Madame la présidente, madame le secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne m’étendrai ni sur la richesse de l’outre-mer en matière environnementale, ni sur son importance, qui permet à la France d’occuper une place essentielle dans toutes les instances internationales compétentes. Ce point a déjà été évoqué à plusieurs reprises.
Toutefois, je rappellerai la place singulière de la Guyane, et ce n’est pas un hasard si le Président de la République, en visite à Camopi, petit village de l’intérieur, y a exalté sa richesse, allant même jusqu’à la qualifier de « joyau » de la France en matière de biodiversité.
Et pour cause ! La Guyane, ce sont 7, 5 millions d’hectares de forêts constituant l’un des quinze derniers grands massifs de forêt tropicale encore bien préservés ; ce sont aussi 15 millions de tonnes de carbone capturées par an, soit 20 % du bilan carbone de la France.
C’est aussi une biodiversité exceptionnelle symbolisée, entre autres, par la création de nombreuses aires protégées avec, comme point d’orgue, le parc amazonien.
Oui, en effet, la Guyane est belle, exemplaire, riche de par son patrimoine naturel. Comme le précise le schéma d’aménagement régional, « les richesses naturelles et la diversité biologique sont très présentes et bien garanties, d’autant que les inventaires scientifiques ont beaucoup progressé et progressent encore ».
On ne saurait cependant se contenter de cet aspect, qui donne une vue partielle de l’environnement en Guyane.
L’environnement, ce n’est pas seulement le milieu naturel, c’est aussi et surtout le milieu physique construit et humain dans lequel un individu et un groupe interagissent.
L’environnement, c’est aussi et avant tout le souci de garantir des conditions de vie décentes pour la population. La première des richesses, c’est l’homme. De ce fait – on ne le dira jamais assez –, il est nécessaire de concilier la protection de l’environnement et le développement économique et social.
Quelle est la réalité, mes chers collègues ? Par rapport à l’ensemble des collectivités de métropole, la Guyane accuse un immense retard, ce qui nécessite un rattrapage structurel important, et dans tous les secteurs d’activité.
Dans un rapport sur l’alimentation en eau potable en Guyane commandé par le ministère de l’équipement et par le ministère de l’écologie, on pouvait lire : « Le territoire guyanais occupe une place singulière dans l’intégration européenne. C’est en effet la région la plus défavorisée de l’Europe des Quinze, la plus pauvre de l’ensemble des régions Objectif 1 [...] Un territoire hors normes, aux marges du modèle européen, qui accumule les handicaps »
C’est certainement pour cette raison que la Guyane et les autres départements d’outre-mer font l’objet, dans le présent projet de loi, d’un titre spécifique.
En ce qui me concerne, j’y vois la reconnaissance de situations bien particulières et la nécessité d’y apporter des solutions adaptées.
Qu’en est-il ? Je le rappelle, les caractéristiques du développement de la Guyane sont celles du Sud, avec un fort taux de chômage – plus de 24 % –, une démographie très dynamique, une faible production et une faible industrialisation.
Par rapport à l’indice de développement humain, la Guyane se situe au quarante-troisième rang mondial. Un Guyanais sur quatre vit sous le seuil de pauvreté. Par ailleurs, 35 % des communes de l’intérieur ne sont toujours pas électrifiées et 40 % des plus petites communes n’ont pas d’accès à l’eau potable. De ce fait, le nombre de maladies liées à l’eau est très élevé. Selon le rapport auquel je viens de faire référence, « la santé publique est préoccupante : la Guyane est le seul territoire européen où des gens souffrent et meurent de maladies liées à l’eau, dysenterie, fièvre typhoïde, gastro-entérites ». Cette liste n’est pas exhaustive. Je pourrais, en outre, parler des problèmes liés au logement, à la santé publique.
Oui, mes chers collègues, la Guyane, vitrine technologique de la France et de l’Europe avec Arianespace, et vitrine du monde avec Soyouz, c’est aussi cette terre de disparités criantes, révoltantes, où les besoins primaires, tels que l’égal accès de tous à l’eau et à l’électricité, ne sont pas satisfaits.
Si l’on considère le classique trépied du développement durable, la Guyane est, en quelque sorte, à contre-pied de la France métropolitaine et de l’Europe : le pied environnemental est durable, le pied du développement économique ne l’est pas. Quant au pied social, je n’en parle même pas !
En tant qu’élu, je veux assurer un réel développement durable à la Guyane, et, à terme, un bien-être satisfaisant à tous les habitants du territoire. Or je ne retrouve pas cet objectif dans les actuelles dispositions du présent projet de loi, notamment dans l’article 49. Les retombées pour les Guyanais sont quasiment nulles au regard du potentiel exceptionnel de la Guyane. Pourtant, les solutions sont là !
Je pense, tout d’abord, au crédit carbone. Il est urgent de reconnaître la contribution carbone de la Guyane et d’en tenir compte, afin d’en faire un véritable enjeu de développement économique et social. Le chef de l’État lui-même a évoqué hier soir la taxe carbone.
Je pense aussi aux biocarburants. Selon une étude projection de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, le développement des filières vertes, telles que la biomasse, l’hydraulique, l’éolien, le solaire et le photovoltaïque, pourrait créer 400 à 450 emplois d’ici à 2020, ce qui injecterait près de 100 millions d’euros dans l’économie locale.
Je pense encore à la commercialisation des plantes médicinales et à son encadrement pour éviter le pillage scandaleux auquel nous assistons.
Je pense enfin à l’orpaillage, également encadré. Je milite pour une éradication durable de l’orpaillage clandestin, qui fait tant de ravages non seulement sur le plan environnemental mais aussi sur le plan humain. Le schéma minier présente des dispositions intéressantes, mais se limite au secteur terrestre en oubliant le potentiel marin.
Pour toutes ces raisons, en défendant les amendements que j’ai déposés et qui, je l’espère, seront pris en compte et adoptés, je m’efforcerai de faire évoluer de façon plus positive la donne.