Nous voilà donc parvenus à ce fameux article 49 auquel nous avons été renvoyés quasi systématiquement tout au long des débats !
Le fait d’avoir rendu hommage à nos territoires à l’article 1er n’a pas auguré, comme je l’avais espéré, la nouvelle gouvernance partagée, pourtant hautement souhaitable s’agissant de questions qui nous concernent tous, au-delà des distances géographiques, des inégalités économiques, des différences culturelles.
Pour l’heure, il nous reste donc à examiner une liste de mesures qui, à défaut d’avoir été intégrées à la réflexion globale, font l’objet d’un appendice, d’un article un peu fourre-tout qui n’introduit pas une véritable politique environnementale et de développement durable pour l’outre-mer.
Quelle contradiction, en effet, entre les deux phrases introductives de cet article et la liste des courses qui vient après, véritable peau de chagrin !
Si nous en restons aux thématiques abordées dans le texte, puisque c’est la clef d’entrée choisie, nous voyons vite les limites de l’approche adoptée.
Rien de particulier pour encourager ou pour sécuriser les efforts supplémentaires ou les nouvelles orientations nécessaires en matière de recherche, de formation, ou d’expérimentation, eu égard aux enjeux et aux réalités propres à nos régions, et ce malgré les discours du président de la République, au mois de février 2008, concernant l’université Guyane-Brésil, le conservatoire écologique, la mission confiée à Sanofi-Aventis sur les ressources génétiques.
Rien sur la protection des ressources génétiques, alors que la Guyane fait l’objet d’un pillage par les grands groupes pharmaceutiques, cosmétiques et autres. Or nous savons tous que la loi doit proscrire ce bio-piratage.
Rien de particulier pour la coopération qui, dans nos régions, ne peut se décliner de la même manière qu’en métropole. L’Hexagone se tourne vers l’espace européen, mais nous avons, nous, beaucoup à faire, à dire, à partager ou à confronter dans nos aires géographiques respectives.
Nous espérons des impulsions nouvelles. Certes, un ou deux projets existent, mais vous aurez du mal à nous faire croire que la question est pour autant réglée !
Presque rien sur les transports, hormis une étude, engagement excessivement prudent, alors que l’on connaît fort bien les problèmes d’engorgement des villes-capitales que sont Cayenne, Fort-de-France, Pointe-à-Pitre, et l’enclavement profond d’autres territoires.
Rien sur les réseaux, les eaux usées, l’assainissement, qui, pourtant, renvoient à des problèmes environnementaux et de santé publique.
Presque rien sur la santé, justement, abordée uniquement sous l’angle de la pollution des eaux et des sols, sans prise en compte des effets des activités technologiques, éventuellement polluantes de l’air, sur la base spatiale de Kourou, par exemple.
Presque rien, juste une déclaration d’intention, sur la lutte contre le changement climatique.
Mais le pire n’est pas là ; par définition, une liste est inévitablement incomplète.
En abordant l’article par d’autres clefs d’entrée, nous découvrons des absences plus graves. Revenons, par exemple, à la définition même du mot « environnement ».
Monsieur le rapporteur, vous avez refusé d’ajouter, à l’article 1er, l’adjectif « sociétales » aux caractéristiques à prendre en compte dans nos territoires, adjectif que je souhaitais introduire au titre non pas des nécessités d’adaptation des textes, mais de la reconnaissance de la dynamique humaine qui fait de l’environnement ce qu’il est dans ces territoires.
À la lecture de l’article 49, je comprends mieux les motivations de votre refus. En effet, le terme « spécificités sociétales » figure en toutes lettres dès son premier alinéa. En revanche, je ne lis ensuite, dans le corps de l’article, aucune référence à la diversité de nos sociétés, leur richesse culturelle, leur apport fondamental à la préservation de la biodiversité, à travers ces valeurs que l’on a si longtemps méprisées comme des survivances archaïques, à travers la transmission de savoir-faire ancestraux dont on découvre aujourd’hui tout l’intérêt salvateur, mais qui se perdent, faute de reconnaissance...
Oui, ce manque-là est immense dans une telle loi, car il peut conduire à valoriser la nature d’un territoire en y laissant les hommes mourir de faim !
D’ailleurs, comment parler de « développement durable » quand les indicateurs sociaux d’un territoire sont ceux des PMA, les pays les moins avancés ? Quand les PIB sont à 75 % inférieurs à la moyenne des pays européens ?
Enfin et surtout, je ne vois dans cet article aucune stratégie, puisque celle-ci est explicitement à élaborer à partir de la plupart des thématiques énumérées, comme si l’on ne connaissait pas les réalités pourtant criantes.
Cependant, ce texte a au moins le mérite d’exister ; on doit saluer l’objectif d’autonomie énergétique des régions d’outre-mer, le nouvel intérêt pour les énergies renouvelables, ainsi que la volonté de mieux encadrer et d’assainir les activités extractives.
De plus, le débat auquel je participe depuis deux semaines a fait bouger quelques positions. Ainsi, Mme la secrétaire d’État s’est engagée à étudier la question des normes et des certifications adaptées pour l’outre-mer. L’étude en vue d’un programme de maillage du territoire la solution du ferroviaire pour la Guyane. Par ailleurs, j’ai eu la confirmation que le schéma national des infrastructures de transport peut comprendre les projets ultramarins dès lors que les critères de la loi sont respectés.
Dans ces conditions, je continuerai de participer, avec optimisme, à la finalisation de ce texte, tout en restant vigilant sur le projet de loi « Grenelle II ».
Il sera essentiel de dessiner, dans ce deuxième texte, une stratégie plus claire, plus globale et plus volontaire pour l’outre-mer, afin de placer les sociétés, parties prenantes de leur environnement, au cœur même de la stratégie adoptée.