Intervention de Alima Boumediene-Thiery

Réunion du 28 octobre 2010 à 9h00
Cumul du mandat de parlementaire et fonction exécutive locale — Renvoi à la commission d'une proposition de loi organique

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

À ce sujet, notre assemblée favorise en quelque sorte cet absentéisme : avec nos modes de scrutin, même les sièges vides peuvent voter ! Aucune sanction financière ne dissuade ceux qui manqueraient d’exercer leur mandat. Et si cette sanction est prévue, elle n’est malheureusement pas appliquée ! Notre règlement intérieur devrait pallier ce problème.

Ces artifices masquent difficilement la triste réalité. D’ailleurs, la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation s’est récemment saisie de cette question : nos collègues Dominique Voynet et François-Noël Buffet, qui savent de quoi ils parlent, publieront un rapport sur le sujet le 14 décembre prochain, rapport qui devait d’ailleurs, initialement, être remis le 26 octobre dernier, à la veille de l’examen de la présente proposition de loi organique. Je regrette qu’il n’ait pas été publié à la date prévue, car son contenu aurait pu nourrir le débat qui s’ouvre aujourd’hui.

Quoi qu’il en soit, selon nous, il est fondamental de limiter, de manière stricte, le cumul des mandats exécutifs. J’entends bien ceux et celles qui nous mettent en garde contre une « déconnexion éventuelle d’avec la réalité locale ». Mais, personnellement, je pense que l’on n’a pas besoin d’un mandat pour continuer à s’engager et à militer localement au quotidien, notamment dans des associations de proximité.

Avec ce texte, s’il est adopté, nous distinguerons nettement les fonctions exécutives locales et la fonction législative et, ce faisant, nous renforcerons les pouvoirs du Parlement.

De plus, un mandat de parlementaire national et un mandat local non exécutif me semblent largement suffisants, pour l’intérêt tant général que familial.

Deuxièmement, qu’on le reconnaisse ou non, le cumul de deux mandats pose le problème du conflit d’intérêts !

On ne peut pas représenter le peuple, et donc incarner l’intérêt général, et, en même temps, être élu d’un territoire dont on représente les intérêts spécifiques à l’échelon national.

Là encore, mettons fin à l’hypocrisie : est-il concevable de voter dans l’une des assemblées, en tant que parlementaire, le budget des collectivités territoriales, et d’en être le premier bénéficiaire en qualité d’élu local ? On ne peut être juge et partie ! Il faut savoir faire un choix entre des intérêts catégoriels et l’intérêt général.

Enfin, troisièmement, j’insisterai sur un élément, qui ne figure pas dans la proposition de loi organique que nous examinons aujourd'hui, mais qui devra s’imposer à un moment donné : pour être complet, le non-cumul entre la fonction exécutive et la fonction législative ne saurait omettre le non-cumul « dans le temps », en le limitant, par exemple, à deux ou trois mandats au maximum dans la même fonction.

Nous sommes convaincus qu’il s’agit là de la meilleure manière, avec le non-cumul des mandats dans « l’espace », de mettre en œuvre une meilleure représentation de la société dans nos institutions. Il est temps de permettre un renouvellement du personnel politique, sans quoi il n’y a pas de réelle représentativité de nos assemblées.

Le non-cumul des mandats électifs successifs dans le temps permettra de renouveler l’offre politique, en même temps qu’il contribuera à faire émerger des hommes et des femmes issus de toutes les diversités.

Pour être crédibles, nos assemblées doivent être à l’image de nos cours d’école. Tous nos concitoyens doivent se retrouver en nous ; c’est la seule manière d’acquérir leur confiance, de leur donner l’envie d’aller voter et d’être pleinement citoyens !

Notre législation a toujours été timide concernant le cumul des mandats. Il est donc urgent, aujourd’hui, d’affirmer avec force et vigueur l’impérieuse nécessité pour un parlementaire de consacrer son temps à la fonction législative, sans pour autant se déconnecter de la réalité locale.

C'est la raison pour laquelle les sénateurs et sénatrices Verts soutiennent ce texte et voteront en faveur de son adoption.

Mais nous sommes certains que, dans leur majorité, nos collègues parlementaires n’auront pas forcément le courage de renoncer à certains de leurs mandats. Il est essentiel de mener une réflexion sur ce statut qui, il faut le dire, est aujourd'hui trop rattaché à certains avantages.

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