Intervention de Philippe Nogrix

Réunion du 20 juin 2006 à 21h45
Protection de l'enfance — Article 4

Photo de Philippe NogrixPhilippe Nogrix :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, Mme Jacqueline Gourault, qui ne pouvait être présente parmi nous ce soir, m'a demandé d'intervenir en son nom sur cet article.

L'article 4 de ce projet de loi vise à imposer au juge d'entendre le mineur capable de discernement dans toutes les procédures qui le concernent, si toutefois l'enfant en fait la demande.

Je voudrais préciser, à cet instant, deux points relatifs à la mise en oeuvre de la résidence alternée.

En préambule, je rappellerai que c'est la loi du 4 mars 2002 relative à l'autorité parentale qui a promu le principe de coparentalité, mis en oeuvre après une séparation et qui introduit la possibilité de la résidence alternée. Avons-nous bien fait d'inscrire dans la loi une telle option ? C'est un autre sujet...

En tout état de cause, si les parents sont d'accord sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, ils peuvent faire homologuer leur accord par le juge aux affaires familiales. En cas de désaccord ou de réticence de l'un des parents, le juge peut ordonner provisoirement une résidence en alternance. Quelle est la place du juge des enfants dans tout cela ?

L'article 4 du projet de loi tend à mettre en conformité le droit français avec l'article 12 de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant et prend en compte les recommandations du rapport de la mission d'information sur la famille et les droits des enfants - l'enfant d'abord - et du rapport annuel pour 2005 de Claire Brisset, défenseure des enfants.

La mission d'information sur la famille et les droits des enfants de l'Assemblée nationale précise que l'enfant ayant atteint l'âge de discernement doit pouvoir demander au juge de modifier les conditions d'exercice de l'autorité parentale, notamment dans le cas d'une résidence alternée.

Mme Gourault se dit certaine que l'ouverture de cette possibilité à l'enfant est positive au regard de la prise en compte de ses intérêts par le juge. À l'heure actuelle, de nombreuses aberrations sont constatées par les associations de protection de l'enfance.

En effet, lors de la mise en oeuvre de la résidence alternée, souvent, le juge n'a pas le temps, ou ne prend pas le temps, d'entendre des enfants qui en font la demande, et il fonde son jugement sur les rapports de « personnes qualifiées », aux missions souvent mal définies et qui se livrent à des expertises psychologiques, dont on connaît les limites depuis l'affaire d'Outreau.

Nombreux sont les cas d'enfants perturbés par la fréquentation de deux écoles différentes, due à la résidence alternée. S'il est désormais établi que les parents ont des droits égaux dans l'exercice de leur autorité parentale, la solution retenue par le juge ne devrait en aucun cas aboutir à une dégradation de l'équilibre psychologique de l'enfant.

L'âge de l'enfant devrait également être pris en compte dans le choix par le juge de la résidence alternée. La prudence serait d'exclure une garde alternée pour un enfant de moins de cinq ans, comme le recommande Claire Brisset.

Je voudrais enfin, monsieur le ministre, appeler votre attention sur la proposition concernant la mise en place d'un guide des bonnes pratiques de la résidence alternée, qui figure dans le rapport de la mission d'information de l'Assemblée nationale.

Ce guide permettrait de préciser la notion d' « intérêt de l'enfant », à laquelle vous êtes attaché, mais qui représente un objectif abstrait dans la mesure où, jusqu'à présent, l'audition de l'enfant n'était pas obligatoire.

Il faudrait également préciser le faisceau de critères à prendre en considération, systématiquement et non éventuellement, comme le prévoit la loi.

Mme Gourault souhaiterait connaître votre position, monsieur le ministre, sur les conditions de mise en oeuvre de la résidence alternée et sur la proposition de créer un guide des bonnes pratiques.

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