquons d'argent pour notre réseau routier, le secteur privé va bénéficier, jusque dans les années deux mille trente, d'une rente de situation formidable ! -, bref, par l'amendement n° II-394, je suggère, avec mes amis socialistes, que les tarifs de péage soient encadrés par l'État et fassent l'objet d'un agrément, d'une autorisation ou d'une approbation par décret en Conseil d'État.
Cette disposition n'est pas une horreur absolue : c'est ce qui a été demandé, je crois, cette semaine, après que j'ai déposé cet amendement, par le Conseil de la concurrence, dans son avis sur la privatisation.
L'amendement n° II-395 rectifié pose un problème auquel, je pense, seront sensibles les élus locaux qui siègent dans cette assemblée.
Les candidats au rachat des concessions sont, très souvent, vous le savez tous, de gros groupes de travaux publics. Ces groupes auront la tentation, malgré la concurrence, de s'arroger la plupart des marchés d'entretien des réseaux autoroutiers, des marchés de constructions neuves ou des petits tronçons supplémentaires, comme les sorties de péage, etc.
Or, mes chers collègues, si les choses se déroulent ainsi, c'est la mort garantie, à brève échéance, de toute une partie du secteur des BTP, spécialement des petites et moyennes entreprises locales installées tout le long de ces réseaux. Alors, ces entreprises de BTP locales n'existant plus, les collectivités locales, conseils généraux et communes, n'auront pas d'autre solution que de passer par ces grands groupes de BTP pour leurs propres travaux routiers locaux, avec toutes les conséquences qui en découleront sur le prix des travaux.
C'est pourquoi je propose que les propriétaires des concessions d'autoroutes - j'ai été sensible aux observations techniques, de rédaction, de M. le rapporteur général -, ne puissent pas réaliser les travaux courants - d'entretien ou neufs -, mais qu'ils puissent cependant, par dérogation et par décret en Conseil d'État, être autorisés à faire les plus gros travaux, ouvrages d'art et autres, qui mettent en oeuvre des procédés techniques particuliers et qui exigent des qualifications très pointues que les petites et moyennes entreprises locales n'ont pas toujours. Je pense aux viaducs ou aux ponts, par exemple. C'est l'objet de l'amendement n° II-395 rectifié, la rectification étant due aux observations de M. le rapporteur général en commission des finances sur la rédaction initiale et dont j'ai tenu compte pour rédiger l'article que je vous présente.
Enfin, l'amendement n° II-396 institue une commission nationale de contrôle de l'application du cahier des charges et des obligations des sociétés autoroutières.
Mes chers collègues, chacun se souvient des graves incidents survenus, voilà quelques années, en période hivernale, sur une autoroute proche de la région parisienne. Vous vous souvenez peut-être également d'avoir lu, dans les rapports successifs des rapporteurs spéciaux de la commission des finances, que la Cour des comptes avaient, à plusieurs reprises, par référés, mis en cause la société d'autoroute concernée, qui ne respectait pas son cahier des charges. Malgré ces nombreuses mises en garde, la société n'a pas déféré, ou a tardé à déférer, aux observations de la Cour des comptes, la Direction des routes étant assez impuissante pour la contraindre à respecter ses engagements de concessionnaire.
Or, si les usagers sont mécontents de la manière dont on les traite, l'État sera dans une situation très difficile, alors qu'il s'agit de l'exploitation d'un bien qui lui appartient toujours puisque, à la fin des concessions, après 2030, il retrouvera la pleine possession du réseau. Il est de notre devoir de faire en sorte que l'usager ait toutes les garanties quant à la bonne exécution des cahiers des charges.
Par l'amendement n° II-396, je propose donc, avec mes amis du groupe socialiste, de créer une commission nationale de contrôle présidée par le président de la section des travaux publics du Conseil d'État, comportant des représentants de l'État, des élus représentant les conseils généraux, les conseils régionaux, les maires, les députés et les sénateurs, et des représentants des usagers et des consommateurs - mais on peut changer cette composition -, afin de vérifier, tous les ans, la bonne application des cahiers des charges.
Si les cahiers des charges ne sont pas respectés, la commission pourrait faire des observations publiques et, éventuellement, déclencher un système d'amendes pour contraindre les sociétés à respecter leur propre cahier des charges.
Monsieur le président, j'ai essayé d'être le plus bref possible sur ces trois amendements. J'ai peut-être dépassé cinq minutes, mais je n'en ai pas pris trois fois cinq, c'est-à-dire quinze, ...